Acta Pacis Westphalicae II B 4 : Die französischen Korrespondenzen, Band 4: 1646 / Clivia Kelch-Rade und Anuschka Tischer unter Benutzung der Vroarbeiten von Kriemhild Goronzy und unter Mithilfe von Michael Rohrschneider
240. Memorandum Ludwigs XIV. für Longueville, d’Avaux und Servien Paris 1646 November 6
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Paris 1646 November 6
Kopien: Ass. Nat. 272 fol. 534–543 = Druckvorlage; AE , CP All. 78 fol. 299–304’. Konzept
Lionnes: AE , CP All. 62 fol. 236–243’.
Mögliche Auswirkungen des Todes des Infanten: 1. Stärkung der spanischen Friedensbereitschaft;
2. kaiserlich-spanische Heiratsverbindung; Gefahr einer Vereinigung der beiden habsburgischen
Linien; 3. Maßnahmen zur Sicherung des Friedens erforderlich; 4. bei Vereinigung der habsbur-
gischen Linien niederländisches und schwedisches Interesse einer engen Anbindung an Frankreich;
5. Todesfall für Portugal von Nutzen; Schwächung oder Umsturz der spanischen Regierung
denkbar; Bemühen um Unterstützung Portugals durch die Generalstaaten; eventuell neue Hei-
ratspläne für die Kaisertochter Maria Anna; Erwerb des Herzogtums Mailand durch Frankreich
denkbar. Furcht der Spanier vor einem Scheitern der Friedensverhandlungen oder einer Ver-
schärfung der Bedingungen aufgrund des Todes des Infanten unbegründet. Hoffnung auf Ein-
lenken der Spanier. Bedeutung Porto Longones. Rolle Frankreichs in Italien. Bemühen um Ab-
tretung der toskanischen Plätze. Eintreten für Verbleib Cengios bei Spanien. Probleme beim
Waffenstillstand in Katalonien. Bedeutung Léridas.
On receut dimanche dernier la nouvelle d’un événement digne de grande
considération et qui peut avoir beaucoup de suittes à désirer ou à craindre
selon qu’il plaira à Dieu d’en ordonner, c’est la mort du prince d’Espagne
qu’une fièfvre de quatre jours a emporté à Sarragosse le 9 e du passé.
La Reyne a esté fort touchée de la perte de ce jeune prince qui luy estoit sy
proche , et Sa Majesté a déploré sur tout et compaty au malheur du roy son
frère qui a esté frappé en peu de tempz des plus rudes coupz qu’un homme
puisse recevoir dans sa famille, ayant perdu la reyne sa femme
sa sœur
Vgl. [ nr. 9 Anm. 1 ] .
là en danger imminent de veoir sortir la monarchie d’Espagne hors de sa
branche.
Après ces premières considérations Sa Majesté en a faict beaucoup d’autres
sur cet accident qui regardent les affaires généralles qu’elle est bien aysé de
communicquer succinctement à Messieurs les Plénipotentiaires.
Premièrement Sa Majesté juge que cette mort servira d’un esguillon nouveau
et bien pressant pour obliger le roy d’Espagne à n’apporter difficulté aucune
en tout ce qui pourroit retarder d’un seul moment la conclusion de la paix,
et quand les avis que nous avons de bon lieu ne nous en asseureroient pas
positivement comm’ilz font, plusieurs raisons que l’on ne s’amusera pas à
déduire parce qu’elles tombent d’abbord dans le sens d’un chacun, nous le
persuaderoient assez.
En second lieu Sa Majesté tient non seullement pour indubitable que le filz
de l’Empereur espousera l’Infante héritière
Zu diesem Heiratsprojekt s. [ nr. 91 Anm. 9 ] .
longtemps qu’on ne le voye passer en Espagne, quoyque le mariage ne puisse
estre sy tost consommé, mais affin que s’il arrivoit quelqu’accident au roy
d’Espagne dont la santé n’est pas bien bonne ny fort asseurée, il y ayt un
prince de la maison pour recueillir la succession et pour gouverner, et quand
mesme la princesse viendroit après à mourir, qu’il se trouvast en possession
et en estat de disputter à la Reyne les droicts légitimes que Sa Majesté y
auroit alors.
Les histoires rapportent que Charles-Quint après avoir ceddé l’Empire à son
frère Ferdinand
Anspielung auf die Abdankung Ks. Karls V. 1556 und den Regierungsantritt Ferdinands I. als
Ks., der bereits 1521 zum Rom. Kg. gewählt worden war und 1558 von den Kf.en erneut
gewählt wurde ( DBA 314, 125; NDB V S. 81–83 ; Sicken ; Kleinheyer S. 124–136).
furent surmontez que par la déclaration que fist Ferdinand qu’il feroit la
guerre pour faire valloir la cession, d’où l’on peut inférer qu’aussy-tost que
la maison d’Austriche verra le moyen de mettre l’Empire et la couronne
d’Espagne en une seulle teste, elle n’en perdra pas l’occasion.
En troisième lieu Sa Majesté attribue à un effect de la providence divine et de
la bonté qu’elle continue d’avoir pour cette couronne, que cet accident deb-
vant arriver, elle ayt permis que ç’ayt esté dans une conjoncture où les condi-
tions de la paix estoient à la veuille [!] d’estre arrestées, et que ne l’estans pour-
tant pas entièrement, la France avant que passer outre, eust assez de tempz
pour considérer tout ce dont elle peut estre menacée à l’advenir en suitte de
cette mort, et pust songer à prendre d’autant mieux ses mesures et ses précau-
tions pour la seureté de la paix qui se conclura, car il n’est pas question seul-
lement aujourd’huy de se munir contre l’intention des Espagnolz qui ne se
portent à la paix que pour sortir d’un mauvais pas, et avec dessein de prendre
leur revanche aussytost qu’ilz en trouveront l’occasion favorable, mais il faut
considérer extrêmement que l’union des deux maisons d’Allemagne et d’ Es-
pagne en une seulle teste peut leur donner lieu de nous faire plus de mal qu’ilz
n’en ont eu jusqu’icy, comm’il est à appréhender que ce prince-là ne soit plus
puissant et plus à craindre que n’estoit le roy d’Espagne avant qu’il eust faict
tant de pertes en cette guerre, puisqu’il ne pouvoit pas disposer de la vollonté
et des forces de l’Empereur comme fera celluy-cy joignant les deux dignitez
ensemble. Et sy nous avions tant songé aux moyens d’empescher que l’ Empe-
reur par intérest d’alliance ne se portast comm’autresfois il a faict à assister les
Espagnolz, au cas que nous fussions demeurez en guerre avec eux après l’ ac-
commodement de l’Empire ou que la paix généralle se faisant, l’Espagne
l’eust rompue à quelque tempz de là, à plus forte raison y devons-nous penser
et prendre touttes les précautions imaginables à présent qu’il ne s’agira pas de
secourir un tiers par mouvement de proximité, mais de soustenir ses intérestz
propres et d’agir luy-mesme en sa propre cause.
Les meilleurs moyens pour cela sont ceux que l’on a mandez diverses fois, et
que Messieurs les Plénipotentiaires ont marquez dans leur dernière des-
pesche , et les plus solides de tous sont l’un d’affoiblir nos ennemis autant
qu’il se pourra, l’autre de s’unir plus estroictement que jamais avec nos alliez,
et le dernier de donner plus d’occupation à l’Espagne dans le Portugal qu’elle
ne croid y en trouver.
En quatrième lieu Sa Majesté a considéré que Messieurs les Estatz sont ceux
qui ont plus de raison d’appréhender l’union qui se va faire des deux maisons
en une seulle personne, car touttes les déclarations que l’Espagne fera en leur
faveur par ce traicté touchant leur liberté et leur souveraineté et touttes les
renonciations de droicts et de prétentions sur eux ne sçauroient les mettre en
condition plus asseurée qu’ilz sont à présent ny empescher que l’Espagne
ayant moyen de faire valloir son droict avec ses forces propres et avec celles
de l’Empire desquelles les Provinces-Unies ont le plus à craindre, elle n’en
perde pas l’occasion, et que s’ilz voyent jamais jour à rompre contre Mes-
sieurs les Estatz avec apparence de bon succez, ilz ne se mettront pas beau-
coup en peine de ce que ce roy-cy aura promis pour sortir d’un mauvais pas,
et practiqueront leur ancienne maxime qu’on ne doit pas garder la foy aux
héréticques.
Et cela doibt faire entrer en considération les Provinces-Unies en quel estat
elles se trouveroient maintenant sy elles s’estoient laissé induire à commettre
quelque manquement de foy envers cette couronne et à l’offenser, estant le
seul véritable appuy dont ilz peuvent s’asseurer en tout tempz.
Les Suédois ont aussy grand intérest de s’unir plus estroictement que jamais
avec la France pour la conservation des pays qui leur demeureront par ce
traicté, puisque sy on vient à leur en disputter la possession ilz auront à
faire à un Empereur qui employera contre eux ses forces et celles du roy
d’Espagne.
En cinquième lieu Sa Majesté a considéré que le roy de Portugal est celuy à
qui cette mort du prince d’Espagne peut estre la plus utille, non seullement en
ce que vraysemblablement elle décourragera la nation espagnolle et pourra
attiédir l’ardeur avec laquelle il eust esté attacqué, mais parce que le roy d’ Es-
pagne qui n’a pas trop de santé peut aussy manquer, et qu’alors soit à cause de
la minorité de la princesse, soit pour le changement qui se feroit dans tout
l’Estat et la nouveauté du gouvernement, il ne luy seroit pas malaysé avec un
peu d’assistence estrangère de se soustenir et se conserver en la possession de
tous ses Estatz, outre que sy avant tous ces événemens-cy et avant les grandes
pertes que le roy d’Espagne a faittes, il s’est trouvé un duc de Medina Sidonia
et le marquis d’Ayamont qui ont voullu se rendre maistres de l’Andalousie
Don Gaspar de Guzmán y Sandoval, 13. conde de Niebla, 9. duque de Medina Sidonia, 7.
marqués de Cazaza (1602–1664) war ein Vetter von Don Francisco Antonio de Guzmán y
Zúñiga, 6. marqués de Ayamonte (1606–1648 hingerichtet); ihre gescheiterte Verschwörung
von 1641 zielte darauf ab, Andalusien zu einem souveränen Kg.reich unter der Herrschaft
Medina Sidonias zu machen ( Domínguez Ortiz S. 115–153).
eussent esté suivis d’autres qui attendoient quel succez auroit la résolution de
ceux-cy, il est à croire que la monarchie d’Espagne estant affoiblie au point
qu’elle l’est, et dans des accidens de mortz ou de mutations de gouvernement,
il pourroit s’en trouver beaucoup qui voyans plus de jour à faire leur fortune,
seroient en pareille humeur que ledit duc et ledit marquis et en disposition de
faire leur proffit par des brouilleries qu’ilz susciteroient.
En suitte de tout ce que dessus Sa Majesté estime qu’il n’y a rien présentement
de plus nécessaire que d’engager Messieurs les Estatz à soustenir le roy de
Portugal. Cette guerre sy elle peut occupper l’Espagne sera la seureté desdits
Sieurs Estatz et celle de nostre repos, mais pour y parvenir il fault travailler
incessament à oster touttes les aigreurs que les Provinces-Unies ont contre
ledit roy par un accommodement où elles ayent toutte satisfaction sur leurs
différens du Brésil.
Il semble que dans cette conjoncture cela ne sera pas malaysé, parce que d’un
costé Messieurs les Estatz feront sans doutte grande refflexion à l’intérest no-
table qu’ilz ont d’occuper aillieurs que chez eux les armes d’Espagne mainte-
nant que celles de l’Empire sont en chemin d’estre à un mesme maistre, et de
l’autre le roy de Portugal à ce qu’on nous mande ayant pezé tout ce qui luy a
esté réprésenté d’icy a résolu à quelque prix que ce soit de contanter lesdits
Sieurs Estatz, et nous avons avis de Lisbonne que le comte de Vidiguiera re-
passe par deça avec qualité d’ambassadeur extraordinaire non seullement avec
plain pouvoir sur cette affaire, mais avec de grandes sommes d’argent que l’on
dict aller jusques à millions pour distribuer parmy les Provinces-Unies. Mes-
sieurs les Plénipotentiaires agiront donc dez à présent pour conduire bientost
cette négociation à une heureuse fin et pour faire une réunion des espritz
aussy sincère que celle de leurs intérestz les y convie.
Sa Majesté a enfin considéré que cette mort rompant le mariage de la fille de
l’Empereur pourra bien donner lieu à Trantmansdorff de jetter quelque pro-
pos de celluy du Roy avec elle, sy ce n’est que le Roy d’Espagne veuille pour
luy-mesme ce qui estoit destiné pour son filz
coutter ce qui pourra leur en estre dict et d’en donner avis icy.
Il eschect aussy de considérer que les filles ne succèdent pas à la duché de
Milan, et que cela pourroit donner jour avec le tempz, le roy d’Espagne ve-
nant à manquer, d’en obtenir l’investiture pour le Roy par marriage, eschange
ou autrement.
Voylà les refflexions que Sa Majesté a faict[es] de prime abord sur l’accident
impréveu de la mort du prince d’Espagne. Il en tombe à chacque moment de
nouvelles dans la pensée et peu de tempz fera encore pénétrer plus avant et
juger de l’avenir avec plus de fondement. Cependant Messieurs les Plénipo-
tentiaires sçauront que l’on est averty de très bon lieu que le roy d’Espagne et
les ministres qui sont prez de luy, comme aussy le marquis de Castel Rodrigo
qui a eu plustost que nous l’avis par la voye de la mer, appréhendent extrême-
ment que cette mort n’empesche la paix ou qu’elle ne nous fasse demander
des choses auxquelles on n’a point encores pensé, croyant bien que nous
considérerons qu’avec le tempz l’union des deux maisons en une teste nous
peut donner beaucoup d’affaires et que voyans desjà les choses en un grand
panchant nous voudrons les pousser plus avant pour nous mettre à couvert de
tout ce qui peut arriver.
Mais comme nonobstant la raison cy-dessus il y en a d’autres fort pressantes
dans la constitution présente de cet Estat pour voulloir la paix, soit pour les
maux dont la chrestienté est menacée par les armes du Turc qui touchent fort
Sa Majesté et tout son conseil, soit pour la révolution de l’Angleterre, soit
pour les nécessitez propres du royaume espuisé par une longue guerre et qui
sont plus grandes pour l’argent qu’il ne se peut dire, Leurs Majestez voyant
qu’elles peuvent faire en attendant la majorité du Roy une paix très glorieuse
et très avantageuse persistent à en désirer la conclusion, espérant qu’avec l’ ay-
de de Dieu et les propres forces du royaume et la vigillance et l’application
avec laquelle on taschera de s’en servir seront suffisantes pour se garentir de
l’effect des mauvaises intentions que les Espagnolz peuvent avoir contre nous.
Elles recommandent seullement auxdits Sieurs Plénipotentiaires de redoubler
leurs soings pour affermir autant qu’il se pourra morallement la durée de l’ ac-
commodement que l’on est prest de conclurre, et pour cella de ne rien obmet-
tre de tout ce qui nous peut estre plus avantageux, ce qui sera la meilleure et
la plus véritable seureté.
Et comme outre les considérations qui obligeoient cy-devant les Espagnolz à
désirer la conclusion de la paix, ilz ont un nouveau motif bien pressant par la
mort du prince d’Espagne qui mesme leur fait craindre plus que jamais que
nous ne nous en esloignions, il y a grande apparence qu’ilz nous accorderont
à présent les pointz où ilz ont faict jusqu’icy difficulté, et entr’autres on ne
faict point de doutte qu’ilz ne consentent à nous laisser ce que les armes du
Roy auront conquis du costé de la Toscane cette campagne.
Positive Nachricht von der Belagerung Porto Longones.
Quoyque ce poste soit extraordinairement important, il n’y a pas lieu de
mettre en doutte que les Espagnolz veuillent plustost continuer la guerre que
nous le laisser.
Sa Majesté ne considère pas seullement cette acquisition comme importante
en soy pour la bonté de la place, pour sa scituation, pour la grandeur du port
le plus seur et le plus vaste qui soit en ces mers-là, pour les grandes difficultez
qu’il y auroit de nous en chasser, puisqu’il faut pour cela une armée navalle et
une de terre qu’aucune autre puissance que celle-cy n’est en estat aujourd’huy
de mettre ensemble, sans desgarnir trop les autres endroitz, pour la terreur
qu’il donne à toutte l’Italie des armes de la France et le respect qu’il imprime
dans l’esprit de tous les princes envers cette couronne, la seulle appréhention
que nous l’occuperions nous en ayant desjà faict veoir les effectz qui augmen-
teront sans doutte de plus en plus à mesure qu’ilz recognoistront que nous
nous establissons en ces quartiers-là avec dessein de nous y fortiffier et de ne
nous en retirer plus, mais elle le considère pour une très grande seureté de la
paix ou pour un moyen très propre de faire repentir ceux qui songeroient à la
rompre, car il est indubitable que la France occuppant ce poste-là il faudra
que les conjonctures soient bien favorables pour les Espagnolz avant qu’ilz
songent de venir à aucune rupture, voyant non seullement la facillité qu’il
nous donne de susciter des changementz et une révolution généralle dans le
royaume de Naples qui est un des plus grands soustiens de leur monarchie et
lequel est aujourd’huy exténué sans forces, sans argent, et les peuples dans le
dernier désespoir, passant souvent des familles entières de l’autre costé de la
mer pour y aller chercher la domination du Turcq, mais aussy qu’il leur seroit
extraordinairement difficille, la France tenant ces postes-là et la Catalongne, de
donner aucun secours audit royaume, ny mesme d’y avoir communication que
fort malaysément, puisqu’il faudroit de nécessité que pour esvitter la rencontre
des gallères que nous pourrions y entretenir, ou qu’ilz y allassent tousjours
avec des armées entières, ou qu’ilz fissent canal entre la Sardaigne et la Barba-
rie avec de grandes incommoditez et beaucoup de péril de toutte sorte.
Quand la France fist l’acquisition de Pignerol pour s’asseurer le passage de ses
armes en Italie, plusieurs personnes sensées jugèrent qu’il ne luy seroit pas
moins important de s’asseurer aussy d’un port de mer pour la mesme fin en
quelque lieu avancé et que sy par négociation ou autrement elle pouvoit en
venir à bout, cette courronne ne seroit pas moins respectée dans toutte l’Italie
que le sont les Espagnolz qui y possèdent une sy grande estendue de pays, et
on songea dez lors à avoir par quelque moyen le Port Venere , ou le Golpho
della Spetie
gone qui probablement est aujourd’huy entre nos mains.
Et comme les princes d’Italie ont désiré et applaudy à la résolution que la
France a faitte de retenir Pignerol, parce que c’est la porte par laquelle elle
pourra faire entrer ses armes dans l’Italie lorsque l’Espagne voudroit oppri-
mer quelqu’un des princes, aussy le respect ne pouvant avoir lieu que pour la
Lombardie, ceux qui se trouvent plus esloignez comme le Pape, le Grand-
Duc et les autres de ce costé-là ont grand intérest que la France ayt aussy
quelques postez advancez qui servent d’une seconde porte pour leur envoyer
en cas de besoing des secours qui ne pourroient pénétrer jusqu’à eux par la
voye de Pignerol, et ce sera une raison bien forte pour nous rendre les média-
teurs aussy favorables en cette rétention de Piombino et de Porto Longone
qu’ilz ont ardemment souhaitté que nous retinssions Pignerol.
Quant à ce que Messieurs les Plénipotentiaires mandent qu’ilz douttent du
succez de cette prétention, parce que la France a tousjours protesté qu’elle ne
prétendoit retenir quoy que ce soit en Italie, cela n’importe rien au faict, car
outre que l’on n’a pas moins déclaré diverses fois que l’on ne se tenoit engagé
en rien sy on n’acceptoit nos offres avant que nos armées commançassent
d’agir cette campagne, et que l’on augmenteroit les prétentions à proportion
des succez qui est une protestation particulière qui destruit la généralle de ne
rien prétendre en Italie, il n’y a personne qui ne voye bien que ce que nous en
avons dit se devoit entendre dans l’estat où nous estions alors que nous ne
possédions rien qui ne fust aux maisons de Savoye ou de Mantoue, mais non
pas de ce que l’on pourroit occuper sur les Espagnolz, et en effect sy par
intelligence ou par la force les armes du Roy eussent peu cette campagne- cy
faire la conqueste du royaume de Naples, on ne croid pas que les Espagnolz
eussent ozé seullement mettre sur le tapis la proposition de le rendre en vertu
de ce que nous avions déclaré ne rien prétendre dans cette province-là.
De plus nous ne retiendrons pas moins Alsace, Brissack et Philipsbourg pour
avoir souvent faict la mesme déclaration à l’esgard de l’Allemagne, et il est
certain que les princes d’Italie bien conseillez et surtout le Pape et le Grand-
Duc dont les Estatz sont enclavez entre le royaume de Naples et la duché de
Milan souhaitteront extrêmement que ces postes de Piombino et de Portolon-
gone demeurent à la France, affin qu’elle soit tousjours en estat de les garentir
de l’oppression que les Espagnolz pourroient leur faire.
Monsieur le Grand-Duc que nous recognoissons de plus en plus estre dans de
très bons sentimentz pour cette couronne nous faict tesmoigner le désir qu’il
a qu’elle se maintienne en la possession de ces postes-là et il semble qu’outre
les intérestz réelz nous y avons encores beaucoup de raisons de bienscéance et
de justice pour le reffus que nos parties ont fait de la trefve sur la mer Médi-
terranée que nous proposâmes en considération de la république de Venize
qui nous a obligé de faire de grandes despenses pour mettre nostre armée
navalle en estat d’agir.
Enfin le dernier party auquel Sa Majesté estime que Messieurs les Plénipoten-
tiaires doivent venir sur cette affaire c’est que la France ne possédera ces pos-
tes -là que comme la Catalongne par une trefve d’esgalle durée à celle que l’on
fera pour cette principauté, mais avant cela il faut tascher par touttes sortes de
moyens de les retenir en propre, les relevant pourtant de l’Empereur comme
pouvoit faire cy-devant le roy d’Espagne.
Et en cas que les ministres d’Espagne rejettent cela sur les Impériaux, disantz
que la chose ne deppend pas d’eux, il n’y a pas apparence que l’Empereur y
puisse faire la moindre difficulté quand les autres y donneront les mains.
Messieurs les Plénipotentiaires sçauront que les Espagnolz ont occuppé le
poste du Cencio sur la maison de Savoye laquelle en effect n’y a aucun
droict, ce qu’elle a déclaré en diverses occasions, tesmoignant mesme n’avoir
pas raison d’insister qu’il luy fust rendu. C’est pourquoy il faudra veoir
adroictement sy faisant en sorte que ce poste demeure aux Espagnolz il y
auroit moyen de mesnager pour nous quelqu’autre avantage, et comme nous
avons une entreprise sur ledit poste qui est sur le point d’estre exécuttée, en
cas qu’elle réussisse nous pourrions encores davantage faire valloir aux Espa-
gnolz les résolutions que nous pourrions prendre là-dessus en leur faveur.
Messieurs les Plénipotentiaires doivent prendre bien garde et remédier à un
inconvénient qui arriveroit sy la trefve de Catalongne se concluoit dans la
conjoncture présente que les ennemis ont passé deça la Sègre et pris poste
dans la pleine d’Urgel, car ilz pourroient prétendre de demeurer en posses-
sion de certains bourgs et villages qu’ilz ont occupez ou dans ladite plaine ou
pour y venir, quoyque ce soient lieux ouvertz ou qu’ilz ne sçauroient garder
et qu’ilz abandonneront en se retirant.
Cependant il se veoid quelle incommodité nous en recevrions et quelles cla-
meurs il y auroit de tous les peuples s’il falloit qu’ilz y demeurassent en vertu
de la trefve.
Nachdem Harcourt den diesjährigen Feldzug in Katalonien mit der Belagerung
Léridas eröffnet hatte, kündigte er mehrfach die baldige Einnahme des Platzes an.
Er ging von der falschen Annahme aus, daß den Eingeschlossenen nur für wenige
Wochen Lebensmittel zur Verfügung stünden. Unsere Informationen dagegen lau-
teten , daß die Vorräte bis zum Ende des Jahres reichten. Ein Erfolg scheint daher
zweifelhaft, zumal die Versorgung der Truppen Harcourts langfristig nicht ge-
sichert ist. Außerdem besteht die Gefahr, daß die Feinde Flix einnehmen.
Après tout Leursdites Majestez ayans bien examiné touttes choses persistent à
croire qu’il vaut mieux courre le hazard que nous soyons forcez à nous retirer
du siège par une nécessité absolue qui soit cogneue de tous les Catalans, que
sy pour l’évitter nous laschions la place en signant la trefve dez à présent;
nous avons desjà sceu que le bruit ayant courru en Catalongne que les Espa-
gnolz sauvoient Lérida par une prompte conclusion de la paix, les peuples
commançoient à se plaindre hautement que la France faisoit bon marché des
intérestz de leur principauté pour gagner dans les siens propres en d’autres
choses qui luy touchoient davantage, et qu’il estoit bien estrange qu’on lais-
sast eschapper une place de sy grande considération que l’on pouvoit s’ asseu-
rer en tenant encorre bon quelques jours. Enfin avec tout le péril qu’il y a de
ne pas l’emporter il semble qu’il est mieux d’en hazarder l’événement. Cepen-
dant nous faisons extrêmement valloir aux Catalans que cette considération
est cause que nous reculions la conclusion du traicté de paix, et l’on a despes-
ché un courrier de delà pour veoir sy ceux de la députation et du conseil
seroient d’advis après avoir bien considéré les périlz qu’il y peut avoir dans la
constitution présente des affaires de delà, que l’on conclût le traicté de paix
consentant de retirer nos armes du siège.
S’il y avoit moyen de se prévalloir de la passion que les Espagnolz ont de
sortir d’affaires promptement, en sorte que Lérida nous demeure que nous
leur debvons faire croire après un siège de six mois estre à la veille de tomber
entre nos mains chacque jour, c’est tout ce que nous sçaurions désirer, et il ne
pourroit y avoir de scruppulle pour la signature du traicté, mais sans cela
nous ne debvons point passer outre que nos parties ne demeurent d’accord
préalablement que la trefve ne commencera ou que trois mois après la signa-
ture dudit traicté ou que l’entreprise de Lérida ne soit achevée de façon ou
d’autre, ou bien l’on pourroit dire que le principal object de Leurs Majestez
en cela estant de satisfaire les Catalans, elles trouveront bon tous les expé-
diens qui seront proposez, pourveu que ces peuples-là y consentent.
Les médiateurs et les députtez de Hollande nous compatiront sans doutte
quand on leur fera bien cognoistre que de conclurre le traicté en ceddant
Lérida à nos parties, ce seroit hazarder la possession de la Catalongne mesme
pour le mauvais effect que cela produiroit dans l’esprit des peuples qui sont
persuadez que chacque jour cette place doibt estre en nostre pouvoir, et s’ilz
voyoient que nous en mesprisassions l’acquisition, ilz soupçonneroient sans
doutte que nous avons faict quelque traicté secret pour les abandonner, c’est
pourquoy on ne doibt pas trouver estrange que nous soyons fermes en ce
point jusqu’au bout.
Il sera bon aussy de convenir expressément que chacun pourra faire telles
fortiffications qu’il voudra durant la trefve, pourveu qu’elles soyent dans l’ es-
tendue de sa possession sans contredict. Cela est important affin de mettre
une barrierre de Tarragonne à Barcelonne pour remédier aux inconvéniens
portez par les mémoires que les Catalans ont présentez au Roy et qui ont
esté envoyez à Messieurs les Plénipotentiaires.