Acta Pacis Westphalicae II B 5,1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 5, 1. Teil: 1646 - 1647 / Guido Braun unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und Achim Tröster, unter Mithilfe von Antje Oschmann am Register
Lob der Verhandlungsführung der Gesandten aufgrund ihres Berichts in
nr. 41.
On ne pouvoit rien désirer de plus en toutte la conduitte qu’ilz ont tenue
pour mettre dans le train qui se doibt les députtez d’Hollande qui s’avan-
çoient trop à nostre insceu dans leur traicté avec Espagne. Et quoyqu’on
n’ayt rien obtenu d’eux qui ne soit dans les règles de la plus rigoureuse
justice et de leurs obligations, Sa Majesté recognoist bien qu’ayant à faire
à des gens qui regardent le plus souvent leur intérest comme leur princi-
palle loy, et dont la pluspart sont |:à la dévotion de nos ennemis:|, il a esté
besoing de beaucoup d’addresse pour les porter à consentir, comm’ilz ont
faict, |:de ne rien rédiger par escript ny signer de ce qu’ilz ont ajusté avec les
Espagnolz:| que le sieur Servien qui est allé à La Haye n’ayt eu le tempz de
représenter de nostre part ce qu’il eschect là-dessuz à Messieurs les Estatz,
et eux, après |:l’avoir ouy, d’envoyer à leurs députez de nouveaux ordres:|.
Mais ce qui faict icy beaucoup de peyne, comm’il en a donné auxdictz Sieurs
Plénipotentiaires, c’est de veoir que le terme de douze ou quinze jours, à
quoy lesdictz députtez ont consenty, s’accorde avec le tempz auquel |:les
ministres d’Espagne disent qu’ilz auront response du roy leur maistre, tou-
chant les places de Piombino et de Porto Langone, qu’ilz asseurent n’avoir
pas pouvoir de relascher, à dessein peut-estre de nous refuser tout net:| après
qu’ilz |:seront entièrement d’accord avec Messieurs les Estatz:|.
On a desjà mandé auxdictz Sieurs Plénipotentiaires
des Espagnolz estoit de conclurre avec les Hollandois:| en quelque façon
que ce peust estre, |:affin de faire après leurs conditions meilleures avec
nous, ou estre en estat de continuer la guerre avec plus d’apparence de
bon succez pour eux:|. Il est donc de la dernière importance que lesdictz
Sieurs Plénipotentiaires n’oublient rien de tout ce qui deppendra d’eux,
pour destourner le préjudice qui nous pourroit arriver par cet artiffice de
nos ennemis |:et par la connivence desdictz Sieurs Estatz.
Sy une fois leur traitté est signé et que ces peuples-là se persuadent que la
France les empesche seule de jouir du repos:| qu’ilz souhaittent tant, parce
qu’elle ne veut point |:la paix ou qu’elle la veult à des conditions desray-
sonnables:|, cela produira de très mauvais effectz |:contre nous, et indubi-
tablement les Espagnolz:| estans alors pour le moins asseurez que |:les
Hollandois ne mettroient point leur armée en campagne et ne feroient
aucun préparatif pour cela:|, songeroient plustost à nous |:retrancher de
ce qu’ilz nous ont desjà accordé, l’expliquant à leur mode:| quand il sera
question de |:le coucher en la forme qu’il doit estre dans le traitté, qu’à
nous donner la moindre satisfaction sur les poinctz qui restent à vuider:|.
Comm’il est certain que quelques-uns |:d’entre les députez de Hollande,
et particulièrement Pau et Knut, sont entièrement gaignez, et qu’ilz ont
stipulé que leur rescompense sera plus grande s’ilz peuvent faire conclure
la paix des Sieurs Estatz sans la France:|, Sa Majesté estime qu’il sera bien
à propos, et qu’on peut mesme tirer un très grand avantage, que lesdictz
sieurs plénipotentiaires se laissent entendre en quelque occasion qui arri-
vera de |:leur reprocher leur mauvaise conduite, comme a esté cette der-
nière, que l’on a grand sujet de faire des plaintes contre quelques-uns
d’entre eux, et qu’on les portera à Messieurs les Estatz avec de telles preu-
ves:| qu’ilz auront grande peyne à s’en deffendre, |:laschant quelque mot
qu’on sçait bien les conventions particulières que quelques-uns ont faites
à l’insceu de leurs collègues avec Pennaranda:|. A quoy l’on pourra adjous-
ter que l’on a tousjours dissimullé et esvitté d’en venir à des déclarations,
espérans qu’ilz ouvriroient à la fin les yeux à la raison, ne s’agissant pas
moins en cela |:du bien de leur patrie que de l’intérest de cette couronne:|,
mais que continuantz dans la mesme manière d’agir, on seroit contrainct
|:avec desplaisir d’en faire esclatter les plaintes sy haut, et avec tant de
preuves en main, qu’on est bien asseuré que le corps de l’Estat qui est
incapable de se laisser piper ny corrompre par les Espagnolz, en feroit le
chastiment qui se doit:|. Tout cela est néantmoins remis à la prudence
desdictz Sieurs Plénipotentiaires qui recognoistront mieux sur les lieux
jusques où ilz devront porter nostre sentiment.
Le soupçon qu’ont eu lesdictz Sieurs Plénipotentiaires, |:que le grand re-
laschement des Espagnolz sur le point des Indes, où ilz avoient tant d’in-
térest de tenir ferme, ne soit le prix accordé entre eux de la défection de
Messieurs les Estatz d’avec la France, paroist assez bien fondé, particuliè-
rement aprez les déclarations qu’a tousjours fait Pennaranda, de voulloir
plustost rompre tout que de céder cette prétention. Néantmoins, il y a
quelque apparence que le gros de l’Estat n’y trempe point, et qu’il n’y a
que quelques députez qui auront flatté les Espagnolz:| de l’espérance d’y
porter leurs supérieurs sy on leur accordoit ce point qui leur est sy avan-
tageux qu’ilz ne voudront pas en perdre le fruit en adhérant en tout et
partout |:aux François.
Sa Majesté a trouvé fort bon l’expédient dont se sont serviz Messieurs les
Plénipotentiaires:|, de demander la restitution de Charlemont, Philippe-
ville et Mariembourg à l’Estat de Liège pour empescher qu’on ne puisse
dire que |:la conclusion des affaires de Flandres est sans obstacle en cas
que Messieurs les Estatz fissent difficulté de s’engager comme il est juste
à celles d’Italie et de Catalogne:|.
On a veu aussy avec plaisir la relation que le sieur de Saint-Romain a
faitte de ce qu’il a négotié avec l’électeur de Brandebourg touchant la sa-
tisfaction de la couronne de Suède ; il ne se peut rien adjouster à la pru-
dence et à l’addresse avec laquelle il s’y est conduit. On attendra mainte-
nant d’apprendre ce qu’aura produit son voyage et ses propositions sui-
vant les ordres que cet électeur aura envoyez à ses députtez à l’assemblée;
sur le suject desquelz Sa Majesté croit devoir faire remarquer auxdictz
Sieurs Plénipotentiaires qu’il sera bien à propos de |:les caresser et leur
tesmoigner bonne disposition aux intérestz de leur maistre, particulière-
ment pendant la négociation du sieur Servien à La Haye, affin que le
party de la princesse d’Orange ne prenne pas à tasche de la traverser:|,
comm’il est ordinairement plus facille de faire du mal que du bien. Et il
semble que ce soing de mesnager les espritz |:des ministres de Brande-
bourg:| est d’autant plus nécessaire que selon divers avis que nous avons,
|:les Suédois publient que c’est la France qui les force à prendre leur satis-
faction sur la Pomméranie qu’ilz seroient bien plus ayses d’avoir en quel-
que autre endroit:|.
Il sera bon aussy que lesdictz Sieurs Plénipotentiaires tesmoignent aux
ministres de la couronne de Suède |:grande appréhension des résolutions
de Hollande:|, leur faisant cognoistre que |:sy cet allié nous manque, les
Espagnolz ne voudroient plus la paix avec nous, et que nous ne pourrions
continuer la guerre qu’avec grand désavantage:|.
On peut aussy leur faire sçavoir que les Espagnolz employent toutte leur
industrie |:pour engager lesditz Sieurs Estatz à la deffense de Brande-
bourg:|, comm’ilz font d’aillieurs touttes les dilligences imaginables pour
empescher que |:cet électeur ne consente à ce que la couronne de Suède
prétend pour la Poméranie:|.
Nous avons divers advis que |:Castel-Rodrigue et Pennaranda sont per-
suadez que la France ne fera la paix à aucune condition qu’on luy puisse
accorder:|, sy elle n’y est absolument forcée |:par la conclusion du traitté
de Messieurs les Estatz:|. Et encores que discourans entr’eux, ilz tesmoi-
gnent estre résolus |:de nous satisfaire touchant les postes de Toscane:|, ilz
croyent néantmoins que cela ne servira de rien qu’à |:nous enorgueillir
davantage:|. Après cela, ce n’est pas merveille s’ilz remuent ciel et terre
pour imprimer dans les espritz |:des Hollandois et partout aillieurs que
la France ne veut point la paix:|, puisqu’eux-mesmes le croyent aussy for-
tement qu’il se peut.
Sy les Hollandois diffèrent quelque tempz de signer leur traicté comm’ilz
y sont tenus, et que l’on a lieu de l’espérer de ce que le sieur Servyen leur
représentera sur ce suject, cette opinion qu’on a |:de l’aversion de la
France à la paix:| ne pourra nous apporter aucun préjudice, parce que
comme la France la désire sincèrement, il sera facille de le persuader aux-
dictz Sieurs Estatz en leur offrant que |:ce point de guarentie estant adjus-
té, nous sommes prestz de la signer aux conditions que nous
leurs députez , pourveu qu’elles soient bien explicquées, et dans lesquelles
est tacitement comprise la rétention des postes de Toscane:|, puisque nous
avons tousjours négocié sur ce fondement que la France ne pouvoit resti-
tuer quoy que ce soit des conquestes qu’elle a faictes sur l’Espagne que
celle-cy ne luy fist raison en mesme tempz des Estatz qu’elle luy détient
injustement. Ainsy nous convaincrons par les effectz et confondrons les
Espagnolz et tout autre qui doutteroit des intentions de Leurs Majestez
pour la paix, d’autant plus que lesdictz Sieurs Plénipotentiaires à Munster,
et le sieur Servyen en Hollande, pourront parler en termes sy préciz sur
cette matière qu’ilz achèvront de dissiper en un instant tous les nuages
dont nos ennemis l’ont enveloppée.
Mais ce qui sur touttes choses, à ce que l’on juge de deçà, faict plus de
peyne |:aux Espagnolz, et leur percera le cœur sy l’effect s’en ensuit,
c’est l’appréhension qu’ilz ont que Messieurs les Estatz ne donnent les
mains à la guarentie que la France leur demande, tant parce qu’ilz y sont
tenus et que c’est leur bien pour mieux assurer la paix, que parce que
désirant avec passion de la conclure promptement, ilz recognoistront
qu’elle peut, par le moyen de cette guarentie, estre faitte en un instant,
de sorte qu’il ne fault pas doubter que les ministres d’Espagne ne met-
tent toutes pièces en œuvre pour destourner ce coup:|. Et comme pour
esvitter la ruine totalle qui les menace, ilz |:accordent tout aux Hol-
landois, jusques au poinct des Indes que l’on a tousjours cru la pierre
d’acchopement [!] en leur traitté, et consentir d’autre costé que la France
retienne toutes ses conquestes:|, tout cela dans la pensée qu’ilz viendront
promptement |:à bout du roy de Portugal:| et qu’ilz pourroient ensuitte,
dans quelque conjoncture plus favorable, |:se vanger des maux qu’on leur
a faictz, violant la foy du traitté soubz quelque prétexte plausible dont
ilz ne sont jamais despourveus:|, il ne peut estre qu’ilz n’ayent grand
dépit et un déplaisir extresme de nous veoir travailler |:à rompre toutes
leurs mesures, tant par la faculté que nous nous réserverons d’assister le
roy de Portugal (ce qui transportera le siège de la guerre en Espagne),
que par la poursuite de cette garentie qui tiendra tousjours les choses en
l’estat qu’elles sont aujourd’huy:|, c’est-à-dire qu’ilz ne sçauroient man-
quer |:au traitté et attaquer la France sans avoir aussytost sur les bras les
mesmes ennemis qui leur font à présent la guerre:|. Et comm’ilz peuvent
d’ailleurs avoir quelques lumières |:que la Suède pourra bien assister le
Portugal de vaisseaux et de bonnes trouppes, et que peut-estre nous
viendrons à bout d’ajuster les différends des Portugais et des Hollandois,
et de réunir les espritz des uns et des autres, il est impossible:| qu’ilz ne
soyent en des peynes indicibles qui s’augmentent encore par la considé-
ration du voyage que le sieur Servyen est allé faire à La Haye, voyant
bien que l’on s’estudie icy à prendre touttes les précautions imaginables
pour rendre inutilles tous les desseins qu’ilz ont de nous tromper, et
pour affermir la durée de la paix malgré eux ou estre en estat de leur
faire plus de mal que jamais par les armes s’ilz viennent une fois à la
rompre.
Il est bon de faire souvenir |:les ministres de Portugal d’engager le plus
qu’ilz pourront la Suède à leur deffense:|, comm’on l’a mandé diverses
fois, et d’employer tous moyens pour s’asseurer |:de l’amitié et des assis-
tances de cette couronne-là:|. On croid icy que la reyne et tout son
conseil |:y auront inclination, et particulièrement le chancellier Oxen-
stiern, qui cognoistra bien qu’il est très advantageux à leurs intérestz de
maintenir ledit roy de Portugal, outre que ledit chancelier a grande pas-
sion pour le commerce, dans lequel il s’intéresse fort. Et il verra bien
que sy ce roy se conserve dans la possession de ses Estatz, cela servira
extrêmement à la Suède pour l’establissement dudit commerce, pouvant
envoyer des flottes conjoinctement avec des vaisseaux portugais dans les
Indes et profiter beaucoup dans les marchandises et le trafic, ou mesme
prendre pied en quelque endroit de ces quartiers-là, et s’y rendre consi-
dérables.
Il sera aussy bien à propos que lesdictz Sieurs Plénipotentiaires escrivent
de tempz en tempz |:au sieur Chanut de porter avec adresse dans la cour
où il est les intérests du Portugal, et qu’ilz luy en suggèrent les moyens
selon les occasions qui pourront s’en présenter.