Acta Pacis Westphlicae II B 1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 1: 1644 / Ursula Irsigler unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy
296. d’Avaux an Brienne Münster 1644 November 23
Münster 1644 November 23
Ausfertigung: AE , CP All. 34 fol. 138–149 = Druckvorlage; Eingang nach Dorsal fol. 149’:
1644 Dezember 6.
Meinungsverschiedenheiten mit Servien: 1. Unnachgiebigkeit Serviens bei der Formulierung der Über-
gangsregelung bis zum Eintreffen der erneuerten Vollmachten; 2. Auseinandersetzung um Titel
und Rang der gegnerischen Gesandten; 3. Form und Inhalt des Rates Serviens, das Allianzgesuch des
Königs von Dänemark abzuweisen. Rat, auf die Verhandlungen mit Dänemark einzugehen.
Je suis obligé de vous représenter quelque diversité d’avis en laquelle je me
rencontre avec Monsieur de Servien. Ce n’est pas qu’en toute nostre négo-
tiation je n’aie passé dans ses sentimens après luy avoir représenté les diffi-
cultés que j’y voiois. J’en ay usé de la sorte pour faire cognestre s’il est
possible à noz Médiateurs et à noz parties que nous agissons d’un mesme
esprit et pour essayer de mériter la bonne grâce de la Reyne qui l’a promise
à celuy de nous deux qui cèderoit le plus. A présent qu’il s’agit de rendre
compte à Sa Majesté de ce qui est faict et de ce qui est encores à faire, je ne
doute point qu’elle n’ayt bien agréable de sçavoir au vray comme les choses
se sont passées et que la différence de noz avis donne lieu au Conseil d’en
délibérer avec cognoissance de cause.
Cette différence se trouve en trois affaires, l’une desquelles est à la vérité
terminée pour cette fois, mais il y a grand sujet de croire qu’elle reviendra.
Les deux autres sont indécises et ont besoin des ordres de la Cour.
Vous avés desjà sceu, Monsieur, que nous sommes convenus il y a longtemps
de la forme des nouveaux pouvoirs qu’on doit faire venir de France, d’ Es-
pagne et de Vienne. Maintenant vous sçaurez que nous avons pensé rompre
quand il a esté question de mettre nostre convention par escrit. Messieurs
les Médiateurs
Genauerer Bericht über die Verhandlungen mit den Mediatoren in nr. 297. Zum Folgenden vgl. auch
V. Kybal – G. Incisa della Rocchetta I, 1 S. 231–240, sowie den Bericht Serviens in
[ nr. 300 ] und den Kommentar zu [ Beilage 2 von nr. 301 ] S. 662–664.
plenipotenze dell’Imperator e delle due Corone di commun sodisfattione
etc.” Ilz disoient que c’est le style de Rome et de Venise qu’en un acte où
les députéz de France et d’Espagne doivent intervenir c’est l’usage de dire
les deux Roys ou les deux Couronnes. Néantmoins, cella nous a faict peine.
Non que nous fissions difficulté de laisser le premier rang à l’Empereur
quand nous n’aurions à traitter qu’entre le Roy et luy, ny de dire les deux
Couronnes quand nous aurions à traitter avec les Espagnolz seulz. Mais
nous trouvions quelque inégalité à nommer l’Empereur et désigner seule-
ment les Roys. Que c’est bien assez de luy donner la préséance sans y ad-
jouster cet avantage. Cet intérest ne touchoit pas moins les députéz d’ Espa-
gne que nous, et toutefois ilz s’en sont extrêmement scandalisés aussy bien
que les Impériaux. Ilz ont faict voir aux Médiateurs que l’un de nous mes-
mes en a cy devant usé de la sorte et ont produit le traitté de Chiérasque
où il est dit que les biens confisquéz seront rendus de part et d’autre “tanto
nelli stati che dipendono dalla Corona imperiale che dalle due Corone” .
A cet exemple qui estoit umpeu pressant, Monsieur le Nunce et Monsieur
l’Ambassadeur de Venise ont adjousté un expédient qui ne l’estoit pas moins.
Ilz ont dit que pour esgaler l’Empereur et les deux Roys et les unir tous trois
par un mesme mot, il falloit mettre: “Essendosi aggiustate le plenipotenze
delle Maestà dell’Imperator e delle due Corone etc.”, et qu’en ce cas tant
s’en faut que l’Empereur y eust avantage, qu’au contraire il y perdroit quel-
que chose en ce que le titre de Majesté Impériale qui luy est particulier seroit
obmis et qu’il n’auroit que celuy de Majesté qui est commun à tous les
Roys.
Je creus alors que nous devions nous rendre aux raisons de noz Médiateurs
et l’usage observé par mon collègue, veu mesmes que le Roy d’Espagne ny
aucun de ses ministres n’est intervenu au traitté de Chiérasque comme ilz
font en celuy cy, et partant qu’on pouvoit alors avec plus de fondement que
non pas à cette heure se passer de dire: les deux Couronnes. Joint que lesdits
Sieurs Médiateurs nous remonstroient que le titre de Majesté se donnant
également aux trois Princes qui contractent, nous ferions la chose avec plus
de dignité pour la France que l’on n’a faict à Chiérasque où l’on a distingué
la Couronne de l’Empereur d’avec celle du Roy. Car suivant ledit traitté il
auroit fallu dire: “Essendosi aggiustate le plenipotenze della Maestà dell’ Im-
perator e delle Maestà delle due Corone.”
Mais Monsieur de Servien a persisté en son premier sentiment et a maintenu
que dans un papier qui porte “Noi Plenipotentiarii di Sa Maestà Christianis-
sima ”, quoyque les Espagnolz en signassent un pareil par lequel ilz mettroient
“Noi Plenipotentiarii di Sa Maestà Catholica”, nous ne pouvions dire: les
deux Couronnes sans blesser le rang de la France. Pour lever encores ce
scrupule, ainsy que les Médiateurs parloient, ilz ont offert que la convention
porteroit: “Noi Plenipotentiarii delle Maestà loro”, auquel cas il est bien
vray que la difficulté cessoit, puisque cet acte nous eust esté commun avec
les députés d’Espagne et que nous avions déclaré que nous ne nous esloigne-
rions pas de l’usage qui est de dire: les deux Couronnes, usage qui s’observe
avec la Suède, avec l’Angleterre et avec toutes les testes couronnées. Néant-
moins , cella n’a pu contenter Monsieur Servien, et je l’ay segondé comme
j’ay pu affin de ne pas faire cognestre de division. Mais ny luy ny moy
n’avons pas esté assez heureux pour persuader Messieurs les Médiateurs.
Ilz nous ont déclaré en plusieurs conférences et avec sentiment qu’ilz ne
pouvoient comprendre noz raisons. Et les choses sont venues à tel point
qu’ilz nous ont faict plainte que nous ne faisions que varier de jour à l’autre,
car je passe sous silence beaucoup de particularités. En un mot, nous avons
eu pendant quinze jours de vives contestations avec eux, et nostre avis leur
sembloit si mal fondé que ny Monsieur le Nunce ny Monsieur l’Ambassadeur
de Venise ne nous ont pas espargnés sur ce sujet. J’en ay veu Monsieur
Servien bien picqué, |:et jusques à soubçonner ledit Sieur Ambassadeur de
partialité:|.
L’affaire estant en ces termes, je proposay qu’il n’estoit pas besoin de faire
sa promesse quand on est prest de paier et que dans un mois nous aurions
icy nostre nouveau pouvoir selon qu’il avoit esté concerté avec les députés
du parti contraire. Que s’ilz faisoient aussy venir les leurs, nous traitterions
ensemble des moiens de faire la paix, et en tout cas nous ferions voir le nostre
à toute l’Allemagne pour justifier que nous ne sommes pas en demeure.
Il fut réplicqué par les Médiateurs que la convention dont il s’agissoit ne
contenant pas seulement la promesse de faire venir de nouveaux pouvoirs
dans un temps limité, mais authorisant aussy ce qui pourroit estre traitté et
arresté durant ledit temps, l’expédient par moy proposé ne remédiroit qu’au
premier point, et qu’ainsy il seroit bien fascheux de demeurer encores trois
mois sans rien faire. Ilz adjoustoient les considérations suivantes: Que les
Princes d’Allemagne estans sur le point d’envoyer à cette assemblée et quel-
ques Eslecteurs nous l’aians desjà escrit, il estoit dangereux de la retarder
et peut estre la rompre pour rien et sans aucune cause apparente. Que tout
le monde nous donneroit le tort, qu’ilz nous prioient de le bien peser et
doutoient mesmes si noz difficultéz seroient approuvées en France. Qu’en
mesme temps que nous invitons icy les Princes d’Allemagne et que nous
protestons de vouloir conserver la dignité de l’Empire, les députéz de
l’Empereur feroient grand bruit de ce qu’on luy dispute sa place, et que
ceux d’Espagne disoient desjà avec un vif ressentiment que ce n’est pas
avoir l’esprit de paix de refuser de dire les deux Couronnes ou les deux Roys
dans un traitté qui se faict avec eux et selon qu’il est accoustumé.
Je ne vous représente pas, Monsieur, la dixiesme partie des choses qui se
sont passées et de l’envie que nous avons soustenue en cette occasion. La
copie de l’article du traitté de Chiérasque lequel sera cy joint a esté envoyée
à Messieurs les Médiateurs par Dom Diego de Saavedra qui l’a depuis
publié de tous costés, et cet exemple tiré de ce que l’un de nous mesmes a
fait en pareil cas a bien aydé à faire murmurer contre nous.
Après tant de constestations, l’on est demeuré d’accord de faire deux escrits
séparés, l’un entre nous et les Impériaux, l’autre entre nous et les Espagnolz.
En celuy là l’Empereur a esté nommé avant le Roy, et en celuy cy Sa Majesté
a este nommée conjointement avec le Roy d’Espagne. Monsieur Servien y
trouve de l’avantage, mais j’avoue que je n’y en vois aucun, et il me semble
qu’au lieu d’aigrir les espritz et mesconter mesmes noz Médiateurs et perdre
beaucoup de temps et hazarder tout pendant qu’on veut vaincre, il auroit
esté plus honorable pour la France d’accepter le parti proposé en ces termes:
“Essendosi aggiustate le plenipotenze delle Maestà dell’Imperator e delle
due Corone di commun accordo e sodisfattione, noi Plenipotentiarii delle
Maestà Loro ci ublighiamo etc.” Car il est à remarquer que chacun a signé
séparément et que dans les exemplaires mesmes qui sont signés de nous seulz,
nous avons donné la préséance à l’Empereur et l’égalité au Roy d’Espagne,
ce que Monsieur Salvius n’a pas fait au traitté préliminaire, puisqu’en
l’exemplaire signé de luy il a tousjours nommé la Reyne de Suède avant
l’Empereur.
Pour cette raison il valoit mieux signer le mesme escrit avec les Impériaux,
veu mesmes qu’ilz n’estoient pas esloignéz de signer en colonne, et par ce
moyen nous gardions quelque égalité avec eux puisque le premier député
de France eust signé en lieu plus éminent que le second député de l’Empereur.
Mais il a paru que c’est pour ce sujet que Monsieur Servien a insisté que
chacun signast séparément, affin de ne point mettre son nom plus bas que
le mien et ne signer pas mesme au dessous de Monsieur de Longueville
quand l’occasion s’en présentera. Et qu’ainsy ne soit la despesche qu’il avoit
dressée, dont copie sera cy jointe
Beilage 2; sie entspricht dem ersten Teil von [ nr. 300 ] .
mesme sorte dans la signature du grand traitté qui sera faict. Tant y a que
les Impériaux ont accordé aussytost ce qu’il désiroit comme y ayans trouvé
leur compte. Cependant il veut croire que c’est un avantage, disant que dans
l’escrit donné par nous nous avons signé les premiers. Mais c’est que per-
sonne ne nous a disputé la place, et j’ay peine à comprendre qu’il y ayt un
premier où il n’y a point de second ny de troisiesme.
Quand au segret qu’il vous recommande
Vgl. [ nr. 300 S. 658. ]
publique et qui va estre escritte de toutes partz, nous n’en tirerons à mon
avis autre fruit que de vous rendre nostre action plus spécieuse et vous en
faire juger avantageusement.
Voilà pour ce qui touche le premier point, sur lequel il vous plaira nous
régler par ordre de la Reyne s’il arrive que dans le progrès de nostre négo-
tiation comme il est bien vraysemblable nous aions à parler conjointement
du Roy, de l’Empereur et du Roy Catholique, et s’il faudra encores refuser
de dire dans un acte commun à toutes les parties: les Majestés de l’Empereur
et des deux Roys.
L’autre difficulté qui nous a parti en opinions est qu’en faisant noz remarques
contre la validité des pouvoirs de noz parties, Monsieur Servien voulut
mettre pour un défaut essentiel que la qualité d’Ambassassadeurs ne leur
estoit pas donnée et prétendit les obliger à se la procurer ou qu’ilz auroient
ny le rang ny le titre d’Excellence qu’ilz ont eu jusques à cette heure.
Je luy remonstray que nous n’avions pas droit de les y contraindre, parce
que dans le traitté préliminaire il n’est parlé que de Plénipotentiaires et que
tous les passeportz ont esté expédiés de part et d’autre soubz cette qualité.
Quand au rang et au titre, qu’ilz en estoient en possession avec les Média-
teurs et avec nous mesmes. Je priay donc Monsieur Servien de considérer
si cette conduitte ne nous jetteroit point dans un embarras et dans des diffi-
cultéz fascheuses et s’il ne seroit pas plus à propos de quitter nous mesmes
cette qualité d’Ambassadeurs et nous contenter de celle de Plénipotentiaires
sans mettre en contestation une matière si délicate que celle du rang où il
faut vaincre quand on y a engagé son maistre, n’y aiant point d’autre issue
qui ne fasse préjudice.
Nonobstant cela il fut d’avis que l’on fist effort pour faire prendre la qualité
d’Ambassadeur aux députéz de l’Empereur et du Roy d’Espagne et dit que
si l’on n’en pouvoit venir à bout, nous la quitterions, soustenant luy mesme
en ce temps là qu’il estoit nécessaire que nous eussions tous une mesme
qualité pour plusieurs raisons.
Il me sembloit tousjours qu’il y avoit quelque péril de nous engager en cette
contestation dont l’evénément dépendoit entièrement de noz parties, et je
disois qu’il valoit mieux faire sans esclat ce qui estoit en noz mains et ne
prendre que la qualité de Plénipotentiares dans la minute de nostre nouveau
pouvoir, car il ne nous en revenoit aucun préjudice. Néantmoins pour ne
retarder pas les affaires, je laissay passer la chose par l’avis de Monsieur
Servien. Nous fismes donc instance dans le mémoire que nous donnasmes
des manquemens que nous trouvions aux pouvoirs des Impériaux et Espa-
gnolz qu’ilz eussent à prendre la qualité d’Ambassadeurs. Nous en parlasmes
aux Médiateurs et Monsieur Servien leur dit nettement en termes exprès
– que j’avois adoucis par le mémoire – que si noz parties n’avoient cette
qualité, nous ne leur en donnerions pas le rang ny le titre. Que l’Excellence
n’estoit deue qu’aux Ambassadeurs et choses semblables. Messieurs nous
furent contraires pour ce regard et entre autres choses ilz nous opposèrent
le traitté de Chiérasque où Galas qui n’y a pris que la qualité de Plénipoten-
tiaire est nommé et a signé avant Messieurs de Thoiras et Servien qui avoient
celle d’Ambassadeurs. Mais comme on ne laissa pas de persister de nostre
part, ilz se chargèrent d’en parler à noz parties. Leur response fut qu’il ne
leur seroit pas honneste d’en escrire à leurs maistres et qu’ilz ne le feroient
pas, que c’estoit contre l’usage de telles conférences de paix où il ne faut
que des députéz avec un pouvoir suffisant. Ilz ne manquèrent pas d’alléguer
aussy ce qui est dit cy dessus du traitté de Chiérasque. Cella n’aiant pas
encores satisfait mon collègue, les Médiateurs en escrivirent à Vienne et en
furent encores refusés.
Lorsqu’ilz receurent cette response nous estions après à convenir du projet
de noz nouveaux pouvoirs, et je ne pensois pas qu’ensuite de ce refus Mon-
sieur Servien voulust encores retenir la qualité d’Ambassadeur, puisque nous
n’avions pu la faire prendre à noz parties et qu’il nous avoit engagé de bouche
et par escrit à ne leur en donner pas le rang ny le titre. Je luy représentay de
nouveau tous ces inconvéniens et que nous estions demeurés d’accord que
si les députés du parti contraire n’obtenoient cette qualité nous quitterions,
estant important que cette différence ne fust point entre nous affin que
personne n’en pust prendre avantage. Monsieur Servien ne fust plus alors
de cet avis, il employa plusieurs raisons pour me faire voir qu’il nous
importoit de retenir cette qualité. Il dist que nous en avions besoin à Munster
pour y mettre noz personnes en seureté, veu mesmes qu’on nous avoit
menacés au sujet de noz lettres circulaires. Il dit de plus que si la négotiation
de paix ne succédoit pas, il estoit à présumer qu’il y auroit occasion de
traitter avec les Princes d’Allemagne et que le caractère d’Ambassadeur
serviroit à nous authoriser d’avantage pour les traittéz. Il fut respondu sur
l’heure par Monsieur de Saint Romain que si la qualité de Plénipotentiaire
nous authorise assez pour conclurre le traitté de la paix généralle, il n’y a
pas lieu de douter qu’elle ne suffise pour un traitté particulier avec quelque
Prince de l’Empire. Que ce n’est pas la qualité d’Ambassadeur qui nous met
icy en seureté mais les passeportz que nous avons comme députéz pour la
négotiation de la paix. Qu’au contraire en prenant la qualité d’Ambassadeur
nous donnerions prétexte aux ennemis pour colorer une violence s’ilz en
vouloient faire, veu que dans le traitté préliminaire il n’est parlé que de
Plénipotentiaires et que les passeportz que nous avons de l’Empereur et du
Roy d’Espagne sont expédiéz pour des Plénipotentiaires et non pour des
Ambassadeurs. Tout cella ne fit aucune impression sur l’esprit de Monsieur
Servien, il dit qu’il falloit laisser la chose au choix et au jugement de la Cour
et voulut constamment que dans la minute de nostre nouveau pouvoir nous
y fussions nommez Ambassadeurs. Je céday encore à sa volonté, quoyqu’il
y eust quelque désavantage pour nous puisque noz parties ne laissoient rien
indécis de leur part. Nous avons pris cette qualité dans le projet de nostre
nouveau pouvoir lequel nous avons signé et mis entre les mains de Messieurs
les Médiateurs, mais avec cette déclaration qu’il dépendra de vous, Monsieur,
de l’insérer ou de l’obmettre dans l’original que vous nous enverrez selon
qu’il plaira à la Reyne.
C’est maintenant à Sa Majesté à décider lequel des deux est le plus con-
venable . Monsieur Servien estime que nous devons estre Ambassadeurs et
moy je suis d’avis contraire. Voicy mes raisons:
1. Nous avons dit hautement qu’il y avoit différence entre un Ambassadeur
et un Plénipotentiaire et que si les Impériaux et Espagnolz n’avoient la
qualité d’Ambassadeur, nous précéderions désormais le Comte de Nassau
et ne donnerions plus d’Excellence ny la main chés nous à Saavedra. Or, il
est constant aujourd’huy qu’ilz n’auront point cette qualité, et partant il nous
faut desdire ou nous engager plus avant dans une prétention en laquelle nous
aurons Messieurs les Médiateurs et tout le monde contre nous et dont je ne
vois pas qu’on puisse sortir avec honneur. Pourquoy se jetter dans cet
embarras sans aucune nécessité?
2. Le traitté préliminaire que nous alléguons à toute heure aux ennemis
comme le fondement et la cause de cette assemblée a réglé cela, il n’y est
point faict mention d’Ambassadeurs.
3. Tous les passeportz expédiés et eschangés respectivement pour venir à
Munster et Osnabrug sont conceus pour des Plénipotentiaires non pour des
Ambassadeurs.
4. Les exemples du passé, au traitté de Vervins et en tous les précédens il
n’y eut de part et d’autre que des députés avec pleinpouvoirs.
5. Il importe que nous ayons tous une mesme qualité comme Monsieur
Servien l’a dit luy mesme et l’a maintenu aussy longtemps qu’il a espéré
d’obliger les députez de la Maison d’Austriche à estre Ambassadeurs. A pré-
sent qu’il n’y a plus lieu de l’espérer, il n’est pas raisonnable qu’il change de
maxime et qu’il puisse faire et desfaire une mesme chose, soustenir le pour
et le contre ainsy qu’il luy plaist.
6. Si le traitté de paix ne réussit pas, le titre d’Ambassadeur ne nous donneroit
aucune seureté parmy les Impériaux, tesmoin l’entreprise qu’ilz firent der-
nièrement sur la personne de Monsieur de La Thuillerie entre Osnabrug
et Minden.
7. Monsieur Servien se persuade qu’au traitté préliminaire le commissaire
impérial n’a point eu qualité d’Ambassadeur, mais il ne faut que lire: “Sacrae
Caesareae Maiestatis cum potestate deputatus Legatus.” Ce sont les premières
lignes dudit traitté. Or s’il n’avoit pas eu ce titre, je n’aurois pas laissé de
convenir des préparatoires de la paix avec luy sans aucun préjudice de la
France quoyque je fusse Ambassadeur du feu Roy, car je ne luy ay cédé en
rien, il n’est pas nommé avant moy dans ledit traitté et je ne l’ay pas signé
après luy. Je ne vois donc pas en quoy Monsieur Servien trouve la similitude
entre la traitté préliminaire et celuy de Chiérasque où le Plénipotentiaire de
l’Empereur a précédé partout les Ambassadeurs de France et a signé avant
eux.
Après cela Monsieur, considérez s’il vous plaist que Monsieur Servien a
grande confiance en ma facilité, non seulement d’escrire sous mon nom des
sentimens que j’ay tousjours combatus et me les présenter comme s’ilz
estoient miens, mais aussy de me vouloir faire signer une despêche
Der erste Teil von [ nr. 300 ] war Teil des von Servien konzipierten gemeinsamen Berichtes, dessen
Unterzeichnung d’Avaux verweigerte.
laquelle je me condannerois moy mesme contre la vérité de ce qui s’est passé
et me chargerois d’une faute que je n’ay pas faitte au traitté préliminaire
pour couvrir ce qui a esté faict ailleurs.
Mais affin de ne parler plus de mon chef et vuider la question par une
authorité supérieure, voicy ce que Monseigneur le Cardinal nous a faict
l’honneur de nous escrire sur ce sujet dèz le 16. avril
[ Nr. 46. ] Auf diese Weisung beruft sich auch Servien; vgl. [ nr. 301 S. 662. ]
quelle raison la qualité simple de Plénipotentiaire pourra esgaler celle que
vous avez de Plénipotentiaires Ambassadeurs, estant certain qu’un simple
gentilhomme peut estre envoyé pour traitter une grande affaire avec plain-
pouvoir de la conclurre sans que pour cela il doive prétendre d’estre traitté
comme s’il estoit Ambassadeur.” Je ne le dis pas pour trouver à redire à ce
que l’on a faict, mais pour vérifier par le moyen du Nunce et de l’ Ambassa-
deur de Venize si la chose est de cette sorte affin que Faxardo et les autres
se fassent pourvoir de la qualité d’Ambassadeur, puisqu’autrement on pour-
roit dire que l’esgalité du traittement blesseroit la dignité du Roy.
Or, nous n’avons pu obliger Faxardo et les autres à se faire pourvoir de la
qualité d’Ambassadeurs et sommes demeurés d’accord de la minute de leur
nouveau pouvoir où ilz ne sont nomméz que Plénipotentiaires. D’ailleurs
nous ne sçaurions désormais nous dispenser de l’égalité du traittement sans
choque[r] Monsieur le Nunce et Monsieur l’Ambassadeur de Venise qui
vivent ainsy avec eux et sans encourir le blasme d’une innovation au bout de
huits mois que nous sommes icy. Il est donc plus expédient de nous passer
d’une qualité non nécessaire pour faire la paix qui est tout ce que la Reyne
attend de nostre service, que d’en estre honorés avec quelque préjudice de la
dignité du Roy.
La troisiesme affaire dans laquelle je ne puis estre de l’avis de Monsieur
Servien mérite umpeu d’attention. |:Il rejette absolument l’alliance que vous
nous mandez avoir esté proposée entre Sa Majesté et le Roy de Danne-
marck
Vgl. dazu [ nr. 303 ] und [ S. 682 Anm. 3. ]
inconcevable, qu’il est presque tousjours transporté de fureur:| et qu’il ne
faut songer |:qu’à le guérir:|. Je crois premièrement, Monsieur, que l’on
ne trouvera pas mauvais que j’aie refusé |:de souscrire à de telz éloges d’un
grand Prince qui:| n’est point en guerre avec nous et qui |:vient d’accepter
l’entremise de Leurs Majestéz pour un accomodement:| qui nous est si
nécessaire. La seureté des chifres n’est pas telle qu’il n’y ayt un grand péril
à escrire de ce style |:contre la personne d’un Roy ami, lors mesme qu’il
recherche une liaison plus estroitte avec la France:|.
Au fondz, j’estime qu’il ne sçauroit estre |:que très utille de l’escouter, car
s’il a faict cette ouverture afin de se concilier la faveur du Roy et les offices
de l’Ambassadeur de Sa Majesté dans le besoin qu’il en a présentement:|,
il est bien à propos de luy laisser le contentement de voir jour à ce qu’il s’est
proposé. Autrement |:Monsieur de La Thuillerie perdra une belle occasion
d’acquérir créance auprès de luy et d’entrer en la confiance de ses principaux
ministres, que si c’est tout de bon qu’ilz parlent d’aliance, nous avons plus
d’intérest:| de ne les pas rebuter par nostre silence ou par une froide res-
ponse . J’ay souvent eu ordre du feu Roy de travailler à |:la conjonction de
ce Roy avec les autres:| alliés de Sa Majesté, et j’avois avancé l’affaire en
sorte |:que partant de Hambourg Monsieur Vulfelt me despêcha un homme
en grand secret:| avec lettres de sa main pour m’avertir qu’à mon arrivée
en France je trouverois le mesme homme muni de pouvoir suffisant pour
traitter segrèttement par mon entremise avec Monsieur le Cardinal de
Richelieu. La mort de Son Eminence survint en ce temps là, et celle du
Roy qui suivit de près rompit les mesures |:dudit Sieur Vulfelt:|. Les choses
en sont demeurées là |:jusques à point que le mesme Seigneur a faict la
mesme proposition à Monsieur de La Thuillerie auquel je l’ay cy devant
asseuré qu’il pouvoit autant se confier qu’en moy mesme:|, ce qui faict
voir qu’en ce point |:le Roy de Dannemark n’a pris conseil de sa passion
et du désir qu’il peut avoir de se vanger des Suédois:| comme Monsieur
Servien a creu. S’il m’eust faict l’honneur d’en conférer avec moy auparavant
que de prononcer si confidemment sur une affaire de telle importance, je luy
aurois représenté comme |:ce projet d’aliance est de plus de deux ans aupa-
ravant la guerre d’entre les Couronnes de Suède et de Dannemarck:| et que
ce n’est pas chose à mespriser. Mais je me promets qu’il y sera enfin pourveu
et qu’un secrétaire ne présumera pas d’insérer dans une despesche ce qui
n’aura point esté concerté.
Tant y a, Monsieur, que par mon opinion laquelle je sousmetz au jugement
des supérieurs il est à propos |:d’entendre à la proposition du Grand Maistre
de Dannemark :|, de l’examiner avec luy mesme, luy remonstrer comme par
confiance et sincérité que nous ne voudrions aucunement |:passer dans une
nouvelle aliance qui pust faire quelque préjudice aux antiennes, mais qu’il
ne s’agist que d’accroistre le nombre des confédéréz et fortiffier de plus en
plus:| la cause commune. La Reyne a tant de passion pour le solide establis-
sement d’une paix |:et tant d’estime et de bonne volonté pour le Roy de
Dannemarck:| que Sa Majesté y apportera de sa part toutes les facilités
possibles sans perdre aucune occasion |:de favoriser l’intérest dudit Roy:|.
Pendant ces pourparlers qu’il sera |:aisé d’alonger sur divers incidens, Mon-
sieur de La Thuillerie avancera tousjours sa négotiation et saura bien prof-
fitter de cette intelligence:| pour achever heureusement l’affaire |:qui est
entre ses mains:|.
Nous en pourrons tirer encores cet avantage que |:l’accomodement estant
faict, le Roy de Dannemark ne permettra pas que ses trouppes passent au
service de l’Empereur et les fera licentier en lieu où nous les puissions
embarquer pour Calais:| ou peut estre |:les emploiera luy mesme contre
noz ennemis selon le dessein qu’il aura concerté avec ledit Sieur Ambassa-
deur :|.
Je n’ay point faict voir cette lettre à Monsieur Servien d’autant qu’aux deux
premiers points les choses ayans passé par où il a voulu, il ne s’agit plus de
dimouvoir l’un de nous de son opinion, mais simplement d’en informer la
Cour et attendre les ordres. Joint qu’il a entendu plusieurs fois tant par
Monsieur de Saint Romain que par moy mesmes les raisons que j’ay cy
dessus desduittes et beaucoup d’autres que j’ay obmises pour ne vous pas
ennuier d’une si longue narration. Et de plus cella n’auroit servy qu’à former
entre nous de nouvelles contestations, retarder le partement du courrier et
multiplier noz escritures. Quand au troisiesme point |:qui concerne le Roy
de Dannemark:|, Monsieur Servien ne m’en a pas demandé mon avis, il
s’est contenté de vous escrire le sien et ainsy il m’a donné la liberté d’en faire
autant, mesmement en une affaire qui touche de si près le service du Roy .
Mit gleicher Post ging nr. 297 nebst Beilagen; vgl. [ S. 647 Anm. 3. ]
1 fol. 150: Auszug aus dem Vertrag von Cherasco.
2 fol. 151–157: Kopie eines nr. 300 S. 651–657,33 entsprechenden Stücks.