Acta Pacis Westphalicae II B 3,1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 3, 1. Teil: 1645 - 1646 / Elke Jarnut und Rita Bohlen unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy, mit einer Einleitung und einem Anhang von Franz Bosbach
Nous nous sommes aperceus icy de deux choses. L’une que les médiateurs et
les parties craignent extrêmement la prochaine campagne, sçachant les prae-
paratifs que l’on fait en France. Ils nous ont fort pressés pour nous départir de
la réserve qui est dans le praeambule de nostre proposition de pouvoir adjous-
ter ou expliquer , quoyque nos parties y ayent consenti et ayent fait la mesme
réserve de leur part, les médiateurs ont failli d’en venir aux extrêmes sur se
subjet avec nous, comme si nous voulions garder ce moyen de rendre le traité
immortel, et que nous y entendissions quelque grande finesse pour faire de
nouvelles demandes.
sion quand ils nous menacent de faire rompre l’assemblée si on ne s’acorde
dans peu de temps, s’imaginant et disant souvent un peu trop liscentieuse-
ment qu’on ne nous tient icy que pour amuser le monde et pour empescher
que les peuples de France ne se révoltent, ce qu’ils fairoient asseurément si le
traité estoit rompu. Le pis est que les Espagnols et eux s’acordent en cela e 1
qu’ils publient les uns et les autres tant chez eux que dans la compagnie qu’il
faut rompre l’assemblée si on ne fait rien dans trois ou quatre mois. Selon
mon foyble sens il se faut bien garder de faire paroistre que nous avons cette
apréhension.
On peut donner une bonne et une mauvaise interprétation au refus que font
messieurs les Suédois de 〈recevoir〉 avec eux monsieur de La Barde quand
ils traitent avec les Impériaux, comme nous apellons monsieur de Rosenan
quand nous traitons d’affaires avec messieurs les médiateurs. La bonne ou
pour le moins la moins mauvaise est qu’ils ne croyent pas les choses égales et
s’imaginent faire plus que nous à cause que le ministre du Roy seroit praesent
à tout ce qui se traitera avec les parties et que le leur n’assisteroit icy qu’à ce
que l’on fait avec les médiateurs et mesme avec l’un d’eux, ce qui leur laisse
lieu (outre les points d’honeur qu’ils en font) de soupçonner que monsieur le
nonce qu’ils ne voyent point et avec lequel nous traitons sans leur ministre,
peut estre chargé de diverses négotiations à leur désavantage ou du moins les
faire de son mouvement, d’autant, disent-ils, qu’il fait profession ouverte d’es-
tre leur ennemy aussy bien que de tout le parti protestant et de s’opposer à
tous leurs intérests tant politiques qu’ecclésiastiques. L’offre qu’ils font d’ex-
séquuter le traité d’alliance si nous prenons résolution de traiter icy avec les
Impériaux immédiatement comm’ils font à Osnabruc sert de fondement à
cette expliquation de leur dessein. En quoy nous sommes bien malheureux (si
les Suédois agissent de bonne foy) puisque nous nous brouillons avec eux et
faisons praejudice aux affaires du Roy pour conserver trop avant dans la mé-
diation un ministre qui ne nous peut estre favorable, le pape estant en l’estat
qu’il est avec la France.
Pour moy je ne sçay pas quel grand inconvénient il y auroit de déclarer à
monsieur le nunce que nous sommes obligés de nous assembler avec les Im-
périaux pour traiter et que nous ne pouvons pas nous y treuver sans nos alliés.
S’il refuse d’y assister, en ce cas la résolution viendra de luy, et il me semble
avoir remarqué au moins par quelques conjectures que quand il se verra forcé
il souffrira la praesence de nos alliés plustost que se priver de la médiation.
La mauvaise interprétation est que les Suédois peuvent avoir intention d’ex-
clurre le ministre du Roy de leurs conférences pour avoir plus de moyen de
traiter en liberté de leurs intérests particuliers et les adjuster avant les nostres
sans qu’on le découvre et pour cest effect sont bien aises d’en chercher de
praetextes sur ce que nous traitons icy d’une autre façon qu’ils ne font à Os-
nabrug, quoyqu’en effect ce soit une mesme manière d’agir, puisqu’il n’est pas
croyable que nous puissions dire des choses en l’assemblée où se treuvera le
nunce que nous n’aurons pas ozé dire à l’ambassadeur de Venise en celle où se
sera treuvé le résident de Suède et qu’il y a encor moins d’aparence que deux
médiateurs qui n’agissent qu’ensemble puissent traiter avec les Impériaux de
choses secrètes de nostre part sans qu’on le découvre bientost, quand mesme
nous serions capables de contrevenir aux traités de confédération.
Nous travaillons sans cesse pour aporter quelque remède à ce dessein en cas
qu’il soit véritable et qu’il nous paroisse plus clairement que les Suédois sont
capables de nous faire quelque infidélité, comme certes leur mauvaise
conduite donne subjet de le craindre, encor que les Hessiens et nos autres
amys qui ont intérest à conserver l’union de la France et de la Suède nous
asseurent que nous ne devons pas apréhender une entière défection des Sué-
dois, avouant néantmoins que leur manière d’agir est désobligeante.
Nous avons trois grands désavantages dans la négotiation des affaires de
l’Empyre sans lesquels nous fairions absoluement tout ce que nous voudrions.
Le 1 er est la praesence des Espagnols qui brouillent tout et tourmentent sans
cesse les Impériaux, les blasmant de leur facilité jusqu’à un point que ceux-cy
en sont rebutés et comencent de s’en plaindre, disant que la superbe des Es-
pagnols ruynera l’Empyre si on les veut croire.
Le 2 e est la disposition peu favorable pour nous des médiateurs et leur mau-
vaise conduite qui va jusqu’à nous blasmer publiquement par leurs lettres et
leurs discours, tantost de ce que nous sommes déraisonables dans nos deman-
des, tantost que nous ne voulons point en effect la paix. Ils ne font pas mesme
scrupule de reprocher aux Impériaux leur facilité quand ils se sont relaschés
sur quelque point contentieux, et de faire souvent des négotiations qui ten-
dent ouvertement à jetter de la division entre nous et nos alliés. Il n’y a guère
d’exemple d’un semblable procédé en des médiateurs qui doivent avoir pour
leur partage la douceur et la retenue et ne donner jamais leur jugement.
Le 3 e est la conduite désobligeante, altière et presque barbare des Suédois qui
peut-estre n’ayant dessein en effect que de découvrir ce que les parties veulent
faire pour eux dans le traité et de se faire plus considérer que nous par une
sotte vanité donnent des espérances aux Impériaux qui nuisent beaucoup aux
affaires et en les empeschant de prendre les bonnes voyes retardent la négo-
tiation au lieu de l’avancer, sans que nous leur puissions faire comprendre le
praejudice qui en arrive aux uns et aux autres, nos affaires estant grâce à Dieu
de part et d’autre en estat que nous pouvons espérer par le droit chemin d’ar-
river à une glorieuse paix pourveu que nous ne nous en détournions pas nous-
mesme.
Nous n’avons jamais peu les dissuader de faire de si grandes demandes pour
leur satisfaction qui sont condemnées par leurs plus grands amys dans l’Em-
pyre, et le pys est que pour se justifier du blasme qu’on leur en donne, au lieu
d’alléguer quelques bonnes raisons, ils n’ont pas honte de dire que nous de-
mandons encor 〈…〉 et exaggèrent à nos parties mesmes nos praetentions
au lieu de nous y ayder comm’ils nous avoient promis et comme nous les
aydons de nostre costé dans les leurs.
D’ailleurs ayant demandé beaucoup aparemment avec dessein de se relascher
d’une partie, ils nous font grand praejudice en ce que nous n’avons pas peu
faire la mesme chose et que nous avons esté contraints de rétraindre d’abord
nos demandes à ce que nous désirons en effect de retenir; le Roy ne possédant
pas tant de choses que dans l’Empyre nous avons esté comme forcés de pro-
poser nostre satisfaction en cette manière et n’avons jamais peu les disposer
d’en faire de mesme, en quoy nous aurons ce désavantage que quand on vien-
dra à conclurre un point, ils se relascheront de leur costé sans que nous le
puissions faire du nostre, ce qui faira croire qu’ils aporteront facilité à la paix
et que nous demeurerons trop fermes.
Il semble que pour nous garentir de ces maux on peut faire trois choses, l’une
de parler de delà confidemment au nonce et à l’ambassadeur de Venise
comme si on nous blasmoit d’avoir d’abord proposé les dernières choses où
nous nous pouvons réduire, bien que les Suédois n’en ont pas fait de mesme,
sans toutefois les blasmer. On pourra se servir si on le juge à propos des
raisons des différences que j’ay mises dans un mémoire séparé. On pourra
mesme adjouster qu’on ne se contentera pas de ce que nous avons demandé si
on attend la campagne et qu’elle nous soit avantageuse.
La 2 e de parler fortement et avec plainte au résident de Suède
Cérisantes; s. [nr. 41 Anm. 4] .
des plénipotentiaires de deçà, premièrement de ce qu’ils ont exclus de confé-
rences le ministre du Roy de leur authorité seule au praejudice d’un concert
praecédent fait avec eux et du traité d’alliance auquel il n’est ny de bon augure
ny de bon exemple de contrevenir si facilement; en second lieu de ce que
recevant tout sorte d’assistance de nous dans leurs intérests particuliers que
nous préférons souvent à ceux de la France, au lieu de nous rendre la pareille
ils font des discours qui nous nuisent et dont les parties tirent grand avantage;
et enfin de ce que par leur manière d’agir ils donnent des espérances d’un
traité particulier qui praejudicient beaucoup au général, encor que l’on sçache
bien que leur intention n’est pas mauvaise, mais cela empeschant les ennemis
de venir à leurs derniers offres, retarde la négotiation au lieu de l’avancer.
La troisiesme est de réduire nos demandes en la forme qui sera marquée cy-
après affin qu’il paroisse que nous ne sommes pas inflexibles et que nous nous
relaschons de nostre costé aussy bien que les Suédois, quoyque d’une manière
différente.
Ceux qui s’arrestent aux formalités et plus à la superficie des choses qu’à la
substance croyent que l’offre des trois éveschés fait par le comte de Trans-
mendorf est fort considérable. Pour moy je ne suis pas de cest advis, car
encor qu’il tende à faire cesser un ancien différend et que pour ceste raison on
eust esté bien aise de l’accepter avant la guerre, néantmoins les trois éveschés
ayant esté possédés depuis cent ans par la couronne de France, ce ne seroit
pas aujourd’huy tirer un fruit proportionné à la durée et aux pertes et dépen-
ses de cette sanglante guerre que de faire cas de cest offre, puisqu’en effect on
ne peut pas dire qu’il estende les limites de l’empyre françois et qu’encor
qu’on n’ayt joui des trois éveschés jusqu’à l’establissement du parlement de
Mets
1633; s. [nr. 4 Anm. 6] .
maistres absolus dans ce pays-là sans souffrir que l’authorité des empereurs y
ayent [!] esté recogneue que dans quelques aparences.
D’ailleurs cest offre si l’Alsace n’y est jointe ne rompt pas cette communiqua-
tion périlleuse pour la France des forces des Pays-Bas avec celles de la maison
d’Autriche d’Allemagne.
Il y a subjet de croire qu’il a esté fait artificieusement et à deux fins. L’une
pour faire voir aux estats de l’Empyre que l’Empereur veut achepter la paix en
cédant ses droits praetendus sur un pays qu’il dit estre usurpé par la France et
par ce moyen s’exempter d’une autre satisfaction comme si celle-là estoit suf-
fisante, quoyqu’elle ne contienne que des choses qui apartiennent desjà de
longue main à la couronne et que tous les autheurs modernes ne comptent
plus parmy les dépendances de l’Empyre. La seconde qui est la plus dange-
reuse, pour faire cognoistre aux estats de l’Empyre et au reste du monde que
la France ne reigle point ses desseins par la justice puisqu’après avoir possédé
un pays longtemps par droit de protection, ell’a de son authorité privée chan-
gé la protection en propriété au praejudice des droits de l’Empyre, ce qui doit
faire craindre qu’elle ne fasse un jour le mesme des autres Estats qu’on luy
pourroit laisser maintenant et qu’insensiblement elle ne vienne de cette sorte
non seulement à démembrer honteusement l’Empyre, mais à l’usurper par le
moyen des forteresses qu’elle veut retenir sur le Rhin. Quelques princes d’Al-
lemagne m’en ont parlé en ces termes et m’ont témoigné que la France ne
pouvoit rien faire qui luy fust plus praejudiciable dans l’Empyre que l’esta-
blissement du parlement de Mets. Nos instructions nous obligeoient bien de
déclarer qu’on n’a point entendu par là de faire praejudice aux droits de l’Em-
pyre, mais depuis l’offre qui nous a esté fait de céder les trois éveschés nous
n’avons plus ozé faire cette déclaration pour ne praejudicier pas à l’offre et
affin d’obtenir s’il est possible l’un et l’autre par le traité.
Néantmoins comme cette praetention paroist excessive et nous acquiert quel-
que envie comprenant presque toutes les parts, aux moins les principales qui
composoient autrefois le royaume d’Austrasie , il semble que nous avons
quelque intérest de la modérer ou de la rendre plus plausible, n’important pas
beaucoup à nos roys en quelle forme tout ce pays leur demeure pourveu qu’en
effect ils en soient les maistres et qu’ils n’y puissent pas estre inquiétés, ce qui
arrivera difficilement quand aux droits de souveraineté ou de protection
qu’on y acquerra quoyque relevant de l’Empyre ils joindront la rétention de
plusieurs forteresses importantes que l’on pourra tousjours secourir facile-
ment, n’y ayant rien qui les sépare du reste du royaume, et cependant Son
Eminence aura fait acquérir à la Reyne pendant sa régence la gloire d’avoir
rendu à la France ses anciennes limites du Rhin et des Pyrénées par un traité
de paix.
J’estimerois donc que pour diminuer l’envie qui peut naistre des grandes prae-
tentions du Roy du costé de l’Empyre, si on void qu’elles soient mal receues
dans l’assemblée des estats et qu’il y ayt trop de difficulté d’obtenir l’Alsace
avec l’offre qui nous a desjà esté fait, on pourroit enfin déclarer quatre choses
qui certainement fairont toutes très bon effect et fairont paroistre dans le
monde un grand relaschement en faveur de la paix pour opposer à celluy que
les Suédois fairont de leur costé en diminuant leurs demandes.
La 1 re que le Roy donnera autant en pension bien assignée dans son royaume
(ou à toute extrémité en terres domaniales) aux princes de la maison d’Autri-
che, que l’Alsace et le reste du pays qu’on prétend de retenir sur eux leur
valoit de revenu avant la guerre. J’aprends que c’est peu de chose et qu’il ne
montoit pas à deux cents mille livres, sur quoy je diray en passant que nous
eussions bien eu besoin de l’information que nous avions demandée
Am 22. VII. 1645 hatten die frz. Ges. in Paris darum gebeten, durch eine geeignete Person die
genauen Rechts- und Besitzverhältnisse im Elsaß feststellen zu lassen ( APW II B 2 Beilage zu
nr. 172, S. 539). Am 5. VIII. teilte Brienne ihnen mit, daß Vautorte (s. [nr. 1 Anm. 4] ) mit
dieser Aufgabe betraut worden sei ( APW II B 2 nr. 178, S. 558).
peut-estre le baron d’Oisomville
particulière seroit bien nécessaire auprès de nous.
La seconde que le Roy n’entend point démembrer les trois éveschés de l’Em-
pyre ny la partie de la Lorraine qui en relevoit avant cette guerre et offre de
relever de l’Empereur les droits de protection et tous autres qui apartiendront
à Sa Majesté dans ledit pays à condition que dans lesdits droits celluy d’y
establir un parlement sera particulièrement spécifié et en tant que du besoin
confirmé par l’Empereur. Il me semble mesme que pour l’obtenir dans l’in-
vestiture qui pourra estre expédiée au Roy en exéquution du traité de paix on
pourra prometre à l’Empereur quelque somme d’argent comm’on fist autre-
fois à l’empereur Maximilien pour avoir l’investiture du duché de Milan
Cela serviroit beaucoup à faciliter l’affaire dans la nécessité où se treuve l’Em-
pereur et dans l’apréhension où il est de l’invasion du Turc, cependant il nous
seroit fort honorable en asseurant au Roy ce pays de conserver le parlement
de Mets lequel selon mon foyble sens on a établi sans beaucoup de raison et
sans que nous puissions justifier cette nouveauté quand on nous en fait
plainte. L’Empereur n’en recevroit pas plus de praejudice qu’il reçoit des sé-
nats de Savoye, de Piémont et de Milan et le [!] parlement de Dolle
jugent souverainement quoyque dans des Estats qui relèvent de l’Empyre.
Mais je croy qu’en ce cas pour rendre les droits du Roy plus légitimes et plus
conformes aux coustumes de l’Empyre et faire cesser pour jamais toute sorte
de difficultés, il faudroit songer de bonne heure à acquérir la souveraineté
dudit pays des évesques ausquels elle apartient en leur donnant récompense
ailleurs à leur contentement et qui augmentast au moins en revenu la condi-
tion de l’Eglise dont ils seroient bien aises.
La 3 e que le Roy offre de restituer l’Alsace lorsque la maison d’Autriche aura
fait rendre à la France les autres Estats dont ell’a esté cy-devant dépouillée par
les armes de ladite maison.
La 4 e que la France ne faira pas difficulté de rendre l’Alsace aux princes aus-
quels ell’a cy-devant apartenu en cas que l’Empyre vienne à n’estre plus pos-
sédé par des princes de leur maison; à condition toutefois qu’on aportera les
seurtés nécessaires, pour remettre ledit pays entre les mains de nos roys lors-
que l’Empyre rentrera dans ladite maison. Cela fairoit deux bon effects. Le 1 er
fairoit voir que nous ne le praetendons que pour nostre seurté et non point
par ambition. Le second montreroit que la France se veut intéresser à conser-
ver l’Empyre dans la maison d’Autriche affin de n’estre pas obligée en ce cas
de rendre l’Alsace.
On pourroit adjouster une cinquiesme déclaration, d’obliger nos roys à four-
nir pour ledit pays un certain nombre de gents de guerre pour l’assistance de
l’Empyre contre le Turc, ce qui rendroit encor nos demandes plus favora-
bles.
Tout cela ne diminuant point l’estendue du pays que nous praetendons don-
ner à la France par ce traité, la rendroit à la vérité dépendante en quelque
sorte de l’Empereur. Mais outre qu’on ne peut l’obtenir autrement si on ne
veut irriter tout l’Empyre qui ne peut souffrir aucun démembrement, l’on ne
le posséderoit pas pour cela avec moins de seurté pour la France et l’acquisi-
tion n’en seroit pas moins glorieuse et utile, comme le royaume de Naples
n’est pas beaucoup moins estimé pour relever du pape. Cependant nous en
recevrions cest avantage que nos roys devenant par ce moyen membres de
l’Empyre, non seulement auroient droit d’envoyer aux diètes pour empescher
les menées que l’Espagne y a tousjours faites au praejudice de la France, mais
ne pourroient plus estre exclus de l’Empyre comme estrangers en cas qu’un
jour ils y voulussent penser. Nous voyons que l’archevesque de Trèves
Richard von Greiffenklau zu Vollraths (1467–1531), 1511 Ebf. und Kf. von Trier ( ADB
XXVIII S. 413–418 ; Schmidt).
que l’élection de Charles Quint fust faite , pour faire admetre François I er
remarqua qu’il ne devoit pas estre considéré comme estranger dans l’Empyre,
puisqu’il possédoit le duché de Milan qui en relevoit et le royaume d’Arles
qui en estoit un membre (quoyque nous ne puissions pas demeurer d’accord
de ce dernier). L’archevesque de Mayence
Albrecht (1490–1545), Mgf. von Brandenburg, 1514 Ebf. von Mainz ( ADB I S. 268–271 ).
les Quint soustint tousjours que François I er estoit estranger et pour cette
seule raison ne pouvoit estre éleu par les loix de l’Empyre.
Nous sommes advertis que les Impériaux ne se soucient pas beaucoup du duc
Charles et qu’ils n’ont pas esté fort piqués du refus que nous avons fait de luy
acorder un passeport du Roy. Aussy avons-nous creu que Trautmensdorf re-
cevra moins de praejudice de ce que nous excluons ledit duc du traité en suite
de l’exclusion qui luy a esté donnée pendant les praeliminaires que si nous
souffrions qu’il vinst ou députast icy et qu’après cela nous ne voulussions rien
faire pour luy en faveur de l’Empereur ny des Espagnols. Il nous semble qu’ils
se rejettent l’affaire les uns aux autres et que chacun est bien aise d’en charger
son compagnon, jugeant très bien qu’elle ne peut pas réussir avantageusement
pour ledit duc. Il seroit bien nécessaire de sçavoir si après avoir soustenu que
son affaire n’est point de ce traité et n’y doit pas estre jointe à cause des divers
traités par lesquels ledit duc a renoncé à l’alliance de la mauvaise [!] d’Autri-
che à l’exéquution desquels nous avons intérest de nous tenir, nous ne pour-
rions point enfin consentir par le traité qui sera fait que ledit duc envoye des
députés au Roy pour repraesenter ses raisons et que Sa Majesté y aura tout
l’égard que la raison et la justice pourront requérir. Il fust fait de la sorte pour
la Navarre par le traité de Noyon entre François 1 er et Charles Quint
Vertrag von Noyon zwischen Franz I. und Karl V. vom 13. VIII. 1516 (Druck: Du Mont
IV,1 S. 224–228). Die Frage der Restitution Navarras an Heinrich II d’Albret (1503–1555;
Isenburg NF II T 14B) wurde darin aufgeschoben: Heinrich sollte seine Ansprüche direkt
beim span. Kg. vorbringen, der Navarra 1512 erobert hatte, und dann eine Satisfaktion selon
la raison erhalten ( Boissonnade S. 483f.).
Je sçay de bon lieu que ledit duc et les Espagnols ont esté esgalement piqués
de l’offre que Trautmensdorf nous a faite, le premier à cause de ce qu’il pos-
sédoit avant cette guerre qui relevoit des trois éveschés, les autres à cause
de Pignerol qu’ils praetendoient de mettre en condition 〈dans〉 les affaires
d’Italie. Ils se sont plaints aigrement que cela ayt esté avancé sans leur avoir
esté communiqué.
Chigi hält es bei schonendem Vorgehen nach wie vor für möglich, die Barberini-
Affäre beizulegen – wobei die Anwesenheit eines geschickten französischen Vertre-
ters in Rom sehr nützlich wäre –, und rät, auf den Großherzog von Toskana und
durch ihn auf den Papst einwirken zu lassen.
1. Zusatz
Zwischen 1. und 2. Zusatz befindet sich fol. 95–95’ ein Sonderbillet für den abbé Servien
(Privatangelegenheiten). Beide Zusätze sind durch Überschriften (pour adjouster au grand
mémoire bzw. pour le grand mémoire ) und Paginierung Serviens als an den bisherigen Text
vom 13. I. 1646 anschließend gekennzeichnet und im Dorsal fol. 96’ auf 1646 Januar 15 da-
tiert .
de nostre satisfaction peuvent contribuer beaucoup à la rendre plus honeste et
agréable aux estats sans faire aucun praejudice à la France ny mesme courre
fortune qu’elles soient acceptées, car il paroist clairement que les Impériau 1
craignent si fort que nos roys ne deviennent princes de l’Empyre pour monter
par ce moyen un jour à la dignité impériale qu’ils aymeront presque autant
faire céder tous les droits de l’Empereur sur ce qui nous demeurera que de la
faire relever de l’Empyre.
2. Zusatz : J’avois parlé à monsieur de Longueville d’un parti à prendre en cas
que les Suédois continuent de mal vivre avec nous et nous donner subjet légi-
time de plainte, mais comme nous ne voyons pas encor assez clair de ce costé-
là et qu’il me semble que l’entière infidélité n’est pas à apréhender, il est à
propos de demeurer encor sur la retenue de crainte que le remède que nous
penserions aporter au mal n’en devinst la cause en fournissant un praetexte
aux Suédois de passer outre, sans quoy peut-estre ils n’en auroient pas eu
l’envie. C’est pourquoy le parti paroist encor un peu trop périlleux.
C’est de proposer la paix comm’elle peut estre faite raisonablement dans
l’Empyre en donnant une juste satisfaction aux estats et celle des deux cou-
ronnes en particulier, y mesnager les intérests des alliés, celluy de Bavière et
du Palatin, et se joindre tous de bonne foy contre ceux qui ne la voudroient
pas accepter. Pourveu que l’Empereur et Bavière en tumbassent d’acord, il
faudroit que le reste suivist et ce seroit un moyen honorable pour nous déga-
ger de ceux qui nous traitent tyranniquement et veulent nous payer d’ingrati-
tude. Néantmoins il est un peu périlleux et n’est qu’un conseil d’extrémité
dont je n’aurois pas pris la liberté d’escrire si je n’avois recogneu aujourd’huy
au discours de monsieur de Longueville qu’il le vouloit proposer à Son Emi-
nence. Je ne sçay s’il l’aura peu expliquer au long , car toutes les principales
difficultés de la paix y sont assez bien décidées, mais je reviens tousjours à
dire que la voye est périlleuse et que nous ne sommes pas encor réduits à nous
en servir.
Les députés de Messieurs les Estats sont arrivés
nous paroist obligeante, syncère et pleine de recognoissance envers Leurs Ma-
jestés. Si les choses continuent avec eux dans le chemin qu’elles prenent, nous
n’aurons pas beaucoup de peyne de ce costé-là.
3. Zusatz : Il paroist clairement que les desseins de Trautmandorff sont tout à
faict contraire[s] aux nostres dans les moyens de faire la paix. Nous désirons
que les choses se facent aux despens de l’Empereur et de la maison d’Autriche
sans préjudicier à l’Empire, et luy tout au contraire ne se soucie ny de l’Em-
pire ny de la religion ny mesmes des intérests de Bavières, pourveu qu’il ga-
rentisse de 〈…〉 le plus qu’il pourra l’Empereur en particulier et la maison
d’Autriche. Ce qui est de fascheux en cela est que les Suédois s’acorden 1
en quelque façon avec luy dans ce dessein affin d’avoir plus grand nombre
d’éveschés qui leur demeure et en établissant leur puissance en plus de lieux y
establir aussy la religion protestante. Je ne sçay s’yl ne seroit point à propos
d’en faire parler audit duc de Bavières confidemment en luy tesmoignant que
l’on croid que ses ministres l’en auront desjà averty. Peult-estre que cela
l’obligeroit de s’ouvrir plus franchement avec nous tant pour l’intérest du pu-
blic et de la religion que pour le sien propre lequel certainement Trautmens-
dorf n’affectionne pas beaucoup.
4. Zusatz
sent d’adjouster au dernier traité de La Haye leur article 9 e touchant l’alterna-
tive de la paix ou de la trêve , ce n’est pas à dessein d’avoir une somme d’ar-
gent considérable de la France en cas qu’après la trêve finie ils soient
contraints de rentrer en guerre contre les Espagnols, mais pour nous porter en
effect à ne faire qu’une trêve non plus qu’eux, laquelle en ce cas ils seroient
obligés de consentir à très longues années. C’est pourquoy pour n’entrer
point en contestation avec eux à l’entrée de cette négotiation, en cas que nous
ne puissions pas renvoyer ce différend jusqu’à la fin du traité comme nous
tâcherons de faire, je persiste tousjours à croire qu’il n’y auroit pas grand
inconvénient à passer cest article 9 qu’ils nous proposèrent à La Haye et qu’il
vaudroit beaucoup mieux en demeurer d’acord que de prometre trois ou qua-
tre millions de livres pour lesquels ils auroient encor peyne de nous quitter
praesentement. Je vous en ay cy-devant marqué quelques raisons et vous
suplie de me faire sçavoir quel est le sentiment de Son Eminence auquel je
soubscriray aveuglément. Car nous allons d’abord entrer malgré nous dans
cette contestation et praesuposé qu’ils ne veuillent pas nous quitter pour de
l’argent, nous aurons peyne d’en sortir que par cest expédient qui nous don-
nera aujourd’huy la liberté de faire nos affaires avantageusement, c’est-à-dire
par une bonne paix, et nous laissera le moyen un jour de repraesenter nos
raisons en un temps plus commode et moins périlleux pour nous parce que
nous n’aurons pas à craindre comm’à praesent que les Hollandois se puissent
acomoder sans nous, au contraire ils seront alors les seuls à craindre de ren-
trer en guerre, au lieu qu’à praesent nous sommes les seuls qui avons à crain-
dre d’y demeurer si nous refusons de faire tout ce qu’ils voudront, puisque les
Espagnols les recherchent tant et s’éloignent si fort de nous.
Et quand aux Espagnols je ne doute point qu’ils ne consentent à l’article
quand nous serons obligés de le leur déclarer, puisqu’il ne devra avoir effect
qu’en cas que ce soit eux qui ne veuillent pas continuer la trêve et que par ce
moyen la guerre sera entièrement en leur disposition. L’affaire n’est pas sans
exemple, il me semble qu’il y a quelque chose de semblable dans le traité de
Noyon d’entre François 1 er et Charles Quint et qu’ils se réservèrent l’un d’as-
sister le roy d’Angleterre et l’autre les Vénitiens sans rompre la paix entre
eux.