Acta Pacis Westphalicae II B 2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 2: 1645 / Franz Bosbach unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und unter Mithilfe von Rita Bohlen
Beilage
AE , CP All. 45 fol. 32–35: Longueville, d’Avaux und Servien an Brasset, Münster 1645
Oktober 13, Kopie:
Nous croyons que vous n’aurez pas esté moins scandalisé que nous de cette addition qui a
esté faictes aux responces de |:Messieurs les Estatz:| sur les douze poinctz qui leur avoient
esté présentez par leurs députez
l’estonnement où elle nous a mis, a esté de l’avoir treuvée hors ligne et après la signature
de tous les commissaires, ce qui nous a faict croire qu’elle a esté adjoustée sans le
consentement de |:monsieur le prince d’Orange:| et peult-estre mesme contre son advis
aussy bien que contre celuy des plus sages du pays, veu qu’elle n’est pas de son stille ny
conforme à tout ce qui a accoustumé de partir de sa prudence. Nous n’en prenons point
de motion non plus que vous, mais nous ne sçavons pas sur quoy se fondent les Messieurs
de s’accoustumer sy fort à nous faire des menaces. Vous pourrez bien asseurer en tous les
lieux où l’occasion requerra que vous en parliez, que cette méthode ne leur réussira
jamais, et que nous ne sommes pas d’humeur estans chargez des affaires d’un puissant
royaume de nous laisser mener de la sorte, sur les moindres difficultez qui se présentent
ou dans la négotiation pour sçavoir sy on doibt faire |:la paix ou la trefve:| ou dans la
forme des complimens, ou dans les clauses des pouvoirs non seulement des leurs mais des
nostres. Ilz nous menacent d’abord sy on ne faict tout ce qu’ilz veullent |:de traiter seulz
sans la France:|. Nous sçavons bien comme nous leur avons dict aultresfois bien
clairement parlant à eux que |:leur alliance est utile à la France, mais:| ilz doivent aussy
recognoistre que celle de la France leur est nécessaire, advantageuse et honorable, et que
nous serions indignes de mesnager les intérestz d’un grand Estat sy les inconvéniens
qu’on nous veult faire sy souvent appréhender nous portoient légèrement à faire des
choses injustes et que nous ne debvrions pas faire grand fondement sur les traitez que la
France a faictz avec eux sy le moindre refus des nouveautez qu’ilz demandent les pouvoit
disposer de les rompre. Nous sçavons bien que s’ilz estoient capables d’exécuter cette
résolution dont ilz parlent sy souvent, ilz seroient les premiers à s’en repentir, aussy est-ce
plustost le mal qu’ilz en recevroient que le nostre propre qui nous oblige de la condemner
et qui nous faict croire qu’on doibt de part et d’aultre rejetter ces pensées peu propres à
conserver l’union qui doibt estre et paroistre entre nous dans le cours de cette
négotiation. Avant que |:l’Estat des provinces unies eust esté fondé la France:| a subsisté
par ses propres forces et s’est deffendue contre de puissans ennemis qui ne l’ont point
ruynée. |:Mais les Provinces-Unies:| n’ont point encor esprouvé le désordre où tomberoit
leur Estat s’il estoit privé de l’assistance et de l’amitié d’un puissant royaume qui a sy
libérallement contribué jusqu’icy ses hommes et son argent pour l’establissement de sa
liberté et l’augmentation de sa grandeur. Dieu veuille qu’ilz ne facent jamais une sy
fascheuse expérience dont il nous ariveroit bien quelque préjudice, mais non pas esgal à la
ruyne qu’elle causeroit parmy eux.
Plus nous considérons cette addition, plus nous la treuvons déraisonnable. Premièrement
ilz veullent adjouster dans leur pouvoir une qualité nouvelle qu’ilz n’ont point accoustu-
mé de prendre et veullent que nous retranchions du nostre celle dont nous sommes en
pocession depuis deux ans que nous avons commencé de prendre en traictant avec eux,
qu’on a accoustumé en France de donner à tous ceux qu’on envoye dans les pays
estrangers pour traicter des affaires d’importance, et que par conséquent nous ne
pourrions à présent quitter sans une espèce de honte et sans nous desgrader à la veue de la
plus célèbre assemblée qui ayt jamais esté convocquée.
En second lieu ilz veullent prendre cette qualité quoyque rien ne les y oblige puisque
nous apprenons que |:elle n’est point insérée dans le pouvoir des commissaires Espagnolz
qui auront charge de traitter avec eux:| au lieu que la pluspart de ceux avec qui nous
avons à traicter icy, soit que l’on considère les médiateurs, soit que l’on prenne exemple
de noz autres alliez, soit que l’on se règle par cellui de noz parties mesmes ayant la qualité
d’ambassadeurs nous sommes obligez de l’avoir aussy bien qu’eux.
En troisième lieu |:si la prétention de Messieurs les Estatz avoit lieu:| il ne seroit plus
permis à noz roys d’envoyer des ambassadeurs en aulcun lieu pour faire des traittez avec
l’Espagne parce que la France estant joincte inséparablement avec eux et ne pouvant rien
traicter sans eux, ils prétendroient tousjours de luy imposer la mesme loy qu’ilz luy
veullent donner aujourd’huy.
En quatrième lieu nous ne pouvons comprendre avec quelle justice |:Messieurs les
Estatz:| peuvent prétendre de tirer raison contre nous d’une offence qui leur sera faicte
par d’aultres sy les Espagnolz contre toute raison refusent de leur passer la qualité
d’ambassadeurs et mettent en doubte leur souveraineté par ce refus. Ce n’est pas nous qui
en sommes cause puisque nous les recognoissons et les traictons comme souverains, ce
seroit une injustice condemnée de tout le monde d’attacquer ses amis pour une injure
qu’on a receue de ses ennemis.
En cinquième lieu il fault considérer que |:les délibérations de Messieurs les Estatz:|
n’estant point secrettes et estant sceues à Bruxelles trois jours après, comme nous en
avons desjà faict l’expérience en plusieurs occasions |:la résolution qu’ils ont prise sera
seule capable de former un obstacle à leur prétention:|. Car il ne fault pas doubter que
|:les Espagnolz qui en auront eu l’advis:| et qui peult-estre |:sans cela n’eussent pas faict
difficulté de passer aux députés de Messieurs les Estats la qualité d’ambassadeurs en:|
feront certainement |:refus lorsqu’ils s’appercevront que ce refus au lieu de causer de la
division entre l’Espagne et les Provinces-Unyes en jettera entre elles et la France, si bien
que Messieurs les Estatz:| se disposent par ce moyen non seulement |:à nous faire une
querelle mais de la mettre à la discrétion de nos ennemis communs:|.
Pour conclusion nous ne pouvons rien treuver qui rende cette résolution excusable, mais
nous vous prions de croire et d’asseurer en tous lieux que nous la combattons plustost par
l’affection que nous avons pour noz alliez que par aucune crainte de ce qui en pourra
arriver laquelle ne nous fera jamais rien faire contre la raison et encores moins contre la
dignité de nostre maistre.
Nous ne voulons pas entreprendre de donner conseil à |:Messieurs les Estats:| mais il
nous semble qu’ilz ne devroient pour rien du monde |:s’exposer au refus des Espagnolz
qui:| en leur contestant et leur faisant quitter la principalle marque de |:leur souveraineté
leur feront un préjudice irréparable quelque secours que messieurs les Estats puissent
avoir contre nous:|. Parce que suppose que nous puissions aujourd’huy nous despouiller
de la qualité d’ambassadeurs à l’instance de |:Messieurs les Estats:| ce qui ne se fera
jamais, le monde ne lairroit pas de recognoistre puisque ce n’est point à nous que cette
qualité est disputée que nous l’aurions quittée pour nous accommoder à |:la condition
defectueuse de nos alliez ausquels les Espagnols auroient soustenu à la veue d’une
assemblée si célèbre:| qu’ilz n’avoient pas |:droict de la prétendre et les auroient obligés à
la rayer de leur pouvoir:|.
En vérité nous ne croyons pas qu’il pust jamais rien ariver de plus |:injurieux et plus
préjudiciable à l’Estat des Provinces-Unyes qui:| ont sy généreusement combattu jus-
qu’icy pour l’establissement de leur indépendance et de leur souveraineté. Tout ce qui la
touche tant soit peu est sy chatouilleux et doibt estre sy cher qu’il n’en fault jamais parler
doubteusement ny rien proposer en public sur cette matière avec dessein de se relascher.
Nous estimons qu’il y auroit beaucoup plus de prudence à n’insérer point |:la qualité
d’ambassadeur dans le pouvoir qui sera donné aux députez de Messieurs les Estatz pour
traicter avec les Espagnolz, que de la prendre avec intention secrette de s’en départir. Il
seroit sans doubte plus utile et plus seur de prendre seulement cette qualité dans un
pouvoir séparé qui sera veu de toute l’assemblée hors des Espagnolz:| et dans les lettres
de créance qui l’accompagneront que d’en faire mention dans celuy |:qui doit estre
communiqué aux Espagnolz puisqu’aussi bien celuy qu’ils ont du roy catholique pour
traicter avec Messieurs les Estats ne la contient pas:| et qu’il ne fault jamais rendre nos
ennemis juges de ce qui touche nostre honneur |:car si les Espagnolz avoient gaigné ce
poinct en:| cette assemblée de faire |:quitter aux députez de Messieurs les Estatz la qualité
d’ambassadeur après l’avoir prise:| la pluspart des |:autres princes et Estatz qui les ont
jusqu’icy recognus pour souverains:| et qui ont interprété en leur faveur la |:clause de la
dernière trefve à laquelle les Espagnolz donnent un autre sens:| auroient subjet de
|:révoquer en doubte ce qu’ils auroient tenu pour constant et pour indubitable jusques
icy:|.
Nous vous escrivons cecy comme à un ministre du Roy que nous sçavons qui en sçaura
user avec prudence et discrétion, et non point pour croire qu’il en faille parler de la sorte
sy ce n’est lorsque vous le jugerez nécessaire, ce que vous pourrez mieux faire que nous
estant sur les lieux, et aymant le service et la dignité du Roy au poinct que vous faictes.
Nous en eussions aultant escript à |:monsieur d’Estrades:| sy nous eussions eu un chiffre
avec luy. Nous vous prions de luy envoyer une copie de tout ce discours affin qu’il soit
informé de nos sentimens aussy bien que vous et qu’il s’en puisse prévalloir quand il le
jugera à propos.