Acta Pacis Westphlicae II B 1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 1: 1644 / Ursula Irsigler unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy
322. Saint Romain an [Brienne] Münster 1644 Dezember [10]
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Münster 1644 Dezember [10]
Kopie: AE , CP All. 25 fol. 270’–272 = Druckvorlage .
Auseinandersetzung zwischen d’Avaux und Servien betreffend die Titulatur des Königs in dem
fälligen Invitationsschreiben. Vergebliche Vermittlungsversuche Saint Romains. Differenzen um die
Entgegennahme der Gegenvisite der Spanier. Verhältnis Serviens zu Saint Romain.
Nous n’avons pas eu plus de calme ni de tranquillité cette semaine que la
précédante. Deux difficultéz dont je ne vous ai point encore parlé nous ont
particulièrement exercéz: La première qui commença dès la semaine passée
est touchant la façon de nommer le Roi dans une troisième lettre circulaire
aux Estats de l’Empire et dans deux responses, l’une à l’Archevesque de
Cologne et l’autre aux Estats de Franconie assembléz à Bamberg qui ont
escrit à nos Messieurs qu’ils avoient résolu d’envoier à Munster et leur
demandent un passeport pour la seureté du voiage de leurs députéz
Vgl. dazu d’Avaux in [ nr. 320 ] und Servien in [ nr. 321. ]
L’opinion de Monsieur d’Avaux qui a conceu lesdictes lettres est qu’au
premier endroit où il eschet de nommer le Roi, il faut mettre “Rex Christia-
nissimus ” et puis “Maiestas”, ou bien “Rex”, et ensuitte “Christianissima
Maiestas”. Et l’avis de Monsieur Servien est que d’abord et partout il faut
dire “Sacra Christianissima Maiestas”. C’est sur cette matière que furent
escrits les derniers billets qui passèrent la semaine passée entr’eux sous le
nom de leurs secrétaires. J’entends que les copies vous en ont esté envoiées
Als Beilagen zu [ nr. 310 ] und [ 311. ]
Vous verrez par là l’estat de cette contestation. Je vous dirai seulement
qu’elle s’est tellement eschauffée par ces escritures, et ils se sont engagéz si
avant chacun dans son opinion qu’il a esté impossible de les en faire désister.
J’y ai fait soigneusement ce que j’ai pû, et il ne s’est passé jour depuis que
je n’aie esté plusieurs fois de l’un à l’autre pour cet affaire. J’ai remonstré
que leurs façons de parler estoient toutes deux honnestes et honorables et
qu’il estoit de petitte conséquence pour Sa Majesté laquelle des deux ilz
emploieroient, mais qu’il importoit grandement que cette expédition ne fust
point retardée. Que les Estats de Franconie assembléz à Bamberg attendoient
leur response et le passeport qu’ils avoient demandé pour envoier leurs
députéz à Munster, et qu’il y auroit grand inconvénient de les laisser sans
response ou de la leur faire attendre longtemps. Que la lettre circulaire
n’estoit pas moins pressée. Qu’en leur proposition ils demandoient la pré-
sence des Estats de l’Empire pour rendre cette assemblée légitime et faisoient
instance que lesdicts Estats fussent conviéz de part et d’autre de se rendre
ici au plustost. Que les Médiateurs commençoient à se formaliser de voir
la négociation retardée par là et demandoient jusques à quand nous chan-
terions cette chanson et si nous ne voulions pas au moins nommer un temps
dans lequel, si lesdicts Estats ne comparoissent point, on passeroit outre.
Je disois que si après cela les Ambassadeurs de France n’escrivoient point
aux Estats de l’Empire pour les convier de comparoistre à cette assemblée
ou tardoient longtemps à le faire, que cela seroit mal interprété d’un chacun
et porteroit coup en Allemagne au préjudice des bonnes intentions du Roi
touchant la paix. D’ailleurs, que c’estoit une chose concertée avec les Suédois
qui ne manqueroient pas d’escrire de leur costé. Nos Messieurs demeurèrent
d’accord de tout cela, et Monsieur Servien proposa d’escrire chacun de son
costé. Il dit qu’ils envoieroient leurs lettres sous une mesme couverture et
estimoit qu’on pourroit les concerter et concevoir en termes qui ne laisse-
roient aucun lieu à une mauvaise interprétation. Monsieur d’Avaux ne fut
pas de cet avis et proposa d’escrire en françois, puisqu’ils convenoient en
cette langue et que Monsieur Servien estoit content de la lettre pour Mon-
sieur le Duc de Bavières qui estoit en françois.
Comme je vis qu’ils ne s’accordoient point sur cela, je mis en avant un autre
expédient qui laissoit leurs deux opinions chacune en son entier en attendant
le reiglement de la Cour. Ce fut de ne point nommer le Roi dans lesdictes
lettres puisqu’on pouvoit s’en passer, et accommodai les endroits où Mon-
sieur d’Avaux en avoit fait mention, en sorte qu’il ne paroissoit pas qu’on
y eust touché comme vous pourrez voir par la copie ci jointe
Als Beilage nicht ermittelt. Vgl. die [ Beilagen 1 und 2 zu nr. 320. ]
d’Avaux consentit à cet expédient. Monsieur Servien y fit difficulté, néant-
moins il signa la response au Cercle de Franconie en cet estat et puis l’autre
pour l’Electeur de Cologne. Mais la lettre circulaire demeure, et j’appréhende
bien qu’elle ne soit point envoiée que la Cour n’aie prononcé sur ce différent.
J’en parlai encore hier matin à Monsieur Servien de la part de Monsieur
d’Avaux, et lui dis ensuitte que s’il avoit agréable de faire à l’ordinaire la
despesche pour la Cour, Monsieur d’Avaux se rendroit chez lui pour la
concerter. Il respondit à ce dernier point que si Monsieur d’Avaux trouvoit
bon que Monsieur de Préfontaine fist la despesche, qu’il iroit chez Monsieur
d’Avaux pour en faire le concert, et quant à la lettre circulaire, il proposa
que toutes celles qui seroient envoiées en la Haute Allemagne fussent con-
formes à l’avis de Monsieur d’Avaux et les autres au sien.
J’en fis rapport à Monsieur d’Avaux, mais il se tient à l’expédient ci dessus
que Monsieur Servien a approuvé pour les lettres addressantes aux Estats
de Franconie et à l’Archevesque de Cologne. Je le dis l’aprèsdisnée à Mon-
sieur Allard et que Monsieur d’Avaux offroit derechef d’aller chez Monsieur
Servien pour concerter la despesche pour la Cour, s’il plaisoit à mondict
Sieur de Servien de la faire dresser par quelcun des siens s’il ne le désiroit
faire lui mesme. A deux heures de là ledict Sieur Allard revint à moi et me
dist que si Monsieur d’Avaux alloit chez Monsieur Servien, il me prioit de
faire en sorte qu’il ne parlast point de la lettre circulaire à Monsieur Servien,
parce que son intention n’estant pas de se relascher il lui fascheroit de refuser
Monsieur d’Avaux en face. Je respondis que je ferois ce que Monsieur
Servien ordonnoit, mais que s’il n’avoit pas agréable de dresser ou faire
dresser la despesche pour la Cour, je ne pensois pas que Monsieur d’Avaux
allast chez lui, veu qu’il ne m’avoit parlé de s’y rendre qu’en ce cas pour con-
certer ladicte despesche. Et les choses en sont demeurées là.
Je n’entre pas dans les raisons de part et d’autre, je laisse à chacun le soin
de justifier sa conduitte. Mais quand je considère le peu de chose qui a
retardé une despesche si importante qu’est à mon sens la lettre circulaire,
je vous avoue, Monseigneur, que j’en suis tout scandalisé et ne comprens
pas comment le service du Roi se fera entre ces Messieurs lorsqu’on sera
entré en matière et qu’on touchera aux endroits plus importans de cette
négociation.
L’autre difficulté a esté sur la façon de recevoir la visite qu’on avoit faitte
aux Espagnols à l’occasion du décèz de la Reine d’Espagne . Ils avoient
receu ce compliment en la maison de Monsieur Saavedra où son collègue
avoit esté convié de se trouver à l’accoustumée, et ces Messieurs faisoient
estat de le rendre en la mesme sorte. Mercredi ils envoièrent demander
heure pour cela à Monsieur d’Avaux. Il respondit à leur secrétaire qu’il
estoit prest quant à lui et qu’il espéroit que ces Messieurs envoieroient aussi
prendre l’heure de Monsieur Servien, auquel il donna avis de sa response
par Monsieur de Préfontaine. Les Espagnols envoièrent peu après chez
Monsieur Servien sçavoir à quelle heure il avoit agréable de se trouver en
la maison de son collègue pour y recevoir ensemble la visite qu’ils désiroient
leur rendre. Monsieur Servien respondit que si c’estoit une visite d’affaire,
il ne manqueroit pas de s’y rendre, mais que s’agissant d’un pur compliment,
il espéroit que Messieurs les Ambassadeurs d’Espagne lui feroient l’honneur
de lui rendre cette visite en sa maison. Les Espagnols disoient que cela estoit
contre l’usage de ce lieu ci, et que d’ailleurs il n’estoit pas raisonnable qu’ils
rendissent deux visites pour une, et renvoièrent chez Monsieur Servien le
convier derechef de leur faire sçavoir à quelle heure il auroit agréable de se
trouver chez son collègue, et ajoustèrent qu’ils parleroient d’affaires. Mon-
sieur Servien demeura dans les termes de sa première response, après cela
les Espagnols rendirent la visite à Monsieur d’Avaux et au sortir de là firent
proposer que si nos Messieurs vouloient visiter Monsieuer Brun, ils don-
neroient ensuitte contentement à Monsieur Servien. Monsieur d’Avaux en
faisoit scrupule, il disoit qu’il estoit quitte avec les Espagnols et qu’il ne
pouvoit pas recommencer et leur faire une nouvelle avance sans retour, et
qu’autrement la dignité du Roi demeureroit engagée en sa personne. La
chose estant proposée aux Espagnols, Monsieur Brun consentit à rendre sa
visite à Monsieur d’Avaux, et ainsi Monsieur Servien a eu contentement.
Les Espagnols y ont procédé ce me semble bien honnestement.
Au milieu de cette difficulté, Monsieur Servien m’envoia une lettre sur ce
sujet
aurois je tout gasté et au lieu de convenir d’un expédient pour ce regard on
auroit travaillé à respondre à cette lettre ou manifeste, je ne sçais ce que
c’estoit. L’affaire terminée, je rendis sa lettre à Monsieur Servien bien
cachettée et le suppliai derechef de me dispenser d’en recevoir à l’avenir et
de considérer le mauvais effet que tous ces billets avoient produit jusques
ici et comme ils ne servoient qu’à fomenter la division et aigrir les esprits.
J’ajoustai qu’estant à la Cour, j’avois remarqué que Monsieur de Brégi y
avoit esté blasmé pour avoir rapporté à Monsieur d’Avaux quelques paroles
d’aigreur qui estoient eschappées à Monsieur Servien, et que j’ appréhen-
derois avec raison un pareil blasme si je me rendois entr’eux le dépositaire
et le porteur de leurs manifestes et pasquils. Mais nonobstant tout cela et
l’offre que je fis ensuitte d’ouïr la lecture des choses qu’il désireroit m’escrire
pour en retenir le sens, il me semble qu’il luy demeura quelque desgoust
de mon procédé. Je ne pense pas néantmoins que j’aie failli en cela, si j’ai
tort je suis prest à me corriger quand vous l’ordonnerez.
Monsieur Servien me dit l’autre jour à propos de la division qui est entre
Monsieur d’Avaux et lui, que d’un costé ma présence servoit de beaucoup,
parce que je parlois librement à Monsieur d’Avaux, mais que d’ailleurs
Monsieur d’Avaux faisoit beaucoup de choses qu’il ne feroit pas s’il n’ espé-
roit que je ne lui donnerois pas le tort escrivant à la Cour. Je respondis que
je n’avois pas esté ici durant leur première division, que Monsieur de Brégi
lequel Monsieur d’Avaux n’avoit jamais veu auparavant avoit esté présent
à cette guerre, et que je ne voiois pas qu’elle en eust esté moins rude de part
ni d’autre, et qu’il pouvoit juger si je rendois sincèrement tesmoignage de
la vérité par la première que je vous avois escritte touchant leur division
dont il a veu la minute. Tandis que la paix a duré, il n’est guères arrivé de
contestation entr’eux (et il y en a eu plusieurs) qui ne se soit terminée au
contentement de Monsieur Servien par mon entremise. Il en demeure
d’accord et me disoit l’autre jour à ce propos que je n’y avois plus si bonne
main. Tout bon concert est rompu entr’eux, ce n’est plus que jalousie et
déffiance, et je ne prévois que discorde et dissension à l’avenir.