Acta Pacis Westphalicae II B 3,2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 3, 2. Teil: 1646 / Elke Jarnut und Rita Bohlen unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy mit einer Einleitung und einem Anhang von Franz Bosbach
276. Memorandum Ludwigs XIV. für Longueville, d’Avaux und Servien Compiègne 1646 Mai 20
Compiègne 1646 Mai 20
Kopien: AE , CP All. 76 fol. 389–395 = Druckvorlage, betitelt: Mémoire du Roy à Messieurs
les Plénipotentiaires sur les affaires de l’Empire; überbracht durch Héron; AE , CP All. 65 fol.
165–171’; Ass. Nat. 272 fol. 253–256, datiert: 1646 Mai 19. Konzept Lionnes: AE , CP All.
60 fol. 299–305, datiert ebenso. Druck, datiert: 1646 Mai 26: Mém. et Nég. II S. 320–334;
Nég. secr. III S. 189–192; Gärtner IX S. 900–914, nennt als Ausstellungsort: Paris.
Interesse Frankreichs, nach Zugeständnis von Breisach, an unverzüglicher Einigung im Reich;
Unklarheit über die Absichten Schwedens. Nachteilige Konsequenzen der vereinbarten Zusam-
menführung der schwedischen und französischen Armeen. Deren Abwendung durch Abschluß
eines allgemeinen Waffenstillstands, andernfalls eines Sonderwaffenstillstands mit Bayern. Argu-
mente , um Schweden wie Bayern dafür zu gewinnen. Befehle an Turenne. Einwirken auf die
Schweden im Sinne einer Verständigung im Reich. Schutz der Religion gegen die überzogenen
Forderungen von Schweden und Hessen. Weitere Befehle an Turenne s. Beilage 1. Beilagen 2
und 3. Angebliche Absicht des Kaisers, einen Reichstag einzuberufen. Pinerolo. Lob der Verrich-
tung Serviens in Osnabrück. Konferenz in Lengerich. Lothringen.
On veult croire que quand lesdicts Sieurs Plénipotentiaires recevront cette
dépesche les affaires de l’Empire seront ajustées puisqu’elles ne semblent plus
pouvoir estre retardées que par une opposition formelle des Suédois sy leur
disposition à la paix ne se treuvoit pas aussy sincère qu’ilz le donnent à enten-
dre , et qu’ilz veulent préférer les avantages qu’ilz pensent remporter dans la
continuation de la guerre à ceux qu’on leur offre par un traicté.
On ne juge pas que cela puisse estre, mais s’il arivoit contre nostre croyance,
la France devroit d’aultant plus songer à soy et à ce qu’elle auroit à faire que
la visée des Suédois ne pourroit estre aultre en cela que de ruyner la religion
catholicque en Allemagne et relevant par ce moyen le party protestant qu’ilz
n’auroient pas grande peine de faire agir selon leurs desseins, se mettre en
estat de n’avoir plus besoin de nous et de donner la loy à tout l’Empire.
Le plus grand intérest qu’il semble que le Roy ayt aujourd’huy en la constitu-
tion où sont les affaires, c’est qu’aussytost que les Impériaux auront consenty
à la cession de Brisach dont on ne doute point, on conclue sans la moindre
perte de temps l’accommodement dans l’Empire par une paix ou par une trê-
ve qui suspende les hostilitez pour le temps qui sera nécessaire jusques à ce
que tous les poinctz les moins importans de ladicte paix qui restent à ajuster
le puissent estre.
Sy les Suédois n’ont déterminé de continuer la guerre à quelque prix que ce
soit, il semble qu’ilz ont tout ce que raisonnablement ilz peuvent désirer pour
la conclurre avec grand avantage; et comme il y a grande apparence que les
Impériaux sçavent pour combien [en] estre quittes envers eux, sans quoy ilz
ne [se] seroient pas vraysemblablement sy fort hastez de nous offrir les 3 éves-
chez , l’Alsace et le Sungau, on ne veoid pas bien par quelles raisons les satis-
factions des couronnes estans une fois ajustées, et ce qui regarde Madame la
Lantgrave et la maison palatine résolu, les ministres de Suède pourront se
deffendre de donner les mains à la suspension d’armes en Allemagne pour
ajuster les poinctz de moindre conséquence dont on ne seroit pas encor
convenu, et pour l’exécution des aultres quand tout seroit bien arresté.
Ce qui augmente icy le désir de cette suspension [et] avec grand subjet est que
les Suédois pressent la jonction de leur armée principalle avec celle que com-
mande le mareschal de Turenne et la promptitude avec laquelle ilz s’y portent
nous donne occasion de croire qu’ilz s’en promettent quelque grand avantage
en leur particulier, l’expérience nous ayant faict veoir qu’ilz n’ont jamais sou-
haitté de joindre leurs armes aux nostres que pour remédier au mauvais estat
de leurs affaires ou pour les mettre en plus hault point, qu’aussy souvent que
nous l’avons désiré pour le bien des nostres quoyqu’ilz y treuvassent aussy le
leur, ou ilz l’ont refusée et treuvé des eschapatoires pour s’en excuser, ou ilz
l’ont fait de sy mauvaise grâce que quatre jours après ilz nous ont quitté,
tesmoin le procédé que tint Keuniscmarc l’année dernière avec monsieur le
duc d’Anguien.
En oultre cette jonction n’est pas seulement périlleuse avant qu’elle se face à
cause de l’empeschement qu’y peuvent apporter les ennemis pour combattre
les uns les aultres à leur avantage avant que l’on soit ensemble, mais c’est
après estre faicte qu’elle peult entraîner plus d’inconvéniens et de préjudices
pour nous et pour nos affaires; nostre armée seroit gehennée à suivre la volon-
té du plus fort, et nous abbandonnerions toutes nos places du Rhin sans aul-
cune apparence de rien conquérir que nous puissions conserver ny y establir
noz quartiers d’hyver; mais ce qui est encor plus considérable, et qui faict plus
de peine, c’est que la jonction ne tendroit qu’à la ruyne entière du duc de
Bavières qui seroit suivie de celle de la religion catholique en Allemagne.
Ainsy par ce respect et par beaucoup d’aultres que lesdicts Sieurs Plénipoten-
tiaires jugeront, les Suédois tireroient tout le proffit, et nous en souffririons
des désavantages irréparables.
Il est bon que le duc de Bavières sçache les progrès de cette jonction, et qu’il
les appréhende vivement parce que cela l’obligera de redoubler ses effortz
près de l’Empereur pour conclurre la paix sans délay, mais il pourroit estre
aussy pernicieux pour que pour luy qu’elle s’effectue.
Le remède qui paroist le meilleur pour nous délivrer de cette inquiétude veu
l’engagement où l’on est avec monsieur Torstenson sur ce poinct, ce seroit un
prompt accommodement dans l’Empire en la forme marquée cy-dessus, à
quoy lesdicts Sieurs Plénipotentiaires applicqueront toute leur industrie et
toute leur addresse, estant peult-estre le plus important et le plus agréable
service qu’ilz auront lieu de rendre à Sa Majesté dans tout le cours de leur
négotiation.
Que sy la suspension généralle dans l’Empire ne peult estre conclue pour
quelque temps quoyque les principaux poinctz soient ajustez, soit par quel-
que obstacle qu’on ne peult préveoir, soit par l’opposition que les Suédois y
pourroient faire pour des fins qu’ilz ont, et dont ilz ne se déclarent pas,
on pourra songer à en faire une particulière avec Bavière, et par ce moyen il
seroit en seureté, la religion catholique hors de danger, nous aurions corres-
pondu aux tesmoignages de bonne volonté que ledict prince a faict paroistre
dans noz intérestz, la face des affaires ne sçauroit quasy changer que de bien
en mieux à nostre esgard, et finallement les Espagnolz se disposeroient sans
doubte à nous contenter entièrement, ou s’ilz s’opiniastroient encor, nous se-
rions en estat de leur porter le dernier coup en Flandres avec l’armée de mon-
sieur le mareschal de Turenne qui se treuveroit quasy desgagée par cette trêve
particulière.
On considère en cela que nous avons deux différens intérestz à mesnager, l’un
avec les Suédois, et l’aultre avec Bavières mesme.
Quant au premier, comme un des principaux articles de cette trêve seroit que
Bavières ne pust faire aulcun acte d’hostilité contre les Suédois ou contre les
Hessiens directement ny indirectement en donnant de ses forces à l’ Empe-
reur , on ne void pas par quelle raison, faisant veoir aux Suédois les grands
avantages que la cause commune en retireroit d’ailleurs, ilz auroient la pensée
de le treuver mauvais, ou la hardiesse de s’y opposer contre ce qui est expres-
sément porté dans un des traictez que nous avons ensemble par lequel sy on
s’en souvient bien il est spécialement réservé au Roy de pouvoir prendre en sa
protection les princes catholicques d’Allemagne qui y auront recours.
L’exemple est bien exprès de ce qui se passa entre le feu roy de glorieuse
mémoire et le feu roy de Suède, lorsque ccluy-cy estant picqué au dernier
poinct contre le duc Charles qui avoit envoyé une armée au secours de l’ Em-
pereur , il venoit fondre avec toutes ses forces sur les Estatz dudict duc pour
s’en vanger, et le Roy en prist la protection, et arresta tout court cet orage
Nach ihrem Sieg bei Breitenfeld am 17. IX. 1631 waren die schwed. Truppen unter Gustav
Adolf nach Westen zum Rhein hin vorgestoßen. Daraufhin hatten die Franzosen ihrerseits den
Vormarsch zum Rhein forciert und die Kontrolle über ihre militärischen Eroberungen durch
Protektionsverträge abgesichert. Im Vertrag von Vic vom 6. I. 1632 (Druck: Du Mont VI,1
S. 28f.) hatte sich das Hgt. Lothringen unter frz. Schutz gestellt ( Stein S. 112ff.).
protection que la France prist de l’électeur de Trèves sur le poinct que le roy
de Suède s’alloit emparer de ses Estatz comme il avoit faict de l’électorat de
Mayence
surtout on ne veoid pas quelle disparité les ministres de Suède pourront treu-
ver entre le duc de Saxe à leur esgard et Bavière au nostre. Néantmoins ilz
viennent tout fraischement de conclurre une suspension avec ledict duc de
Saxe qui doibt durer jusqu’au traicté de la paix sans nous en dire un seul mot,
comme
cause commune, ayant mesme permis audict duc d’envoyer sa cavalerie à
l’Empereur, où bien esloignez de cela nous ne résoudrions rien qu’après en
avoir communicqué avec eux, et nous prétendrions lier en sorte Bavière qu’il
ne pust jamais employer ses forces qu’à
que l’Empereur n’en pust recevoir aucune assistance mesme par voye indi-
recte .
Toutes ces considérations, et la conduicte mesme que les ministres dudict
duc ont tenue dans l’assemblée quand il a fallu parler de la satisfaction de la
couronne de Suède qu’ilz ont dict hardiement luy estre deue, et pressé à
Vienne l’Empereur de la part de leur maistre pour la faire accorder sans délay,
font juger [que] quelque animosité que puissent avoir les Suédois contre ledict
duc, ilz n’ozeront pas formellement s’opposer à la suspension que nous
pourrions traicter avec luy, aussy ne le firent-ilz pas positivement l’année
dernière quand ce prince pressoit son accommodement avec la France, mais
ilz
trompez, et de ne pouvoir prendre confiance en un prince qu’ilz croyent si
ruzé, dont ilz eurent bientost occasion de se repentir à cause de l’eschec que
les troupes de monsieur de Turenne receurent à Mariendal qui fist tomber
d’abord la pluspart des forces de Bavières sur les bras de Torstenson.
On estime donc que soit pour obtenir que les Suédois donnent les mains à la
suspention généralle dans l’Empire, les pointz principaux estans ajustez, soit
pour les faire consentir à la suspension particulière avec Bavière au cas que le
traicté de paix aille en longueur, il ne seroit peult-estre pas mal, ce qui est
remis pourtant à la prudence desdicts Sieurs Plénipotentiaires, de parler fran-
chement aux ministres de Suède, et après leur avoir faict comprendre toutes
les raisons marquées cy-dessus, leur déclarer confidemment qu’il sera assez
malaisé que l’on puisse plus longtemps continuer la guerre ny fournir de l’ ar-
gent à cause que le royaume en est espuisé, y adjoustans doucement que lors-
que nous avons pris les armes nous ne nous serions jamais flattez de pouvoir
abbaisser la puissance de l’Empereur et affoiblir la maison d’Austriche au
point que nous avons faict, obtenir tant d’avantages pour l’une et l’aultre cou-
ronne , et relever nos alliez de l’oppression soubs laquelle la pluspart gémis-
soient , toutes les personnes désintéressées jugeans que chacun doibve estre
très satisfaict de ce que les ennemis offrent sans parler de la guerre du Turc
qui doibt estre un puissant motif à tous les princes chrestiens de terminer
leurs divisions particulières pour avoir plus de moyen de résister à cet ennemy
commun.
Ce discours, sy lesdicts Sieurs Plénipotentiaires jugent à propos de le tenir,
devra estre faict avec grande circonspection et addresse affin qu’au lieu du
bon effect que nous en devons attendre il n’en produise pas un très mauvais,
estant à craindre que les Suédois voyans que nous les pressons très vivement
de s’accommoder et de donner les mains, ou à une suspension généralle, ou à
une particulière avec Bavière à laquelle ilz ont aversion, ne songent à s’ accom-
moder eux-mesmes se servans du prétexte que nous aurions voulu les y
contraindre, et il ne fault pas doubter qu’ilz n’y treuvassent d’abord toute
facilité, et que comme toute la plus grande rage de la maison d’Austriche dans
cette guerre est contre la France, nos ennemis ne leur offrissent mesmes de
plus grands avantages pour les diviser d’avec nous dans la passion démesurée
qu’ilz ont de se vanger de cette couronne, et dans l’espérance qu’ilz en conce-
vroient s’ilz croyoient de pouvoir en séparer ses confœdérez. C’est pourquoy
tout est remis à la prudence desdicts Sieurs Plénipotentiaires lesquelz estans
sur les lieux, et pouvans examiner de plus près les actions et les résolutions
des ministres de Suède, ilz sçauront aussy prendre celles qui seront plus pro-
pres pour parvenir à la fin que Sa Majesté désire sans courre fortune d’aucun
inconvénient.
Voylà pour ce qui regarde les Suédois. Quant à Bavières, il est certain, et on
l’a pu recognoistre par tout ce qui s’est passé jusqu’icy qu’il n’a rien oublié
pour porter l’Empereur à nous donner satisfaction et à conclurre la paix, mais
aussy on a recognu en mesme temps qu’il a de l’aversion à faire une trêve
particulière, soit qu’il ayt de la honte à se tirer d’un party où il a esté sy
longtemps attaché, soit qu’il le juge en quelque façon contraire à son honneur
et à son debvoir, soit enfin qu’il croye cette résolution capable de ruyner tout
à faict les affaires de l’Empereur, et qu’il veuille à son accoustumée se rendre
considérable de part et d’aultre sans venir qu’à la dernière extrémité à aulcune
déclaration formelle.
Néantmoins dès qu’il recognoistra que la paix ne se peult faire avant la cam-
pagne , que ce n’est point la France qui par dessein ou par intérest retarde
l’accommodement, que les Suédois ne veullent point entendre à aucune sus-
pension généralle d’hostillitez, que les forces de France devans se joindre aux
Suédois, et agir conjoinctement contre luy, ses Estatz, sa maison et la religion
catholicque peuvent courir de grandes risques, qu’on ne luy demandera plus
pour seureté de sa parole en cette suspension, ny des places ny des quartiers
delà le Rhin qui sont les deux principaux pointz sur lesquelz il s’en est excusé
par le passé, et enfin que les difficultez que les Suédois apportent à la paix ne
procèdent que de l’espérance qu’ilz ont qu’en joignant l’armée de monsieur
de Turenne ilz pourront relever extrêmement le party protestant par la ruyne
dudict duc, à quoy par une nécessité inévitable nous nous treuvons malgré
nous forcez de contribuer, il semble icy qu’il tombera aisément d’accord avec
nous de cette suspension particulière qui peult
tous les inconvéniens cy-dessus, d’aultant plus que luy promettant encores de
l’assister de toutes nos forces, en cas que ses Estatz fussent attacquez par quel-
qu ’un, il ne doubteroit pas qu’estans joinctes aux siennes il ne fust en plaine
seureté de quelque ennemy qu’il eust à se deffendre. On n’a pourtant pas jugé
à propos de luy faire escrire positivement de cette suspension par monsieur le
nonce de crainte qu’il n’attribuast à foiblesse ou à quelque appréhention que
nous aurions de ses forces, ce qui ne part que d’un pur effect de bonne volon-
té en son endroict et de zèle pour le maintien de la religion catholicque en
Allemagne. Ce qui doibt obliger aussy lesdicts Sieurs Plénipotentiaires d’ ap-
porter la mesme circonspection quand ilz traicteront avec ses ministres, les
faisant tumber adroictement dans noz fins par leur intérest sans qu’ilz s’ ap-
perçoivent quasy que nous le souhaittions.
On peult encor faire comprendre ausdicts ministres que la hayne des Espa-
gnolz contre leur maistre estant au plus hault point qu’elle puisse aller,
comme d’ailleurs ilz appréhendent extraordinairement que la paix ne se
conclue dans l’Empire sans que leurs affaires soient accommodées avec nous,
il n’y aura ressortz qu’ilz ne facent jouer ny artiffices dont ilz ne s’avisent
pour empescher l’accommodement, et en cela faire deux effectz, l’un de tenir
l’Empereur et ses adhérens engagez dans leur
ne demeurer pas seulz à en soustenir le faix contre nous, et l’aultre de se
vanger de Bavières, estans raviz quoyque peult-estre contre leur propre inté-
rest qu’il reçoive quelque mortiffication par la jonction des deux armées
françoise et suédoise d’aultant plus qu’il dépendra après plus absolument qu’il
ne faict des volontez de l’Empereur et de la leur et qu’il seroit comme forcé de
les suivre aveuglément en toutes choses.
On a dépesché un courrier à monsieur le mareschal de Turenne lequel est
persuadé de devoir faire cette jonction quelque inconvénient qu’il y en ayt à
craindre parce qu’il cognoist qu’il est quasy impossible qu’il puisse agir seul
en Allemagne. On luy a donné part de toutes choses, on luy réitère les ordres
de faire tout ce qui luy sera mandé par lesdicts Sieurs Plénipotentiaires les-
quelz cependant n’espargneront pas la despence des courriers pour le tenir
continuellement informé de ce qui se passera, et on luy ordonne qu’aultant
qu’il pourra dépendre de luy il esloigne la jonction, et qu’estant nécessité à la
fin de la faire s’il n’a aucunes nouvelles de Munster qui l’empeschent, il tasche
au moins d’engager Torstenson à l’assister à la prise d’Hidelberg et Hailbron
affin de laisser en seureté toutes les places du Rhin et s’asseurer d’une retraicte
qui puisse luy donner moyen de prendre ses quartiers d’hyver au-delà de ce
fleuve .
Pour conclusion, on réplicque ausdicts Sieurs Plénipotentiaires que le point
de Brisac estant résolu en nostre faveur ilz doivent employer tout leur esprit
et toute leur suffisance pour obliger les Suédois à donner les mains à l’ accom-
modement , puisque sans doubte l’Empereur les satisfera entièrement sur les
chefs principaux de leurs prétentions, et cela de crainte que la jonction de nos
armées venant à se faire pendant le délay, il n’arrive des accidens dans le ma-
niement des armes qui troublent tout et qui empeschent l’accomplissement
d’une sy grande affaire qui est desjà sy avancée et dans laquelle les avantages
considérables que nous remporterons dans l’Empire nous en
doubte encor de plus importans du costé d’Espagne.
Il aura esté facile ausdicts Sieurs Plénipotentiaires de remarquer que les pré-
tentions exorbitantes des Suédois, et celles que les Hessiens ont mis en avant
depuis peu sans nostre sceu et contre ce qui avoit esté concerté, visent princi-
palement à la ruyne de la religion catholicque et à rendre meilleure la condi-
tion du party protestant en Allemagne. Et comme l’incomparable piété de
Leurs Majestez leur donne beaucoup plus de zèle pour nostre religion que
n’en peuvent avoir les alliez de cette couronne pour la leur, non seulement
elles ne prétendent adhérer ny contribuer en rien aux mauvaises fins qu’ilz
peuvent avoir, mais elles entendent que leurs plénipotentiaires aultant qu’il
dépendra d’eux, employent leur industrie à procurer tous les avantages possi-
bles à la religion, et à la garentir des préjudices qu’on prétendroit de luy
faire.
Après avoir escript ce que dessus l’occasion s’estant présentée d’un courrier
qui porte en lettres de change pour Strasbourg la monstre de l’armée de mon-
sieur de Turenne, on luy a faict à la haste une nouvelle dépesche touchant sa
jonction avec les Suédois et l’advantage qui résulteroit au service du Roy s’il
pouvoit tirer de bonne grâce le consentement de Torstenson [d’]un délay de
six sepmaines pour faire agir pendant ce temps-là l’armée de Sa Majesté deçà
le Rhin en une entreprise importante et qui presseroit extrêmement les enne-
mis de nous donner satisfaction. Il auroit ainsy moyen d’attacquer Luxem-
bourg joignant à son armée le corps qu’assemble vers Metz le sieur de La
Ferté-Seneterre, et la cheute de cette place seule qui vraysemblablement ne
dureroit pas plus d’un mois ou six sepmaines tireroit infailliblement après elle
la perte de toute la province. On joinct icy une coppie de la dépesche mesme
qu’on a envoyée à monsieur de Turenne, et sy Messieurs les Plénipotentiaires
treuvent de leur costé quelque expédient de faire avoir libres ces six sepmai-
nes audict sieur mareschal soit par une suspension, soit en négotiant eux-
mesmes le consentement de Torstenson par l’entremise de messieurs Oxen-
stiern et Salvius ou s’addressans directement à luy, ilz rendront un signalé
service à Sa Majesté dont eux-mesmes ne seront pas longtemps sans en tirer
beaucoup d’avantage dans leur négotiation.
Lesdicts Sieurs Plénipotentiaires treuveront cy-joincte la coppie d’une se-
conde lettre de monsieur le duc de Bavières que monsieur le nonce Bagni a
envoyée de Paris sur le point du départ de ce courrier.
Comme aussy la coppie d’un mémoire que le résident de Madame la Lant-
grave en cette cour nous a donné ces jours-cy sur les intérestz de sa mais-
tresse , sur lequel lesdicts Sieurs Plénipotentiaires feront ce qu’ilz estimeront le
plus à propos comme encores touchant les justes instances que faict monsieur
de Bavières en faveur de la religion.
On a eu quelques advis de Venize que l’Empereur vise à assembler une diète à
Ratisbonne où il espère avoir favorables générallement tous les estatz de
l’Empire depuis la déclaration qu’ont faictes[!] les couronnes de leurs préten-
tions en Allemagne, s’asseurant qu’un chacun se joindra à luy pour empescher
que les estrangers, dict-il, ne desmembrent l’Empire. On n’en envoye pas le
détail parce que la mesme personne qui en escript mande de l’avoir dict au
sieur de Grémonville pour en informer lesdicts Sieurs Plénipotentiaires.
On croid que les Impériaux qui n’ont point renouvellé dans leur duplicque
l’offre qu’ilz avoient faicte touchant Pignerol, ne feront point de difficulté sur
ce poinct au premier mot qu’on leur en dira puisque la raison qu’ilz pour-
roient avoir eue de plaire en cela aux Espagnolz cesse à présent que ceux-cy
l’ont offert.
On a veu avec plaisir la relation que monsieur Servien a faicte de toutes ses
négotiations en son dernier voyage d’Oznabrug. Sa Majesté a loué son ad-
dresse et sa conduicte et on tirera icy beaucoup de lumières de ce qu’il a man-
dé . Cependant on attend avec impatience d’apprendre le résultat de la confé-
rence qui se devoit tenir entre lesdicts Sieurs Plénipotentiaires et ceux de la
couronne de Suède à Lengerick puisque les dernières responces de Vienne
devans estre pour lors arrivées, il semble que ce sera la décision ou de la
conclusion de la paix ou de la continuation de la guerre.
Lesdicts Sieurs Plénipotentiaires se sont résoluz avec beaucoup de prudence
de ne pas parler de la Lorraine que le point de Brisac et
concerne nostre satisfaction ne soit ajusté.
1 Mazarin an Turenne, Compiègne 1646 Mai [20?], Kopie.
3 Memorandum des Residenten von Hessen-Kassel, Kopie.