Acta Pacis Westphalicae II B 3,2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 3, 2. Teil: 1646 / Elke Jarnut und Rita Bohlen unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy mit einer Einleitung und einem Anhang von Franz Bosbach
On envoye ausdicts Sieurs Plénipotentiaires la coppie de ce qu’escript cette
sepmaine-cy monsieur de Bavières par laquelle il semble qu’il ne parle plus sy
positivement qu’il avoit faict en la précédente de la résolution où il avoit
porté l’Empereur d’acorder à la France la satisfaction qu’elle prétend en Alle-
magne. On ne sçait sy cela ne procède point de la pensée que les Espagnolz
peuvent avoir suggérée depuis à l’Empereur d’essayer à nous contenter en
nous cédant la comté de Bourgogne plustost que l’Alsace, comme l’on a advis
icy de deux ou trois endroictz différens que l’on devoit bientost en faire la
proposition ausdicts Sieurs Plénipotentiaires, et de ce que l’Empereur aura
peult-estre recherché Bavières de ne nous descouvrir pas le secret de ce qu’il
luy a promis, attendant quel effect cette ouverture pourra produire à leur
avantage.
On tient pour certain néantmoins que quand ilz nous la verront rejetter bien
loin et qu’ilz nous recognoistront fermes et bien résoluz à ne nous relascher
jamais sur ce poinct, ilz se disposeront aussytost à y condessendre. Ce sont les
termes ausquelz l’ambassadeur de la républicque de Venize qui est icy en a
parlé depuis deux jours à monsieur le cardinal Mazarini et à monsieur de
Brienne, les informant de l’engagement où s’est mis l’Empereur avec l’envoyé
de Bavières à ce que luy escript son collègue, qui est en substance qu’il se
deffendra aultant qu’il pourra de céder l’Alsace, mais que s’il le faut à la fin
pour avoir la paix dans l’Empire il y donnera les mains.
Il est superflu de se mettre en peine de leur desduire les raisons pour lesquel-
les nous ne devons point accepter la Franche-Comté pour l’Alsace et Brisack,
elles sont trop évidentes surtout à qui a la cognoissance des affaires que les-
dicts Sieurs Plénipotentiaires ont.
Quand les ministres de Bavières et les Impériaux se mocquent de la fermeté
desdicts Sieurs Plénipotentiaires sur le subjet de Philisbourg et qu’ilz disent
de sçavoir qu’ilz n’ont pas ordre d’y incister, c’est une chose qu’ilz devinent,
mais dont ilz ne sçauroient avoir que des doubtes, l’affaire ayant esté résolue
comme on l’a
de Monsieur le Prince et de monsieur de Brienne; et quand lesdicts Sieurs
Plénipotentiaires soustiendront fortement le contraire jusques à ce qu’il soit
temps de déclarer la facilité que nous y apporterons, les uns et les aultres
seront bientost détrompez de leur croyance et cela pourra servir à haster la
résolution de la cession de l’Alsace.
On a eu beaucoup de joye d’apprendre que les Suédois reprennent le bon
chemin, et que lesdicts Sieurs Plénipotentiaires ayent eu satisfaction de leur
conduite dans la conclusion qui a esté prise en l’assemblée des estatz d’Ozna-
brug touchant nostre satisfaction et sur la demande du passeport pour les
députez du duc Charles.
Hyer fut signé le traicté pour la campagne avec Messieurs les Estatz par le-
quel ilz s’obligent de mettre vingt-cinq mil hommes en estat dans le 4 e de
may. Voylà Dieu mercy une affaire finie heureusement après tant de vacarmes
qu’avoient excité dans la province de Hollande les artiffices des Espagnolz
que l’on recognoist tous les jours plus clairement n’avoir eu aultre but en la
belle proposition qu’ilz firent de remettre tout au jugement de la Reyne, sy ce
n’est de donner telle apréhention à Messieurs les Estatz que la France ne se
fust accommodée sans eux, que l’allarme qu’ilz en prendroient les obligeast à
nous prévenir et à conclurre leur accord sans attendre le nostre. Tout est en
bonne assiète de ce costé-là, et on prétend encor obliger la province de Hol-
lande, en certaines choses qu’elle désire sur le subjet de la navigation qui la
convieront de plus en plus à estre favorable aux desseins communs et à consi-
dérer monsieur le prince d’Orange par les mains duquel on prendra soin de
faire passer la satisfaction qu’ilz en recevront.
Lesdicts Sieurs Plénipotentiaires ne pouvoient mieux respondre qu’ilz ont
faict à la belle proposition que les Hespagnolz n’ont pas eu honte de nous
faire porter en dernier lieu par les médiateurs. On n’a rien à leur dire sur ce
subjet sy ce n’est qu’il est à croire que quand les ennemis verront toutes les
affaires de Hollande en l’estat que nous pouvons souhaitter nonobstant toutes
leurs ruses, que le temps de la campagne s’approche sy fort et qu’ilz verront
de plus près nos grands préparatifs, ilz feront des ouvertures plus raisonna-
bles et dont ilz puissent attendre plus de fruict.
On est icy entièrement de leur advis sur la façon dont ilz estiment que l’on
doibt parler en Hollande et avec les ministres de Messieurs les Estatz tou-
chant tous les desconcertz que la malice des Espagnolz avoit faict naistre en-
tre nous et eux, qui est d’avouer sincèrement la vérité dont mesmes toutes
choses bien entendues ilz doibvent nous avoir obligation, leur disant que sur
les premiers discours que les médiateurs avoient jetté d’un mariage et d’un
eschange, Sa Majesté n’avoit pas seulement voulu songer à y prendre aulcune
résolution qu’elle n’eust auparavant appris quelz pouvoient estre là-dessus
les sentimens de Messieurs les Estatz par le moyen de monsieur le prince
d’Orange, auquel seul on s’en estoit ouvert parce que nous n’avions encor en
main rien de solide touchant la véritable intention des Espagnolz, mais seule-
ment des parolles entrecoupées des médiateurs qui pouvoient faire juger que
nos parties en eussent la pensée.
Lesdicts Sieurs Plénipotentiaires se sont prévalluz fort adroictement de la
qualité de la dernière offre que nous font les Espagnolz pour désabuser tous-
jours davantage les députez de Messieurs les Estatz de tous les faux bruictz
qui ont couru en leur pays, estant comme ilz remarquent très judicieusement
bien absurde que l’on nous veuille donner tous les Pays-Bas puisque pour
faire la paix, on ne nous offre que de céder quatre des moindres places que
nous avons conquis, prétendant la restitution de provinces toutes entières, et
des places les plus importantes de l’Europe qui ont cousté tant de sang des
subjetz du Roy et de trésors à cette couronne; et on ne peult comprendre
comme ilz sont sy hardiz de faire ainsy paroistre leur injustice et leur hauteur
dans la foiblesse où ilz sont
de noz despouilles et n’y ayant pas un François qui n’ayt le cœur percé de les
veoir tousjours en pocession de la Navarre qui n’est pas moins légitimement
au Roy que Paris.
Il y a longtemps que l’on a donné advis ausdicts Sieurs Plénipotentiaires que
le roy d’Espagne avoit destiné une somme notable d’argent pour distribuer
dans l’assemblée et particulièrement pour estre employée à gagner les députez
de Messieurs les Estatz. Il est certain qu’ilz n’espargneront quoy que ce soit à
leur esgard pourveu qu’ilz facent que lesdicts Sieurs Estatz s’accommodent
séparément; mais c’est aussy le seul service pour lequel ilz prétendent prodi-
guer leur argent, car pour d’aultres choses qui ne seront pas de cette considé-
ration, elles ne leur feront pas beaucoup ouvrir la main. Noirmon et Fricquet
sont les deux émissaires qu’ilz laschent après eux pour les séduire. Il sera bon
que lesdicts Sieurs Plénipotentiaires s’estudient à les descrier auprès desdicts
députez pour personnes qui se vantent de les gouverner et qui tiennent sou-
vent des discours injurieux à leur réputation comme s’ilz avoient espérance de
les corrompre par argent. Il fauldra glisser ce discours délicatement tesmoi-
gnant n’y faire nul fondement et de n’y prendre aultre part que celle que l’on
doibt par bienscéance pour l’honneur des alliez et des ministres sy qualiffiez
qui les servent.
On est icy du sentiment de Messieurs les Plénipotentiaires pour ce qui re-
garde le duc Charles et que le restablissement de ce prince dans ses Estats est
une récompence infiniement au-dessus du service incertain que l’on peult se
promettre en cette conjuncture d’affaires de luy et de ses troupes. Il y a long-
temps que l’on travaille à l’engager à se rendre maistre d’une des provinces de
Flandres comme lesdicts Sieurs Plénipotentiaires proposent, mais soit que les
moyens luy manquent, ou que son irrésolution ordinaire l’empesche de se
déterminer, il n’y a pas encore eu lieu de le persuader. On taschera pourtant
de le luy remettre de nouveau dans l’esprit, parce qu’il peult y avoir des in-
stans où il sera capable de le faire.
On ne veoid pas bien icy ce que peult changer en la face des affaires et en la
négotiation la déclaration que lesdicts Sieurs Plénipotentiaires pourroient
faire au nonce que la paix devant estre généralle, et Sa Majesté ne voulant rien
laisser en arrière qui puisse de nouveau altérer le repos de la chrestienté, il est
nécessaire pour cela que le pape donne satisfaction à la France dans les justes
subjetz de plainte qu’elle a des mauvais traictemens qu’elle en esprouve tous
les jours et que sy Sa Sainteté n’a agréable de le faire par d’aultres voyes, il
fault qu’elle se résolve que cela soit terminé dans le traicté mesme de la paix.
Sy lesdicts Sieurs Plénipotentiaires ont quelque chose à représenter sur ce
subjet avant que tenir ce discours-là aux médiateurs, ilz pourront le faire au
plus tost et Sa Majesté leur en fera plus particulièrement sçavoir sa volonté.