Acta Pacis Westphalicae II B 2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 2: 1645 / Franz Bosbach unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und unter Mithilfe von Rita Bohlen
182. Servien an Lionne Münster 1645 August 5
–/ 182 /–
Münster 1645 August 5
Eigenhändiges Konzept: AE , CP All. 52 fol. 227–235 = Druckvorlage S. 570 Zeile 27 – S. 571
Zeile 6; Teil eines Reinkonzeptes: AE , CP All. 52 fol. 221–226 = Druckvorlage S. 571 ab
Zeile 7 .
Eintreten Chabods für Bellezia. Vermutungen über die Entsendung Rortés nach Stockholm,
Bemühungen um die Ablösung La Thuilleries, Empfehlung de La Cours. Gute Zusammenarbeit
mit Longueville. Gute Erfolgsaussichten bei den Verhandlungen: Bereitschaft der Spanier zu einem Abkommen,
vor allem zu einem Waffenstillstand; Wirkung der Türkengefahr auf die Friedensbereitschaft,
günstige Gelegenheit zu einem Friedensschluß nach den Bedingungen Frankreichs; ähnliches
Verhalten der Spanier in der Vergangenheit; Vorschlag einer erneuten Erklärung der Absicht
auf Einbehaltung der Eroberungen und einer Fristsetzung für die spanische Antwort, Erfolg der
Schweden mit diesem Verfahren in den Verhandlungen mit Dänemark; Vorteile einer
Weiterführung des Krieges. Eventuelle Bereitschaft Spaniens zu einem Abkommen ohne
gleichzeitige Regelung der Probleme im Reich, Befürwortung eines solchen Abschlusses für den
Notfall zur Konzentration der militärischen Kräfte im Reich als Gegengewicht gegen Schwe-
den , Präferenz für einen allgemeinen Friedensschluß. Eventueller Friedensschluß mit Spanien
für Italien und die Niederlande und langjähriger Waffenstillstand für Katalonien und
Portugal, Tausch der spanischen Niederlande in einem Heiratsprojekt gegen Katalonien, gegen
die Aufgabe der Unterstützung Portugals und gegen Türkenhilfe. Berücksichtigung der
Interessen der Verbündeten in den Verhandlungen: keine Verpflichtung zur Rücksicht auf
Portugal, Savoyen, Hessen-Kassel und Siebenbürgen; Verpflichtung zur Rücksicht auf die
Generalstaaten und Schweden, eventuell mangelnde Friedensbereitschaft dieser Mächte, Nei-
gung zur Weiterführung des Krieges bei Schweden angesichts der gegenwärtigen Erfolge,
Widerstand von Seeland und des Oraniers gegen einen Friedensschluß der Generalstaaten,
Furcht des Prinzen von Oranien vor den Ansprüchen Longuevilles auf das Fürstentum Orange.
Drohende Stärkung der protestantischen Partei bei der Fortführung des Krieges, Vorschlag der
Vergrößerung der Armee im Reich zur Verstärkung der französischen Position; Vergrößerung
der Truppen durch katholische Soldaten als Gegengewicht zu den Weimarer Truppen. Haltung
der Mediatoren: kein Verlaß auf eine freundliche Einstellung Chigis trotz seiner Querelen mit
der Kurie, feindselige Haltung Contarinis. Ehrliches Bemühen der bayerischen Gesandten um
den Friedensschluß, keine Aussicht auf ein Separatabkommen mit ihnen. Brandenburgs
Neigung zu Schweden.
Monsieur l’ambassadeur de Savoye désireroit bien qu’on pust obtenir de
Son Eminence la grâce de Belletia comme d’un costé il craint que toute
cette affaire ne tumbe sur luy dans la cour de Piémont. Il espère que cest
homme ayant esté mortifié comme il a esté sera désormais plus sage et plus
modéré qu’un autre qu’on luy pourroit envoyer de Piémont lequel peut-
estre on voudroit luy associer et le mettre en condition esgale à la sienne. Il
m’a témoigné néantmoins que s’il croyoit que cette pensée dépleust à Son
Eminence il ne voudroit pas l’avoir. Pour moy je croy qu’il y a eu plus
d’imprudence et de présumption dans la conduite de Belletia que de malice
car monsieur de Saint Maurice m’a juré qu’il n’y a rien dans leurs
instructions touchant Pignerol qui ne tende à faire exéquuter le traité de
Quérasque.
Monsieur de Rorté est party d’icy avec espérance d’estre renvoyé en Suède
je croy mesme qu’il a obtenu quelque lettre de monsieur de Longueville à la
prière de monsieur d’Avaux. Si cela arrivoit je vous conjure de me donner
moyen auparavant de me dégager honestement des parolles que j’ay
données à monsieur Oxestiern de la part de Son Eminence. Le pauvre
monsieur de La Tuilerie a une très grande apréhension du voyage de Suède.
Je vous conjure que les siens cognoissent que je vous ay escrit affectionné-
ment pour l’en faire déclarer s’il voyoit un ambassadeur ordinaire nommé
qui luy peut faire espérer que son séjour y sera court. Ich schlage de La Cour
für die Stelle in Stockholm vor.
Je ne vous escris plus d’affaires voyant que monsieur de Longueville prend
plaisir d’en entretenir Son Eminence. Je luy dis avec liberté toutes mes
pensées et je voy qu’il l’a bien agréable. Je ne doute point qu’il ne soit desjà
désabusé de la première opinion qu’il avoit de monsieur d’Avaux, mais je
ne croy pas quoy que je pusse jamais faire qu’il veuille rendre témoignage
en ma faveur qui puisse faire préjudice à monsieur d’Avaux.
Pourveu que nous ayons de la patience, de la retenue et de la fermeté l’estat
présent des affaires s’il ne change point nous donnera moyen de faire icy
tout ce que nous vouldrons pour l’advantage de la France.
Les Espangolz tesmoignent estre disposez à faire les traictez qu’on vouldra
de paix, de trêve longue ou courte ou de suspension, mais que de chacun de
ces traictez les conditions en doibvent estre différentes . Ce discours est si
public par icy qu’il y a lieu de craindre qu’ilz ne l’ayent plustost faict par
ostentation et pour faire esclatter leur bonne disposition à l’ accommode-
ment que pour en avoir l’intention. Néantmoin, beaucoup de circonstances
font croire qu’appréhendant les longueurs, difficultés et désadvantages
qu’ilz rencontreroient en traictant la paix, ilz inclinent en effect à la trêve et
que c’est leur principal but, mais pour moy si j’en estois cru puisqu’ilz nous
ont faict renoncer par des traictez irrévocables lorsqu’ilz ont esté les plus
fortz, nous en prendrions aujourd’huy nostre revenche n’y ayant pas
apparence que la conjuncture soit jamais sy favorable que maintenant pour
acquérir à la France un tiltre légitime pour asseurer ses conquestes et
destruire ceux qu’ilz ont acquis aultresfois contre nous. La diversion du
Turc où grâces à Dieu nous n’avons point de part, ne laisse pas de nous
mettre à couvert de la mauvaise volonté de tous les princes d’Italie et en
menaceant de tous costez les Estatz de noz ennemis comme les plus
proches les réduire à se contenter du traicté que nous vouldrons leur
donner puisque c’est un fléau que Dieu leur envoye, il semble que nous
aurions très grand tort sy nous n’en faisions pas nostre proffict puisque si
noz ennemis avoient le mesme advantage sur nous ilz ne le perdroient pas
non seulement pour conserver ce qu’ilz auroient conquis auparavant mais
pour faire des demandes nouvelles comm’en la prison de Francois I où ilz
ne se contentèrent pas des Estatz qui estoient contestez par les armes, mais
nous firent renoncer à la souveraineté de Flandres et d’Artois
toient point en contestation.
Si la guerre du Turc nous faisoit faire des demandes nouvelles on pourroit
dire que nous voulons proffiter du malheur public, mais on ne sçauroit rien
désirer de nous de plus favorable que l’offre que nous faisons de conclurre
la paix en quinze jours en demeurant chacun en l’estat que nous sommes,
puisque quand le Turc ne s’en mesleroit pas noz ennemis ne sont pas en
estat de nous faire rien faire de plus par les armes. Je vouldrois donc qu’on
se tînt ferme à cette déclaration qui est trouvée juste de toutes les personnes
désintéressées et qu’on déclarast nettement aux Espagnolz qu’on ne s’en
relaschera jamais et que mesme on leur tesmoignast de voulloir une
responce cathégoricque dans un certain temps affin de n’amuser pas plus
longtemps le monde. Nous avons veu que la fermeté des Suédois et les
démonstrations qu’ilz ont faictes de voulloir rompre le traicté avec les
Danois ont obligé ceux-cy d’accorder aux autres ce qu’ilz ont voulu. Je
passe bien plus avant et croy’que sy l’on a de l’argent en France il vauldroit
mieux continuer la guerre estrangère encor deux ou trois années que de
faire une paix laquelle à la vérité est désirée de tout le monde, mais qui tost
ou tard nous jettera dans la guerre civille. Au moins ne vouldrois-je par
l’avoir acheptée pas la restitution d’une seulle place. Je sçay bien que je
parle contre mon employ, mais il est plus honneste à un homme de bien de
dire ce qu’il croid avantageux pour son maistre et pour sa patrie que de
chercher la glorie d’avoir mis son sein dans un traicté.
Pourveu qu’il n’arrive point d’eschec à l’armée de monsieur d’Anguien et
qu’elle puisse prendre des quartiers deçà le Rhin, nous ferons sans peine
tout ce qui nous sera ordonné avec l’Empire et avec l’Espagne. Je croy
mesme que nous aurons à choisir de faire un traicté avec celluy des deux
qui nous sera le plus commode, car comme les estatz de l’Empire déclarent
que sy les Espagnolz ne se veullent mettre à la raison ilz les abbandonne-
ront et mesmes traicteront la paix sans l’Empereur s’il ne s’y veult disposer,
j’ay quelque oppinion que les Espagnolz pour n’estre pas abbandonnez
essayeront de les prévenir et de sortir d’affaires avec nous sans l’Empire. Le
meilleur est bien comme il nous est ordonné de faire la guerre sy l’on peult
de tous costez pour une paix généralle, mais s’il falloit choisir de la faire
avec l’un des deux sans l’aultre selon mon foible sens je croirois plus
advantageux à la France de traicter avec l’Espagne sans l’Empire et
penserois en pouvoir donner des raisons assez concluantes à la charge
tousjours de ne rien rendre. Car j’estime qu’il sera plus court et plus facille
de demeurer constamment sur la résolution de conserver tout que sy en
donnant l’espérance aux Espagnolz de nous entamer nous portions la
négotiation à contester sur le plus ou sur le moins. Je suis tellement de
l’oppinion que je viens de dire que je croy que cette résolution de traicter
avec l’Espagne sans l’Empire peult servir de remède à la mauvaise humeur
que pourroient prendre les Suédois de continuer la guerre dans l’Allemagne
où nous pourrions bientost nous mettre en estat sy nous estions débarrassez
de la guerre d’Espagne, que les Suédois ne pourroient pas de [!] nous y
donner la loy ny opprimer injustement les catholicques comme peult-estre
ce seroit enfin leur dessein s’il leur arivoit de plus grandes prospéritez dans
l’Allemagne. Pour conclusion, selon mon foible sens il fauldroit tenir bon à
ne vouloir présentement faire que la paix avec l’Espagne aussy bien qu’avec
l’Empire et dans la paix de ne vouloir accorder aultres conditions que celles
que nous avons proposées sans se relascher en aulcune façon, peult-estre
mesme n’y auroit-il point de mal de déclarer aux médiateurs franchement
que sy les Espagnolz ne la veullent de cette sorte il n’est point nécessaire de
presser les Hollandois de venir icy et que nous n’y demeurerons que pour
terminer les affaires d’Allemagne.
Tout ce qu’on pourroit modérer dans nostre proposition seroit de faire
seulement la paix pour l’Italie et les Pays-Bas et faire une trêve de dix ou
douze années pour les affaires d’Espagne, assavoir pour la Cathalogne et le
Portugal, ce qui nous donneroit moyen de prendre noz résolutions à loisir
pour ces deux intérestz et peult-estre pendant la trêve de faire une eschange
de la Cathalongne avec ce que le roy d’Espagne possède dans les Pays-Bas
faisant en mesme temps le mariage de l’infante avec nostre Majesté. Mais il
fault considérer que la moindre ouverture de mariage avec l’Espagne seroit
dangereuse avant la conclusion du traicté parce que noz alliez en pren-
droient jalousie et peult-estre en suite des résolutions précipitées de nous
prévenir et de sortir d’affaires sans nous. Je ne doubte point que sy nous
pouvons maintenant sortir d’affaires avec les Espagnolz de cette sorte l’on
ne pust aisément cy-après en traictant un mariage avec eux les engager de
nous céder les Pays-Bas pour ravoir la Cathalogne, pour nous faire
abandonner le Portugal et pour obtenir quelque assistance contre le Turck
laquelle je croy bien qu’il fauldra donner enfin sy la guerre qu’il a
commencée continue, mais je vouldrois que nostre secours nous vallust
quelque chose ailleurs. Car il est certain que les Espagnolz nous traicte-
roient de cette sorte s’ilz estoient en nostre place et que les Vénitiens qui
sont les premiers attacquez n’ont pas dans leur âme tant d’affection pour
nous qu’ilz mentent que pour l’amour d’eulx nous irritions de gayeté de
coeur un sy puissant ennemy.
Tout ce raisonnement présupose que nos affaires sont en bon estat, aussy
est-il très véritable par la grâce de Dieu et que le lieu d’où nous avons le
moins à craindre est du costé de noz ennemis, mais comme la partie que
nous jouons est bien faicte pour nous puisque nous sommes cinq contre un
et que pour faire heureusement la guerre contre un si puissant ennemy que
la maison d’Austriche il a fallu faire diverses confoedérations, elles sont
bien advantageuses tandis que la guerre durera, mais quand on vient à un
traicté les diverses prétentions et intérestz des uns et des autres donnent
beaucoup de peine, voycy donc quelques inconvéniens qu’il fault considé-
rer parmy noz alliez, noz amis et les indifférens pour y remédier sy l’on
peult: Parmy les alliez de la France Portugal, Savoye et Hesse sont obligez
de se conformer à ce qu’on vouldra. C’est pourquoy on ne s’y arreste pas
non plus qu’à la confoedération nouvellement faicte avec le prince de
Transilvanie dont les conditions n’obligent pas trop avant. Mais celles de
Suède et de Hollande ne laissent pas la liberté de rien faire sans leur
consentement sy bien que l’une ne voulant que la paix et l’aultre que la
trêve, il est bien malaisé de s’accommoder à ces deux différens desseins, on
avoit bien proposé pour les concilier de faire la paix avec l’Empire et la
trêve avec l’Espagne, mais il fauldroit premièrement estre bien asseuré que
la Suède et les Provinces-Unies veuillent effectivement traicter, car il y en a
beaucoup qui croyent qu’elles ne veulent ny paix ny trêve quelque
semblant qu’elles facent du contraire.
La Suède enflée de l’advantageux traicté qu’elle vient de faire avec les
Dannois et de l’inclination que tous les protestants d’Allemagne ont pour
elle aura peult-estre plus d’envie de continuer la guerre dans l’Allemagne
que de conclurre la paix et comme elle songe plus à son agrandissement
qu’au bien public au lieu d’estre touchée du péril qui menace la chrestienté
par l’invasion du Turc, elle croira que c’est une conjuncture favorable pour
pousser ses conquestes plus avant et pour donner un establissement solide à
sa grandeur.
Parmy les Provinces-Unies il y en a qui souhaittent ardemment le repos et
particulièrement en Hollande qui est la plus puissante. Il seroit mesme à
craindre sy elle estoit la maistresse qu’elle ne fist pas grand scrupule de
traicter sans nous, mais la Zélande y apportant des obstacles, ceux qui
sçavent par quel motif elle a retardé sy longtemps aultresfois la première
trefve ont subjet de croire que la mesme cause la faict agir aujourd’huy et
craignent bien que monsieur le prince d’Orange ne s’oppose soubz main
aux conseilz pacificques de crainte que n’estant plus nécessaire quand ces
provinces seront dans le repos elles ne prennent envie de diminuer son
authorité et peult-estre mesme de se passer entièrement de luy. Il y a une
aultre appréhention qui le touche que monsieur de Longueville ne veuille
remuer dans cette assemblée ses prétentions sur la principaulté d’Orange
sçay de bon lieu qu’il a cette crainte laquelle quoyque la moindre ne laisse
pas d’augmenter celle qu’il a d’ailleurs. C’est pourquoy il seroit très
nécessaire de luy rasseurer l’esprit pour Orange affin que l’oppinion qu’il
pourroit prendre que l’on protégera monsieur de Longueville dans sa
prétention ne l’esloigne pas de l’affection de la France et que s’il traverse le
traicté ce ne soit pas par animosité contre nous laquelle le feroit mal agir
aussy dans la guerre. Sy ce jugement que plusieurs personnes censées font
des inclinations de la Suède et de monsieur le prince d’Orange est véritable
on doibt appréhender avec très grande raison d’estre icy longtemps sans
rien faire puisqu’il ne sera pas malaisé aux uns et aux aultres de treuver des
prétextes pour esloigner la conclusion du traicté et rendre la négotiation
immortelle.
Ce qui est le plus à craindre est que la durée de la guerre ne rende les
Suédois trop puissans dans les affaires d’Allemagne et que les protestans
ausquelz on a un peu trop visiblement faict cognoistre qu’ilz ne doibvent
rien espérer de nous dans l’intérest le plus sensible qui est celluy de la
religion ne s’attachent entièrement à eux sans nous considérer beaucoup.
L’unicque moyen de nous garentir de ce préjudice est de soustenir la guerre
en Allemagne tandis qu’elle durera avec de plus grandes forces que celles
que nous y avons eues jusqu’à présent affin qu’elles treuvent plus de facilité
à subsister et prendre pied deçà le Rhin, qu’elles nous donnent moyens de
soulager le pays que nous prétendons de conserver par le traicté et ce qui
est de plus avantageux qu’elles nous rendent plus considérables à noz amis
et à noz ennemis. Lorsque les Allemands et les Suédois nous verront en cet
estat ilz ne prendront pas sy aisément la pensée de nous donner la loy ny de
rien faire qui nous puisse déplaire et seront contrainctz de s’accommoder à
noz conseilz tant pour les desseins de la guerre que pour ceux de la paix.
L’expérience faict veoir tous les jours que les troupes françoises ne sont pas
propres pour la guerre d’Allemagne et l’exemple des Suédois nous apprend
que pour y réussir il fault avoir des troupes du pays. Celles qu’on
appellent [!] Weymariennes sont presque destruictes et peult-estre n’est-ce
pas un des plus grands malheurs qui pust ariver non seulement parce que
elles n’obéissent qu’à leur fantaisie et vivent sans discipline, mais parce
qu’elles sont deppendantes du party protestant et qu’en cas qu’il se formast
une guerre de religion comme les affaires semblent y pencher sy nous n’y
remédions, elles ne demeureroient pas dans le service de la France, sy elles
estoient obligées par conscience ou par raison d’Estat de se séparer des
protestans ou bien de former un tiers party. Nous sçavons que les
protestans ont plus regretté la perte de Margetain pour l’espérance qu’ilz
avoient aux chefs qui y sont demeurez que pour l’amour de nous, craignant
beaucoup plus qu’ilz ne désirent noz prospéritez c’est pourquoy dans la
nessésité qu’il y a de lever des estrangers il seroit à propos de préférer les
catholicques qui se présentent aux aultres affin que cy-après l’armée
d’Allemagne s’il est possible soit my-partie.
La disposition des médiateurs n’est pas beaucoup meilleure que celle de noz
alliez et de nostre armée. Il y a cette différence que ceux-là souhaittent
ardemment la paix et que ceux-cy en ont peult-estre la pensée bien
esloignée. Sy le nonce n’estoit point violenté par l’attachement du pape
avec les Espagnolz je croy certainement qu’il auroit plus d’inclination pour
la France que son collègue, les deux dernières fois que je l’ay veu il m’a
voulu persuader qu’il avoit rompu tout commerce avec le cardinal Penzirol-
le et m’a faict cognoistre par le reste de ses discours (quoyque fort
discrettement) qu’il n’est pas satisfaict du pape et qu’il n’a pas subjet
d’espérer aulcun avancement pendant ce pontificat, en effect depuis qu’il
est icy on ne luy a pas seulement envoyé un bref pour le continuer dans son
employ, mais comme il est très retenu et qu’en toutes les occasions
importantes il peult estre bridé par les ordres de Sa Sainteté, je ne sçay s’il y
a lieu de s’en promettre quelque véritable assistance. Quant à Contarini, je
n’avois point voulu adjouster foy aux diverses conjectures qui me font
croire que dans son coeur il n’a point de bonne volonté pour nous jusqu’à
ce que divers advis nous ont appris que toutes ses lettres sont remplyes des
jugemens qu’il fait contre nous et qu’il n’a point de plus grand plaisir que
nous descrier en jettant sur les François le blasme de tout ce qui ne se fait
pas à son gré. C’est un homme présomptueux et amoureux de ses oppinions
qu’il s’émancipe de dire trop librement pour un médiateur et qui ne peult
souffrir qu’on luy résiste. Il est bien à craindre qu’il n’ayt donné de très
mauvaises impressions à sa République qui l’eussent peu porter à des
résolutions bien esloignées du début de la médiation sy cette nouvelle
guerre du Turc ne luy eust donné de l’occupation. Je croy certainement que
sans cela nous eussions veu bientost une ligue des princes d’Italie contre la
France et que c’ettoit sans doubte pour les engager dans ce dessein que le
pape a pris tant de soin de les réunir à luy en les obligeant tous. Contarini
néantmoins tasche de se racommoder avec nous en apparence, il n’y a que
quatre jours qu’il me parla fort à la louange de Son Eminence et qu’il me
pria de luy faire venir son portraict. Je vous suplie d’en parler à Son
Eminence aussy bien il y a longtemps que je vous l’avois demandé pour
moy.
Les députez de Bavière sont ceux qui agissent le mieux dans les affaires
publicques et pour avancer la paix généralle. Leur oppinion est qu’il la fault
faire si l’on peult, mais que sy les Espagnolz se rendent trop difficiles il la
fault faire avec l’Empereur et l’Empire sans eulx et que sy l’Empereur la
refuse, les estatz ou le forceront de la faire ou la feront avec les deux
couronnes sans luy. Ilz nous ont faict cette déclaration fort librement que
nous avons treuvé très bonne sans toutesfois nous explicquer à eux du party
que nous avons intention de prendre. Ilz ne paroissent pas moins bien
disposez sur les aultres difficultez plus importantes du traicté et ont
eux-mesme ouvert des expédiens assez raisonnables pour terminer les
différends qui concernent la religion où ilz ne paroissent pas si scrupuleux
que monsieur d’Avaux. Aussy vont-ilz plus au solide qu’à l’ostentation et il
y a subjet d’espérer que dans noz intérestz particuliers leur maistre sera
celluy que nous aurons le plus favorable affin d’estre assisté de la France à
conserver la dignité électoralle dans sa maison. A la vérité, pour les offres
cy-devant faictes par le confesseur ilz n’en parlent plus et je croy certaine-
ment que leur maistre ne fera jamais rien traicter en ce lieu de cette nature
puisque son intention estoit de faire un traicté fort secret et qu’il ne vouloit
pas que l’Empereur ny les Suédois en eussent cognoissance, ce qu’il ne croid
pas se pouvoir faire icy, c’est pourquoy ayant esté renvoyé il n’en fault plus
parler.
Les députez de Brandebourg sont aussy assez bien disposez et se portent
très bien en toutes les délibérations publicques, mais oultre que l’intérest de
la religion est le dominant dans leur esprit, l’espérance du mariage de leur
maistre avec la reyne de Suède leur faict considérer dans leur coeur les
Suédois plus que nous bien que nous n’ayons aulcun subjet de nous en
plaindre.