Acta Pacis Westphlicae II B 1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 1: 1644 / Ursula Irsigler unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy
37. Servien an Brienne Münster 1644 April 9
Münster 1644 April 9
Ausfertigung: AE , CP All. 32 fol. 96–99’ = Druckvorlage; Eingang nach nr. 61: 1644 April
20. Kopie: AE , CP All. 26 fol. 359–363’.
Ankunft und Empfang Serviens in Münster. Zurückweisung der Forderungen Contarinis in Sachen
Kurialien. Schwierigkeiten der Reise La Thuilleries. Beurteilung der spanischen und kaiserlichen
Gesandten. PS: Bitte, den Brief an Mazarin weiterzuleiten.
Je n’escrivis jamais avec plus de contentement que je fais aujourd’huy, puis-
que c’est de Munster où Dieu m’a faict la grâce d’ariver depuis quatre jours
en très bonne santé m’ayant donné un temps sy favorable pendant mon
voyage qu’il m’a servy de remède spécifficque pour me redonner mes forces.
Ces premiers jours comme vous pouvez croire se sont passéz en complimens
où certes nous n’avons eu peine qu’à nous déffendre de la civilité des Ambas-
sadeurs de l’Empereur et du Roy Catholicque dans laquelle sy nous nous
fussions laissez vaincre, vous ne nous eussiez pas jugéz dignes de porter
les intérestz d’une nation sy renommée pour la courtoysie comme la nostre.
Toutes choses se sont fort bien passées à ce premier commencement. Tous
les Ambassadeurs ont envoyé leurs carrosses et leurs gentilzhommes au
devant de moy et m’ont faict ensuite les mesmes complimens et visites qu’ilz
avoient desjà rendues séparément à Monsieur d’Avaux. Il n’y a eu que
l’Ambassadeur de Venize qui s’est contenté comme les trompettes de mener
les autres dans le combat de la civilité sans y entrer. La prétention nouvelle
qu’il a qu’on le doibt traicter aultrement qu’on ne faict à Rome et en tous
lieux où jusqu’à présent j’ay veu des Ambassadeurs de Venize, l’a empesché
de me rendre la première visite comme tous les autres. Il a voulu auparavent
exiger de moy que je l’accompagnerois jusques à son carrosse et le verrois
partir avant que me retirer. J’ay respondu que je ne pouvois faire que ce
qu’avoit faict Monsieur d’Avaux de qui j’avois l’honneur d’estre collègue
et qui en suite de ce que nous avions concerté ensemble avant que partir de
La Haye, s’est conduict en ce rencontre selon la raison et la coustume,
et mesme pour honorer la personne de Monsieur Contarini il a adjousté
quelque chose par delà. |:Le Vénitien qui paroist un peu rude et ambitieux
n’en est pas content:| croyant que l’occasion luy est favorable pour entre-
prendre et pour prétendre injustement une nouveauté. Voycy (comme j’ay
eu desjà l’honneur de vous escrire) une espèce de concile politicque où
presque toutes les nations de l’Europe auront des députéz et où pour ne
rien faire de préjudiciable de part ny d’aultre nous ne sçaurions prendre une
meilleure règle pour nostre conduicte en matière de complimens que ce qui
s’observe en la Cour de Rome. Nous avons creu que sy on ne choisist un
modèlle pour s’y attacher fortement, ou il fauldra se relascher partout, dont
vous sçavez mieux la conséquence que moy, ou faire des bigearreries qui
donneroient du contentement aux uns et du mescontentement aux aultres.
Cela m’avoit faict croire qu’il valloit mieux prendre des expédiens qui lais-
sassent un chacun dans la pocession du droict que chacun prétend luy appar-
tenir que de s’esloigner des anciennes coustumes ny rien céder positivement
dans une occasion sy célèbre. A la vérité, il n’y a pas une trop grande diffé-
rence entre le hault du degré où l’on a accoustumé d’accompagner les
Ambassadeurs de Venize et la cour où demeure leur carosse qui est le lieu
où celuy cy veult qu’on le conduise. Mais certes, après avoir desjà par
succession de temps obtenu tous les honneurs qu’on leur faict qui mettent
la Républicque de Venize dans une esgalité desraisonnable avec la première
Couronne de la Crestienté, Monsieur Contarini a mauvaise grâce de vouloir
aujourd’huy forcer les Ambassadeurs de Sa Majesté par la nécessité qu’il
croid qu’on a de son entremise à luy accorder une nouveauté qu’il demande
avec aultant de haulteur et de violence que sy on luy faisoit injustice en
voulant vivre comme on a faict cy devant. Quelque résolution que la
prudence de la Reyne luy face prendre de nous commander ou de céder ou
de tenir ferme, il me semble qu’il nous restera tousjours un peu de subjet
de nous plaindre du procédé de Monsieur Contarini, tant pour l’occasion
qu’il a choisie pour frapper son coup que pour la forme un peu violente
dont il a accompagné sa nouvelle prétention. Car il a d’abord rompu le
commerce avec nous sans doubte dans l’oppinion qu’il a conceue que sa
fermeté nous feroit céder et obligeroit le Conseil du Roy de recevoir le
party. Cela est assez estrange, Monsieur, que les Ambassadeurs de Venize
n’ayant peu obliger jusqu’icy les ministres impériaux et espagnolz de suivre
nostre exemple en leur donnant le tiltre d’Excelence et la main dans leurs
logis et ayant aujourd’huy obtenu l’un et l’aultre et quelque chose de plus
que ce que nous faisons (je ne sçay sy c’est par surprise ou par quelque
autre voye plus légitime), veult nous violenter par cet exemple nouveau à
faire le mesme que les aultres ont faict et par ce moyen augmenter les grâces
que cette Républicque a aultres fois receues de la France seule et qu’elle luy
a continuées longtemps sans que les aultres Couronnes l’ayent imitée. Vous
voyez par là, Monsieur, combien il est dangereux en matière d’honneur
d’accorder quelque chose de nouveau et que la pluspart des hommes qui
sont ordinairement injustes dans leurs intérestz ne sont point satisfaictz sy
on ne leur donne tout. Sy on revoyoit les registres non pas des plus anciens
conciles, mais seulement de ceux des dernièrs siècles, on y treuveroit en
quelques uns les Ambassadeurs de Venize après ceux de Savoye et traictéz
en tout d’une façon bien différente de ceux de France. A présent ilz ne se
contentent pas d’estre traictéz esgallement et de ne rendre que ce qu’on leur
donne, mais parce que les ministres des premières Couronnes se font entre
eux quelque civilité plus grande, ceux de Venize la veulent aussy recevoir.
Nous attendrons ce qu’il plaira à la Reyne nous commander sur ce subjet,
et lorsque nous en avons conféré ensemble, Monsieur d’Avaux et moy, bien
que nous ayons esté entièrement conformes en oppinions, il a désiré ayant
desjà escript de son chef avant mon arivée, que j’en escrivisse aussy
aujourd’huy en mon particulier.
Dans les appréhentions où nous sommes pour le passage de Monsieur de
La Thuillerie et que nous craignons que noz seulz passeportz ne puissent
pas servir pour son entière seureté, nous nous sommes résoluz de faire
pressentir des ministres impériaux qui sont icy s’ilz luy vouldroient donner
le leur, peult estre se laisseront ilz persuader de le faire, mais il y a quelque
subjet d’en doubter. Sy cela luy manque, ou il fauldra recourir à de puissans
convoys ou qu’il se rende par mer en Dannemarck, après toutes fois que
nous aurons eu des ministres suédois son approbation pour son voyage,
sans quoy il ne seroit pas utile de l’entreprendre, encor moins de commencer
par la visite de leur ennemy.
Je suis obligé de vous dire, Monsieur, dans le peu de cognoissance que j’ay
eue de l’humeur et de l’inclination des Ambassadeurs qui sont icy, que pour
peu que les effectz respondent aux parolles et aux apparences, nous avons
tout subjet de bien espérer. Ilz sont fort courtois et tesmoignent d’estre
aussy fort bien intentionnéz pour la paix. Elle a presque tousjours esté dans
nostre bouche des uns et des aultres pendant les complimens que nous nous
sommes faictz. Dieu veuille qu’elle soit establie par un bon traicté avant
que nous nous séparions.
La courtoisie des Espagnolz s’est estendue jusques à saluer civilement les
Catalans
que nous avions de craindre quelques rencontres pour eux et pour le Portugal
semblent estre tout à faict évanouyz, et certes les ministres qui sont icy
vivent en tout comme gens qui y sont venuz pour réconcilier et réunir les
espritz. |:Savedra est le seul de tous qui paroist versé dans le maniement
des affaires. Brun n’a pas jusques icy esté:| beaucoup |:employé en négotia-
tions et ny l’un ny l’autre:| n’avoit point eu jusqu’à présent |:la qualité
d’Ambassadeur. Le Comte de Nassau est bon cavallier et faict des compli-
mens de reste. Je doubte qu’il puisse passer pour homme intelligent. Quant
à son collègue le Docteur Volmar:|, je ne sçay pas encore |:bien sa portée,
mais il ne paroist pas digne de porter seul les intérestz de l’Empire:|, et
après avoir bi en considéré les |:qualitéz de toutes leurs personnes en parti-
culier, il y auroit subject de craindre qu’ilz n’eussent pas le dernier secret de
leurs maistres et que leurs instructions ne les obligent, quelque pouvoir
qu’ilz facent voir, d’attendre le secours de quelques compagnons plus fortz
et de plus haulte considération qu’eux quand il faudra conclure:|. Néant-
moins |:ilz disent le contraire et nous font asseurer qu’ilz peuvent décider
et résoudre sans mesme consulter leurs maistres:|. Nous vous en escrirons
conjoinctement avec plus de certitude par le premier ordinaire après avoir
examiné leurs pouvoirs, ce qui doibt estre faict dans deux jours.
PS: N’ayant pas eu le temps de faire coppier cette lettre je vous suplie
d’avoir agréable de l’envoyer à Son Eminence après qu’il vous aura pleu
de la lire.