Acta Pacis Westphalicae II B 4 : Die französischen Korrespondenzen, Band 4: 1646 / Clivia Kelch-Rade und Anuschka Tischer unter Benutzung der Vroarbeiten von Kriemhild Goronzy und unter Mithilfe von Michael Rohrschneider
192. Memorandum Serviens für Lionne [Münster] 1646 Oktober 9
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[Münster] 1646 Oktober 9
Konzept, größtenteils eigenhändig: AE , CP All. 78 fol. 112–124 (am Rand z. T. zerstört) =
Druckvorlage.
Reise Marcilly-Croissys nach Schweden unnötig. Kritik Serviens an einem von d’Avaux entwor-
fenen Schreiben der französischen Gesandten an Königin Christina. Lérida. Waffenstillstand für
Katalonien. Zweifel an der Bereitschaft der Generalstaaten, das Bündnis aufrechtzuerhalten und
den Frieden zu garantieren. Besitz von Mainz gefährdet durch mangelndes Einvernehmen zwi-
schen Turenne und Courval. Bei Einnahme Dünkirchens Forderungen niederländischer Händler
zu erwarten. Furcht vor Intrigen d’Avaux’.
Monsieur de Marsilly me vint dire il y a quelques jours que monsieur
d’Avaux luy avoit proposé de faire un voyage en Suède pour disposer la reyne
à la paix et qu’il ne l’avoit pas voulu entreprendre sans mon consentement. Je
luy répondis franchement que monsieur d’Avaux ayant desjà une douzaine de
fois disposé des employs qui s’estoient présentés en faveur des siens, la raison
vouloit que j’en eusse quelqu’un à mon tour, mais que pour luy dire mon
sentiment avec liberté je ne croyois pas ce voyage nécessaire, que le Roy avoit
un ministre très sage et très capable sur les lieux qui servoit parfaitement bien
et qui estoit fort cogneu à toute la cour de Suède et à celle de France, que ce
seroit le mespriser trop et luy faire grand préjudice si on luy envoyoit à toute
rencontre d’autres 〈co〉mpagnons dans sa rédisence[!] pour y agir conjointe-
ment avec 〈luy〉 et mesme l’y 〈précéder〉 que pour cette raison ou quelque
autre on n’avoit pas cy-devant apreuvé à la cour le dernier envoy de monsieur
de Saint-Romain en Suède et que je le priois de n’y penser pas pour ne jetter
point de subjet de nouvelle contestation entre monsieur d’Avaux et moy sur
ce subjet. Il me promit fort honestement de s’en départir, mais pour garentir
monsieur Chanud de ce praejudice il a fallu consentir que monsieur de Mar-
silli soit allé treuver monsieur de Turenne pour traiter la suspension, ce que
j’ay fait de bon cœur, ne me souciant pas beaucoup de ces ostentations, pour-
veu que le service du Roy s’avance et qu’on ne fasse tort à personne qu’à
moy.
Depuis cela, monsieur d’Avaux s’est mis dans l’esprit de dresser une grande
lettre latine presque en forme de manifeste à la reyne de Suède et retarde par
ce dessein l’envoy d’un mémoire que j’avois dressé pour monsieur Chanud il
y a quelques jours lorsque nous estion à Osnabruc et qu’il estoit mala〈de〉.
En effect vous verez qu’une partie des raisons contenues dans le mémoire que
je vous envoye sont traduites dans 〈sa〉 lettre.
Lorsqu’il me l’a communiquée [je] m’e〈stois〉 souvenu du praejudice que
nous avons cy-devant receu de sa lettre circulaire que je signois avec trop de
facilité, n’ayant peu obtenir qu’il en ostast ce qui estoit trop libre, et de sa
harangue
Vgl. [ nr. 152 Anm. 7 ] .
à une action faite contre mon advis.
Je l’ay pris de m’excuser, si je ne pouvois demeurer d’acord de cette lettre, et
luy ay représenté les inconvéniens qu’elle peut produire le plus respectueuse-
ment qu’il m’a esté possible, mais ayant apris que sans nous en rien dire il en
envoya copie à la cour par le dernier ordinaire, et que depuis il travaille à
gagner monsieur de Longueville qui d’abord avoit esté d’advis que s’il falloit
escrire à la reyne de Suède ce ne devoit estre qu’une lettre de créance, j’ay creu
vous devoir envoyer les raisons de mon advis contraire, affin que s’il en arrive
cy-après quelque inconvénient, cela soit déchargé et justifié du refus que j’ay
fait d’y mettre mon sens pour ne tumber pas dans le blasme où j’ay eu part
diverses fois sans avoir eu part aux fautes qui l’avoient attiré.
Je ne doute point que monsieur d’Avaux n’ayt escrit pour apuyer son dessein
que monsieur Salvius nous pria, lorsque nous estions à Osnabruc, d’escrire en
Suède ce qui est véritable, mais il ne nous parla jamais d’escrire à la reyne qui
n’est pas nostre coustume. Je n’ay jamais compris de son discours qu’il eust
intention que nous n’escrivissions qu’au ministre du Roy qui est sur les lieux
pour faire agir en cette rencontre et persuader ceux qui n’ont pas toute la
disposition pour la paix qu’on peut souhaiter, à quoy je croy que le mémoire
qu’on luy eust envoyé pourroit suffire.
Son Eminence ne croira pas s’il luy plaist que ce soit une pointille pour sou-
tenir ce que j’ay fait et rebuter le travail de monsieur d’Avaux. J’ay offert de
jetter mon mémoire dans le feu et qu’on envoyast à monsieur Chanud telle
autre instruction que l’on voudroit, mais j’ay creu périlleux d’envoyer un es-
crit à la reyne de Suède qui ne peut estre révoqué ny changé ny adoucy, et
cela dès le lendemain que la satisfaction du Roy est ajustée, et où nous pre-
nons ouvertement le parti de noz ennemis contre noz alliez.
J’avois fait quelques remarques sur la lettre de monsieur d’Avaux aux endroits
qui sont marqués, mais on n’a pas eu le temps de la copier. Je vous envoye
seulement en général les inconvéniens qu’elle pouroit produire, quand mesme
tout ce qu’elle contient seroit recevable.
La lettre tient du manifeste et en quelque endroict de la déclamation. Les
ordres du Roy nous deffendent de traicter par escrit, et il n’y eut peult-estre
jamais une occasion sy délicate où il ayt esté nécessaire de s’abstenir d’escrire
principalement à cause que nous combattons l’interést des alliez en faveur des
ennemis.
Il semble que nous nous opposions à l’offre faicte par les Impériaux dans
l’instrument de paix, ce qui sera imputé à jalousie de la grandeur de nos amis
ou au dessein de prendre le parti de Brandebourg contre la Suède.
On n’y parle point du subjet principal de l’expédition du courrier, qui est
pour communiquer à la reyne ce qui a esté faict avec les Impériaux, en luy
représentant 〈droitement〉 qu’il ne tient plus maintenant qu’à son intérest
que la paix ne soit faicte. En cas qu’on jugeoit nécessaire de luy escrire, il
faudroit que ce fust seulement en créance sur le ministre du Roy et en se
tenans sur les termes généraux sans agiter par escrit les quaestions chaleureu-
ses qui peuvent déplaire.
A. Le commencement est une espèce de reproche, nous y mettons en ligne de
compte nos simples conseilz. Cela peut estre 〈pris〉 pour le préambule d’une
séparation; on pouroit dire que nous exagérons nostre 〈fidélite〉 passée que
sur le point que nous avons intention de la finir, si on en vouloit faire men-
tion , il vaudra mieux la restraindre à ce que nous venons de faire. On auroit
moins de subjet de soupçon, quand nous dirions que nous avons témoigné
nostre fidélité dans les conventions que nous avons faites avec les Impériaux,
en répétans qu’il n’y auroit rien de fait sans l’ajustement de la satisfaction de
Suède.
B. On veult trop vendre ce qui a esté faict pour nostre milice; les Suédois
sçavent assez que ce n’est pas seulement pour favoriser leur prétention que
nous nous sommes départis de la nostre.
C. On s’engage insensiblement à faire satisfaire celle de Suède, ce qui pourroit
nous en rendre garends en cas qu’il y survînt quelque difficulté.
D. On s’attribue par ces motz „adipisci totum non potuimus“ l’authorité que
nous n’avons pas eue de traicter pour la couronne de Suède qui s’en offensera
sans doubte. Nous sçavons qu’ell’a refusé jusqu’icy nostre médiation deman-
dée par Brandebourg. Ses ministres croiront que nous nous y ingérons contre
leur gré et sont assez pointilleux pour vouloir que le monde croye que ce sont
leurs armes et leurs victoires qui leur font obtenir ce qu’ilz prétendent et non
pas nostre entremise.
E. On dict que nous sommes près du port, ce qui pourra augmenter les
soupçons, la satisfaction de Suède n’estant pas ajustée, ny les intérestz publicz
démeslés. On nous a desjà admis qu’ilz sont en grande jalousie et se plaignent
secrètement de ce que nous sommes trop avancés.
F. On se charge des difficultez de Brandebourg que nous disons n’avoir pas
peu surmonter quoyque cela ne nous touche point, et que nous ne devions ny
affecter tant d’y avoir agi ny authoriser par nostre ingérence un refus qu’il
fait.
G. Nous disons que Brandebourg a offert la moytié de la Poméranie, ce qui
n’a point encor esté fait formellement de sa part si 〈…〉 n’ayant faict autre
chose que de laisser espérer.
H. Il semble que nous nous chargions mesmes des difficultez de Vismar et des
éveschez au lieu de les représenter comme naissantes de la chose mesme en
quoy du moins il ne faudroit pas mesler nostre sentiment.
I. On les dissuade de retenir ce qu’on leur offre sans le consentement des
intéressez qui est peult-estre l’expédient par où on peult enfin s’accorder et
sortir de cet embarras en cas que les intéressez persistassent à faire trop long-
temps des difficultez injustes. Monsieur Contarini nous a fait cognoistre aux
dernières conférences que les Impériaux sont de cet advis, cognoissans que la
France n’aura jamais de 〈force〉 si on prétend de contenter tout le monde. Il
semble que le principal but doit estre de satisfaire ceux qui ont les armes en
main et la principale puissance, et que tous les autres doivent s’acomoder à ce
que les couronnes et l’Empereur auront treuvé raisonable.
K. On playde pour l’électeur de Brandebourg sur l’obligation réciproque des
estatz de Poméranie et de luy, et on adjouste que lesdits habitans ne voul-
droient pas se soubzmettre à la Suède sans le consentement de Brandebourg,
ce qui seroit plus scéant en la bouche d’autruy que dans un escrit venant de
nous, l’expérience pouvant justiffier le contraire.
L. On menace de soubzlèvemens de peuples aussy bien pour Vismar que pour
la Poméranie, outre que cela passera bien avant, nous allons contre nostre
intention qui est ou que les Suédois gardent tout sans le consentement des
intéressez ou une partie avec leur consentement, à quoy les Impériaux mes-
mes donnent les mains, en quoy il semble que nous faisons nostre intérest de
celuy d’aultruy contre la Suède et contre ses propres ennemis.
M. On menace encor des Danois et Polonois, Hollandois et des villes anséa-
ticques lesquelles ont faict une déclaration contraire aux Suédois, les Hollan-
dois leur ont aussy parlé plus doucement.
N. La paix des Hollandois devroit estre explicquée et en autre sens et avec un
peu plus de modération.
O. Par ces motz „mitius agi“ il semble que nous condemnons nos amis, et
affectons de prendre le party de leurs parties.
P. On taxe les Suédois de demander des choses impossibles.
Q. On blasme encor ouvertement la demande des ambassadeurs de Suède
par la censure de toute l’assemblée laquelle ne leur a jamais parlé de cette
sorte.
R. On s’engage à dire qu’il n’y aura point de paix s’ilz persistent, et il peult
ariver le contraire dès demain s’ilz veullent garder la Poméranie à leur party
comme l’Empereur l’a offert.
S. Nous faisons cette déclaration de la part du Roy sans en avoir charge.
T. Nous nous establissons conseillers sans qu’on le demande qui est une
entreprise.
V. On allègue nostre exemple un peu trop envieusement; s’il faut parler, ce
doit estre avec plus de douceur.
X. On blasme la reyne en quelque sorte de n’avoir pas eu jusqu’à présent des
conseilz chrestiens.
Y. Nous répétons que ceux qui y ont intérest ne peuvent pas les accepter,
quoyqu’ilz le deussent faire pour le bien de paix, puisque les Suédois ont
tousjours demandé qu’on leur donne un équivalent, ce qui les met hors d’ in-
térest .
Z. Nous prononçons trop hardyment sur la satisfaction de la Suède et offrons
des choses sans pouvoir, nous ne sommes ny juges, ny parties, ny procureurs.
aa. On répète que c’est l’advis de toute l’assemblée qui ne nous a point donné
cette charge et qu’il vault mieux luy laisser explicquer que de l’alléguer, veu
qu’il peult estre différend et que les Suédois se promettent toute assistance
protestante.
bb. On exagère ce que nous offrons sans charge, qui toutesfois n’est que la
moytié de la prétention.
cc. Nous y interessons la réputation, la conscience de la reyne qui est une
espèce de blasme.
dd. Nous déclarons indirectement que le Roy veult faire la guerre au Turc, ce
qu’il fault éviter de dire par escrit.
ee. Nous y voulons encor inciter la reyne de Suède par un escript qui sera
public dans peu de temps dont on peut recevoir grand préjudice, les Impé-
riaux ayant esté merveilleusement soigneux de ne rien faire ny dire pendant la
négotiation qui leur pust nuire à la Porte.
ff. On allègue diverses raisons qui tiennent de la déclamation et qui ne sont
pas bonnes à escrire.
gg. Nous nous rendons demandeurs de la paix „rogatam volumus“ et ne
sommes plus par ce moyen conseilleurs désintéressez; en tout cas ce mot de
„volumus“ ne seroit pas bien là, parlant à une reyne.
hh. „Sperandum est“ etc., ces motz veullent dire que sy elle ne prenoit
d’autres conseilz, les alliez s’en pourroient offenser et se porter à quelque
résolution sans elle.
ii. Nous redevenons conseillers après avoir esté soliciteurs.
kk. „Imo et faciat“, ces motz sont un peu superbes pour des espritz jaloux qui
ne pensent pas tenir de nous ce qui leur demeurera.
Cela continue à faire veoir comme tout le reste de la lettre que nous préten-
dons d’estre les arbitres de cette difficulté, ce qui ne nous apartient pas ny de
droit ny par bienscéance en cette ocasion. Enfin nous ne sommes pas sy as-
seurez de nos ennemis qui ont laissé finement des conditions capables de
rompre le traicté s’il arrivoit quelque notable changement, qu’il faille passer
sy avant avec les amis par un escript public. S’ilz vouloient reprendre une
négotiation secrette sans nous avec les Impériaux, ceux-cy ne manquent pas
de bonne disposition pour y entendre. Les Espagnolz s’y porteroient de bon
cœur et s’il 〈en〉 mésarrivoit on nous accuseroit d’en avoir donné le prétexte
par une lettre non nécessaire, ce qu’elle contient pouvant estre représenté de
bouche avec moins de péril par un ministre du Roy qui a un caractère plus
puissant que celluy qui vient de nous pour agir en cette rencontre.
Il se pourroit faire, lorsque la lettre sera rendue, qu’on aura desjà pris quelque
favorable résolution sur ce subjet, monsieur Chanut ayant mandé qu’on estoit
sur le point de le faire. Cependant nous aurions donné subjet sans besoin à
noz alliez de faire quelque mauvais jugement des intentions de la France, ce
qu’il fault éviter soigneusement sur la conclusion d’un traicté.
Il seroit donc beaucoup plus seur d’addresser à monsieur Chanut tout ce que
contient la lettre, et en cas qu’il y ayt quelques raisons différentes de celles qui
sont dans un mémoire qui fut dressé il y a quinze jours lorsque nous estions à
Osnabruc et que monsieur d’Avaux estoit indisposé, l’on adjouste à celles du-
dit mémoire, à quoy on pourra joindre tout ce qu’on jugera à propos pour
fa〈ire〉 réussir le désir du Roy et faciliter la paix. Cela estant réprésenté de
vive voix par un homme sage qui s’arrestera quand il fauldra, s’adoucira aux
endroictz où il sera besoin, se retiendra ou s’excusera quand il cognoistra
s’estre trop avancé, traitera l’affaire à une ou à plusieurs reprises et choisira le
temps et les ocasions favorables, produira beaucoup plus d’effect et ne sera
subjet à aucun inconvénient, au lieu qu’une longue lettre ne pouvant estre
retirée ny changée après qu’elle a esté rendue, est subjette à diverses plaintes
et interprétations, et quand il n’y auroit rien à redire dans la matière, on pour-
roit s’offenser de la forme, puisque nous n’avons pas accoustumé de nous
addresser directement à la reyne de Suède pour les autres choses que nous
avons eu à traicter pendant la négotiation. En chef, nous sommes advertis que
monsieur le chancelier Oxestern est entièrement contraire à noz intentions
sur cette matière. Il ne manquera pas, habile au point 〈qu’il est〉, de faire
censurer nostre manière d’agir et d’escrire et peut-estre d’y faire une réponse
désobligeante qui nous engageroit dans une fâcheuse contestation avec noz
amys au temps que nous avons plus d’intérest d’affermir l’union de crainte
que noz ennemis ne profitent de la moindre division dont ilz se pourroient
apercevoir.
Peut-estre mesme que ledit chancelier qu’on dit estre un peu esloigné de la
paix et avoir quelque aversion contre la France seroit 〈bien〉 aise de prendre
cette ocasion au poil que nous luy donnerions nous-mesmes pour mettre
quelque division qui embrouillast les affaires.
Wenn die Generalstaaten nach Beilegung ihrer Differenzen mit Spanien oder die
Schweden nach Regelung ihrer Satisfaktion mit den Kaiserlichen dem französi-
schen König oder uns einen Brief dieser Art geschrieben hätten, hielten wir dies für
ein Anzeichen ihrer baldigen Abkehr von uns. Es ist zu befürchten, daß genau dies
die Gefühle der Schweden sind und sie versuchen werden, uns zuvorzukommen.
Sie würden dann wohl ihre Angelegenheiten nicht nur ohne uns regeln, sondern
sogar auf Wunsch der Kaiserlichen Druck auf uns ausüben, damit wir auf Brei-
sach , Philippsburg und anderes verzichten. Wir dürfen uns nicht durch eine vor-
eilige Entscheidung der Gefahr eines kaiserlich-schwedischen Separatabkommens
zu unseren Lasten aussetzen.
A la vérité si dans quelque temps nous recognoissions que l’on ne voulust point
de paix en Suède, que l’on fist icy des difficultez sans fondement pour l’ esloi-
gner et que l’on fust obligé à la cour de prendre quelque nouvelle résolution
là-dessus, nous pourrions à la fin (s’il estoit jugé à propos) escrire en Suède un
peu fortement, et il n’y auroit pas tant d’inconvénients à craindre que de le faire
aussytost après que nous avons convenu de la satisfaction du Roi avec les
ennemis, quoyque j’estime que mesme en ce temps-là il sera plus seur de faire
agir le ministre du Roi que de s’embarasser dans des escrits pour les prudentes
raisons qui nous ont esté souvent envoyées de la cour sur ce subjet.
Ce qui est de plus fascheux en tout cela est que ce [!] malheureuse lettre, que
monsieur d’Avaux a minutée pour la reyne de Suède et qu’il ne peut souffrir
qu’on diffère encor moins qu’on la rebute, est cause que la dépesche de mon-
sieur Chanud quoyque 〈très〉 importante et nécessaire est retardée depuis
quinze jours dont il ne se soucie pas beaucoup, pourveu qu’il contente sa
passion dominante, ne s’estant jamais freiné, que luy qui de deux voyes qu’il y a
de faire une affaire dont l’une est exposée à divers périls et inconvéniens et
l’autre seure et utile, ayme mieux s’attacher obstinément à la première parce
qu’il treuve son élément ordinaire qui est l’ostentation.
d’Avaux a cedé à la raison, aux persuasions de ses confidentz et à l’opinion de
monsieur de Longueville qui a esté de la mienne sur le subjet de la lettre latine;
tous luy ont fait cognoistre les inconvénientz qui en pourroient arriver, estant
desjà informez de la grande jalousie qu’ont les Suédois de nous voir plus avan-
cez qu’eux. La dépesche de monsieur Chanud a esté envoyée aux termes que
vous la verez; l’on y a fait quelques additions sur ce qui s’est passé depuis, que
je n’ay sceu faire copier, et monsieur d’Avaux qui vouloit qu’on n’envoyast ny
l’une ny l’autre de ces lettres s’est aperceue qu’il ne falloit pas pour des poin-
tilles particulières retarder plus longtemps le service du Roy. Il m’en a cousté
une bonne querelle qu’il a fallu souffrir avec luy où il me semble qu’il s’est
beaucoup emporté; si le récit en va jusqu’à la cour, je m’asseure qu’on avouera
que je suis demeuré dans toute la modération possible, ne voulant point d’autre
juge ny d’autre tesmoin que monsieur de Longueville. Le détail ne mérite pas
de vous estre racomptés. Si toutefois on avoit pris cette ocasion de me jouer
quelque pièce, vous pourez asseurer sur mon honneur que le tort de mon costé
et demander du temps pour faire cognoistre la vérité.
Le mémoire des Catalans qui nous a esté envoyé de la cour est remply de très
importantes considérations. Il mérite bien qu’au moins avant que rien
conclurre on reprenne Lérida en cas que monsieur le comte d’Harcourt ne
craigne point 〈l’e〉fort des ennemis pour la secourir, il faut confesser avec
eux que sans cette place Barcellonne demeureroit en mauvais estat et en très
grand péril. Il me semble qu’ayant esté bloquée quatre mois et estant à l’ ex-
trémité nous avons très grande raison de la demander par le traité sans qu’on
puisse avec justice blasmer nostre demande qui est fundée sur la coustume. Si
pour surmonter ce〈tte〉 difficulté on pourroit advertir en diligence monsieur
le comte d’Harcourt de capituler promptement et donner plustost un long
délay aux assiégez d’attendre le secours, la capitulation estant faite quoyque
l’exéquution n’en deust suivre d’un mois, nous aurons beaucoup plus de droit
de praetendre la place.
J’avois pensé si on pourroit achever le reste du traité avec l’Espagne en conve-
nant que la trêve de Cataloigne ne comencera qu’après la fin du siège de
Lérida, soit qu’il finisse par le secours ou par la reddition de la place, il fau-
droit seulement déterminer la forme du secours et qu’il fust tel que la place
pust tenir deux ou trois mois après l’avoir receue.
Il me semble qu’on a besoin de rasseurer l’Espagne des Catalans et qu’il est à
craindre que voyant le Roussillon et Rozas nous demeurer par un traité diffé-
rend de celluy du reste de la Cataloigne, ilz n’entrent en de très grands
soupçons, car j’ay remarqué qu’ilz parlent tousjours dans leurs escrits du
Roussillon comme d’une partie de la Cataloigne et affectent partout de ne
faire aucune séparation. On leur peut dire selon mon advis que l’intérest de la
Cataloigne est le seul qui a retardé la paix depuis trois ans que nous sommes
icy; que nous avons fait adroitement proposer toute sorte d’eschanges pour
asseurer cette province au Roy par le traité de paix jusqu’à vouloir faire per-
mutation des droitz de la France sur la Navarre contre ceux de Castille sur la
Cataloigne et à deffaut de cela ayant offert de donner jusqu’à six places
〈inportantes〉 dans la Flandre en eschange de celle que les Castillans occu-
pent dans la Cataloigne, mais que les raisons marquées dans le mémoire, qui
expliquent le grand praejudice que la couronne de Castille recevroit en per-
dant 〈un〉 pays qui luy est si nécessaire pour la communiquation de l’ Espa-
gne avec l’Italie, pour attaquer la France et pour s’en deffendre, sont les mes-
mes qui empeschent ses ministres d’y consentir. Ilz protestent qu’ilz atten-
dront plustost la dernière extrémité que de renoncer jamais aux prétentions
qu’ilz ont sur cette principauté, et les affaires estant réduites au point ou de
continuer inévitablement la guerre ou de conclurre le traité laissant les choses
en l’estat où elles sont présentement. Les progrès des uns d’un costé et l’ ar-
deur demesurée qu’ont les Hollandois de jouir du repos ne nous laissent pas
l’entière liberté de penser à la continuation de la guerre que la France seroit à
l’avenir contrainte de soutenir, non seulement sans estre assistée de la diver-
sion des Provinces-Unies, mais avec quelque apréhension de les voir rangés
dans quelque temps du parti de noz ennemis; que cette pressante nécessité
nous forceant de sortir d’affaire avec l’Espagne en mesme temps que noz
alliez affin de les conserver par ce moyen dans les devoirs de l’alliance et de
s’en praevaloir en une autre ocasion, on ne peut se prometre d’autres condi-
tions que de demeurer de part et d’〈autre〉 en possession de ce qu’on tient
présentement, veu mesme que la situation de Tarragone qui est sur le rivage
de la mer ne permet pas d’en entreprendre le siège avec espérance d’un heu-
reux sucès estant comme impossible d’empescher que la place ne puisse tous-
jours estre secourue.
Cette quaestion estant décidée par la contrainte et par la pure nécessité de
suivre le mouvement de noz alliez, qui depuis le siège de Dunquerq ont pris
de grande jalousie de noz progrès, s’imaginant que nous voulons détruire en-
tièrement la monarchie d’Espagne, nous avons considéré que ne pouvans pas
espérer la renuntiation du roy de Castille aux droits qu’il pra〈e〉tend sur la
Cataloigne qui est néantmoins ce qu’on a acoustumé d’estre fait dans les trai-
tés de paix où les prétentions de part et d’autre doivent estre décidées claire-
ment , il falloit donc nécessairement recourir à la trêve qui laisse ordin〈 aire-
ment 〉 un chacun dans ses droitz et prétentions.
Encor qu’entre de grands monarques il n’y ayt pas beaucoup de distance entre
la paix et une trêve de trente ans, veu que jamais il n’y a eu de paix 〈entre〉 la
France et l’Espagne qui ayt duré si longtemps et qu’une si longue trêve est
ordinairement tenue de la nature d’une paix, nous avons estimé qu’il estoit
avantageux au Roy de faire comprendre dans la paix la plus grande partie de
la principauté qui nous a esté possible, affin que cela servist comme de tiltre
et de praejugé pour y faire entrer plus forcément le reste avec le temps, et que
s’il falloit cy-après venir à quelque traité avec l’Espagne pour ravoir le reste
du pays qu’elle tient dans la Cataloigne et toutes les prétentions qu’elle estime
de garder sur tout le pays, la récompense que nous luy en pourrions donner
ailleurs en fust moindre, pour cet effect nous avons creu à propos de com-
prendre le Roussillon et Rozas dans le traité de paix, et mesme si nous en
fassions pour venir à bout, nous aurions désiré aussy d’y adjouster la ville de
Barcelonne, mais estant la capitale de tout le pays et estant le siège de la sou-
veraineté , nous avons recogneu que les Espagnolz ne se fussent jamais résolus
d’y consentir.
D’ailleurs quand il eust esté possible d’obtenir leur renuntiation pour tout ce
qui demeurera au Roi, tant soubz le tiltre de paix que soubz celluy de la trêve
qui est en effect la mesme chose, ilz eussent aussi praetendu que le Roy eust
renoncé pour jamais à Tarragone, Tortose et aux autres places et pays qu’ilz
occupent en Cataloigne, ce qui eust fait un démembrement de la province que
peut-estre les habitantz n’eussent pas apreuvé, et l’on a creu plus avantageux
pour la couronne de France et pour les Catalans affectionnez de laisser des
prétentions imaginaire à l’Espagne sur toute la province pour conserver les
droitz légitimes qu’on a sur ce qu’elle y possède encor, que d’en faire les re-
nunciations de part et d’autre, à cause qu’au moins au ce moyen nous demeu-
rions en droit et en espérance de recouvrir un jour par quelque eschange ou
autrement les places et pays démembrez et occupez par l’ennemy pour les
réunir au corps de la principauté duquel il n’est pas possible qu’ilz demeurent
longuement séparez.
Peut-estre que ce raisonement estant fait aux principaux et sages du pays,
servira beaucoup à dissiper plusieurs apréhensions qu’ilz pourroient avoir pri-
ses de la négotiation qui se fait icy dont il est comme impossible qu’ilz ne
soient advertis.
Il me semble que nous allons recevoir divers praejudices dans la conclusion
du traité que la praecipitation de Messieurs les Estatz rendra presque inévita-
bles et qui tendent tous insensiblement à nous séparer d’eux et à nous forcer
de recomencer un jour la guerre sans leur assistance.
Premièrement je ne croy pas qu’ilz veuillent garentir 〈la〉 trêve de Cataloi-
gne ny s’obliger de rentrer en gu〈erre〉 en cas qu’elle recomence pour ce
subjet; cela estant, je praevoy que la garentie de la France en〈vers〉 eux sera
bien effective, mais que la leur envers nous ne le sera pas. Le seul avantage
se〈lon〉 mon foyble sentiment que les Espagnolz espèrent de ce traité est de
rompre l’union d’entre la France et les Provinces-Unies, et s’ilz n’en peuvent
venir à bout présentement, leur dessein est d’en mettre les fundementz pour
l’avenir. Je croy certainement que c’est l’intention de quelques-uns des princi-
paux députez de Hollande et qu’ell’a souvent esté mise sur le tapis dans les
conférences secrètes qu’ilz ont eu avec ceux d’Espagne. Nous avons très
grand subjet de croire qu’ilz travaillent de concert à establir les choses en
sorte que si la guerre se recomence cy-après entre la France et l’Espagne, les
Pays-Bas en soient exemptz qui néantmoins est le seul lieu où ilz cognoissent
que nous pouvons faire des conquestes facilement, lesquelles ne sont pas
moins apréhendez par noz amys que par noz ennemis. Les propositions si
souvent avancées que les Provinces-Unies ne sont engagées avec la France que
pour les intérestz des Pays-Bas ont principalement cette visée, et nous avons
recogneu par expérience qu’ilz ne sont pas gents à s’esloigner de leur but ny à
changer aisément leurs maximes.
En second lieu si nous sommes obligés de laisser quelque queue aux affaires
d’Italie, ce que je ne croy pas qu’on puisse éviter, personne n’ayant icy pou-
voir de convenir de la ligue ny de la seureté réelle de Casal qui sont les deux
principaux pointz en toute la négotiation qu’il a à faire pour ce pays-là, il
faudra nécessairement y laisser les choses en suspens pour une anné[e] pen-
dant laquelle on députera des commissaires de part et d’autre pour s’accorder
et cependant relever les places qui nous ont esté cy-devant désignées. Si faute
de tumber d’acord on est obligé de reprendre les armes, je ne croy pas que les
Estatz y veuillent ren〈trer〉 dans la partie. Encor qu’il soit très difficile que
nous fassions la guerre contre le roy catholique en Italie et en Espagne sans
qu’on la fasse aussy dans les Pays-Bas, mais soit qu’ilz ayent envie maintenant
de convenir qu’on ne pourra jam〈ais〉 la recomencer dans les Pays-Bas, quoy
qu’il puisse arriver ailleurs, soit qu’en effet quand elle y recomenceroit de
nostre part, ilz ayent intention secrète de ne s’en mesler pas, soit que l’on
demeure apréhendé quand ilz n’auroient pas aujourd’huy cette intention,
qu’il ne soit en ce temps-là très difficile de les retirer du repos dont ilz jouy-
ront , veu qu’à présent ilz y courent avec tant de praecipitation et que toutes
les obligations contenues dans 〈des〉 alliances les en peuvent avec tant de
peyne empescher, il y a très grand subjet d’〈en〉 croire que voicy la dernière
année qu’ilz seront en guerre avec nous comme noz alliez si toutefois ce
qu’ilz ont fait cette campagne mérite d’estre apellé faire la guerre.
Je ne voy pas pour le présent beaucoup de moyens de remédier à ces deux
inconvénientz, si ce n’est qu’on pust retarder la conclusion de paix partout
jusqu’à ce que les affaires d’Italie et de Cataloigne soient terminez deffinitive-
ment , à quoy il sera difficile de faire consentir Messieurs les Estatz, n’ayant
point treuvé de meilleur expédient pour les tenir en devoir que de leur faire
paroistre que nous sommes disposez à un prompt acomodement, et en effect
leur donnant subjet de croire que nous y portions les affaires, si on ne se
soucioit pas d’estre un jour seul à faire la guerre contre l’Espagne ailleurs
qu’aux Pays-Bas. Les inconvénientz cy-dessus remarqués ne sont pas tant à
craindre, mais si tout l’avantage que nous avons eu dans cette guerre vient
principalement de ce que nous avons joué une partie bien faite, il importe
extrêmement d’éviter, si l’on peut, qu’à l’avenir on ne soit obligé de la jouer
d’une autre façon.
Cela regarde principalement les affaires d’Italie, car pour la Cataloigne je pré-
suppose que les Espagnolz ont intention, la trêve y estant résolue, de traiter
avec nous de cette province et de la ravoir par un eschange; autrement il seroit
malaisé de se persuader qu’ilz eussent une véritable intention d’observer la
paix qui certainement courre fortune à tout moment d’estre troublée par le
subjet de deffiance et autres accidents qui arriveront en Cataloigne qu’il est
presque inpossible de conserver qu’en entretenant une armée, qui est une
〈fo〉rte raison qu’on peut 〈al〉léguer aux Catalans 〈pour〉 les rasseurer
contre 〈le〉 péril qu’ilz craignent, 〈…〉 y adjoustant que le Roy tiendra
〈…〉 de galères et de vaisseaux au port de Barcelone et rendra son particu-
lier d’y faire fleurir le 〈commerce〉 beaucoup plus avantageusement qu’il
n’eust jamais peu faire si cette ville estoit demeurée soubz la domination d’ Es-
pagne , ce qui faira cesser la jalousie qu’elle peut 〈avoir〉 contre Taragone.
Il y a encor une importante considération à faire sur ce qui arrivera du Portu-
gal si la France ne l’assiste puissemment après la paix faite; il ne faut pas
douter qu’il ne soit bientost remis à la couronne d’Espagne, mais si les Pro-
vinces -Unies ne s’en meslent point ou (ce qui seroit plus à craindre) si les
différends qu’elles ont avec le roy de Portugal pour le Brésil les portent à luy
faire la guerre au lieu de l’assister, il faudroit apréhender qu’elles et nous,
prenant si bien un différend parti, ne devinssions insensiblement enn〈emis〉
qui seroit une très mauvaise voye d’observer 〈les〉 traités d’alliance faits
principalement contre le roy d’Espagne comme le principal subjet de toutes
noz craintes. C’est pourquoy il seroit très nécessaire de sçavoir le dessein des
Provinces-Unies touchant le Portugal et les engager par noz instances, s’il est
possible, à le deffendre contre l’Espagne, puisque pour leur complaire et faci-
liter le traité sur ce point nous avons consenti de n’en point parler et nous
sommes contentz de la se〈ule〉 liberté qui nous reste de l’assister.
Je croy qu’il est aussi très nécessaire de convenir clairement et nettement avec
eux de ce qu’ilz praetendent faire après la fin de la trêve en Cataloigne ou en
cas qu’elle soit rompue pendant le temps qu’elle doit durer. Il seroit beaucoup
plus praejudiciable d’attendre que le cas arrive de le faire appliquer que de
sçavoir leur intention 〈maintenant〉 qu’ilz ont besoin de la France pour
consentir à leur traité et pour le garentir, parce que leurs affaires estant faites,
ilz seront bien plus hardys à soutenir qu’ilz ne sont point obligez de prendre
part aux intérests de 〈la〉 Cataloigne, qu’ilz ne le sont dès aujourd’huy que
noz mesmes intérestz font une des principales partz de toute la négotiation. Je
vous escris en confusion, mais Son Eminence a tant de b〈onté〉.
J’ay bien peur que la mauvaise intelligence qui est entre monsieur le vicomte
de Turenne et monsieur de Courval ne fasse perdre Mayence sy la paix ne se
fait promptement. Ce dernier se plaint d’estre en très grande nécessité et hors
de moyen de conserver la place sy on n’y remédie. Je ne doubte pas qu’il n’en
ayt donné advis à la cour, et croy qu’il n’en escript icy que pour se pouvoir
justiffier un jour s’il mésarive de la place.
Les advis de Flandre portent que Dunquerque est aux abois. Il est à craindre
quand il sera pris que les Hollandois ne demandent au Roy la mesme chose
pour cette place qu’ilz avoient obtenu des Espagnolz, à sçavoir que l’on sera
obligé d’y charger les marchandises autant qu’elles le sont du costé de l’ Es-
caut , à quoy il seroit très praejudiciable de s’engager. J’ay creu d’en devoir
advertir par avance Son Eminence affin qu’elle n’y soit pas surprise.
Je voy bien que pour avoir voulu garentir monsieur Chanud du tort qu’on luy
vouloit faire je contredis une lettre que monsieur d’Avaux vouloit escrire avec
un peu trop d’ostentation, je me suis attiré de nouveau sa hayne. Il y a deux
jours qu’il travaille en particulier et ne paroist point. Je crains bien qu’il ne
médite quelque 〈…〉 contre moy. J’ay mesme remarqué dans la dépesche
commune qu’on parle d’une relation de monsieur de Saint-Romain que je
n’ay point veue, c’est sans doute pour faire voir que l’envoy de monsieur de
Marsilly en Suède eust esté fort nécessaire. Je suis résolu à l’avenir de ne résis-
ter plus à tout ce que l’on voudra faire et me prometz de la bonté de Son
Eminence qu’elle ne me rendra pas re[s]ponsable de ce qui arrivera contre
mon advis que je me contenteray de dire avec douceur et pour le laisser faire
que si ce mauvais raisonement vienne à sa cognoissance, elle excusera l’ acca-
blement où nous sommes qui ne me permet presque pas de relire ce que je
metz sur le papier.