Acta Pacis Westphalicae II B 5,1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 5, 1. Teil: 1646 - 1647 / Guido Braun unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und Achim Tröster, unter Mithilfe von Antje Oschmann am Register
Le travail de cette semaine n’a pas esté plus utile que celuy de la précé-
dente. Les ambassadeurs de Suède portent si hautement toutes les préten-
tions de la maison palatine, et toutes celles des protestans, que ceux-cy,
sentans un tel appuy, ont augmenté leurs demandes depuis trois jours
les accompagnent de menaces s’il n’y est entièrement satisfait. Le comte
de Trautmansdorff se trouve estonné de ce dernier coup qui recule et em-
pire les affaires; et, à la vérité, il va au-delà de son pouvoir et de celuy
mesmes de l’Empereur pour achever. |:Mais je doute si les Suédois ont
pareille intention.
L’on peut se souvenir qu’une de leurs principales maximes:|, dans la né-
gotiation de la paix, a esté qu’il ne falloit pas |:rompre sur l’intérest des
deux couronnes, mais sur:| celuy des estatz de l’Empire. Monsieur Oxen-
stiern |:nous a souvent ennuié de ce précepte paternel:| (quoyque raison-
nable en un sens), d’autant qu’il sembloit n’estre en peine que de bien
|:choisir la cause ou le prétexte d’une rupture:|; quand je le considère au-
jourd’huy si animé pour lesdits estatz, et pour ceux mesmes qu’il n’aime
ny n’estime, |:comme le prince palatin:|, et dont la religion ne le choque
pas moins que la catholique, j’appréhende qu’il ne vueille [!] faire à pré-
sent ce qu’il disoit alors, et la chose est digne de réflexion.
Je sçais mesmes que |:leur plus secrette ambition est de faire ériger en
électorat les principautés qu’ils tiennent de l’Empire:|, et les protestans y
trouvent leur compte puisque, par ce moien, ils auroient |:quatre voix
dans le collège électoral:|. Monsieur Oxenstiern m’a sondé de loin sur ce
sujet. Il faut s’attendre après cella sans aucun doute qu’ilz voudront |:un
empereur luthérien:|, et je suis bien averti que c’est encores une de leurs
pensées pour l’avenir. |:Mais quant à l’électorat, c’est un dessein:| présent
et pour lequel il ne tiendra pas à eux que |:les affaires ne se brouillent affin
que dans la suite de la guerre:|, ilz contraignent l’Empereur à adjouster cet
article à leur satisfaction. Cependant ils demandent l’évesché de Hildes-
heim qui n’a jamais esté que catholique depuis sa fondation; c’est une des
nouveautés du mémoire que monsieur Salvius porta l’autre jour aux Im-
périaux
Vgl. Anm. 3; in diesem Schriftsatz zu Hildesheim Art. XII, im Druck bei Meiern IV, 95
(lat.) und 105 (dt.). Zur Übergabe des Schriftsatzes durch Salvius an Trauttmansdorff und
Volmar am 9. März 1647 vgl. den Bericht Trauttmansdorffs, Lambergs, Kranes und Vol-
mars an Ferdinand III., Osnabrück 1647 März 11 (Druck: APW II A 5 nr. 304, hier 612
z. 14–42).
ster pour le fils du roy de Dannemarch qui estoit archevesque de Brême . Si
l’on attend en France à s’opposer à une si grande contravention des trait-
tés , quand ils prétendront Mayence ou Trèves |:comme ils font maintenant
Uberlinguen et Offenbourg:|, il y a danger que ce ne soit à tard.
Nous avons avis de monsieur de Croissy que les députés du mareschal
Wrangel |:demandent Memmingen
mais comme ils ont desjà Benfeldt et:| que de leur grâce ils ont tousjours
évité d’en accommoder la France, |:j’avoue que ce voisinage me seroit sus-
pect:| et que, selon mon foible sens, ledit sieur de Croissy |:ne doit pas
permettre qu’ils ayent Offemburg:|.
Après avoir veu ses lettres et relations
D’Avaux bezieht sich in der Antwort, die er Croissy am Folgetag erteilte, auf dessen Me-
morandum vom 26. Februar 1647; dieses Memorandum ist mit Randbemerkungen
d’Avaux’ überliefert: Apostilles Faites par Monsieur D’Avaux, Sur le Memoire de Mon-
sieur de Croissi. Du 26. Fevrier 1647. […] Touchant la suspension d’armes entre les Cou-
ronnes & Baviere, [Osnabrück, nach 1647 Februar 26]; zahlreiche nicht zeitgenössische
Kopien, darunter: AN KK 1392 fol. 172’–180’; Druck: NS IV, 46ff. Vgl. dazu auch den
Brief [d’Avaux’] an Croissy, [Osnabrück] 1647 März 12; eigh. Konzept: AE , CP All. 87
fol. 552–553’; zahlreiche nicht zeitgenössische Kopien, darunter: AN KK 1392 fol.
168’–172; Druck: NS IV, 45f.
niquer avec les ambassadeurs de Suède. La maladie du premier qui s’aug-
mente m’a donné lieu de commencer par monsieur Salvius
trouvé froid et irrésolu touchant la suspension d’armes, soit générale
dans tout l’Empire, soit particulière entre les couronnes et Bavières. Ce
n’est pas qu’il ne demeure d’accord que la paix doit estre précédée d’une
suspension de quelques jours, mais il croid que c’est assés d’y préparer les
affaires en sorte qu’um peu auparavant la signature du traitté de la paix,
l’on despêche un courrier à l’armée pour conclurre alors laditte suspen-
sion, et séparer les trouppes dans les quartiers dont l’on devra estre con-
venu par avance avec les ennemis. Voillà sa pensée qu’il dit avoir escritte
au mareschal Wrangel affin qu’il s’asseure des conditions, et tienne le
traitté de la suspension en estat d’estre signé aussytost qu’il aura avis que
celuy de la paix est aux mesmes termes.
Je luy ay respondu que toutes choses ne se laissent pas ainsy ajuster à
nostre point, et qu’à mon avis, il prenoit ses mesures bien courtes pour
pourvoir à une affaire de cette importence.
Il me l’a avoué, disant que |:cela vient de l’humeur de leur nation qui est
soupçonneuse:|, et qu’ils ne peuvent croire la paix qu’ils n’en voient le
traitté signé, ou au moins à la veille de l’estre.
J’ay reparti qu’ils sçavent possible eux-mesmes que la conclusion n’en est
pas encores si proche, et qu’en ce cas, ils font sagement d’esloigner aussy
la suspension d’armes.
|:Il s’est pris à rire, m’asseurant néantmoins que hors le chancelier Oxen-
stiern et ceux de sa cabale qui sont peu:|, le sénat de Suède est tout pacifi-
que.
«Je m’apperçois, dis-je, |:que si cette cabale-là est petite en nombre, elle
est bien puissante en effet:|, puisque nous travaillons icy fort inutilement
pour la paix. Il y a trois semaines que la satisfaction de la couronne de
Suède est réglée, vous aviés tousjours tesmoigné que cella fait, le surplus
n’arresteroit guères, et cependant nous ne pouvons sortir ny des griefs, ny
de l’affaire palatine, ny de celle de Bade, ny avancer en quoy que ce soit».
Monsieur Salvius voulut justifier les difficultés qu’ils apportent en ce que
dessus, |:car au fonds c’est de leur part qu’elles viennent toutes, et ils ex-
citent mesmes les protestants, les députés du prince palatin et ceux du
marquis de Durlac à tenir ferme dans leurs prétentions:|.
Le récit de toute nostre conférence seroit trop long, il me suffira de re-
marquer qu’elle servit à rendre monsieur Salvius capable de raison sur ce
qui concerne le duc de Bavières. Il dit par deux fois qu’il falloit se relas-
cher pour le respect de la France, mais qu’aussy la dignité électorale de-
meurant dans sa maison avec toutes les prééminences que celle de Heidel-
berg a eues, il estoit raisonnable qu’il rendist une partie du Haut-Palati-
nat.
Je tesmoignay que la France n’empeschoit pas cella, mais que certaine-
ment l’Empereur n’y consentiroit pas parce qu’il est obligé à la garentie.
«Nous l’en deschargerons, dit-il, le duc de Bavières sera bien paié de sa
debte avec la moitié du Palatinat Supérieur».
Je répliquay que la France ne prendroit pas le parti de l’Empereur contre
luy, mesmement en une cause si juste et si claire comme est celle dudit
duc, et que ce seroit aussy contre toute raison d’Estat que les Suédois
ostassent quelque chose à la maison de Bavières pour le donner à celle
d’Austriche, dont la puissance est si grande et si establie qu’avec toutes
les victoires des deux couronnes, elle gaigne plus par ce traitté qu’elle ne
perd.
J’ay depuis eu audience de messieurs Oxenstiern et Salvius, où monsieur
de La Court s’est trouvé . Nous les avons premièrement sollicité de met-
tre fin aux affaires qui restent à décider, et ensuitte nous leur avons fait
entendre en quel estat se trouve le traitté d’Ulm, les convians d’en haster
la conclusion en attendant la paix.
Sur la première partie de nostre discours, ils se sont déclarés, comme de
coustume, avec ambiguïté, irrésolution, et beaucoup de difficultés. Ils
trouvent chaque point de grande conséquence qui requiert du temps
pour délibérer, et surtout ils estiment que la réputation de la couronne
de Suède recevroit préjudice si après avoir transigé pour ses intérestz par-
ticuliers, ils venoient aussytost à terminer ceux des princes d’Allemagne.
|:C’est de quoy ils veulent maintenant couvrir le peu d’inclination qu’ils
ont à la paix:|. Mais nous leur dismes qu’il y a deux ans que l’on traitte et à
Munster et à Osnaburg touchant les affaires de l’Empire; que nous les
avons proposées avant celles des couronnes
Vgl. die frz. Proposition II (Druck, frz.: Meiern I, 443 ff.) und die schwed. Proposition II
(Druck, lat.: ebd., 435–438) vom 11. Juni 1645.
mission; qu’en effet, l’on a restabli la dignité et les droitz des princes et
estatz de l’Empire; que l’on a obtenu de grandes choses à l’avantage des
protestans, et qu’ainsy il ne faut pas compter du jour qu’on est convenu
de la satisfaction de la Suède, mais de l’ouverture des assemblées, puisque
dès lors les plénipotentiaires de France et de Suède ont agi vigoureuse-
ment, et de bouche et par escrit, pour l’intérest public de l’Allemagne.
Que la réputation de la couronne de Suède seroit bien plus exposée au
blasme si pour vouloir mettre un prince particulier um peu plus à son
aise ou gaigner un bénéfice de plus pour ceux de leur religion, ils aban-
donnoient toute la chrestienté aux invasions du Turc.
Il fut dit plusieurs autres choses de part et d’autre sans aucun fruit, sinon
qu’en la cause palatine, ou plustost au fait de l’électorat, monsieur Oxen-
stiern tesmoigna faire cas d’une raison dont nous nous estions servis, c’est
à sçavoir que le feu roy en avoit approuvé la translation en la maison de
Bavières, luy en avoit fait donner le titre
Den Titel électeur hatte Ludwig XIII. Kf. Maximilian schon am 30. März 1623 in der
Adresse des Gratulationsschreibens zur öffentlichen Kurtranslation und Investitur Maxi-
milians vom 25. Februar 1623 zuerkannt ( BA NF II.1, 45 Anm. 1; Albrecht, Maximilian
I., 572); er hatte die Kurübertragung nachdrücklich favorisiert ( ebd., 544f. und 572).
refuser au comte palatin, et qu’en un mot, la France y estoit engagée au-
paravant que d’avoir traitté d’aucune alliance avec le feu roy de Suède. Il
escouta aussy assés favorablement la relation que je luy fis des instances
avec lesquelles j’avois pressé, le jour précédent
dorff de faire rendre une partie du Haut-Palatinat au prince palatin en
satisfaisant d’ailleurs le duc de Bavières, et qu’enfin ledit sieur de Traut-
mansdorff, au lieu de cette portion de terre qu’il soustient ne pouvoir
estre séparée, m’avoit offert trois cent mille risdalles
ce prince lequel, par ce moien, sera deschargé de l’appennage qu’il leur
doit. Cette première ouverture donne espérance que l’on pourra bien ob-
tenir jusques à quatre ou cinq cent mil risdales, et ne fut pas mal receue
par les ambassadeurs de Suède, |:qui se gardèrent bien, toutefois, de dire
nettement qu’ils en estoient contents ou:| qu’ils le seroient si l’on y
adjoustoit telle ou telle chose, car il ne faut |:rien précipiter et la paix
sera aussi bonne dans sept ou huit mois qu’à cette heure :|.
Quand à la négotiation d’Ulm, ces messieurs nous firent à peu près la
mesme response que l’un d’eux m’avoit faitte à part; mais comme nous
pressions pour avoir une résolution nette et certaine, remonstrans que de-
puis un an nous leur avons proposé plusieurs fois une suspension d’armes
sans qu’ils y aient voulu entendre, sinon en apparence, et qu’il seroit plus à
propos de ne s’embarquer pas dans un traitté si l’on n’a pas dessein de le
conclurre, ils avouèrent que les ordres de Suède y ont tousjours esté con-
traires, |:et que c’est un bonheur que les députez impériaux qui sont à Ulm
aient manqué de pouvoir ou d’intention d’en convenir, parce qu’en effet
ceux de Suède y estoient allés avec une instruction
celle de monsieur de Croissi
plustost que de se plaindre qu’ils nous l’eussent si longtemps celée.
Nous dismes ensuitte que |:leur reine ne s’oposant qu’à une suspension
générale dans l’Empire:|, messieurs les mareschaux pourroient en faire
une particulière avec Bavières, veu mesmes que l’avantage de la couronne
de Suède s’y rencontre en ce que les armées confédérées n’auroient plus
que celle de l’Empereur à combattre.
Ils demeurèrent d’accord que |:Wrangel n’a pas les mains liées pour:| une
suspension d’armes avec Bavières, |:mais ils dirent qu’il n’en a aussi:| au-
cun ordre et que le plus seur est de n’en point faire.
On leur représenta que la France aiant souvent désiré et jugé utile au bien
commun d’entrer en un traitté de cette sorte, elle avoit pourtant déféré à
l’opinion de ses alliés. On leur marqua divers endroitz de cette conduitte
où il a bien paru que nous avons l’esprit de société, et il fut dit doucement
que sans se blesser ils pourroient donner aussy quelque chose au senti-
ment de leurs amis.
Alors monsieur Oxenstiern, comme vaincu de courtoisie, s’estendit davan-
tage qu’il n’avoit encores fait sur la véritable explication de leurs ordres
et de leurs pensées. Il nous |:déclara ouvertement qu’il ne peut compren-
dre pourquoy:| le mareschal Wrangel a député les sieurs Mortagne et Du-
glas pour traitter avec le duc de Bavières; qu’il sçait bien que |:ledit mares-
chal n’en a point:| le pouvoir de Suède; qu’ils ont tousjours eu charge de
ne pas consentir à une suspension, et de nous en dissuader; mais que si la
France continuoit en ce dessein, et qu’à l’exemple du traitté fait avec le
duc de Saxe , elle voulût en faire un pareil avec le duc de Bavières, ils
avoient ordre de nous remonstrer la différence qu’il y a entre ces deux
princes, dont l’un est beaucoup plus puissant que l’autre, |:et de faire in-
stance qu’en tout cas nous traittions en sorte avec Bavières qu’il n’en
puisse arriver aucun dommage à l’armée de Suéde.
Ce consentement est de telle importance que n’estant donné que par l’un
des plénipotentiaires de Suède:|, quoyqu’en présence de l’autre, je dis en
me levant qu’ils voudroient peut-estre y penser encores et que nous nous
reverrions une autre fois.
Sur cella monsieur Salvius s’approcha du lit, ils parlèrent um peu de temps
ensemble, et puis nous aians convié de reprendre noz places, monsieur
Oxenstiern répéta tout ce que dessus et dit qu’il n’estoit pas besoin d’en
délibérer plus longuement entre eux puisque les ordres de Suède estoient
tels; sur quoy monsieur Salvius nous recommenda de bien obliger le duc
de Bavières à ce qu’il promettroit.
Je luy demanday quelles précautions l’on pourroit prendre.
Il dit que |:s’il désarme, il faut avoir grand soin de faire passer ses troupes
au service du Roy affin que les ennemis:| n’en proffitent pas, et que ledit
duc doit aussy mettre quelque bonne place entre les mains de Sa Majesté.
Nous réplicasmes que |:les Suédois ne voulant pas de suspension avec luy,
il n’y avoit guières d’apparence qu’il désarmast:|.
Ils en tombèrent d’accord sans insister plus sur cette seureté que sur une
autre, nous exhortans seulement de prendre garde autant qu’il sera possi-
ble que l’Empereur n’en reçoive point
807,36–808,1 de l’avantage … que soit] im Konzept, an die Adresse Longuevilles: d’avantage.
Maintenant, Monseigneur, c’est à vous à juger s’il est à propos de faire une sus-
pension particulière avec le duc de Bavières et d’en envoier les ordres à mes-
sieurs de Tracy et de Croissy, ou de remettre l’affaire à la décision de la cour. Je
seray de l’avis que Vostre Altesse prendra, et me contenteray de dire que soit.
Tant y a que soit qu’on fasse le traitté ou non, les choses sont disposées
icy en sorte que |:l’on en peut tirer profit pour le service du Roy:|. Si la
suspension d’armes entre Sa Majesté et l’électeur de Bavières ne se con-
clud point, |:il y aura lieu de faire valoir auprès des Suédois ce nouvel
acquiescement de la France à leurs désirs et à leurs intérests; et si elle se
conclut, ce sera de leur consentement et moiennant des places importan-
tes, lesquelles je ne voudrois pas apeller places de seureté, moins encores
obliger Sa Majesté de les rendre après la paix, si ce n’est pour engager les
Suédois à la mesme restitution de celles qui leur seront données en cas:|
que les sieurs Mortagne et Duglas concluent le traitté commencé; |:mais
l’on y pourroit remédier par un article à part, fondé sur:| la protection que
ce prince demande particulièrement du Roy.
Le projet de paix donné par les Espagnolz est une pure illusion. Je ne
trouve point de différence entre cette pièce et les notes ou extraits de la
négotiation qui ont esté cy-devant faitz de part et d’autre; encores
ceux-cy ont-ils quelque chose de plus particulier et de mieux esclairci.
L’omission des places de Toscane et du Portugal est le défaut le plus ap-
parent. Nous ne pouvons pas le dissimuler en aucune sorte ny traitter sur
un tel projet sans beaucoup affoiblir ce que la France prétend fort juste-
ment en l’un et l’autre point. Car Porto Longone et Piombino doivent
estre cédés comme le reste des conquestes, et la résolution n’en est pas
seulement prise en France, les Espagnolz y sont disposez aussy.
Et quant au Portugal, s’il faut le laisser en guerre, c’est-à-dire attirer là
une bonne partie des forces de la chrestienté qui seroient bien plus chres-
tiennement emploiées ailleurs, et peut-estre mesmes plus utilement pour
le roy d’Espagne dont les Estatz vont estre désormais les premiers expo-
sés aux progrez du Turc, il est au moins très nécessaire d’y faire cesser les
hostilités pour un an, pendant lequel il se pourra trouver quelques moiens
d’accommoder l’affaire au principal, qui ne paroissent pas à présent que le
roy de Portugal est encores rempli de grandes espérances. Que si ce bon
dessein ne réussit pas dans ledit temps, la liberté que le Roy se réserve et
que les Espagnolz ont accordée, ne seroit nullement seure, et quasi pas
praticable sans encourir le blasme de toutes les nations, comme aussy
elle fourniroit un prétexte au roy d’Espagne pour rompre la paix lorsqu’il
en jugera l’occasion favorable, s’il n’y a un article exprès dans le traitté qui
comprenne nettement laditte cessation et laditte réserve. C’est à mon sens
la moindre chose et la dernière extrémité où l’on se peut porter en une
affaire de si grand esclat et de si grande conséquence. Autrement le roy
de Portugal se plaindroit d’avoir esté non seulement abandonné par la
France, mais livré à ses ennemis qui l’opprimeront tout à coup s’il n’y a
quelque intervalle entre son exclusion d’un traitté où il se promet d’avoir
place, et la cheute de toutes les forces espagnoles sur ses bras, veu mesmes
que sans cella la faculté qu’on stipule de l’assister luy seroit inutile, ou
engageroit le Roy au triple de ce qu’il veut faire affin de réparer le premier
désordre.
Cette faculté dont noz parties sont tombées d’accord, si elle n’estoit que
verbale, se trouveroit destruitte clairement par le premier article de leur
projet où ils disent que les deux rois ne feront jamais rien directement
ny indirectement au préjudice l’un de l’autre, et que les occasions de mau-
vaise intelligence seront entièrement levées pour tousjours sans qu’il de-
meure aucune apparence d’inimitié entre eux.
Bref, ceux qui consentent à quelque chose sans dessein de se rétracter ne
font pas difficulté qu’il en apparoisse, et ce consentement peut estre dé-
claré avec des termes qui ne blessent point le roy d’Espagne, car au fondz
toute la terre sçait qu’il est en guerre avec le Portugal, et au contraire il
luy sera honnorable de l’y faire cesser pendant que la chrestienté sera oc-
cuppée contre le Turc, ou au moins pendant un an.
Pour le surplus du projet espagnol, il faudroit un volume pour y respon-
dre; la préface est offensante et les articles couchés en termes si généraux,
si obscurs et si captieux que jamais rien ne ressembla moins à un traitté
quand il ne seroit question que de la vingtième partie de ce qui se décide
en celuy-cy. Enfin c’est une pièce toute défectueuse et en la matière et en
la forme. L’on en auroit bien plustost fait un autre tout entier que de
rabiller celuy-là. Que si les Espagnolz pressent, je ne sçais point de meil-
leure response à leur projet que le nostre
article et adjousterois ceux qu’ils ont obmis, sans nous laisser engager en
sorte quelconque à traitter sur d’autres propositions. Nous escouterons ce
qu’il leur plaira, nous l’examinerons, pourveu qu’ils sachent qu’il en fau-
dra tousjours revenir aux conditions qui leur ont esté offertes, et ne s’es-
loigner ny du sens ny des paroles, si ce n’est que par raison ils nous fissent
voir que l’on y deust adjouster ou diminuer, sur quoy nous espérons d’es-
claircir en sorte Messieurs les Médiateurs que l’on en demeurera satisfait.
Tous noz articles du commerce , qui est une des principales parties de
cette négotiation et qui recommendera davantage à la postérité la glo-
rieuse régence de la Reine, y sont réduitz à quatre lignes insérées à la fin
d’un article
tion d’Arras
traittement qu’ils font aux Anglois et aux Holandois.
Touchant les conquestes , ce projet parle encores plus mal; il nous veut
renfermer dans les places et lieux que l’on occuppe effectivement sans dire
aussy les païs. Il n’y a pas un mot des appartenances et dépendences, non
plus que des baillages, chastellenies, etc. Il ne cède pas mesmes absolu-
ment lesdittes places, villes et chasteaux en toute propriété et souveraine-
té, mais il cède la propriété et possession des droitz qui y peuvent appar-
tenir au roy d’Espagne. Il conclud que pour tesmoigner sa sincérité, il fait
cette cession très réservée et très imparfaitte affin que Messieurs les Estatz
aient lieu d’exercer jurisdiction sur les deux rois. Tout cella paroist plus
digne de risée que de response. Il ne faut que voir en quels termes et avec
quelles expressions et répétitions ils nous ont autrefois obligé de quitter,
délaisser, renoncer, céder et transporter telles et telles choses, le tout par
le menu. Il ne faut que voir les traittés qui viennent d’estre faitz entre
Suède et Brandebourg , entre l’Empire et la Suède , et entre l’Empereur
et Brandebourg
mesmes Estatz , qui n’y ont rien laissé d’indécis à l’arbitrage d’un tiers.
Il semble aussy très important de persister à la cession du comté d’Artois
à la réserve des trois places
maiori parte fit denominatio
Zu Dt.: Die Bezeichnung (oder: die Rechtszugehörigkeit) leitet sich vom größeren Teil ab.
Vermutlich ein Rechtssprichwort, konnte aber in genau diesem Wortlaut nicht nachgewie-
sen werden. Zu verwandten Rechtsregeln, die aus dem größeren Teil einen für das Ganze
gültigen Rechtszustand ableiten, vgl. Liebs nr.n R 102 und Q 14. Das Wort denominatio
als Fachbegriff der Logik gehört dem Gebrauch der mittelalterlichen Schule an und wurde
als solcher in der frz. Logik des 17. Jh. rezipiert ( l ’ Art de penser II, 58 [= Buch I, Ka-
pitel 2, hier Variante aus der Aufl. von 1683; fehlt in derjenigen von 1662, vgl. ebd. I, 41];
Prantl III, 292 mit Anm. 551; Muñoz Delgado). – Antoine Arnauld (1612–1694;
Tans), einer der Autoren des Werkes l ’ Art de penser, ist der Bruder von Saint-Nicolas
(s. Anm. 10 zu nr. 107).
tre de tout le comté excepté deux villes
Wahrscheinlich sind Aire-sur-la-Lys und Saint-Omer gemeint, denn La Bassée wurde im
frz. Gesamtentwurf zwar unter die Ausnahmen von der Zession des Artois gefaßt, gehörte
aber zur Gft. Flandern, was den frz. Ges. auf dem WFK zumindest bis zum 20. Mai 1646
unklar war; vgl. APW II B 3 nr. 275 und Tischer, 75f. Keiner der drei Orte war frz.
besetzt; vgl. die Liste von 1646 Oktober 26 (s. Anm. 10 zu nr. 1).
La trêve de Catalogne, la ligue d’Italie, le point de Casal, la liberté de dom
Duart
meilleure response la plus juste et la plus seure est d’insister aux condi-
tions et explications sans lesquelles cette trêve de Catalogne seroit une con-
fusion qui se convertiroit bientost en une nouvelle guerre. Il paroist en
plusieurs endroitz de ce projet que les Espagnols ne veulent que plastrer
et n’ont pas intention d’estre longtemps en paix.
C’est pourquoy sans luitter davantage contre les subtilités de Brun, il se-
roit peut-estre bon de dire une fois pour toutes aux Médiateurs et aux
Holandois que c’est assez disputé, que toutes les matières ont esté déba-
tues pendant cinq mois, et qu’il est grand temps de se résoudre à accepter
purement et simplement ou refuser un projet qu’ils nous ont demandé
avec tant d’instances et où sont les dernières intentions de la France qui ne
se relaschera plus en rien. Mais qu’au contraire, s’ils tardent davantage,
l’on s’engagera de sorte avec le roy de Portugal qu’il ne se fera point de
paix sans l’y comprendre, et l’on n’acceptera plus de trêve en Catalogne, à
l’exemple de Messieurs les Estatz, qui après avoir négotié longtemps et
convenu des articles d’une trêve, l’ont changée en un traitté de paix ,
veu mesmes que nous n’avions entendu à cette trêve de Catalogne que
pour nous conformer à celle desditz Sieurs Estatz.
Je l’ay déclaré ainsy cette semaine au comte de Trautmansdorff
fait réflexion sachant les grans préparatifs qui se font en France, et le
choix du général qui va commander l’armée du Roy en Catalogne . Il
craint les suites de cette résolution, et tesmoigne certainement plus
d’amour pour les Espagnolz qu’ils n’ont mérité de luy. Il m’a respondu
avec anxiété qu’il ne tenoit qu’à nous de prévenir la campagne et de con-
sidérer que l’événement pourroit estre autre que l’on n’espère en France.
Et sur ce que j’ay répetté de la cessation d’armes en Portugal et de la
liberté d’y envoier des secours quand elle seroit finie, il a dit que |:cela se
mesnageroit mieux après la conclusion de la paix:|; et puis il a voulu me
faire croire comme par crainte d’avoir trop parlé, que c’est son sentiment
particulier sans en avoir communiqué avec monsieur Brun. Cette explica-
tion non demandée, et la manière dont il la donna, me fait juger presque
avec certitude qu’il |:s’est hasté de me découvrir un expédient que les Es-
pagnols méditent:| pour nous satisfaire, en gardant cette hauteur qu’il ne
soit fait aucune mention du Portugal dans le traitté.
Mais je n’y ay adhéré en aucune façon, soustenant tousjours, comme en
effet je le crois, qu’il n’y a ny seureté ny réputation pour la France si cet
article n’est inséré parmy les autres, et que le roy d’Espagne ne se fera
aucun préjudice d’y consentir pourveu que Leurs Majestés trouvent bon
de se contenter de l’effet, et que le roy de Portugal ne soit pas nommé.
Je continue de poursuivre les affaires de Madame la Langrave, et en ce
seul point |:les ambassadeurs de Suède agissent um peu foiblement:|. Je
veus croire que
monsieur Oxenstiern dit:| ces jours passés au comte de Wittgenstein
comme ils s’animoient l’un l’autre à maintenir la maison palatine, que
l’on ne |:peut rien attendre de celle de Hesse-Cassel d’autant qu’elle est
trop attachée à la France:|.
J’ay obmis de dire que dans nostre dernière conférence avec les ambassa-
deurs de Suède, m’estant apperceu que monsieur Oxenstiern |:a quelque ja-
lousie de l’obligation que le Roy acquiert sur la maison de Bavières:|, je re-
présentay sur un autre propos que ledit duc a travaillé pour la satisfaction de
la couronne de Suède et qu’il se dispose à luy rendre encores cy-après de
bons offices et de bonnes assistences dont elle pourra avoir besoin. Puis je
luy demandé s’il auroit agréable d’entendre monsieur Krebs, ce qu’il n’a pas
voulu faire depuis trois ans parce qu’il refuse le titre d’électeur à son maistre.
Il fut longtemps à disputer cette question et à se faire tenir, mais enfin il se
modéra, remettant néantmoins à un autre jour à me donner response. Et ce
matin il m’a mandé que le plénipotentiaire de son altesse électorale de Ba-
vières seroit le bienvenu. Cella a bien resjoui monsieur Krebs qui m’en est
venu remercier sur le champ. Il est à cette heure chez ledit sieur Oxenstiern.