Acta Pacis Westphalicae II B 3,2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 3, 2. Teil: 1646 / Elke Jarnut und Rita Bohlen unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy mit einer Einleitung und einem Anhang von Franz Bosbach
272. Memorandum Serviens für Lionne Münster 1646 Mai 17
Münster 1646 Mai 17
Eigenhändiges Konzept: AE , CP All. 76 fol. 373–376’ = Druckvorlage; überbracht durch
Murinet.
Geheime Informationen: verdächtiges Verhalten der Gesandten der Generalstaaten. Übergabe
des holländischen Vertragsprojekts an die Spanier; Verweigerung einer Kopie für die Franzo-
sen. Negative Vorzeichen für den Feldzug. Haltung Amsterdams, der Prinzessin von Oranien,
Knuyts und Ripperdas, des Prinzen von Oranien. Spanisches Angebot von Roermond und Venlo
an den Prinzen von Oranien. Rat, dem Oranier Brügge anzubieten und seine Frau für Frank-
reich zu gewinnen. Notwendigkeit der Anwesenheit La Thuilleries in Den Haag. Aussicht auf
spanisch-holländische Verhandlungen auch ohne Rücksicht auf Frankreich. Bitte um vorläufige
Geheimhaltung dieser Informationen.
Voicy des advis importants que je viens de recevoir praesentement d’une per-
sonne de considération très fidelle et très affectionnée à la France . Je souhai-
terois de bon cœur qu’il ne se fust pas adressé à moy ou qu’il ne m’eust pas
obligé au secret par divers serments. Si on venoit jamais à sçavoir que j’eusse
dépesché mon nepveu pour cela vous jugez bien que monsieur de Longueville
seroit offensé contre moy et ne s’imagineroit pas qu’on m’eust obligé par ser-
ment de ne luy dire pas ny à monsieur d’Avaux ce qui m’a esté confié fort
secrètement. L’homme qui s’en [est] ouvert à moy rend un très grand service à
la France en donnant les moyens de praevenir les maux qu’on praepare contre
elle. La façon d’agir des députés de Messieurs les Estats qui sont icy, au moins
de la pluspart, est étrange. Ils sont tousjours en conférences secrètes avec
Noirmon et très reservés avec nous. Il paroist visiblement qu’ils n’ont pas
bonne intention et qu’ils machinent quelque chose.
Ils ont donné par escrit depuis deux jours tous les articles du traité qu’ils
veullent faire avec les Espagnols. Après cela ils nous en ont donné part, mais
superficiellement, nous ayant seulement dit ce qu’ils ont fait, mais non pas ce
que contient leur escrit duquel ils nous ont refusé la copie quoyque nous
l’ayons demandée. Lorsqu’ils se sont veus pressés par nos instances ils nous
l’ont enfin promise, mais ayant après mis l’affaire en délibération chez eux il a
passé par pluralité de voix qu’ils ne devoient pas nous la donner qu’après que
les Espagnols y auroient fait réponse par escrit et qu’ils seroient asseurés de ce
que l’Espagne veut faire pour eux affin, disoient-ils, que nous ne l’empes-
chions pas ou que nous ne les praevenions pas en faisant nos affaires sans eux,
ce qu’ils supposent affin peut-estre d’avoir un praetexte de nous devancer.
L’affaire est de si grande importance et peut aller si viste que j’ay creu devoir
dépescher à l’heure mesme que j’en ay sceu les particularités par un homme
qui ayme la France et qui avoit les larmes aux yeux en m’informant d’un
procédé que luy-mesme apelle honteux. Je croy certainement que le mal est à
un point qu’il y faut chercher un remède prompt et extraordinaire.
On nous mande bien que la campagne est résolue à La Haye, mais la province
de Hollande a donné des députés à monsieur le prince d’Orenge pour l’acom-
pagner qui sont les plus grands ennemys qu’il ayt et qu’on croid avoir inten-
tion et ordre d’empescher tout ce qu’il voudra faire. Il ne nous importeroit
pas beaucoup qu’il ne fist rien pourveu qu’il divertisse seulement une partie
des forces ennemies, si on n’avoit subjet de craindre que ceux qui parlent si
hardyment dans le pays contre nous et en faveur des Espagnols les adver-
tissent secrètement qu’ils ne doivent rien craindre du costé de Messieurs les
Estats.
Je ne doubte point que Son Eminence ne soit très bien advertie que la ville
d’Amstredam n’a jamais ratifié le traité de 1635 fait entre la France et Mes-
sieurs les Estats. La raison de son refus est plus mauvaise que l’effect, puisque
c’est pour ne s’engager pas pour tousjours dans les intérests de la France.
Selon toutes les aparences du monde Knuyt et Riperda sont gaignés, on croid
que madame la princesse d’Orenge l’est aussy et que la ville d’Amstredam l’a
attirée dans ses sentiments partie par argent partie par espérance qu’on luy a
donnée de la laisser dans le gouvernement après son mary pendant la jeunesse
de son fils. Ce n’a pas esté une mauvaise amorce pour un esprit ambitieux et
avare comme le sien qui peut profiter de deux costés pour faire une mesme
chose et recevoir les praesents d’Amstredam et des Espagnols. On croid qu’el-
le fait agir icy et ailleurs ceux qui dépendent de son mary à son insceu et
contre ses intentions dans l’opinion qu’ell’a et qu’elle leur donne qu’il s’affoy-
blist de corps et d’esprit, outre qu’ils y treuvent leur compte, par les récom-
penses que les Espagnols leur promettent et que peut-estre ils leur ont desjà
donné.
Ce qui est de pyre est que lesdits Knuyt et Riperda travaillent sans cesse à
gaigner monsieur le prince d’Orenge en luy escrivant des faulcetés d’icy et luy
donnant de nouveaux ombrages de nous. Encor que les choses qu’ils escrivent
n’ayent point pour tout de fundement, elles ne laissent pas de faire quelque
impression dans l’esprit dudit prince qui par foyblesse ou par quelque autre
intérest n’est pas encor bien revenu des apréhensions que luy donna le dis-
cours de monsieur d’Estrade.
Si ce prince qui est le seul appuy qui nous reste se laisse aller, il sera bien
malaisé d’empescher que les Provinces-Unies n’embrassent honteusement et
avec praecipitation un traité particulier.
Noirmon a porté parolle de la part de Pigneranda à Kn[u]yt pour le faire
sçavoir au prince d’Orenge et a offert que Pigneranda s’y obligera par escrit,
que le roy d’Espagne laissera audit sieur prince Ruremonde et Venlo avec les
pays qui en dépendent pour les relever de l’Espagne pourveu qu’il favorise le
traité particulier. L’on ne doute pas qu’ils ne luy donnassent voluntiers Guel-
dres, mais estant la ville capitale de la province qui en porte le nom, monsieur
le prince d’Orenge n’oseroit y entendre de peur d’offenser cette province qui
fist cognoistre ses sentiments lorsque l’offre en fust faite dernièrement par le
capucin
S. [nr. 4 Anm. 2] .
Knuyt a dépesché en grande diligence au prince d’Orenge pour luy faire
sçavoir ce que les Espagnols veullent faire pour luy. Cela fait apréhender aux
bien intentionnés que monsieur le prince d’Orenge qui s’est extrêmement in-
commodé pour le mariage d’Angleterre, treuvant son compte particulier à
contenter les plus puissantes provinces de celles qu’il gouverne, y estant porté
par sa femme et par ceux qui l’aprochent qui luy persuadent que nous le
voulons tromper, ne se laisse enfin emporter par foyblesse ou autrement à
quelque mauvaise résolution si on n’y remédie.
Le personage qui m’a parlé croid qu’on devroit songer promptement en
France à s’asseurer de monsieur le prince d’Orenge par quelque offre qui pust
aussy gagner sa femme. Il estime que pour intéresser l’un et l’autre et les
convier de bien agir 〈on〉 pourroit offrir audit sieur prince de luy laisser la
v〈ille〉 de Bruge (s’il la prend cette année), avec tous les villages qui en dé-
pendent, en souveraineté à la charge de les tenir en fief de la couronne, de n’y
rien changer pour la religion et surtout à condition que Messieurs les Estats
ne se sépareront point de la France, et au contraire qu’ils l’assisteront à
conserver ses conquestes tant du costé d’Espagne que des Pays-Bas etc.
Le mesme personage croid puisque les Espagnols ne font pas scrupule de
donner ce qui leur apartient pour gaigner monsieur le prince d’Orenge qu’on
ne doit pas faire difficulté en France pour ne le perdre pas de luy offrir ce
qu’on ne possède pas encor bien qu’il soit du partage du Roy. Pour moy je n’y
haesiterois pas pour bien asseurer le reste et nous garentir d’une infidélité. Je
croy mesme que monsieur d’Estrade lorsqu’il proposa l’eschange à monsieur
le prince d’Orenge, devoit comencer par l’offre d’Anvers et de la cession des
droits du Roy sur les Provinces-Unies. Cela eust fait cognoistre que l’on
considère monsieur le prince d’Orenge et que l’on ne veut point conserver de
praetention sur son pays. La retenue où demeura monsieur d’Estrade sur ces
deux points n’a pas esté heureuse.
Si l’on apreuve cette négotiation on croid icy qu’il y faut travailler prompte-
ment et envoyer exprès en Hollande pour rompre les mesures des ennemis et
dissiper pour un coup toutes leurs pratiques. S’ils se voyent descheus de leurs
espérances de ce costé-là, ils parleront sans doute comm’on voudra dans fort
peu de temps. Surtout on estime qu’il faut regaigner à quelque prix que ce soit
〈l’esprit〉 de la princesse d’Orenge en luy faisant voir qu’elle treuvera mieux
son compte en toutes façons du costé de la France que partout ailleurs.
Je crains bien que monsieur de La Tuilerie ayant asseuré la campagne ne soit
parti de La Haye. Je suis extrêmement son serviteur, mais l’intérest du public
et du service du Roy m’estant plus cher que toute autre considération je tien-
drois son départ très praejudiciable dans la conjoncture praesente qui est plus
dangereuse pour la France qu’aucune où nous nous soyons treuvés depuis la
naissance de la guerre.
Depuis que les députés de Messieurs les Estats ont donné leurs demandes aux
Espagnols, Brun les est venu voir et après avoir touché assez légèrement les
difficultés qui se rencontrent sur quelques articles a déclaré qu’il se pourra
treuver des expédients sur tous, mais que tandis qu’ils s’obstineront à ne vou-
loir point traiter sans la France on ne faira jamais rien, parce que ses praeten-
tions sont si déraisonables qu’il paroist visiblement qu’elle ne veut pas la paix.
Lesdits députés ne répondent pas qu’on ne peut rien faire sans cela, au
contraire ils donnent espérance que cela n’arrestera pas le traité et dès la pre-
mière conférence Pau fist espérer qu’on y treuveroit des expédients.
Son Eminence jugera bien par sa prudence combien il m’importe qu’on ne
sçache jamais que j’aye fait cette dépesche ny que j’ay envoyé exprès mon
nepveu pour cela. Je la suplie très humblement de croire que je ne l’ay point
faite par praesomption et que je ne fis jamais rien avec tant de peyne et de
regret à cause du respect que je dois à monsieur de Longueville, mais je n’ay
peu sçavoir l’offre de Ruremonde et de Venlo qu’à condition de ne la commu-
niquer à âme vivante. Celluy qui me l’a découverte ne voudroit pour rien du
monde traverser l’avantage et le contentement de monsieur le prince d’Oren-
ge, mais il juge plus utile et sans comparaison plus honorable pour ledit sieur
prince de l’avoir du costé de la France quoyque moindre que de la main des
ennemis. Je vous suplie de mesnager que Son Eminence ne réponde point sur
ce mémoire jusqu’à ce que nous en ayons escrit en commun, ce qui sera dans
huit jours . Je treuveray moyen d’y faire insérer la pluspart des choses expri-
mées cy-dessus sans les spécifier ny nommer personne. Mon nepveu a pris
praetexte pour son voyage sur la maladie de sa mère
S. [nr. 271 Anm. 3] .