Acta Pacis Westphlicae II B 1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 1: 1644 / Ursula Irsigler unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy
157. d’Avaux und Servien an Mazarin Münster 1644 Juli 2
Münster 1644 Juli 2
Ausfertigung: AE , CP All. 37 fol. 253–266 = Druckvorlage. Konzept [ des 1. Servien-Kopisten
mit Korrekturen d’Avaux’ und Serviens]: AE , CP All. 29 fol. 288–296. Kopie: AE , CP All.
27 fol. 331–339’. Druck: Nég. secr. II, 1 S. 78–82; Gärtner III S. 183–203.
Auf nr. 140 und 142. Instruktion für die Mission nach Polen. Anweisung der Subsidien für
Rákóczy. Einschluß Siebenbürgens in den Frieden. Konferenzen mit Salvius: Auszahlung der Sub-
sidien an Rákóczy, sein Einschluß in den allgemeinen Frieden; Bedingungen für die Auszahlung der
Subsidien an Schweden. Kurialien für die Gesandten der Generalstaaten. Wichtigkeit der Krieg-
führung in Deutschland und des Friedensschlusses zwischen Dänemark und Schweden. Eventuelle
Drohung mit der Abreise eines französischen und eines schwedischen Gesandten. Vorerst keine
Möglichkeit zur Kontaktaufnahme mit Bayern. Dank der Katalanen für unsere Kritik an der
spanischen Vollmacht. Beschwerde der hessischen Gesandten über die Aufrüstung des Grafen von
Ostfriesland: Bedeutung der Grafschaft für die hessische Kriegführung.
Nr. 140 und nr. 142 erfordern eigentlich keine Antwort.
Le mémoire pour dresser l’instruction de celuy qui doit aller en Polongne
ne nous servira pas seulement de règle, mais nous soulagera tout à faict de
la peine d’y travailler. |:Il comprend si exactement tout ce qui peut estre
faict en cette Cour là pour le service du Roy qu’il seroit:| difficile d’y ad-
jouster sans que l’addition fust superflue. De sorte que nous n’aurons qu’à
coppier le mémoire pour dresser l’instruction, et nous aurions desjà achevé
cette affaire si Monsieur de Brégy que nous attendons aujourd’huy estoit
arrivé pour sçavoir s’il veut faire le voyage.
Nous espérons en mesme temps de faire partir celuy |:qui doibt aller en
Transylvanie:|, mais nous sommes obligéz de représenter encores à Vostre
Eminence |:que s’il arrive prèz du Ragoci sans porter aucune lettre de
change, il est malaisé de se promettre aucun bon effect de sa négotiation:|.
Monsieur le Comte de Brienne nous escrit bien par sa dernière despêche
qu’elles ont esté résolues |:et envoyées à Venise et à Constantinople pour
estre acquictées en l’un de ces deux lieux, mais outre qu’il ne nous parle
point pour quelle somme elles ont esté faictes et si elles sont pour cent
dixhuict mille richedalles, à quoy monte la part que le Roy doibt fournir
cette première année, tant pour la moityé du subside de la somme que le
Ragoci a esté contrainte de payer à la Porte pour avoir permission de prendre
les armes:|, il semble que pour garder l’ordre il eust esté meilleur qu’on
se fust contenté d’envoyer en ces deux lieux des lettres d’avis |:et qu’on
eust envoyé icy les lettres de change pour en rendre porteur le Sieur de
Croissy, de craincte que s’il arrive en Transsylvanie les mains vuides, ce
Prince auquel les Suédois n’ont rien tenu de ce qu’ilz luy ont promis ne
s’imagine que l’on ne luy envoye que pour l’amuser, veu mesme que l’envoyé
n’aura pas charge seulement de ratiffier le traicté, ny mesme de luy pro-
mettre qu’on ne conclurra point la paix sans son consentement:|. Si Vostre
Eminence le jugeoit à propos, il seroit bien nécessaire |:en cas que les
premières lettres de change ayent desjà esté envoyées, de nous en addresser
les secondes, puisqu’aussi bien c’est le style ordinaire des marchandz d’en
délivrer plusieurs pour une mesme somme quand elle est considérable
comme celle cy et qu’elle doibt estre payée en quelque lieu esloigné:|. Mais
il faudroit qu’on nous les envoyast promptement, affin que si elles ne peu-
vent estre consignées audit Sieur de Croissy avant son départ près de nous,
elles luy puissent estre portées |:à Hambourg ou Lubek où il doit attendre
celuy que Monsieur Torstenson doibt envoyer avec luy:|.
Nous sçavons bien, Monseigneur, que le traitté du Rakotzi |:ne peut et ne
doibt pas estre ratiffié par le Roy, mais pour la promesse de le comprendre
dans la paix et de ne la conclurre pas sans luy:|, Vostre Eminence aura peu
voir dans noz despêches précédentes les raisons qui nous ont faict croire
qu’elle est plus advantageuse que préjudiciable aux intérestz du Roy. Nous
attendons avec impatience la response de Vostre Eminence sur cet article
que nous jugeons très important, parce qu’il sera difficile |:d’obtenir que
le Ragostki promette de ne faire point de paix avec l’Empereur sans le
consentement des deux Couronnes, si en mesme temps elles ne s’obligent
aussi de ne traicter point sans luy:|.
La résolution que la Reyne a prise par le conseil de Vostre Eminence
|:touchant le subside qui est deub aux Suédois par le traicté d’alliance:|
est accompagnée de toute la prudence et de toutes les précautions qu’on y
eust peu désirer, car comme il eust peut estre esté périlleux |:d’en refuser
tout à faict le payement, quoyque les Suédois en ayent donné assez de suject
pour les raisons que:| Vostre Eminence remarque, il ne seroit pas aussy
raisonnable de le continuer s’ilz persistoyent |:à tourner toutes leurs pensées
et employer toutes leurs forces contre le Roy de Dannemark:|. Il s’est ren-
contré heureusement comme nous délibérions des moyens de traitter de
cette affaire |:avec les Ambassadeurs de Suède et d’y:| apporter les précau-
tions que Vostre Eminence nous prescrit, |:que Monsieur Salvius est arrivé
en cette ville:|. Nous avons bien jugé d’abord que ce point estoit un des
principaux sujectz de son voyage, c’est pourquoy nous avons résolu en le
visitant de luy en laisser ouvrir le discours, ce qu’il n’a pas manqué de faire
Vgl. dazu Salvius an Johan Oxenstierna, Münster 1644 Juni 19/29, Druck: APW II C 1
[nr. 186 S. 256f.] und derselbe an Königin Christina, Osnabrück 1644 Juni 28/Juli 8, Druck:
ebenda [nr. 190 S. 262–270.]
Il a néantmoins commencé par |:l’assistance qu’il trouve à propos de donner
promptement au Ragostki en suite du traicté qui a esté faict avec luy, nous
ayant tesmoigné que la Suède estoit disposée d’y contribuer de son costé
tout ce à quoy elle estoit obligée:|. Sur quoy avant que luy respondre nous
n’avons pas oublié de luy faire considérer |:que si la France avoit engagé
de la sorte la Suède dans un traicté sans luy en parler, les ministres suédois
ne seroient peut estre pas si promptz d’en accomplir les conditions que ceux
du Roy l’ont esté à exécuter de la part de Sa Majesté les principaux articles
de celuy qui a esté faict avec le Ragostki:|. Mais que Sa Majesté ayant
recognu que cette diversion pourroit estre utile à la cause commune et faire
plustost obtenir une bonne paix, n’avoit pas faict difficulté d’entrer en cette
nouvelle despense. Que néantmoins nous estions obligéz de luy dire que
pour tirer quelque fruict de l’entreprise du |:Ragoski, il falloit nécessaire-
ment que Monsieur Torstenson retournast au plustost dans son voisinage
pour agir de concert avec luy et le fortiffier par son approche:|, sans quoy
il y avoit très grand suject de craindre que tous les soins qu’on y apporteroit
et toutes les despenses que l’on y pourroit faire ne fussent perdues. Nous
luy en avons allégué des raisons si concluantes qu’il a esté contrainct de se
ranger de nostre advis et de nous advouer |:que si cette guerre de Danne-
mark eust pû estre différée nous eussions faict la paix cette année, et la Suède
eust eu loisir après cela de se vanger des injures qu’elle avoit receues du
Roy de Dannemark:|. Nous luy avons ensuitte franchement déclaré |:que
le traicté faict avec le Ragostki est conceu en une forme et contient diverses
choses qui ne permettent pas au Roy de le ratiffier:|, et il a trouvé les raisons
que nous luy en avons alléguées si justes qu’il nous semble d’avoir remarqué
dans son discours |:qu’on a pris en Suède une résolution semblable à celle
de la Reyne, à sçavoir d’exécuter les principaux poinctz du traicté sans en
venir à la ratiffication:|.
Néantmoins il estime comme nous qu’il sera difficile de s’exempter |:de
promettre à ce Prince qu’on ne traictera point sans son consentement et sans
le faire comprendre dans le traicté de paix:|, auquel mesme il insiste que
nous le convions par noz lettres.
Le second article de son discours |:a esté la demande du subside, à laquelle
nous nous attendions bien. Il l’a faicte en exagérant l’extrême besoing que
leurs troupes ont de cette assistance. Nous luy avons respondu d’abord avec
un peu de froideur:| comme nous nous y estions préparéz, et n’avons pas
manqué de luy représenter le préjudice que reçoivent |:les affaires publiques
par la nouvelle guerre que la Suède a entreprise contre le Dannemark sans
le consentement ny la participation de ses alliéz. Que leur principale armée
estant employée de ce costé là depuis quelque mois:|, l’on ne pouvoit pas
demander en vertu du traitté d’alliance |:le payement du subside ordinaire
qui n’estoit destiné que pour la guerre d’Allemagne. Que non seulement la
France n’avoit point d’intérest à celle de Dannemark, mais en recevoit un
très grand préjudice en ce que l’Allemagne ayant esté comme abandonnée
par les forces de Suède, les affaires de la guerre y alloient dépérissant de
jour en autre, celles de la paix en estoient retardées et tout le fardeau nous
tomboit sur les bras, qui nous obligeoit de faire une infinité de nouvelles
despenses pour le soustenir. Qu’il estoit trop raisonnable pour croire que
nous deussions encore contribuer à faire durer une diversion qui nous jettoit
dans toutes ces peines, puis mesme que ce seroit rendre la médiation du Roy
suspecte aux Danois et nous oster le moyen d’assoupir le différend qu’ilz
ont avec la Suède que chacun juge capable de ruiner enfin tous les desseings
des Couronnes alliées dans l’Empire. Nous en sommes venus jusques à luy
faire voir le détail des despenses extraordinaires que la Reyne a esté con-
traincte de faire:| pour opposer à l’Empereur à cause qu’il est aujourd’huy
libre dans l’Allemagne, où nous n’avons pas oublié les effortz qu’on faict
dans les Pays Bas, qui selon qu’il a peu apprendre par les advis publics
doivent bientost attirer pour secourir la Flandre une partie des forces qu’on
avoit résolu d’employer contre l’armée suédoise. A la vérité, Monseigneur,
quoyqu’il n’ayt pas de bonnes raisons pour opposer aux nostres, il est
demeuré un peu surpris de nostre discours, et croyant peut estre de nous
estonner, |:il nous a demandé un peu brusquement si on vouloit rompre
l’alliance:|. Nous avons respondu |:qu’elle seroit tousjours observée aussi
religieusement de nostre part qu’elle l’avoit:| esté |:cy devant, mais que les
obligations estans réciproques, il falloit que chacun fist de son costé ce qui
est porté par le traicté, et qu’en un mot la France ne pourroit jamais se
résoudre de contribuer aux fraiz de la guerre de Dannemark. Qu’il:| se
pouvoit souvenir que lorsqu’elle avoit esté entreprise, |:on avoit positive-
ment promis qu’elle ne diminueroit en rien la vigueur avec laquelle on avoit
agy jusqu’icy dans l’Allemagne et que Monsieur Torstenson et son armée
y retourneroient aussitost que la campaigne seroit en estat de nourrir la
cavalerie. Que cependant:| nous apprenons qu’il n’y avoit encores aucuns
préparatifs |:pour sa marche, qu’au contraire il sembloit qu’il luy arrivast
tous les jours de nouveaux ordres ou de nouveaux sujectz pour le retenir en
Jutland, et qu’après qu’on avoit pris pendant quelque temps prétexte sur
ce que l’herbe n’estoit pas venue, on parloit maintenant de différer jusques
à ce que la moisson fust faicte:|. Nous n’ozerions pas importuner Vostre
Eminence de tout ce qui a esté dict sur ce suject en cette première con-
férence |:en laquelle nous avons réduict Monsieur Salvius à nous proposer
qu’une partye du subside pourroit estre maintenant employée au payement
du Ragostki et que le reste du premier terme seroit distribué à leurs troupes
de Poméranie:|. Mais voyans que son offre ne pourvoyoit pas à tout ce que
nous désirions et que nous avions résolu |:de ne nous pas expliquer de nos
sentimens en cette première visite:|, nous nous séparasmes sans rien con-
clurre.
Le deuxiesme jour suivant, comme il nous a rendu la visite et qu’après avoir
traitté de plusieurs autres points de nostre négotiation, |:il est retombé sur
l’article du subside:|. Lorsqu’enfin il a veu que nous persistions à noz pre-
mières difficultéz, il a adjousté à ses offres précédentes |:qu’une partye de
l’argent du terme escheu pourroit demeurer à Hambourg jusqu’à ce que
Monsieur Torstenson fust en chemin pour retourner dans l’Allemagne:|.
C’estoit la proposition que nous attendions et que nous luy eussions faitte
si elle ne fust venue de luy. Néantmoins nous n’avons pas |:expressément
tesmoigné d’en estre satisfaictz. Ce n’est pas que Monsieur Salvius estant
homme d’affaires et très habile n’ayt assez recognu que c’est tout ce que
nous pouvons prétendre:|, aussy est il véritable que trouvant en ces pré-
cautions les remèdes que nous pouvions chercher à noz appréhensions, et
ayans considéré que comme l’une des conditions |:excitera Monsieur Tor-
stenson de se remettre plustost en campaigne, l’autre nous met à couvert
du Roy de Dannemark et du desseing qu’on pourroit avoir d’engager la
France à l’advenir dans cette guerre et en d’autres semblables en vertu du
traicté de Wismar:|, nous serons obligéz de nous en contenter dans la
croyance que nous avons d’avoir exécuté en ce rencontre tout ce qu’il a
pleu à Vostre Eminence nous prescrire. Mais ce qui nous donne un peu de
peine |:est que nous voyons à la fin du terme que nous avons à faire à des
gens extraordinairement pressans et que nous n’apprenons pas que les lettres
de change ayent esté envoyées:|, ce que nous estimons devoir faire consi-
dérer à Vostre Eminence pour le préjudice que recouroyent de deçà les
affaires du Roy |:si on apportoit un plus long délay au payement des Suédois,
qui sont naturellement mesfians et s’imagineroient sans doubte qu’après
avoir contesté que la chose n’est plus deube:|, nous conservons tousjours
la mesme croyance, et que les démonstrations contraires que nous ferions,
si elles ne sont accompagnées de l’effect, ne seront que pour pousser le
temps et les amuser.
Voilà, Monseigneur, ce qu’ont produict deux longues conférences |:que
nous avons eues avec Monsieur Salvius:|, dont cette affaire a esté le principal
suject. La résolution que nous avons prise avec luy n’a pas peu recevoir sa
dernière forme, parce qu’il a refusé de la mettre par escrit, nous ayant
tesmoigné |:que ny luy ny le Baron Oxenstiern qui sont Ambassadeurs de
Suède et entre les mains desquelz le payement du subside ne doibt pas estre
faict ne pouvoient:| avec dignité faire une convention de cette nature. Mais
il est demeuré d’accord et nous a positivement promis |:qu’avant la déli-
vrance de l’argent, Monsieur Torstenson ou ceux qui auront ordre de le
recevoir:| nous donneront toute satisfaction selon ce qui a esté verballement
convenu entre nous. C’est à quoy nous veillerons, Monseigneur, ne croyant
pas que nous eussions peu mesnager en cette occasion quelque chose de plus
à l’advantage du Roy |:hors d’exempter Sa Majesté de l’entier payement du
subside, mais nous eussions jugé cette proposition de périlleuse consé-
quence:| et sommes ravis de voir que Vostre Eminence fait le mesme
jugement.
Nous sommes sur le poinct d’envoyer vers Monsieur le Prince d’Orange
pour convenir par son entremise s’il est possible de quelque expédient avec
Messieurs les Estatz pour les honneurs qu’ilz prétendent qu’on doit faire à
leurs Ambassadeurs en cette assemblée. Nous aurions desjà faict commencer
cette négotiation suivant les ordres qui nous en ont esté envoyéz, si nous
n’eussions attendu de jour à autre l’arrivée de Monsieur de Brégy que nous
avons appris avoir passé près dudict Sieur Prince par commandement de
Sa Majesté, peut estre aura il eu charge d’en parler, et en ce cas nous pourrons
apprendre la disposition qu’il aura trouvée dans l’esprit dudit Sieur Prince.
|:Si nous avions à faire à des personnes raisonnables:|, ilz devroyent estre
très contens des ordres qu’on a résolu d’envoyer à Monsieur de La Thuillerie
et ne nous presseroyent pas davantage de faire icy des choses en leur faveur
qui nous feroyent très grand préjudice envers ceux qui ne leur cèdent pas,
les Eslecteurs ayans résolu tout de nouveau dans leur collège de ne céder
icy ny à eux ny à Venize. Mais nous avons desjà remarqué diverses fois qu’ilz
sont si injustes qu’a[u] lieu de sçavoir gré du bon traittement qu’on leur
faict en un endroict, ilz le veulent tirer à conséquence pour tous les autres,
et que sans considérer la peine ou le préjudice qu’ilz font à leurs amis ilz ne
songent qu’à pousser tousjours leurs prétentions plus avant au désadvantage
de qui que ce soit, ce qui nous faict extrêmement craindre que l’on ne puisse
pas facillement prendre un tempéramment avec eux, pour lequel néantmoins
nous n’obmettrons rien de ce qui dépendra de nostre industrie.
Il est très asseuré, Monseigneur, que toutes les affaires publiques prennent
leur mouvement et déppendent en quelque sorte de celles d’Allemagne. Le
jugement que Vostre Eminence en faict est appuyé sur tant de solides con-
sidérations qu’il ne reste pas lieu de fonder en raison une oppinion contraire,
aussy les ennemis qui ne congnoissent pas mal cette maxime, tesmoignent
de ne ressentir pas toutes les pertes qu’ilz font ailleurs, pourveu que leurs
desseins prospèrent dans l’Empire. Ilz tiennent pour asseuré que si les mem-
bres diviséz de ce grand corps peuvent estre une fois tous réunis pour agir
de concert soubz la conduitte du chef, il y auroit peu de puissances capables
de luy résister. C’est d’une semblable espérance qu’ilz repaissent leurs parti-
sans et font semblant d’estre bien aises que la France face ses plus grandz
effortz aux autres endroictz, qui selon leur advis ne sont que des accessoires
et où ilz disent qu’une seulle place est le fruict d’une année de guerre et le
seul prix d’une prodigieuse despense qui consomme insensiblement les forces
de l’Estat, cependant qu’eux rangent des provinces entières à leur dévotion
et se rendent maistres des forces de tout un grand pays, avec lesquelles ilz
se promettent un jour en portant la guerre dans le cœur du Royaume de
redemander tout à la fois la conqueste de plusieurs années. Ce sont imagina-
tions dont ilz se flattent, principalement quand pour en faciliter l’exécution
ilz espèrent qu’il arrivera des divisions en France, qui font néantmoins
cognoistre que toute leur espérance et leur resource sont de ce costé là et
qu’en effect c’est le seul endroict dont nous avons à craindre. C’est pouquoy,
Monseigneur, Vostre Eminence ne sçauroit faire prendre une plus utile
résolution à la Reyne selon nostre foible advis que d’avoir particulièrement
à cœur les affaires d’Allemagne et peut estre d’y faire désormais les plus
grandz effortz de la guerre, soit que l’on se trouve forcé de la continuer, soit
que l’on veuille obliger les ennemis à faire plustost la paix, ou que l’on ayt
dessein de l’obtenir honorable en conservant les advantages que Dieu nous
a donnez.
Mais certes, Monseigneur, le plus nécessaire moyen pour parvenir à l’un ou
à l’autre |:est d’accommoder le différend de Dannemark, n’y ayans jamais
rien eu d’entrepris si hors de saison et si préjudiciable à la France que cette
malheureuse guerre:|. Le dessein que Vostre Eminence a pris d’y faire tra-
vailler vigoureusement |:Monsieur de La Thuilerye et de n’y espargner pas
l’argent:| est un effect de sa prudence ordinaire. Quoyque nous ne cognois-
sions guières d’occasion aujourd’huy où il puisse estre plus utilement em-
ployé, nous appréhendions d’avoir trop hardiement faict la proposition de
cette nouvelle despense avant qu’avoir veu les sentimens de Vostre Emi-
nence qui appreuvent nostre pensée et nous donnent lieu d’espérer que son
authorité y fera pourvoir. |:Si ce traicté s’achève en peu de temps et si on
peut arriver auprès du Ragostki avant qu’il a faict le sien pour l’empescher
d’y entendre, il y aura:| lieu de se promettre une glorieuse paix à la fin de
cette campagne.
Cependant pour faire cognoistre aux Impériaux ainsy que Vostre Eminence
nous l’ordonne très prudemment, que nous ne sommes pas icy pour y
attendre leur commodité, |:il ne sera pas inutile de faire quelque démonstra-
tion d’en vouloir partir s’ilz ne se:| disposent à traitter les affaires d’une
autre fasson qu’ilz n’ont faict jusques icy. Nous nous sommes tellement
rencontréz en cella dans les sentimens de Vostre Eminence que si leurs refus
de traicter avec les Suédois continuent encores quelque temps, nous estime-
rions pas hors de propos |:qu’en effect l’un de nous et l’un de Messieurs
les Plénipotentiaires de Suède se retirassent pour leur donner appréhension
que les deux autres feroient bientost de mesme s’ilz ne se disposoient:|
d’entrer sincèrement en négotiation, après toutes fois avoir informé les
Princes et Estatz de l’Empire des justes causes qui nous auroyent obligéz
de prendre cette résolution. |:Monsieur Salvius nous a parlé le premier en
ce sens, et c’est une des choses où il a le plus insisté:|.
Nous croyons encores, Monseigneur, que rien ne peut tant contribuer ou à
finir promptement la guerre |:ou à conserver nos advantages dans la paix
que l’entremise de Monsieur le Duc de Bavière, pourveu qu’on puisse espérer
qu’il s’employera sincèrement et qu’il nous sera favorable. Mais nous som-
mes estonnéz:| que pour commencer |:la confiance qu’il tesmoigne vouloir
establir avec la France, il n’a:| point faict plus de diligence |:d’envoyer icy
quelqu’un de sa part:|. Il y a mesme lieu de |:luy faire cognoistre le suject
qu’on a de se plaindre que luy ny les autres Electeurs n’ayent point encore
envoyé leurs ministres, veu le long temps qu’il y a que nous sommes icy
où leur présence advanceroit beaucoup les affaires s’ilz avoient une véritable
envie de la paix:|. Aussytost que nous verrons |:icy quelqu’un de la part
dudict Duc, nous luy tesmoignerons la bonne disposition de la Reyne et
tascherons d’establir une véritable confiance avec luy pour essayer d’en tirer
les lumières et advantages qui nous:| seront nécessaires dans nostre négo-
tiation, pourveu que nous trouvions |:en luy la mesme sincérité que nous
luy ferons paroistre:|. Nous ne manquerons pas néantmoins de nous y con-
duire avec grande retenue |:pour ne donner pas jalousie aux Suédois, qui
entrent aisément en mesfiance de toutes choses. Cependant jusqu’à ce qu’il
y ayt icy quelqu’un de sa part:|, nous voyons peu de moyens |:de luy faire
sçavoir de nos nouvelles:| comme Vostre Eminence le désire, |:ne cognois-
sans icy personne à qui nous en puissions parler avec confiance:|.
La Régent de Catalongne vient de nous dire que la difficulté que nous avons
faitte sur le pouvoir des Espagnolz à cause de la qualité de Comte de Barce-
lonne que le Roy Catholique y a prise, a faict un très bon effect dans l’esprit
des peuples de ce pays là, auxquelz il en a donné advis. Il nous en a rendu
des lettres de remerciement de la part des députéz et des Conseillers de la
ville
fois plus propres à retenir les Catalans dans le debvoir que d’autres qu’on
croiroit plus importantes:|.
Les députéz de Madame la Landgrave font icy de grandes plaintes d’un
armement que faict le Comte d’Embden dans la Frise orientale, n’ayant
point accoustumé d’avoir des gens de guerre et ayant pris depuis peu à son
service quelques compagnies d’infanterie et de cavallerie que Messieurs les
Estatz ont faict semblant de licentier. Ce procédé nouveau donne suject à
laditte Dame de croire que Messieurs les Estatz pour estendre leur domina-
tion, ou que Monsieur le Prince d’Orange pour favoriser ledit Comte duquel
le fils aisné a espousé sa cadette
vince et en chasser les trouppes de laditte Dame qui depuis quelques années
la tiennent soubz contribution
Ende August 1637 besetzten hessische Truppen ostfriesische Grenzgebiete und trieben Kontribu-
tionen ein, und zwar mit Wissen der Generalstaaten, die bereits seit Ende des 16. Jahrhunderts eine
Art Protektorat über die Grafschaft ausübten. Die Truppenwerbungen des Grafen von Ostfries-
land geschahen mit geheimer Unterstützung des Prinzen von Oranien. Vgl. dazu ebenda
S. [232–264.]
qu’ilz nous font extrêmement appréhender l’effect des mescontentemens
qu’on leur donne en cette occasion:|. Ilz en sont venus jusques à dire que
sans le respect que leur maistresse porte au Roy, elle sçauroit bien se garentir
de l’injure qu’on luy veut faire. Lorsqu’on en parle à Messieurs les Estatz, ilz
font les ignorans de ce dessein, et Monsieur le Prince d’Oranges croid de
donner une bonne response quand il promet qu’on ne fera rien au préjudice
de Madame la Landgrave ou que de son consentement. Laditte Dame ne se
contente point de ces déclarations, proteste qu’il n’y a rien à traitter sur ce
suject, que l’unique moyen de la satisfaire est de faire cesser cet armement.
Que hors l’intérest du Roy s’il falloit retirer ses troupes de quelque endroict,
elle aymeroit mieux tirer de l’argent des Espagnolz pour leur remettre Calcar
et les autres places qu’elle tient delà le Rhin que de recevoir celuy que
Messieurs les Estatz luy voudroyent offrir pour abandonner l’Ostfrise. Que
comme sans cette province qui luy fournit une retraitte asseurée en cas
qu’elle fust pressée par ses ennemis et luy donne moyen de faire ses recreues
toutes les années, ce ne seroit pas prudence à elle de continuer la guerre,
elle sera obligée de hazarder et abandonner tout le reste pour la conserver.
Cette affaire mérite extrêmement qu’on prenne soin de l’assoupir en sa
naissance. Nous envoyons à Vostre Eminence le mémoire que lesdictz
députéz nous en ont donné. S’il s’agissoit d’un simple différend entre Mes-
sieurs les Estatz et Madame la Landgrave, les ministres de Sa Majesté se
pourroyent rendre entremetteurs pour l’accommoder. Mais estant question
d’oster une province des mains d’un allié du Roy qui s’en sert pour faire
la guerre à un ennemy commun, |:pour la faire tomber à des gens qui sont
si respectueux envers l’Empereur et si soigneux de leur neutralité qu’on ne
croid pas qu’ilz osassent mesme aujourd’huy penser à l’Ostfrise s’ilz n’en
avoient eu secret consentement de la Cour de Vienne:|, où l’on ayme encores
mieux qu’elle soit entre les mains des neutraux que d’un ennemy déclaré, il
semble que la France a grand intérest d’intervenir en l’affaire comme partie
et comme ayant intérest de l’empescher à présent. Qui que ce soit qui entre-
prenne la chose, ou le corps de l’Estat ou Monsieur le Prince d’Orange, ilz
recognoissent que leur dessein est si mal receu de tous les gens de bien qui
s’intéressent dans la cause commune qu’ilz sont obligéz de le désadvouer.
Mais s’ilz y ont une fois mis le pied, il sera très difficile de leur faire lascher
prise. C’est pourquoy il importe selon nostre foible advis |:sans faire sem-
blant de cognoistre d’où vient le mal, d’en parler de bonne heure vivement
et avec chaleur:| comme d’une chose à laquelle on est nécessairement obligé
de prendre part à cause qu’elle destruict une partie de noz affaires dans
l’Allemagne, si ce n’est que Messieurs les Estatz y faisans entrer leurs armes
|:voulussent en mesme temps se déclarer contre l’Empereur, auquel cas il
nous seroit indifférend qu’eux ou Madame la Lantgrave fussent maistres de
la province:|, et nous pourrions nous entremettre des conditions de leur
accommodement. Mais sans cella ilz ne sçauroyent s’excuser |:de faire une
espèce de perfidie:| en maltraittant une Princesse qu’ilz ont autresfois
engagée à prendre les armes, et en luy courant sus en une saison où ilz
seroient obligéz par toutes sortes de raisons de luy donner assistance.
Hessisches Memorandum betreffend die Aufrüstungen des Grafen von Ostfriesland.