Acta Pacis Westphalicae II B 5,1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 5, 1. Teil: 1646 - 1647 / Guido Braun unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und Achim Tröster, unter Mithilfe von Antje Oschmann am Register
Je donnay, il y a quelques jours, aux commissaires qui ont esté nommez
pour traitter avec moy, la proposition dont j’envoye coppie à Vostre Al-
tesse et à Vostre Excellence affin qu’il leur plaise de me faire sçavoir sy
elles jugent que j’y doive changer ou adjouster quelque chose. J’ay voulu
veoir avant que l’envoyer à Vostre Altesse et à Vostre Excellence, de
quelle façon elle auroit esté receue dans le public. L’on m’assure qu’elle
n’y a fait que de bonnes impressions, |:et que si elle a desplu à quelques
malintentionnez, ç’a esté pour les avoir mis en estat de ne pouvoir respon-
dre sur plusieurs articles qu’elle contient, et de n’y avoir osé dire ny ouy
ny non:|.
Vous verrez par l’avis cy-joinct de |:la ville de Leyden qu’il y a encore
quelques membres sains dans le corps de la Holande:|, et qu’il y en a plu-
sieurs qui cognoissent la justice de nostre procédé, |:et l’injustice des plé-
nipotentiaires de cet Estat:|.
La pluralité des voix dans les estatz de Hollande qui se séparèrent hyer au
soir seulement pour quelques jours, a esté qu’il falloit demeurer uniz à la
France et observer le traitté de 1635 , mais qu’il estoit sy clair qu’il n’avoit
point besoing de nouvelle explication. Je ne sçay pas encore bien certai-
nement sy c’est une dernière résolution qu’ilz ont prise, et sy la diversité
des oppinions ne l’aura point empesché. |:Si cette response avoit esté faicte
avec bonne intention et par des gens qui eussent observé l’alliance de
meilleure foy qu’ilz n’ont faict, nous aurions peut-estre sujet de nous en
contenter, et, en tout cas, voylà le plus dangereux advis que nous ayons à
craindre:| dans toutes ces provinces, y ayant très grande apparence que
|:celuy des six autres nous sera plus favorable:|. Cependant je me plain-
dray des douttes qu’on veult laisser dans une affaire de sy grande impor-
tance, et tascheray de faire veoir l’intérest que nous avons de demander
une déclaration plus claire après les diverses questions qui ont esté mues
sur le traitté de 1635 et l’interprétation qui en a esté faite aux députez
d’Espagne, par ceux de cet Estat, directement contraire à son véritable
sens.
Je me suis apperceu que ce n’est pas tant l’animosité qu’une faulce préo-
cupation d’esprit qui esloigne de nous la pluspart de ceux qui gouvernent
cet Estat. Ilz s’ymaginent sans rayson que nous ne voulons point la paix,
et, sur ce faux fondement, bastissent touttes les belles résolutions qu’ilz
prennent. On leur a sy avant imprimé cette oppinion trompeuse que tout
ce que nous sommes obligez de demander, ou pour la seureté du traitté ou
pour nostre advantage, ilz croyent que ce sont des prétextes recherchez
pour continuer la guerre.
Cela m’a obligé de leur déclarer, pour les tirer de l’erreur où ilz sont, que
s’ilz vouloient députer quelques-uns d’entre eux avec qui je peusse confé-
rer librement, je me chargeois de leur faire avouer, en leur explicquant
l’estat où nous en sommes avec les Espagnolz, qu’il ne tient pas à nous
que le traitté ne soit achevé, et que rien n’en retarde jusques icy l’exé-
cution que l’espérance qu’on a donnée de leur part d’une séparation.
S’ilz acceptent ce party et que je m’en puisse promettre quelque bon effet
pour le service du Roy, je croy que Vostre Altesse et Vostre Excellence ne
trouveront pas mauvais que je leur fasse veoir un projet de tout le traitté
en la forme que nous le pouvons signer, principalement sy je puis mesna-
ger qu’après l’avoir leu et approuvé, et surtout aprez estre demeuré d’ac-
cord que |:nous devons retenir toutes les conquestes:|, à quoy je ne voy
pas que personne fasse icy difficulté, |:ilz envoyent dire aux Espagnolz
que s’ilz le refusent en cette forme, cet Estat ne peut pas refuser de leur
continuer la guerre conjoinctement avec nous, nonobstant tout ce qui
s’est passé. Si j’avois pu obtenir une semblable déclaration:|, il y a appa-
rence qu’elle produiroit la paix en moins de huict jours. Je continue de
leur dire qu’elle ne peut estre faite qu’à Munster, et que sy Brun vient icy,
je me retireray à l’heure mesme. Mais sy l’on prenoit icy résolution de
|:faire faire cette déclaration:|, je demanderay aussy que ce soit |:par d’au-
tres que par leurs plénipotentiaires, ou du moins qu’on leur donne des
adjoinctz pour esclairer leurs actions et rectiffier leur conduite:|.
Car je persiste tousjours en mon oppinion que pour authoriser |:icy les
justes plainctes que nous faisons d’eux, il importe de ne mettre pas, à
Munster, toutes nos affaires entre leurs mains:|. J’ay desjà mandé à Vostre
Altesse et à Vostre Excellence que leur |:entremise n’est plus nécessaire
pour convaincre les Espagnolz de ce qu’ilz ont accordé pendant leur mé-
diation puisque Philippes Le Roy a plus advoué par l’escrit qu’il a donné
à Messieurs les Estatz que ces bons médiateurs ne nous avoient raporté:|.
Je supplie très humblement Vostre Altesse et Vostre Excellence de me
marquer sy elles approuvent que j’aye fait l’offre de monstrer le projet
du traitté, et s’ilz ne jugeroient point à propos de |:l’envoyer prompte-
ment à la cour pour sçavoir si on le trouvera bien et si on n’y voudra
rien adjouster:|. Il me semble que nous sommes forcez de justiffier au
corps de l’Estat les droittes intentions de la France qui ont tousjours esté
desguisées par les artiffices des plénipotentiaires de Munster.
|:On a faict une despesche fort seiche aux plénipotentiaires de Munster
pour faire envoyer icy tout ce qui a esté faict avec l’Espagne, que toutes
les provinces veulent examiner. Celle de Holande, quelques effortz
qu’elle ayt faictz, n’a pu empescher que cette résolution n’ayt esté prise
et exécutée avec chaleur et avec desseing d’esplucher par le menu toutes
les actions des particuliers qui altèrent souvent les bonnes intentions de
l’Estat:|. Il y a apparence que quelques-uns des plénipotentiaires voudront
venir justiffier leur procédé pour prévenir les mauvais jugemens qu’on en
pourroit faire.
|:Car encore que quelques particuliers de ceux qui gouvernent le pays, ou
par trop de désir de la paix, ou par corruption, inclinent à favoriser les
Espagnolz:|, le corps de l’Estat pourroit estre encor sain, et certainement
le peuple, quelque envye qu’il puisse avoir pour le repoz, conserve dans
son cœur beaucoup d’affection et de respect pour la France. |:Quant à
madame la princesse d’Orange, je n’ose rien vous en dire. Elle me donne
tousjours de belles paroles, mais en vérité ses actions n’y respondent pas.
Je sçay qu’un de ses domestiques, parent de Knut , est bien souvent la
nuict en conférence secrette avec Philippes Le Roy:|.
Je viens d’apprendre tout présentement de bon lieu que nonobstant le refus
qui a esté fait par toutes les provinces du passeport qui avoit esté demandé
par monsieur Brun, |:on reparle sourdement de le laisser venir, et qu’on dict
desjà chez madame la princesse d’Orange qu’ayant la liberté du passage
comme plénipotentiaire:|, on ne peut pas empescher avec rayson qu’il ne
prenne son chemin par icy, comme sy c’estoit celuy de Munster et sy ce
n’estoit pas tromper le monde que de recevoir un ennemy dans le cœur de
l’Estat pendant que les alliez y traittent d’affaires de confiance. |: Il faict
tousjours dire soubz main que c’est pour faire renouveller les offres à la
France, et mesme pour se relascher de Piombino et de Porto Longone.
Néantmoins:| il est certain que |:ces belles ouvertures ne sont que le pré-
texte de son voyage, et qu’il a desseing de proposer des liaisons plus
estroictes avec cet Estat et contrebattre celle que nous y voulons faire:|. Je
supplie Vostre Altesse et Vostre Excellence de me vouloir mander |:si je me
retireray en cas qu’il vienne:|.
Je vous puis asseurer que sy je suivois mon inclination et sy je |:ne crai-
gnois d’estre blasmé d’avoir abandonné sans permission les affaires dont
je suis chargé, laissant nos ennemis maistres de la campagne, je prendrois
congé avec esclat, ce qui feroit peut-estre un meilleur effect que mon sé-
jour. Mais je voy par les dernières lettres de la cour qu’une semblable
résolution n’y seroit peut-estre pas approuvée, puisqu’on incline mesme
à dissimuler ce qui a esté faict à Munster:|. J’ay escrit amplement les ray-
sons qui me font croyre qu’il n’est pas utile |:dans une république comme
celle-cy, composée de tant de différentes testes, de souffrir tous les maux
qu’on nous veut faire sans ressentiment, et que ce seroit désarmer les bien
intentionnez qui sont nos amys pour donner par nostre connivence toute
l’authorité au party contraire:|.
Je viens d’apprendre que les plénipotentiaires de Munster ont escrit par
une lettre du 19 que Vostre Altesse leur avoit proposé de remettre entre
leurs mains tout le traitté. Mais
lettres particulières que Vostre Altesse m’a fait l’honneur de m’escrire par
le gentilhomme que je luy avois envoyé, j’ay sujet de croyre que |:c’est un
artifice dont ilz se sont servis pour faire croire icy:| qu’ilz sont tousjours
en la mesme considération auprez de nous, nonobstant tout ce qui s’est
passé. Je supplie très humblement Vostre Altesse
me faire sçavoir ce qui en est, affin que je ne fasse rien par deçà de contraire
à ce qu’elle a trouvé bon de faire par delà, et que l’on n’impute pas ce que je
pourrois dire contre lesditz plénipotentiaires à une animosité particulière.
Ilz représentent dans leur lettre comme une grande merveille et un effet de
leur crédit d’avoir engagé les Espagnolz à rentrer en négociation avec nous,
et cela me fait croyre que le point sy important |:des places de Toscane est
accordé, sans quoy il seroit à craindre que nos partyes, nous voyans passer
outre et faire de nouvelles propositions sans en estre asseurez et pendant
qu’ilz font difficulté non seulement sur cet article mais qu’ilz n’ont pas
encore respondu sur ceux que nous leur avons présentez
pouvoir conclurre que nous nous en sommes départis:|.
C’est peut-estre trop de présomption à moy d’expliquer |:d’icy mes ap-
préhensions:| à Vostre Altesse et à Vostre Excellence, estant bien assuré
que leur grande prudence sçaura pourveoir à tout. Je prendray pourtant
la liberté de leur représenter encor que sy elles jugent à propos de donner
tout le traitté par delà, il faudra se souvenir d’y adjouster un article tou-
chant |:Philippeville, Charlemont et Mariembourg:|, et que s’il n’a point
encore esté délivré, peut-estre recevriez-vous plus d’avantage que |:la pro-
position en vinst de deçà:|. Cette voye, ce me semble, nous feroit rentrer
plus honnorablement en commerce avec des gens qui nous ont désobli-
gez, soit qu’on donnast |:aux vieux plénipotentiaires quelques adjoinctz
nouveaux, soit qu’on leur envoyast des ordres très exprez:| de se conduire
mieux en nostre endroit.
L’escrit de Philippe Le Roy fera veoir à Vostre Altesse et à Vostre Ex-
cellence que l’on pourroit maintenant en toute seureté employer les an-
ciens médiateurs et que pour peu qu’ilz ayent de cœur, ilz doivent avoir
très grand ressentiment du mespris que les Espagnolz ont fait d’eux, ayans
tesmoigné par escrit qu’ilz n’ont rien voulu faire par leur moyen et que
tout ce qu’ilz ont accordé a esté en faveur de Messieurs les Estatz
Vgl. ebd., in der Kopie [für Mazarin] ( AE , CP All. 80 fol. 427–453) fol. 428’–429, auch
452–453. Die Aussage, die Spanier hätten nicht über die Mediatoren verhandeln wollen,
findet sich darin nur indirekt, durch das öffentliche schriftliche Eingeständnis der ndl. In-
terposition durch die Spanier, bestätigt; es erfolgt keine Kritik an der Mediation Chigis
und Contarinis.
une imprudence de nos partyes qui, estant bien relevée, peut produire un
très bon effect auprès du Nonce et de Contarini, et nous les rendre entiè-
rement favorables:|.
Outre tout ce que dessuz, je ne sçay pas sy Vostre Altesse et Vostre Ex-
cellence croyent devoir conclurre le traitté |:sans la garentye que je de-
mande à Messieurs les Estatz. Je crains bien que s’ilz apprennent que la
paix se puisse conclurre sans qu’ilz s’expliquent sur ce que je leur ay pro-
posé, ilz ne prennent résolution de demeurer dans le silence, sans venir à
aucun nouveau traicté ny à aucune interprétation des précédens
certain que jusques icy, je n’ay point eu de meilleure rayson pour les per-
suader qu’en les asseurant que |:la garentye
litera la paix et nous tirera de la nécessité où nous sommes de rechercher
d’autres seuretez qui pourroient retarder le traicté, quand nous serons as-
seurez de celle-là:|.
Je supplie très humblement Vostre Altesse et Vostre Excellence de me par-
donner sy je leur représente librement la peine où je me trouve d’accorder
des choses contraires, |:et l’impossibilité qu’il y aura de réussir si la conduite
de Munster et celle d’icy ne sont uniformes:|. Vostre Altesse et Vostre Excel-
lence le peuvent faire facilement parce que je feray tout ce qui leur plaira de
m’ordonner; je leur demande seulement, avec le respect que je dois, qu’il leur
plaise ne m’envoyer pas des advis conditionnez qui me rendent seul respon-
sable de l’événement, et prescrire avec authorité tout ce qu’il leur plaira que
je fasse, aprez avoir fait réflexion sur la connexité et deppendance qu’il y doit
avoir entre la négociation de Munster et celle d’icy. J’obéiray punctuelle-
ment à tout ce qu’il leur plaira de me commander.