Acta Pacis Westphalicae II B 3,1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 3, 1. Teil: 1645 - 1646 / Elke Jarnut und Rita Bohlen unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy, mit einer Einleitung und einem Anhang von Franz Bosbach
134. d’Avaux an Mazarin Münster 1646 Februar 24
Münster 1646 Februar 24
Ausfertigung: AE , CP All. 59 fol. 278–283 = Druckvorlage
434–437, ohne PS; AE , CP All. 75 fol. 302–310.
Zufriedenstellender Ausgang der Reise nach Osnabrück, Versöhnungsbereitschaft der Schweden.
Umgang des schwedischen mit dem kaiserlichen Gesandtschaftssekretär. Hoffnung Trauttmans-
dorffs auf Einigung mit den Schweden. Drängen der Bayern auf Verständigung mit Frankreich.
Pommernfrage. Haltung der Kaiserlichen in der Lothringen- und Elsaßfrage. Meinung d’Avaux’
zu dem spanischen Angebot: Rat, darauf einzugehen und den Spaniern einige Zugeständnisse zu
machen. PS: Beteuerungen Peñarandas hinsichtlich der Aufrichtigkeit des spanischen Angebots.
Tout s’est fort bien passé au voiage que j’ay fait à Osnabrug, y aiant trouvé les
ambassadeurs de Suède en si bonne disposition de se raccommoder avec nous
qu’il n’a fallu que se présenter pour avoir contentement. Il y en aura cy-jointe
une relation particulière, à laquelle il manque encores quelque chose dont je
rendray compte par le prochain ordinaire . Il ne se peut rien adjouster aux
promesses qu’ils ont faittes de maintenir inviolablement l’alliance, et à la sin-
cérité qui a paru en leur conduitte tant en général qu’en particulier. Monsieur
Salvius m’a fait voir dans les dernières despêches de Suède qu’ils ont receu
ordre exprès d’éviter soigneusement de nous donner en aucune fasson «spe-
ciem separationis»; ces deux motz latins sont parmy les suédois comme ils
font assés souvent. Monsieur Oxenstiern m’a fait aussi des visites particulières
et parlé avec beaucoup d’ouverture. Il y a longtemps que je ne l’ay veu en si
bonne humeur. Il estoit bien content d’une lettre de Vostre Eminence sur le
sujet de la grâce que la reyne de Suède a faitte à monsieur son père . Je ne
laissay pas tomber cella à terre.
|:Il me desplaist seulement que le sieur Melonius secrétaire de l’ambassade de
Suède se trouve de fois à autres chez Peschevitz avec le secrétaire du comte de
Trautmansdorff:|. Je descouvris cella peu d’heures avant partir d’Osnabrug
et n’ay pas eu le moien de m’en esclaircir suffisamment; j’en ay averti mon-
sieur de La Barde |:qui les fera observer de près:|. L’on m’a dit pourtant que
|:monsieur Oxenstiern ne peut souffrir ledit Peschevitz et qu’il le traitte
d’espion:|.
|:Je suis plus en peine de ce que j’ay appris icy:| à mon retour et qui est très
asseuré. C’est que |:le comte de Trautmansdorff pressé et quasi violenté par
les Bavarois d’avancer la paix:| et de leur dire ce qu’ils peuvent mander à
|:leur maistre d’un séjour inutile de deux mois qu’il a fait à Osnabrug, il a
répliqué n’avoir pas perdu ces deux mois, mais qu’il n’est pas obligé de s’en
expliquer avant le temps:|. Cella se rapporte à ce que |:l’Empereur a dit de sa
propre bouche à l’ambassadeur de Venise:| que Trautmansdorff luy donne
bonne espérance d’un prompt accommodement de l’article qui touche |:la
satisfaction de la couronne de Suède:|. L’un et l’autre avis ne va pas à |:un
traitté séparé, et je n’ay rien veu à Osnabrug qui en puisse laisser aucun doute.
Mais il pourroit estre que les plénipotentiaires de Suède ne sont pas marris de
mettre premièrement à couvert l’intérest de laditte couronne:|, auquel cas
nous en recevrions |:préjudice sur le plus ou le moins de nostre satisfaction:|.
Vostre Eminence a grande raison de dire que |:encores que leur conduitte en
nostre endroit ne soit pas si franche ny si ouverte que la nostre envers eux, il
faut cultiver soigneusement ce qu’il peut y avoir de bon:|. C’est ce que j’ay
fait pendant le temps que j’ay esté avec eux, et il arriva très à propos que je
receus lors la despêche de Vostre Eminence du 3 e de ce mois qui m’instruit
amplement sur ce sujet.
Il n’est pas croiable Monseigneur combien instamment et efficacement |:le
duc de Bavières escrit à Trautmansdorff par tous les ordinaires jusques à le
menacer de prendre d’autres résolutions s’il ne haste davantage les affaires en
traittant avec nous de la satisfaction de la France. Ses ambassadeurs pressent
icy la mesme chose dans le conseil des estatz de l’Empire et disent libre-
ment:| qu’il ne faut point espérer de paix sans régler ce point à nostre
contentement. Mais j’oubliois de dire à Vostre Eminence que |:ledit duc a
mandé à Trautmansdorff qu’il ne doit pas se rebuter de nostre prétention et
que nous avons ordre de nous en relascher:|.
Les Brandeburgiens déclarent hautement qu’ils ne consentiront jamais que la
Poméranie demeure aux Suédois. Monsieur Salvius m’a dit sur ce propos: «Je
vois pourtant bien que |:si nous nous voulions contenter de l’une des deux
Poméranies et de Wismar:|, on s’accommoderoit.» Je luy ay demandé s’il ne
croioit pas qu’on pust porter la Suède à s’en contenter; il a respondu: «C’est
bien peu, c’est bien peu.»
J’ay appris que le comte de Trautmansdorff parlant l’autre jour à un certain
ecclésiasticque d’Osnabrug qui a familiarité avec luy, et se plaignant de nostre
prétention sur l’Alsace, avoit dit en secouant la teste:|:«Je ne suis pas venu icy
pour donner le nostre pour celuy d’autruy, on le peut laisser passer»:|. Ce qui
a esté expliqué |:pour la Lorraine et qu’il est prest de nous la laisser:|.
Quelques députés des princes de l’Empire m’ont averti qu’il estoit venu avis
de la Haute-Allemagne qu’on avoit mis en délibération à Vienne et mesmes à
Munich de donner l’Alsace au duc de Bavières au lieu du païs d’Ou[t]re-Ens
qui luy est engagé, au cas qu’il soit obligé de restituer le Haut-Palatinat. Ce
voisin nous seroit moins incommode qu’un prince de la maison d’Austriche,
mais il vaut encores mieux que le païs demeure au roy.
Le comte de Trautmansdorff a dit à monsieur Salvius que cette prétention est
injuste et impratticable, et luy en a parlé de sorte que |:les ambassadeurs de
Suède tesmoignent croire que nous y rencontrerons de grandes difficultez:|.
Il me semble que cette opinion |:est aussy fondée sur le désir qu’ilz ont de
voir plustost agrandir la France partout ailleurs qu’en Allemagne:|.
Il ne m’appartient pas Monseigneur de donner conseil à mon maistre, bien
moins lorsqu’il est de vostre force et dans l’élévation d’esprit où vous estes. Je
me contenteray tousjours de rendre compte à Vostre Eminence de ce qui se
passera et d’exécuter ses ordres au mieux qu’il me sera possible. Mais d’autant
qu’il a esté dit icy entre nous que ce soin ne suffit pas, et que Vostre Emi-
nence auroit bien agréable que chacun luy escrivist son sentiment sur la pro-
position des Espagnolz, j’ose luy présenter humblement le mien. Je le fais
Monseigneur par une pure déférence à l’opinion de plus sage que moy, et avec
une entière soumission a vostre censure.
Il me semble que |:c’est faire honneur à la Reyne et service au Roy de recevoir
l’offre du roy d’Espagne comme si elle valloit:| beaucoup; de tesmoigner
qu’on |:croit qu’il y procède sincèrement:| et qu’il se veut rendre à la raison,
|:et que pour les mesmes:| motifz de l’invasion du Turc et autres semblables
qu’il dit avoir eus de se sousmettre au jugement de la Reyne, |:Sa Majesté veut
faire aussy quelque chose de son costé:|; bref de |:publier partout qu’après en
avoir délibéré solennellement dans le conseil:| l’on y a pris une résolution qui
|:marque bien l’estime qu’on en fait:|. De cette sorte la parole du roy d’Espa-
gne se trouvera plus engagée, les bonnes intentions de la Reyne plus justifiées,
et l’artifice des ennemis éludé. Car ou ilz accepteront les conditions que Sa
Majesté leur présentera |:en se relaschant un peu de celles que nous préten-
dons:|, et en ce cas l’on aura paix qui est le plus grand bien qui puisse arriver
aujourd’huy à la chrestienté et par la voie la plus glorieuse qui ayt jamais esté
tenue, et la France en aura directement toute l’obligation à la Reyne et à son
principal ministre. |:Ou bien si cette modération ne restablit pas le repos pu-
blic, elle produira de très bons effetz tant envers les peuples:| qui cognestront
alors clairement le désir qu’on a |:de les soulager:|, et seront les premiers à
justifier le gouvernement présent, et à contribuer aux frais d’une guerre qu’ils
jugeront eux-mesmes nécessaire, comme encores envers les alliez, les média-
teurs, et toute l’assemblée de Munster et d’Osnaburg |:qui n’auroit plus sujet
d’exagérer l’excedz de noz demandes et de douter de nostre disposition à la
paix:|. Au contraire les médiateurs seront indignés d’avoir presté leur créance
et leur ministère à une offre captieuse et de se voir ainsy frustrés de l’espéran-
ce qu’ils en ont prise et donnée sur un tel fondement, aians mesmes usé de ces
termes lorsqu’ils nous l’apportèrent: «Haec dies quam fecit Dominus etc. »
Nous tirerons un autre avantage de cette proposition du roy d’Espagne |:si
l’on monstre d’en faire cas:|. Elle ouvrira le chemin à la négotiation de la
paix; elle nous |:fera considérer de Messieurs les Estatz et des Suédois qui ont
tous creu jusqu’à présent pouvoir diriger les affaires à leur volonté:|; desjà
mesmes |:le comte de Trautmansdorff a pris résolution de venir icy et de
traitter avec nous:|, car son maistre ne craint pas moins que |:le roy d’Espa-
gne de demeurer seul en guerre:|. Enfin elle |:fera avancer les Impériaux et
nous rendra noz alliez plus commodes:|.
|:La fermeté dont nous avons usé depuis deux ans a esté fort utile:|, mais
après avoir produit son effet aiant contraint le roy d’Espagne de demander la
paix à la Reyne, il est à croire que |:si Sa Majesté luy tient la mesme rigueur
que nous:| il s’adressera à tous les |:autres princes et Estatz de l’Europe pour
exciter du blasme et des jalousies contre la France:|, et qu’une telle response
de Sa Majesté |:luy en donne plus de prétexte qu’il n’en a eu jusques à pré-
sent:|.
D’ailleurs ce seroit |:ayder à l’artifice des Espagnolz et au but qu’ilz se sont
proposé, qui est:| sans doute de partager |:le conseil du Roy sur cette offre et
de jetter un sujet de rumeur et de mescontentement parmy le peuple si elle est
rebutée:|.
Quand nous fusmes à La Haye il y a deux ans nous ne pusmes persuader
monsieur le prince d’Oranges que ce fust tout de bon que |:la France voulust
faire la paix sans restituer aucune chose aux Espagnolz:|. Et comme nous
disions vouloir |:traitter cette fois à la hollandoise:|, il répliqua que cella se-
roit bon |:en faisant une trêve comme eux, mais que jamais le roy d’Espagne
ne consentiroit que ce fust une condition de paix:|.
Icy les ambassadeurs de Messieurs les Estatz |:se prennent à rire autant de fois
que nous leur déclarons nostre prétention. Nul d’entre eux ne croit que l’on y
doive persister. Ceux de Suède en parlent de la mesme sorte. Les Bavarrois
mesmes qui font bon marché du roy d’Espagne disent qu’il luy est impossible
d’entendre à la paix tant que les François seront en Catalongne:|. Enfin |:
l’opinion générale s’accorde avec nostre instruction et avec les ordres de la
cour les plus récens:| qui ne nous obligent pas à |:ne point conclurre la paix
sans garder toutes les conquestes:|. Or puisqu’il est |:trouvé à propos d’en
rendre quelque partie, l’on ne peut le faire plus à temps ny avec plus de répu-
tation, ny avec plus de liberté de choisir ce qui nous est propre, ny avec plus
d’apparence de succez qu’à cette heure:|.
Il n’y a pas lieu d’appréhender qu’on puisse dire que |:la Reyne auroit
eu trop d’affection pour sa maison:|, puisque le traitté ne sçauroit estre que
très avantageux à la France, et que Son Altesse Roiale, Monseigneur le Prince,
Vostre Eminence, et tous messieurs les ministres d’Estat feront part de la ré-
solution qui se prendra et que l’Espagne mesme le demande ainsy.
La proposition de rendre quelques places en Flandres ou en Luxembourg
pourveu qu’on mette entre noz mains |:Lérida, Tarragonne et Tortose ne
semble guères convenable à la Reyne:| ni à la submission que luy fait le roy
son frère, et une telle response |:pourroit estre mal expliquée lorsqu’on nous
offre la carte blanche:|. Joint qu’il n’est pas |:de la dignité de Sa Majesté
d’amuser les Catalans d’une belle apparence pour les abandonner trois jours
après:|.
|:La seule raison qui:| pourroit obliger la Reyne à se tenir précisément aux
termes de nostre première proposition, c’est que |:pour cela les Espagnolz ne
romproient pas le traitté et que dans l’extrême besoin qu’ilz ont de la paix,
cette persévérance les forceroit de songer à d’autres moyens d’y parvenir,
comme au mariage ou à l’eschange:| dont il a esté discouru. Mais en ce cas il
est nécessaire que |:chacun agisse d’un mesme esprit, qu’on parle à la maison
comme au conseil:|, et que les ministres du pape et de Venize |:qui auront
tousjours les yeux ouvertz en cette rencontre ne voyent rien partout que d’u-
niforme:|. Autrement Sa Majesté |:perdroit la grâce et le mérite d’une action
qu’il faudra tousjours faire si les Espagnolz s’apperçoivent qu’on ne soit pas
bien d’accord de ne la faire pas:|. Or comme la response que Vostre Emi-
nence attend |:de monsieur d’Estrades luy fera cognoistre si l’on peut seure-
ment traitter de mariage ou non:|, il me suffit de dire que |:hors cette espé-
rance l’on pourroit en offrant de rendre quelques places qui ne sont pas à
nostre bienséance:| proffiter de l’engagement où le roy d’Espagne est entré,
et ne luy laisser pas l’avantage qu’il s’en promet. Quand je dis |:quelques
places j’en excepte nommément celles que nous avons en Catalongne:|, es-
tant certain que |:s’il les faut rendre, ce ne peut jamais estre par une offre
volontaire:|.
Je ne doute point Monseigneur qu’en ce cas Sa Majesté ne déclarast aussy que
|:le roy de Portugal doit estre comprins dans la paix, d’autant que si enfin
l’on est obligé de se contenter d’une trêve pour luy et de quelque tempéram-
ment pour les Catalans:|, cella nous donnera moien de |:retenir les places
que la Reyne auroit offert de remettre entre les mains des Espagnolz:|, ou
bien de |:les changer contre les villes de Saint-Omer et Aire , affin que tout le
comté d’Artois demeure au Roy aussy bien que le comté de Roussillon:|,
Gravelines, Bourbourg, et Thionville , avec toute la Lorraine, et l’Alsace.
Que Vostre Eminence pardonne s’il luy plaist aux resveries d’un homme qui a
tousjours eu plus de zèle que de capacité, et qui ne les expose qu’à vous Mon-
seigneur dans la pleine et parfaitte confiance où il est que s’il y a quelque
chose de raisonnable vous aurés la bonté de le recevoir agréablement, et d’ex-
cuser tout le reste.
[Eigenhändiges PS:] Quand les plénipotentiaires d’Espagne asseurèrent les
médiateurs que l’ouverture qu’ils ont faitte n’est pas un simple compliment
mais une proposition de paix et un acte de respect envers la Reyne, le comte
de Pennarenda se sentant pressé par quelques objections de ces messieurs qui
essayoient de s’en bien esclaircir, il jura deux fois avec esmotion «por Dios
trino y uno adorando» que leur intention est d’acquiesser à ce que la Reyne
dira pourveu que Sa Majesté ayt quelque esgard à son frère et à sa maison.