Acta Pacis Westphalicae II B 4 : Die französischen Korrespondenzen, Band 4: 1646 / Clivia Kelch-Rade und Anuschka Tischer unter Benutzung der Vroarbeiten von Kriemhild Goronzy und unter Mithilfe von Michael Rohrschneider
Messeigneurs les ambassadeurs du Roi aians rendu compte à messieurs les médiateurs de
leur voiage d’Osnabrugk et fait considérer que les plénipotentiaires de Suède se plai-
gnoient avec raison que le comte de Trautmansdorff ne leur avoit jusques là fait aucune
offre formelle pour la satisfaction de leur couronne et s’estoit contenté de proposer pour
cela la Poméranie et quelques autres Estats sans se déterminer à rien de certain. Messieurs
les médiateurs se chargèrent d’en faire remonstrance, et deux jours après monsieur Conta-
reni vint offrir de la part des Impériaux l’archevesché de Bremen et l’évesché de Ferden à
perpétuité, la cosseigneurie de la ville de Wismar, la Poméranie antérieure avec le consen-
tement de l’électeur de Brandenbourg et la garantie de l’Empereur et des estats de l’Em-
pire pour le tout. Monsieur Contareni promit encore que les Impériaux n’obmettroient
rien pour procurer aussi le consentement du duc de Meckelbourg touchant la cosseigneu-
rie de Wismar.
Messeigneurs les ambassadeurs m’envoièrent à Osnabrugk pour informer les Suédois de
ce que dessus et savoir si depuis leur séparation ils n’avoient point receu d’ordre de
Suède qui leur donnast lieu de condurre sur cette proposition. Ces messieurs receurent
cette offre avec grand’joie et firent cas de ce qu’on leur laissoit les éveschez à perpétuité
et plus encore de ce que les Impériaux estoient entrez en négo〈tiation〉 avec l’électeur de
Brandenbourg pour se charger de son desd〈ommagement〉. Ils dirent seulement que la
Suède ne pouvoit part〈ager〉 avec personne la ville de Wismar à cause du vois〈inage〉
des Danois, ni se passer de celle de Stettin, et qu’il falloit contenter l’armée de Suède, mais
au reste ils semblèrent acquiescer à tout; leur résolution néantmoins fut d’attendre la res-
ponse de Suède, où ils promirent 〈d’escrire〉 encore favorablement pour y disposer les
esprits à la paix. Je leur dis alors, selon l’ordre que j’en avois, que Messieurs les Estats
continuoient à presser vivement nostre accommodement avec les Espagnols et leur fis
voir, que s’il se faisoit 〈avant〉 que leur response fust venue, cela porteroit grand préju-
dice aux affaires d’Allemagne. Ils en demeurèrent d’accord et m’asseurèrent qu’ils estoient
très disposez de leur costé à avancer les affaires, qu’ils n’avoient point besoin d’estre d’a-
vantage sollicitez pour cela, et qu’il falloit tourner nos offices du costé de Suède, et ils me
demandèrent si messeigneurs les ambassadeurs n’avoient pas escrit à la reine et tesmoignè-
rent que leurs lettres et leurs instances seroient grandement considérées.
Monsieur Salvius me tesmoigna séparément grande affection à la paix et alléga plusieurs
raisons pour lesquelles il estimoit que nous devions agir vigoureusement à la cour de
Suède, dont la principale est que cela autoriseroit ceux qui désirent la paix et leur donne-
roit moien d’amener les autres à leur avis. Il dist qu’il avoit escrit en particulier à la reine,
que nostre traitté estant fait avec les Impériaux il y avoit péril de traîner l’accommode-
ment de Suède, et qu’il estoit nécessaire de se résoudre promptement.
Monsieur Oxenstiern paroît aussi fort bien disposé; il m’asseura qu’il avoit escrit favora-
blement nos raisons et nos remonstrances à monsieur son père, et l’opinion de monsieur
Salvius est qu’il a grand désir et grand intérest de retourner bientost en Suède.
Oxenstierna möchte nach dem Tod seines Vaters Kanzler werden und hat weitere private
Gründe, bald nach Schweden zurückkehren zu wollen.
Quant à la suspension d’armes, ils persistent dans la résolution qui a esté prise sur ce sujet
avec messeigneurs les ambassadeurs, et le commissaire Brandt
sieur le mareschal Vranghel pour cette affaire, devoit pa〈rtir〉 dans un jour ou deux, et
ces messieurs ne doutent point que la chose ne réussisse. Ils m’ont dit qu’aians autrefois
demandé à monsieur Torstensohn son avis touchant une suspension d’armes, il leur avoit
respondu qu’elle seroit fort à propos lorsque l’on verroit toutes choses disposées à une
conclusion, parce que si on publioit d’abord la 〈paix〉 en leur armée, et que l’on n’eust
pas en mesme temps de quoi contenter la soldatesque, ce qui seroit presque impossible, ils
se tiendroient unis en un corps, et ne se lairroient pas séparer aisément, au lieu que pen-
dant une suspension d’armes on auroit moien de les préparer à la paix et de prendre son
temps et ses mesures pour les séparer.
Comme j’eus rendu compte de mon voiage à messeigneurs les ambassadeurs, ils m’ordon-
nèrent d’en informer monsieur Contareni sans tesmoigner que cette proposition est agrée
aux ambassadeurs de Suède, ni qu’ils fussent capables de se relascher de leurs anciennes
prétentions. Cela le mit en fort mauvaise humeur contre les Suédois, il pa〈rla〉 long-
temps contr’eux et conclud: „Je vois bien que nous n’aurons point de paix.“
Je respondis: „Nous l’aurons, Monsieur, s’il plaît à Dieu, mais il en coustera plus aux
Impériaux qu’ils ne viennent d’offrir.“
„Comment!“ reprit-il. „Pensez-vous qu’on donnera toute la Poméranie aux Suédois? Cela
ne sera jamais.“
Je répliquai: „Ils la prétendent tousjours, et si on les pouvoit porter à se contenter de
Stettin avec l’antérieure Poméranie, on feroit un grand service aux Impériaux.“
Monsieur Contareni fut quelque temps sans respondre et puis me demanda brusquement:
„Les ambassadeurs de Suède ont-ils pouvoir de condurre si on leur donne encore
Stettin?“
Ma response fut que je ne le croiois pas, et qu’ils prétendoient que le comte de Traut-
mansdorff leur avoit offert toute la Poméranie. Cela fit encore crier monsieur Contareni
contr’eux; il dist que tantost ils se plaignent qu’on ne leur a fait aucune offre formelle, et
tantost ils prétendent qu’on leur a offert toute la Poméranie avec l’archevesché de Bre-
men, l’évesché de Ferden et la ville de Wismar. Je respondis que les ambassadeurs de
Suède ne prétendent pas qu’on leur aie fait une offre formelle de toute la Poméranie, de la
ville de Wismar, de Bremen et Ferden, mais ils maintiennent que lorsuqe le comte de
Trautmansdorff leur en a fait parler, son intention estoit de leur en faire l’offre formelle
s’ils eussent voulu l’escouter, et qu’il n’est pas raisonnable qu’il se prévale aujourd’hui de
l’accommodement qu’il a fait avec nous pour leur faire perdre et leur accorder moins qu’il
n’a eu intention de faire.
Sur ce que les ambassadeurs de Suède m’avoient tesmoigné qu’ils seroient bien aises que
les ministres de l’Empereur qui sont à Osnabrugk, leur fissent les mesmes offres que je
leur avois faittes, monsieur Contareni me dist que le comte de Lemberg en avoit ordre
et qu’il n’y manqueroit pas.