Acta Pacis Westphalicae II B 3,1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 3, 1. Teil: 1645 - 1646 / Elke Jarnut und Rita Bohlen unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy, mit einer Einleitung und einem Anhang von Franz Bosbach
Du 17.
Les députés de Weymar, de Magdebourg, de Lauvenbourg
Dr. David Gloxin (1597–1671), 1642 Syndikus der Hansestadt Lübeck, 1645 Ges. Lübecks
beim WFK, wo er auch Voten für Sachsen-Lauenburg, Nordhausen und Goslar führte ( ADB
IX S. 241–244 ; NDB VI S. 465f. ).
de quelques comtes de l’Empire, et des villes anséatiques me vinrent voir sé-
parément. Ils parlèrent en la mesme sorte qu’avoient fait les autres, et me
voulurent persuader que tous les intérestz des protestans devoient estre termi-
nés les premiers et avant qu’on touchast à la seconde ny à la troisième classe;
mais comme leur résolution estoit fondée sur une crainte qu’ils tenoient très
juste que les couronnes estans une fois asseuré[e]s de leur satisfaction, de celle
de Hesse, et de la seureté de la paix, l’on ne feroit pas grand effort pour eux,
je pris sujet de leur représenter combien utilement la France depuis toute
cette négotiation a travaillé pour les princes d’Allemagne, quelle envie nous
en avons soutenue, les clameurs, les libelles, et jusqu’aux menaces contre noz
personnes, et contre le droit des gens. S’il y avoit apparence que les couronnes
après avoir maintenu les droitz de l’Empire et par les armes et par le traitté,
après avoir résisté si constamment aux Impériaux et à tous leurs adhérens qui
ne vouloient pas que les estatz eussent part à la négotiation de la paix, qui
prétendoient ensuitte d’en exclurre quelques-uns, ou bien d’en laisser toute
l’authorité à la diète de Francfort transférée icy à cette fin, et d’obliger au
moins tous les députez à comparoir en un mesme lieu affin de dissiper l’as-
semblée d’Osnaburg; je leur demandois si après tant de preuves de la cons-
tante affection des couronnes il y avoit sujet d’appréhender qu’elles n’ache-
vassent pas un ouvrage si glorieux et si utile que le restablissement des loix et
des affaires de l’Empire. |:Cette dernière considération de nostre utilité les a
touchez:|, leur aiant fait comprendre qu’en vain ils craignoient que nous pus-
sions estre contens sans qu’ils le fussent aussy, parce que la principale partie
de la satisfaction des couronnes consiste au restablissement de la liberté, di-
gnité et puissance des princes et estatz d’Allemagne, sans quoy l’Empereur
pourroit tousjours troubler ses voisins et se faire absolu dans l’Empire. Ils
sont demeurés d’accord que cet intérest nous est commun avec eux, et de si
grande conséquence pour la France et pour la Suède qu’on ne le sçauroit ja-
mais abandonner. Tout cella |:néantmoins ne servit qu’à diminuer la def-
fiance qu’on leur avoit donnée de nostre conduicte:| en ce que nous préten-
dions contre leur avis et contre celuy des Suédois que les affaires de l’Empire
ne doivent pas estre traittées et terminées avant toutes les autres, car au fonds
ils me tesmoignèrent bien qu’il seroit juste de délibérer conjointement sur
tous les articles de la réplique pourveu qu’on ne laissast pas leurs intérestz en
arrière; |:mais ilz ne me promirent rien, et il leur restoit tousjours une opi-
nion qu’il y avoit:| encores moins de péril que les estatz abandonnassent les
couronnes sans lesquelles ils ne peuvent pas aujourd’huy grand-chose, que
non pas que les couronnes négligeassent les estatz dont elles se peuvent pas-
ser. Je leur fis voir sur ce propos que l’on |:n’imagine rien moings qu’une
défection de leur part, que leur sincérité:| nous est connue aussy bien que
leur prudence, et que toute l’Allemagne voulant la paix et en aiant besoin l’on
est bien asseuré qu’ils n’ont garde d’entendre à une paix de Prague; mais que
sachans certainement que l’intention des Impériaux est telle, et que le comte
de Trautmansdorff après avoir fait des effortz inutils pour induire les plénipo-
tentiaires des couronnes à traitter premièrement de leur satisfaction ne parle
plus à présent que de la paix interne dans l’Empire et de la réunion des mem-
bres avec le chef, nous estimons qu’il importe au bien de la cause commune
de rompre ses mesures, parce que s’il voit le moindre jour à nous pouvoir
séparer, la vanité de cette espérance l’empeschera de prendre les résolutions
nécessaires pour parvenir à une bonne paix.
|:Le député de Weymar qui est un des plus considérés dans l’assemblée et
celuy de Magdebourg me dirent en particulier:| que nous avions raison, et
que les plénipotentiaires des couronnes devroient eux-mesmes traitter de la
satisfaction avec ceux de l’Empereur en mesme temps que les estatz délibèrent
sur la première partie de nostre réplique. «Mais outre que ce procédé feroit
perdre aux couronnes l’effet que nous attendons de voz conseils pour appuyer
leurs demandes, et à vous le droit de suffrage sur cet article de noz proposi-
tions, qui sçait, dis-je, si les Impériaux |:espérans aujourd’huy de pacifier le
dedans de l’Empire voudront entrer en négotiation avec les estrangers jusques
à ce qu’ilz ayent veu comme ce desseing leur réussira»:|.
Je cogneus lors assés aisément que les estatz ne toucheront pas volontiers au
point de la satisfaction sinon pour dire que’elle est deue aux couronnes et que
la paix ne se peut faire s’il n’y est pourveu. Les plénipotentiaires |:de Suède à
qui j’en fis raport en furent bien contens, et tesmoignèrent que cet aveu de
tout l’Empire, s’ilz le font tel, sera suffisant pour nous faire obtenir de bonnes
conditions de l’Empereur:|.
Je ne dois pas aussy obmettre qu’en toutes les conférences que j’ay eues avec
lesditz députés ils m’ont fort asseuré, et quelques-uns m’ont donné la mai 1
pour promettre en bons Allemans l’affection et gratitude de leurs princes et
communautés envers le Roy. |:Monsieur Lampadius entre autres me dit une
fois que ce sont Leurs Majestez qui luy donnent la liberté de parler et d’agir
comme il faict à la veue du comte de Trautmansdorf:|, qu’ils ont esté
cy-devant chassez des diètes à la moindre ouverture qu’ils y faisoient pour
l’avantage de l’Empire, et qu’aujourd’huy par le bénéfice de la France et de la
Suède ils peuvent s’expliquer de leurs sentimens en gens de bien. |:Il adjousta
qu’ilz modéreroient pourtant leurs prétentions, et qu’ilz soustiendroient cel-
les des couronnes:|.
Avec tout cella je me suis apperceu que |:luy et les autres protestans, sans en
excepter les Suédois, voudroient bien rejetter la satisfaction de la France sur
l’Espagne:|. Et comme j’ay essayé de pénétrer dans leur pensée j’ay appris
que hors du conseil ils ont |:parlé entre eux de nous donner le duché de
Milan ou le comté de Bourgoigne comme fiefz de l’Empire:|. Je n’ay pu
sçavoir si c’est du consentement de Trautmansdorff, |:car pour celuy des Es-
pagnolz, il n’y a guières d’apparence:|. Mais quoy qu’il en soit, |:ce discours
tesmoigne qu’autant que l’assemblée d’Osnabruk tient juste nostre satisfac-
tion, autant est-elle en soing de nous l’assigner ailleurs qu’en Alsace:|.
Du 18.
Les ambassadeurs de Suède confirmèrent à monsieur de La Barde et à moy
tout ce qu’ils nous avoient dit le 14 et demeurèrent enfin d’accord l’un et
l’autre sans plus y apporter de difficulté qu’il falloit obliger les estatz de l’Em-
pire à délibérer conjointement sur tous les articles de la paix. Ils trouverrent
bon de le faire sçavoir sur-le-champ à monsieur Lampadius, aux députés
d’Altenbourg, et à celuy de Weymar; comme aussy au comte de Trautmans-
dorff auquel ils envoièrent le secrétaire Melonius et luy en donnèrent l’ordre
en nostre présence. Nous fismes en sorte qu’il fust aussy chargé de presser
ledit comte pour le passeport des ambassadeurs de Portugal et mesmes de luy
dire que le refus pourroit estre cause de quelque inconvénient. Melonius rap-
porta au bout d’une heure que le comte de Trautmansdorff disoit n’avoir
point d’authorité de prescrire aux estatz de l’Empire comment et par quel
ordre ils doivent délibérer entre eux, qu’ils ne se départent pas volontiers de
leurs formes, et qu’il les faut laisser faire. Cette response affermit davantage
monsieur Oxenstiern à ne pas permettre qu’ils séparassent leurs affaires des
autres pointz de la réplique. Quant au passeport il demanda temps pour en
consulter avec ses collègues à Munster, et s’entretint paisiblement des expé-
diens qu’on y pourroit prendre.
Du 19.
Comme je devois partir ce jour-là monsieur Oxenstiern envoia de bon matin
demander heure pour me visiter en particulier. Je ne sçaurois dire assés le
contentement qu’il me tesmoigna de voir que je m’en retournois satisfait de
luy, et d’espérer que messieurs mes collègues le seroient aussy. Je vis encore
tout clairement qu’il n’a eu aucun dessein de se cacher de nous quand il ne
mena pas monsieur de La Barde à la conférence, mais qu’il a estimé ne le
pouvoir faire avec la dignité de la couronne de Suède, et que le premier refus
l’a engagé à y persister jusques au bout. Il comprit bien aussy que noz plaintes
n’ont procédé d’aucune deffiance, je luy fis avouer que cette entreveue avec
les Impériaux estoit plustost un acte de cérémonie que de négotiation, et que
la présence de monsieur de La Barde ny de monsieur de Rosenhan n’est pas ce
qui asseure l’union des couronnes, mais c’est ce qui l’auroit fait parestre aux
yeux de tout le monde. Je luy dis de nouveau |:comme en confiance qu’outre
cette raison il ne falloit pas qu’ilz s’accoustumassent à faire les choses à leur
mode, et que cela ne leur réussiroit pas:|. Il en tomba d’accord avec tant de
douceur et de condessendence, et mesmes d’excuses du passé qu’il eust fallu
estre de mauvaise humeur pour ne sortir pas bons amis.
Il entra de luy-mesmes dans le discours des affaires, et me dit que pour arriver
heureusement à la fin que les couronnes se sont proposée, qui est une paix
seure et avantageuse, trois choses sont tout à fait nécessaires, la fermeté et
persévérance en leur union, la continuation de la guerre sans aucun rallentis-
sement, et l’uniformité en la négotiation de la paix.
Sur le premier point il s’arresta longuement à prouver que ny luy ny son père
ny leur reyne mesme ne peuvent avoir d’autres sentimens que d’observer
tousjours fidèlement une alliance qui leur est si utile. Je l’interrompis en cet
endroit pour luy dire: «Adjoustés Monsieur: et si honnorable. Considérés s’il
vous plaist quelle différence il y a entre le traitté que vous faittes icy avec le
principal ministre de l’Empereur et celuy que monsieur vostre père faisoit il y
a quelques années avec les députés du duc de Saxe
Sog. Schönebecksche Traktate, s. [nr. 31 Anm. 4] .
voulut pas traitter alors immédiatement avec la couronne de Suède. Le renou-
vellement de l’alliance de la France suivy d’une rupture ouverte contre la mai-
son d’Austriche vous a produit ce bon effet, et sera la meilleure garentie que
vous puissiés avoir pour maintenir ce qui vous sera accordé par le traitté de
paix.» Il ne se contenta pas de l’avouer, mais il engagea sa parole et son hon-
neur que la reyne et le sénat de Suède ne hésitent point sur cette maxime, ny
sur la créance qu’ils ont en nostre bonne foy. Il me dit à ce propos qu’il
mesprisoit beaucoup d’avertissemens qui luy venoient de la part des ennemis,
demy-amis, et de quelques amis mesmes que la France traitte séparément, que
les Suédois le vérifieront trop tard, et qu’au moins ils se souvinssent du soin et
de l’affection de ceux qui les avoient avertis. |:Il me regardoit fort en parlant
comme s’il en eust cherché quelque esclaircissement dans ma contenance,
mais une conduicte si nette et si justiffiée qu’est la nostre:| envers tous les
alliez, ne me pouvant rien reprocher, il ne vit ny n’entendit que ce qu’il dési-
roit, et parut en estre content.
Pour le second point il fit grande instance que l’armée du Roy revinst puis-
sante en Allemagne, et bientost, parce que la leur soustient à présent toutes les
forces de l’Empereur et de Bavières. Je luy dis en riant qu’ils estoient difficiles
à servir; que quand |:l’armée du Roy est deçà le Rhin ilz ne sont pas bien aises
qu’elle s’y establisse et que dès qu’elle n’y est plus ilz crient au secours:|. Il
essaya de justifier la retraitte de Königsmarch, mais il eut peine à le deffendre
sur ce qu’il avoit tesmoigné craindre que noz trouppes prissent leurs quartiers
|:en Franconie. Je luy demanday pourquoy ilz ont différé de traicter d’une
suspension de deux ou trois mois pendant lequel temps l’on seroit en estat
d’agir du costé du Rhin comme ilz désirent si ce n’est que le traicté de paix
s’avanceast:| en sorte qu’on |:trouvast bon de continuer la suspension:|. Il
me respondit que ne sachans pas si leur armée pourroit trouver de la subsis-
tence dans les lieux qu’elle occuppe ils n’ont garde de rien faire en cette ma-
tière sans l’avis des généraux, et qu’ils en auroient dans peu de jours une am-
ple information par un officier de l’armée qui estoit despêché vers eux. Tant y
a qu’ils pressent fort le retour de monsieur de Turenne pour occuper les ar-
mes de Bavières qui tombent sur leurs bras.
Quand au dernier moien pour avoir une bonne paix, qui est de tenir une
mesme conduitte en la négotiation, il me représenta avec soin que si la France
et la Suède n’insistent esgalement à faire remettre toutes choses en l’estat où
elles estoient en 1618, sans aucune réserve ny exception tant pour la Bohême
que pour l’Empire, et si elles |:ne rejettent toute sorte de tempéramens qu’on
pourroit offrir, nous serons maltraictez sur le poinct de la satisfaction; que s’il
faut rompre, ce doibt estre pour l’intérest de l’Empire et non pour ceux des
couronnes; que c’est un conseil qui vient de monsieur le chancelier son père
et dont le succès est infaillible:|. Je ne voulus pas luy remonstrer que |:ce
conseil est beaucoup meilleur pour les luthériens que pour nous, car quand il
dict qu’il fault insister fortement et rompre mesme si besoing est pour l’inté-
rest de l’Empire, il veut dire pour l’intérest des protestans au faict de la reli-
gion:|; mais je le priay d’examiner un peu si une telle union |:et un tel effort
des deux couronnes:| ne tourneroit pas |:plus à l’advantage d’autruy qu’au
leur et s’il n’est point à craindre qu’après avoir obligé l’Empereur à faire tant
de choses en faveur des estatz il n’en devînt plus difficile pour nous:|, n’y
aiant pas apparence qu’il se résolve de perdre de tous costez. «C’est pour cette
raison», dit monsieur Oxenstiern, «que |:nous devons agir de la sorte, car
l’Empereur ne pouvant jamais accorder les demandes des protestans touchant
l’amnistie et les griefz, il aymera bien mieux accorder celles des couronnes.»
Je dis qu’il:| faudroit donc alors |:se relascher sur les intérestz de l’Empire. I 1
repartit: «Ouy alors, et non plus tost», m’advertissant en mesme temps qu’il
falloit tenir cela très secret. Je luy promis le silence, mais je l’advertis aussi
que:| les députez des princes et estatz protestans auroient desjà résolu entre
eux de s’accommoder à l’amiable, et qu’ils me l’avoient déclaré. |:Il y fit ré-
flexion et me donna lieu de doubter qu’ilz luy en eussent tant dict à cause
peut-estre qu’il les anime au contraire:|.
Je luy |:demanday s’il tenoit pour bien certain que dans l’extrémité où nous
mettrions l’Empereur, il aymeroit mieux contenter les couronnes que les es-
tatz de l’Empire, veu qu’il peut contenter ceux-cy:| aux despens de l’Eglise et
de quelques particuliers. Il n’en fit nul doute, parce, dit-il, que |:les estatz
estans contentez, la guerre ne cesseroit pas, et les couronnes ayans satisfac-
tion:|, l’Empereur seroit asseuré d’avoir la paix. J’en demeuray d’accord, mais
non sans représenter que |:la cause des couronnes seroit bien affoiblye et ex-
posée à l’envie publique:| si la guerre ne continuoit que pour leur intérest, et
que nous tomberions en ce cas dans l’inconvénient qu’il veut éviter. |:Il revint
à son premier sentiment qu’il est:| impossible que |:l’Empereur consente aux
prétentions des estatz et que nous pouvons estre en repos de ce costé-là:|.
«Enfin», luy dis-je, «cette manière d’agir que vous proposez peut bien pro-
duire un bon |:effect, mais elle en peut produire plusieurs:| mauvais. Car si
|:les estatz se relaschent de quelque chose:|, l’intérest des couronnes sera
moins favorable estant demeuré le dernier et lorsque l’Empereur |:prétendra
avoir desjà assez faict en leur considération. S’ilz ne se relaschent point ny
nous pour eux:|, ou le traitté se rompra, qui n’est pas le but pour lequel
|:nous travaillons, ou l’Empereur sera contrainct d’accorder ce qu’ilz deman-
dent, qui n’est pas vostre intention ny la nostre, ou il viendra à nous pour
essayer de sortir d’affaires avec les couronnes:|. Ce dernier cas est le seul qui
peut apporter quelque utilité, les trois autres sont très désavantageux.»
Après beaucoup de contestations fort paisibles et pleines de confiance il me
dit que |:nostre inclination pour le duc de Bavière:| faisoit tort au bon succès
des affaires, et que ses ambassadeurs avoient dit publiquement dans le collège
électoral qu’ils savent «ex certa scientia» que la France ne prétend pas |:qu’on
luy oste l’électorat:|. Je répliquay que |:si la Suède tesmoignoit aussi de ne
vouloir pas sa ruine entière, cela l’obligeroit à travailler pour la satisfaction de
ladite couronne; que nous sommes en lieu et en temps de nous prévaloir des
intérestz d’autruy:| pour le service de noz roys |:et que monsieur de Bavière
estant:| puissant comme il est en Allemagne et dans la |:cour de l’Empe-
reur:| l’on en pourra tirer un bon usage dans cette négotiation. Monsieur
Oxenstiern l’avoua et dit que pour |:tempérer son advis et le mien il seroit
bon que nous laissassions espérer quelque adoucissement à ce prince pendant
qu’eux feroient les mauvais et insisteront au restablissement de toutes les af-
faires séculières et ecclésiastiques:|, comme elles |:estoient en:| 1618; mais
que le coup seroit encor plus seur |:si nous en faisions autant de nostre par 1
selon l’advis de monsieur son père auquel il se tient ferme:| contre toute
suggestion estrangère. Je louay la pensée qu’il avoit qu’on |:mesnageast mon-
sieur de Bavière comme:| un moien propre à l’avancement de la paix avec la
satisfaction des couronnes, et fus bien aise de voir que du consentement des
Suédois |:dont nous avons esté en peine jusqu’à présent la France et ledit duc
se peuvent entrayder icy par mutuelz offices:|.
Une heure après cette conférence j’allay prendre congé de luy en son logis.
Nous répétasmes quasi les mesmes choses, mais succinctement. Ce que j’ap-
pris de plus ou plustost ce que je jugeay de ses discours fut que le comte de
Trautmansdorff s’est laissé entendre que |:l’Empereur pourroit accorder la
Haute-Poméranie avec l’archevesché de Brême, et que ce partage ne luy sem-
bloit pas mauvais:|.
Au sortir de là je fus visiter monsieur Salvius et le mis sur ce propos luy
donnant sujet de croire que |:monsieur Oxenstiern:| m’en avoit |:encore plus
dict:|. Il me jura qu’ils n’ont encores pouvoir de se contenter de si peu de
chose, mais cette fasson de |:parler me sembloit signiffier qu’ilz en atten-
doient l’ordre:|.
Sur le point de mon partement je sceus que |:le secrétaire Melonius et celuy
de Trautmansdorf se voyoient quelquesfois chez Peschewitz, homme d’intri-
gue qui reçoit des nouvelles de tous costez, mais:| comme ce ne sont que
gazettes elles ne mériteroient pas d’occuper quelques heures de deux person-
nes de tel employ, et quand la curiosité les y porteroit il ne seroit pas besoin
de s’y rencontrer en mesme temps. J’en avertis aussytost monsieur de La
Barde, et m’en vins coucher à Lengeric.
Reste à donner compte de ce que messieurs les ambassadeurs de Suède nous
rapportèrent à monsieur de La Barde et à moy d’une conférence que mon-
sieur Salvius avoit eue avec le comte de Trautmansdorff. C’est en substance
que ledit comte condanna nostre demande d’injustice et d’impossibilité, et
que monsieur Salvius luy aiant dit que nous la deffendons par les immenses
despenses que la France a faittes en cette guerre, et par le nombre de places et
roiaumes entiers que la maison d’Austriche a usurpés sur noz roys, il répliqua
pour une seconde fois qu’il est injuste de prétendre l’Alsace et impossible de
la céder. Il dit ensuitte que tout le monde s’est eslevé contre la maison d’Aus-
triche sur un simple soupçon mal fondé de quelque dessein de parvenir à la
monarchie universelle: mais qu’aujourd’huy que la France y marche à grans
pas, et qu’outre tant de conquestes elle veut encores avoir tous les Pays-Bas,
par le moien du mariage de l’infante d’Espagne qui n’a qu’un frère de foible
complexion, il s’estonnoit que de si vastes desseins ne donnent jalousie aux
princes de la chrestienté. Nous fismes aisément cognestre à ces messieurs que
c’est un artifice des ennemis qui sèment exprez de tels bruitz pour exciter
quelque tempeste contre nous; qu’on n’a jamais ouï parler de ce mariage
qu’aux Impériaux ou Espagnolz; et que nous sommes prestz de faire la paix
avec Espagne, pourveu qu’on demeure de part et d’autre en l’estat qu’on est à
présent.