Acta Pacis Westphalicae II B 3,2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 3, 2. Teil: 1646 / Elke Jarnut und Rita Bohlen unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy mit einer Einleitung und einem Anhang von Franz Bosbach
282. d’Avaux an Mazarin Münster 1646 Mai 21

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[ [265] ] / 282 /–

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d’Avaux an Mazarin


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Münster 1646 Mai 21

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Ausfertigung: AE , CP All. 60 fol. 324–331’ = Druckvorlage. Kopie: AE , CP All. 76 fol.
20
420–432’. Eigenhändiges Konzept: AE , CP All. 65 fol. 189–197.

21
Schuld der Spanier an der Verweigerung Breisachs. Kritik Contarinis an Trauttmansdorffs Os-
22
nabrücker Verhandlungen. Gespräch d’Avaux’ mit Trauttmansdorff: Breisachforderung, Interes-
23
sen der Katholiken, Behandlung der Erzherzöge von Tirol, Ansprüche der Spanier auf das Elsaß,
24
Einstellung Mazarins. Ressentiment Trauttmansdorffs. Widerlegung seiner Vorwürfe und Ver-
25
dächtigungen . Politik gegenüber England und dem Papst. Ablehnung von Trauttmansdorffs Ge-
26
genvorschlag in der Breisachfrage. Zurückweisung eines weiteren Vorschlags der Mediatoren.
27
Protest Volmars. Aussicht auf Einlenken Trauttmansdorffs. Dessen geplante weitere Verhand-
28
lungsschritte . Interessen Spaniens. Angebliche Bereitschaft der Spanier, auf alle holländischen
29
Wünsche einzugehen. Beteuerungen der Bündnistreue durch Mathenesse und Pauw. Eintreten der
30
Bayern für Frankreich in der Breisachfrage.

31
Nous avons sceu de divers endroitz que ce sont les Espagnolz qui empeschent
32
et à Vienne et icy qu’on ne nous accorde Brisach. C’est chose très asseurée.
33
|:Contarini:| me l’a avoué en particulier, mais après avoir stipulé le segret; et
34
l’autre jour comme |:nous estions avec les médiateurs et que chacun de
35
nous:| se plaignoit qu’un si grand ministre que le comte de Trautmansdorff
36
s’esloigne à présent d’une condition dont il avoit donné tant d’espérance |: le-

[p. 985] [scan. 315]


1
dit sieur Contarini nous pria de l’espargner et dit::| «Merita d’esser compatito
2
non che scusato.» Il dit aussy que nous avions sujet de nous louer dudit comte
3
|:et que le mal vient d’ailleurs. Il désaprouva néantmoins sa négotiation d’ Os-
4
nabruk :|, ne pouvant comprendre comment il avoit accordé tant de choses
5
|:aux Suédois et aux protestans de l’Empire sans en avoir receu une bonne
6
parolle:|.

7
Cella nous aiant fait voir qu’il estoit à propos de |:mesnager l’esprit du conte
8
de Trautmansdorf:| je le visitay jeudy dernier

42
17. Mai 1646.
par l’avis de messieurs mes
9
collègues.

10
Il n’est pas inutile de sçavoir que l’heure estant arrestée à trois heures après
11
midy, les ambassadeurs de Hollande qui devoient venir entre une et deux
12
chez monsieur le duc de Longueville ne s’y trouvèrent qu’entre deux et trois.
13
L’heure sonnant j’envoyay prier le comte de Trautmansdorff d’avoir agréable
14
que je différasse un peu de temps pourveu que sa commodité le permist,
15
sinon, je quitterois l’audience desditz ambassadeurs pour aller chez luy. Il me
16
manda fort courtoisement qu’il m’attendroit tout le jour et jusques à huit
17
heures du soir si je voulois.

18
Je me rendis chez luy un peu après quatre heures, et je cogneus aussytost à
19
l’accueil qu’il me fit et à son entretien qu’il estoit bien aise que je l’eusse esté
20
voir, car il me dit d’abord qu’il s’en retournoit à Osnabrug dimanche ou
21
lundy au plus tard (qui est aujourd’huy) et qu’il me remercioit de la peine que
22
j’avois prise d’aller en son logis puisque nostre conférence pourroit servir à
23
l’avancement des affaires. Qu’il ne me pouvoit celer que nous traittions rude-
24
ment son maistre, que si Brisach estoit de l’autre costé du Rhin il juroit Dieu
25
qu’on n’auroit fait nulle difficulté de nous le laisser, mais que cette place ou-
26
vrant le passage en Allemagne si l’Empereur l’accordoit aux François ce seroit
27
faire la paix sans estre jamais en paix. Je respondis à tout cella avec douceur,
28
et mesmes avec quelque excuse de ce que j’estois obligé de le contredire, luy
29
qui estoit un des hommes du monde pour qui j’avois plus de respect; et après
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l’avoir fait souvenir de beaucoup de facilitez que nous avons apportées en ce
31
traitté jusques-là, que nous avons escrit favorablement à la cour touchant ce
32
qu’il nous fit cy-devant proposer par les médiateurs et par les Bavarrois , je le
33
priay d’en juger par la comparaison de tous les autres intérestz qu’il a eu à
34
desmêler en cette assemblée soit avec les plénipotentiaires de Suède soit avec
35
les estatz de l’Empire, et que je n’en voulois pas excepter les Espagnolz mes-
36
mes . |:Il sousrit un peu et:| je continuay à dire et à luy faire avouer tacite-
37
ment (au moins si le silence en est une marque) qu’on s’est beaucoup relasché
38
en France à l’esgard de l’Empire. |:J’ajoustay à dessein que j’en sçavois bien la
39
cause et qu’il la connoistroit un jour:|. Il me regarda aussytost |:et assés lon-
40
guement , luy qui d’ordinaire tient la veue basse:|, et sans respondre en destail
41
à ce que dessus il reprit son premier discours et me voulut persuader que

[p. 986] [scan. 316]


1
Brisach demeurant entre noz mains l’Empereur n’ozeroit jamais s’engager
2
dans une rupture ouverte contre le Turc. J’essayay de luy oster cet ombrage
3
par toute la cognoissance que je puis avoir des conseilz du Roy, et de luy
4
donner meilleure opinion de nous; qu’au contraire j’estois bien asseuré que
5
Vostre Eminence porteroit Sa Majesté à donner assistance à l’Empereur et à
6
favoriser une si sainte guerre. «Ouy, dit-il, pourveu que les choses soient en
7
balance, mais en cas que nous fissions quelques progrès en Hongrie voz jalou-
8
sies recommenceroient aussytost, vous ne pouvez souffrir que la maison
9
d’Austriche s’agrandisse, et tout le mal que nous avons aujourd’huy ne procè-
10
de que d’une vaine et imaginaire ambition que les François nous imputent
11
d’aspirer à la monarchie universelle. Ilz ne cognoissent pas nostre cour et je
12
vous déclare Monsieur que |:si les Espagnolz avoient une si folle pensée:| les
13
empereurs d’Allemagne seroient les premiers à s’y opposer.» Je luy tesmoi-
14
gnay de le croire parce que la raison et leurs intérestz le veulent ainsy, je dis
15
seulement que la France a eu grand sujet d’arrester le cours de l’ambition des
16
Espagnolz et de pourvoir s’il estoit possible à ce qu’elle ne fust plus soustenue
17
des forces de l’Empire comme on a veu en des guerres qui ont esté trouvées
18
injustes de tout le monde, et que c’est de là que vient le mal. Qu’on sçavoit
19
bien que si luy, Trautmansdorff, en eust esté creu le feu empereur ne se seroit
20
pas engagé dans l’entreprise des Espagnolz contre Cazal et Mantoue , et
21
qu’en ce cas il auroit laissé à son filz le plus florissant empire de toute la terre.
22
Il l’avoua franchement et dit qu’il avoit |:résisté au prince Eckenberg. Je dis
23
en passant que les Espagnolz s’en souviennent:|, mais il me semble qu’il n’y
24
prit pas garde et qu’il avoit l’esprit occupé à tirer proffit de cette confession
25
en me voulant faire craindre que Dieu les ayant punis (comme il ne feignit
26
point de dire) pour avoir adhéré à une mauvaise cause, il ne chastiast aussy la
27
France pour avoir pris un party qui ruine la religion catholique, et pour avoir
28
traitté avec tant de rigueur des princes innocens: il vouloit parler des archi-
29
ducs d’Inspurch. Je me deffendis sur le premier point par la nécessité où la
30
maison d’Austriche nous a jettez de nous joindre avec les protestans; que ç’a
31
esté pour deffendre noz autelz et pour empescher qu’une inondation d’ Alle-
32
mans n’en fist autant en France qu’à Mantoue; que le roy d’Espagne s’estoit
33
allié avec le duc de Rohan

43
Henri, duc de Rohan (1579–1638), Anführer der Hugenotten ( NBG XLII Sp. 516–520).
, chef des huguenotz, et que j’en avois veu le traitté;
34
qu’en tous ceux que nous avons faitz avec la couronne de Suède et la maison
35
de Hesse-Cassel il est porté expressément que l’exercice de la religion catho-
36
lique et les biens d’Eglise demeureront au mesme estat où ilz estoient dans les
37
lieux qui pourront estre occupés; que nous avons tenu la main à l’exécution
38
de cet article, et qu’en effet hors quelques désordres arrivés par la licence
39
militaire il ne se trouvera pas que les Suédois ny les Hessiens aient chassé les
40
catholiques ou ecclésiastiques en aucun endroit; que si à présent les protestans
41
de l’Empire ou noz alliez mesmes prétendent des éveschez catholiques et au-

[p. 987] [scan. 317]


1
tres choses directement contraires à la religion et à ce qui a esté convenu entre
2
nous, ilz ne seront point assistez du Roy pour ce regard; que chacun sçait que
3
nous le déclarasmes dernièrement icy à monsieur Oxenstiern et empeschas-
4
mes qu’il ne demandast les éveschez de Minden et d’Osnabrug pour partie de
5
la satisfaction de Suède; et qu’il nous reproche aujourd’huy que nous leur
6
faisons plus d’obstacle en ce point que les Impériaux mesmes. J’adjoustay que
7
c’est luy, Trautmansdorff, qui a accordé l’archevesché de Brême, l’évesché de
8
Verden et celuy d’Halberstat sans que nous en aions dit un seul mot. Il répli-
9
qua que nostre silence ne sert de rien aux catholiques puisque nostre armée
10
parle en faveur des protestans qui osent tout entreprendre se voyans appuies
11
des forces et de l’authorité de la France; qu’il ne leur donne point de biens
12
d’Eglise, mais qu’il leur laisse, faute de les pouvoir retirer de leurs mains tant
13
que nous agirons de concert avec eux, et que nous ne voudrons pas seulement
14
leur faire observer ce qu’ilz nous ont promis; qu’on verra bien par cette
15
conduitte que l’article cy-dessus n’aura esté inséré dans noz traittez que par
16
forme et pour sauver les apparences si après avoir stipulé tant de fois la
17
conservation de la religion catholique nous venons en effet à l’abandonner. Je
18
ne demeuray pas court, |:mais à n’en point mentir je ne dis rien qui vaille et:|
19
je vous avoue Monseigneur que je suis foible et mal préparé de ce costé-là. La
20
meilleure évasion que je trouvay, fut de luy dire: «Tousjours paroist-il par là
21
que vous autres Messieurs aimez mieux donner des éveschez et mesmes de
22
ceux qui sont entre les mains des catholiques que de toucher à la Silésie ou
23
autres terres de l’Empereur; présupposé que vous estes forcez d’accorder
24
quelque chose aux protestans, tousjours ce choix-là vient de vous, et ainsy
25
vous faittes volontairement le préjudice que l’Eglize en reçoit.»
26
Quand à la rigueur dont il nous accusoit à l’esgard des jeunes princes d’ Ins-
27
pruch , je le priay de se souvenir de ce que [je] luy avois respondu une autre
28
fois sur le mesme sujet et le répétay succinctement. Mais je me servis encores
29
de la déclaration que les plénipotentiaires d’Espagne nous ont depuis faitte
30
que l’Alsace appartient au roy leur maistre, et qu’ilz prétendent que la cession
31
qu’il en fera au proffit du Roy doit obliger Sa Majesté à luy céder ailleurs
32
quelque autre droit . Qu’ainsy les archiducs n’y perdent au plus qu’une jouis-
33
sance incertaine d’un Estat si chargé de debtes que le revenu ne suffit pas pour
34
en payer les arrérages. Je dis une jouissance incertaine puisqu’elle dépend de
35
la grâce du propriétaire. Le comte de Trautmansdorff nia que l’Alsace appar-
36
tienne au roy d’Espagne, dit en avoir les preuves en main |:et trouva un peu
37
estrange que Pennaranda en eust parlé si affirmativement. Cela ne me dépleut
38
pas et me donna lieu de luy faire voir:| que l’amitié des Espagnolz couste
39
cher à l’Empereur et qu’ilz ne l’espargnent pas luy-mesmes ny sa maison
40
quand ilz y trouvent le moindre avantage. Puis je conclus qu’ilz devoient s’ ac-
41
corder entre eux, et qu’il n’est pas raisonnable que l’Empereur, les archiducs

[p. 988] [scan. 318]


1
d’Inspruch, et le roy d’Espagne nous mettent tous une mesme chose en ligne
2
de compte. Il dit qu’ils le peuvent prétendre par divers respectz, l’Empereur
3
parce que l’Alsace est un membre de l’Empire; les archiducs parce qu’ilz en
4
sont propriétaires; et le roy d’Espagne à cause du droit qu’il a d’y succéder
5
comme estant un pays héréditaire de sa maison.

6
De là il revint à l’exclusion de Brisach la voulant fonder sur beaucoup de
7
raisons, entre lesquelles aiant encores touché le péril où l’on seroit tousjours
8
de voir de nouveaux troubles en Allemagne, spécialement lorsque l’Empereur
9
seroit engagé ailleurs, je luy déclaray derechef positivement et en homme
10
d’honneur que nous sommes très esloignez d’une telle pensée, que ce seroit
11
une indignité de les attaquer quand ilz attaqueront le Turc, et que la France
12
sera bien aise qu’ilz estendent leurs limites de ce costé-là; que je ne parlois pas
13
sans fondement et sçavois aussy |:la haute estime que vous faites de sa per-
14
sonne et en quelz termes Vostre Eminence nous en escrivoit sitost qu’elle
15
sceut son envoy à Monster:|. Sa response fut fort civile et accompagnée de
16
|:quelque joye de se voir estimé de Vostre Eminence:|, mais il ne laissa pas de
17
tesmoigner tousjours du ressentiment de leurs maux qu’il attribue à vostre
18
conduitte |:et à une affectation de paroistre plus zélé pour la France que le[s]
19
François mesmes:|. Je ne vous desguise rien Monseigneur, je ne cherche pas à
20
vous escrire des choses agréables, mais à vous servir fidellement affin que
21
vous ne preniez pas de fausses mesures. |:Ce ministre n’est point content:|,
22
c’est la seconde fois qu’il m’a tenu ce langage

41
Zum ersten Mal in [ nr. 224 ] .
, mais celle-cy plus à descouvert
23
et avec plus de liberté. Il est vray qu’il receut assez bien les raisons dont j’ay
24
maintenu la justice et la nécessité du procédé de Vostre Eminence. Il ne me
25
put nier que |:la qualité d’estranger ne vous oblige à faire:| quelque chose de
26
plus que |:si vous estiez né François, comme la Reyne est obligée:| à la
27
mesme chose parce qu’elle |:est sœur du roy d’Espaigne:|. Il fit aussy ré-
28
flexion sur ce que je luy dis pouvoir monstrer par escrit que dans l’instruction
29
qui me fut donnée du vivant de feu monsieur le cardinal de Richelieu

42
Richelieu war am 4. XII. 1642 gestorben. Zu seinem maßgeblichen Anteil an den Instruktio-
43
nen für die Ges. und zur frz. Forderung von Breisach s. APW I 1 .
il y a
30
ordre précis de ne faire jamais la paix sans garder Brisach; que ce n’est donc
31
point une dureté de ce siècle, et qu’il vous l’imputoit à tort, mais que je le
32
priois de considérer par sa prudence si après tant de victoires et de conquestes
33
adjoustées à celles du feu roy il vous est possible d’en faire aujourd’huy meil-
34
leur marché, et quel murmure ce seroit par toute la France; qu’en l’estat où est
35
Vostre Eminence l’on ne manque jamais d’envieux, et qu’il ne vous conseille-
36
roit pas de leur donner si beau jeu; qu’il devoit juger de vous par luy-mesmes
37
et que s’il fait tant d’effortz pour une place qu’ilz n’ont pas et qu’ilz ne sçau-
38
roient reprendre de vingt ans, combien plus vous estes obligé de la conserver
39
au Roy qui en est le maistre, et dans un temps où les affaires de Sa Majesté
40
vont à souhait.

[p. 989] [scan. 319]


1
Tout cela fit quelque effet sur son esprit au moins en apparence, car il cessa
2
de se plaindre de nostre rigueur et se mit à louer vostre conduitte d’avoir fait
3
de si grandes choses pendant une minorité. Ce ne fut pas néantmoins sans y
4
apporter quelque exception, il dit que Vostre Eminence donnoit beaucoup à
5
sa fortune et qu’aiant à soustenir une guerre contre l’Empereur et contre le
6
roy d’Espagne elle entreprenoit en mesme temps le pape, le Grand-Duc, et
7
vouloit forcer tout le monde à prendre le party de France; qu’il seroit meilleur
8
à son avis de faire la paix avec les avantages qu’on nous présente, et de s’ ap-
9
pliquer puissamment à restablir le roy et la royauté d’Angleterre. Je luy de-
10
manday si la maison d’Austriche ayderoit à ce dessein, il ne respondit pas
11
comme il faut se contentant de dire que nous y avons le plus grand et le plus
12
proche intérest. Mais je ne sçais Monseigneur |:s’il est fort à désirer que le roy
13
d’Espagne s’en mesle, tant pour ne point partager avec luy:| la gloire de cette
14
action ny l’utilité qui en reviendra, que pour les obstacles qui se rencontrent
15
ordinairement à faire réussir une entreprise |:quand elle est conduite par deux
16
puissances si esgales et si jalouses l’une de l’autre:|. Quoy qu’il en soit je luy
17
|:parlay froidement de cette

39
17 révolution] fälschlich dechiffriert: résolution
révolution d’Angleterre, voyant bien qu’il s’en
18
vouloit prévaloir pour obliger la France:| à rendre Brisach et achever promp-
19
tement le traitté avec l’Empereur. Qu’au surplus je n’avois pas encores appris
20
que l’armée navalle du Roy eust fait aucune hostilité sur les terres du pape ou
21
du Grand-Duc, mais que j’estois bien informé des justes causes que Sa Sainte-
22
té nous en a données et de la grande modération de Vostre Eminence en cette
23
rencontre, pouvant dire avec vérité que si le conseil du Roy n’estoit dirigé par
24
un cardinal, il y a longtemps qu’on y auroit pris d’autres résolutions. Pour
25
preuve de cella je luy contay ensuitte ce qui se passa l’autre jour au Parlement
26
touchant la bulle qui fut déclarée abusive, et comme l’arrest fut donné du
27
propre mouvement de la compagnie pour satisfaire au devoir de leurs charges
28
sans aucune impulsion de la cour. Il fit mine d’en douter, mais je luy fermay
29
la bouche quand je dis librement qu’aux affaires où la cour prend part, le
30
Parlement n’agit pas d’ordinaire avec tant de facilité ny de diligence; et qu’au
31
reste je pouvois sçavoir au vray comme la chose s’y est passée aiant un frère
32
qui y tient la seconde place

42
Henri de Mesmes, s. [ nr. 235 Anm. 1 ] .
.

33
|:J’avois dessein Monseigneur d’insinuer au conte de Trautmansdorf ce dont
34
vous m’avez fait l’honneur de me charger :|, mais outre que mon audiance
35
avoit desjà esté longue je ne trouvay pas son esprit dans une telle assiette qu’il
36
pust recevoir |:toute l’impression que je voulois. Je me

40
36 contentay] nach Konzept und Kopie; in der Druckvorlage (Chiffre und Klartext): contente
contentay de l’y avoir
37
disposé:| par les moyens cy-dessus touchez selon que l’occasion s’en estoit
38
offerte et me levay pour prendre congé.

[p. 990] [scan. 320]


1
Alors il me remit sur le différend de Brisach disant qu’il me vouloit commu-
2
niquer une pensée dont il ne s’estoit encores ouvert ny aux Bavarrois ny aux
3
médiateurs, qui est celle dont nous rendons compte par nostre despesche
4
commune , [de] démolir la place, arrester qu’elle ne puisse jamais estre fortif-
5
fiée , couper le pont, avoir faculté de fortiffier tel lieu que nous voudrons delà
6
le Rhin, et posséder l’Alsace et le Zuntgau en souveraineté et l’incorporer au
7
royaume comme une autre des provinces de France.

8
Je luy fis voir que le titre auquel le Roy tiendra l’Alsace quelque spécieux
9
qu’il puisse estre ne sert de rien à la seureté de l’acquisition ny à la durée de la
10
paix, qui est ce que nous cherchons, et ce que la seule place de Brisach nous
11
donne.

12
Il repartit qu’estant rasée ce grand fleuve du Rhin nous asseure assez, et
13
voyant qu’il ne me pouvoit persuader et que je luy objectois que les Impé-
14
riaux le peuvent passer en plusieurs autres endroitz il se laissa entendre à
15
demy-mot qu’on pourroit nous accorder Benfeld. Mais j’en fis bien peu de cas
16
en comparaison de Brisach, et le suppliay sincèrement de ne s’attacher pas à
17
cette pensée qui ne feroit que retarder la paix. Il insista que nous en donnas-
18
sions avis à la cour par homme exprès affin d’en avoir promptement response,
19
s’asseurant que cette ouverture y seroit bien receue. Je dis que s’il prenoit
20
quelque créance en moy, comme il m’avoit tesmoigné plus d’une fois, je luy
21
protestois en conscience que nous avions les derniers ordres dans lesquelz
22
Brisach n’a pas seulement esté mis en doute, et qu’il seroit inutile d’en consul-
23
ter davantage ceux qui s’en sont expliquez si absolument. Je me chargeay
24
néantmoins d’en faire rapport à messieurs mes collègues, et le lendemain
25
monsieur de Servien luy fut porter response conforme à ce que dessus.

26
Hier les médiateurs nous en parlèrent, et monsieur Contarini demanda s’il ne
27
suffiroit pas pour la seureté de la France de garder Brisach cinq ou six ans
28
pendant quoy l’on bastiroit une forteresse delà le Rhin. Cella ne fut pas es-
29
couté .

30
|:Monsieur Wolmar:| a dit aujourd’huy à un sien confident avec qui j’ay ha-
31
bitude que le comte de Trautmansdorff lairra plustost renverser l’Empire que
32
de laisser une telle pièce, et que quand il seroit capable de nous l’accorder ce
33
ne seroit jamais du consentement des princes d’Inspruck lesquelz feront une
34
protestation solennelle contre cette cession. Il a encores dit qu’en ce cas |:luy,
35
Wolmar, ne signera pas le traité de paix. Cela tesmoigne qu’il y voit de la
36
disposition:|, et d’ailleurs nous jugeons par diverses circonstances qu’après
37
|:s’estre bien deffendu le comte de Trautmansdorff donnera les mains:|.

38
Je remarquay chez luy qu’en me disant qu’il s’en iroit bientost à Osnabrug
39
pour la dernière fois, et qu’il n’y seroit que sept ou huit jours d’autant qu’il a
40
offert à la couronne de Suède tout ce qu’on luy peut accorder, et qu’il ne
41
restoit qu’à se déclarer de la mesme sorte envers les protestans, il adjousta
42
qu’au retour de ce voyage |:il nous diroit aussi le dernier mot et se reprit en

[p. 991] [scan. 321]


1
mesme temps comme:| n’aiant plus rien à adjouster à ses offres, |:

34
1 mais] ergänzt nach dem Konzept; Chiffrierfehler in der Druckvorlage.
mais ce fust
2
avec un sousris et une douceur qui me fit croire:| davantage qu’il ne nous a
3
pas encores |:tout dit:|. Après cella il fait estat de faire imprimer jusques où il
4
sera condescendu pour la satisfaction des couronnes, et de s’en retourner à
5
Vienne.

6
Il m’entretint aussy des intérestz d’Espagne et me proposa les deux comtez
7
entiers, disant que s’il pouvoit porter Penaranda à nous accorder tout le Rous-
8
sillon y compris Roses, et tout l’Artois y compris Saint-Omer, Ayre et La
9
Bassée nous devions faire la paix. Mais il cogneut bien qu’il faut que les Es-
10
pagnolz passent outre.

11
Le mesme |:confident du sieur Wolmar:| m’asseure que les plénipotentiaires
12
d’Espagne accorderont à ceux des Provinces-Unies tout ce qu’ilz ont de-
13
mandé .

14
Monsieur de Matenesse et monsieur Pau m’ont visité tantost, ilz promettent
15
une fidélité constante. |:Le premier

35
15 y] fehlt im Klartext.
y satisfait pleinement et agit en toutes
16
occasions comme nous pouvons souhaiter,

36
16 mais] aus dem Konzept ergänzt; Chiffrierfehler in der Druckvorlage.
mais l’autre marche avec plus de
17
retenue:|. Par la response que les Espagnolz ont faitte à leurs articles ilz ont
18
convié Messieurs les Estatz à conclurre sans s’arrester à des intérestz estran-
19
gers , veu mesmes que la couronne de France a sujet d’estre plus que suffisam-
20
ment et surabondamment satisfaitte des conditions qu’ilz nous ont proposées.
21
Ce sont les propres termes. Lesditz sieurs de Matenesse et Pau m’ont dit qu’il
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leur sera répliqué que soubz le nom d’estrangers la France ne peut estre com-
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prise , et qu’on persiste à ne voulloir traitter que conjointement avec nous et
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d’un commun consentement.

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Les Impériaux se plaignent que les députez du duc de Bavières parlent plus
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haut et plus ferme pour Brisach que les François mesmes. |:Et à la vérité
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Monseigneur ilz m’ont dit avoir déclaré au conte de Trautmansdorf que s’il
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ne se résout prontement il ne faut pas douter que l’Empire se partagera et que
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la Haute et Basse-Saxe et pays voisins se metront sous la protection de la
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couronne de Suède, et la Franconie et la Suavbe et les quatre cercles du Rhin
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rechercheront celle de la France. En effet ils ne s’esloignent pas de traiter avec
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nous d’une neutralité ou suspension d’armes en cas que les affaires aillent
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davantage en longueur:|.

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