Acta Pacis Westphalicae II B 5,2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 5, 2. Teil: 1647 / Guido Braun unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und Achim Tröster, unter Mithilfe von Antje Oschmann am Register
242. Memorandum Ludwigs XIV. für Longueville und d’Avaux Paris 1647 April 26
Paris 1647 April 26
Duplikat für Servien: AE , CP All. 99 fol. 401–422 = Druckvorlage. Konzept: AE , CP All.
83 fol. 63–70, 71–73’. Kopien: AE , CP All. 88 fol. 118–133’; Ass.Nat. 273 fol. 248–259.
Freude über die Fortschritte bei den Verhandlungen mit Spanien; Begrüßung des spanischen
Vorschlags zum Zeitpunkt der Einstellung der Feindseligkeiten. Zu Portugal: Hoffnung auf
erfolgreiche Unterstützung der beiden diesbezüglichen französischen Forderungen durch
Trauttmansdorff; als sicher zu erachtendes spanisches Bestreben, den Krieg mit Hilfe zwei-
deutiger Vertragsbestimmungen wiederaufzunehmen; daher große Bedeutung genauer For-
mulierung der Artikel; einzelne Anweisungen zur Abfassung des Artikels zum französischen
Assistenzrecht für Portugal; Notwendigkeit, dieses Recht für Frankreich zu sichern und die
Unterstützung Herzog Karls IV. von Lothringen durch die Habsburger auszuschließen; au-
ßervertragliche Erklärung der Mediatoren, Niederländer und möglichst auch Kaiserlichen
über die spanischen Zugeständnisse betreffend Portugal und deren Auslegung wünschens-
wert; zur Waffenstillstandsforderung: Abweisung des spanischen Türkenkriegsangebots;
Gründe dafür und Widerlegung der Argumente Contarinis; also Bestehen auf einem einjäh-
rigen Angriffskriegsverbot. Gegenüber den Mediatoren und Spaniern Hervorheben der für
Frankreich günstigen Wendung der Lage im Reich, in den Niederlanden, in Katalonien, in
Italien und im eigenen Lande angezeigt. Zu den Vingt premiers articles du projet du traitté
entre la France et l’Espagne comme ilz ont esté donnez à Son Altesse par Messieurs les
Médiateurs vom 10. April 1647: notwendiges Bestehen auf dem französischen Textvorschlag
in den wichtigen Punkten, Nachgeben bei den weniger wichtigen; Kommentierung und nä-
here Anweisungen zu einzelnen Artikeln. Anwesenheit Weyms’ bei den Beratungen über die
Pfalzfrage? Unbedingtes Bestehen auf Mont-Cassel. Turenne erteilte Anweisung, Hessen-
Kassel zu unterstützen, soweit mit seinen wichtigeren Aufgaben zu vereinbaren. Verwunde-
rung über die unvorsichtigen Ausführungen Oxenstiernas zu den Reichsangelegenheiten; da-
von abweichende Stellungnahme Königin Christinas; gleichwohl auch in Stockholm erkenn-
bare Langsamkeit der Schweden auf dem Weg zum Frieden; voraussichtlich größerer Eifer,
wenn künftiger französischer Verzicht auf Unterhalt einer großen Armee im Reich und auf
weitere Auszahlung der Subsidien deutlich; Bauen auf die Unterstützung der Kaiserlichen,
Kurbayerns und der übrigen katholischen Stände im Falle eines Griffs der Schweden nach
dem Reich; Zustimmung zur Argumentation d’Avaux’ gegenüber Oxenstierna; Anweisun-
gen zum künftigen Verhalten ihm gegenüber; unzutreffende Lagebeurteilung durch jenen:
bei offenem französischen Widerstand Bildung einer Koalition im Reich und in Europa ge-
gen Schweden zu erwarten. Zustimmung zu d’Avaux’ Erklärung zu den Subsidien; Vereite-
lung des vermuteten Plans der Schweden, den Frieden bis zu ihrem Auszahlungstermin hin-
auszuzögern. Billigung von d’Avaux’ Einsatz für die Interessen der Landgräfin von Hessen-
Kassel, aber notwendige Begrenzung ihrer Forderungen auf das Durchsetzbare. Aufschub
der von Kurbayern angeregten Diskussion über ein alternierendes Kaisertum auf die Zeit
nach dem Friedensschluß. Erforderliche Erkundung der schwedischen Absichten gegenüber
Polen.
Sa Majesté a esté bien aise d’apprendre que la négociation de nostre ac-
commodement avec Espagne continue à s’avancer en sorte, par le soing
des Médiateurs, qu’il y ayt sujet d’en espérer bientost une heureuse fin.
Elle a sceu avec grand plaisir qu’il ayt esté accordé qu’on traictera sur
nostre project
ayt comme arresté les vingt premiers articles , puisque monsieur de Lon-
gueville mande que lesdits Médiateurs n’avoient pas grande difficulté de
refformer ce qu’il leur avoit tesmoigné qu’il trouvoit à désirer dans lesdits
articles.
On s’est resjouy icy que la proposition que les hostilitez ne cessent que du
jour de la délivrance des ratiffications |:vienne de noz parties mesme,
quoyqu’il se voye par là qu’ilz ont encor espérance de faire d’abord quel-
que chose de bon, ou contre noz postes de Toscane, ou en Flandre, les Hol-
landois:| ne mettant point en campagne, mais on se prépare à les bien rece-
voir. En tout cas, il ne faut pas se mettre beaucoup en peine à qui la fortune
rira pour si peu de temps, et Messieurs les Plénipotentiaires verront ce qui
est porté de l’arrivée de Monsieur le Prince en Catalongne et des pensées
qu’il a, par l’autre mémoire de Sa Majesté qui est cy-joinct et qu’on avoit
songé d’envoyer par courrier exprès au commencement de cette sepmaine,
mais on a creu après qu’il suffiroit que ce fust par l’ordinaire.
On a considéré icy ce que l’on a ajousté après le temps des sept semaines,
si ce n’est que les ratiffications puissent venir et estre délivrées plus tost
Ebd. heißt es wörtlich: […] le jour de la ratification du présent traitté […] devera estre sept
semaines après la conclusion et signature d’iceluy, et en cas que la ratification vienne plus
tost, cesseront depuis l’eschange qui en sera fait de part et d’autre lesdites hostilitez, et si
après ledit ledit [!] jour quelque nouveauté et voye de fait estoit entreprise par les armes ou
en quelque façon que ce soit sous le nom et authorité de l’un desditz seigneurs rois au
préjudice de l’autre, le dommage sera réparé sans délay et les choses remises au mesme
estat où elles se trouveront au jour de ladite ratification; zit. nach der Kopie AE , CP All.
88 fol. 64–70, hier fol. 64–64’.
|:et que cette clause peut estre artificieusement mise par les ennemis parce
que comme ilz ont des blancs signez du roy d’Espagne qu’ilz peuvent
remplir de cette ratiffication s’ilz voyent que leurs affaires prospèrent
dans la guerre, ilz attendront la fin des sept sepmaines à dire qu’ilz ont
receu ladite ratiffication et sy elles vont mal, ilz la présenteront plus tost.
Mais on ne s’en met pas icy en peine parce que nous ne croyons point
estre tenus de rigueur à deslivrer nostre ratiffication que dans le jour que
les sept sepmaines expireront et pourveu que cela soit, nous:| aurons
punctuellement accomply ce à quoy nous estions obligez.
Sa Majesté se promet que l’arrivée du comte de Trantmansdorff à Mun-
ster aura beaucoup servy à nous faire donner les deux satiffactions que
nous prétendons |:sur le poinct de Portugal, dont l’une estoit desjà accor-
dée en substance, mais il y avoit quelque chose à dire en l’expression:| que
noz parties voudroient en faire dans le traicté.
Messieurs les Plénipotentiaires auront veu ce qu’on leur en aura escrit
depuis peu assez amplement , néantmoins comme la dépesche de mon-
sieur le duc de Longueville |:n’est que sur cette affaire de Portugal:| et
qu’elle est très importante, on juge à propos de la discuter encores de
nouveau pour mieux résoudre ce qui s’y peut, et ce qui s’y doit faire.
Premièrement, il faut establir pour fondement certain qu’en mesme temps
que les Espagnolz sont forcez par la nécessité de leurs affaires et pour
éviter de plus grandz maux de conclure la paix à quel prix que ce soit,
dans le mesme instant ilz songent à laisser quelque queue qui leur donne
lieu un jour, selon les changemens qui arrivent dans le monde et les con-
jonctures qu’ilz croyront favorables, de rompre contre nous sur l’inter-
prettation de quelques parolles ambiguës qu’ilz ayent sujet de destourner
de leur vray sens affin de pouvoir donner à entendre que c’est la France
qui a esté la première à violer la paix, et ainsy empescher que les Holan-
dois qui desjà ont assez d’aversion à rentrer en guerre ne se déclarent pour
nous comme ilz ne s’y croiroient pas tenus si c’estoit la France qui eust
enfraint la première les conditions du traicté.
Il importe donc au dernier poinct, comme il a desjà souvent esté mandé ,
que ce dont on conviendra soit couché en termes si clairs qu’il ne puisse
jamais naistre la moindre contestation sur leur explication, affin d’asseu-
rer au moins que s’ilz viennent à manquer, tout le monde cognoisse leur
perfidie, et que les articles du traicté ne leur en donnant aucun prétexte, il
parroisse qu’ilz n’en ont point d’autre que l’envie de troubler de nouveau
la chrestienté.
Ainsy ç’a esté avec beaucoup de prudence que monsieur le duc de Lon-
gueville vouloit faire ajouster le mot d’«amis» à celuy d’«alliez»
Bezug: Beilage 1 zu nr. 225, hier Art. 2, in dem es heißt: nonobstant le contenu en ces deux
articles premier et second ou autres suivans pourront lesditz seigneurs rois donner réci-
proquement assistance à leurs alliez et confédérez en cas de leur deffense seulement sans
que pour cella la paix entre les deux couronnes s’entende rompue. Longueville merkte
dazu am Rande an, diese Klausel sei ajoustée 〈pour〉 réserver au Roy la 〈facu〉lté d’assis-
ter le 〈Port〉ugal. J’ay dit à Messieurs 〈les〉 Médiateurs qu’il faloit ajouster le mot
d’«amis» à ceux d’«alliez et confédérez» pour obvier ce qui pourroit estre objecté que
nous n’avons pas alliance avec ledit royaume.
Au lieu de ces motz «en cas de leur défense seulement», je prétens faire mettre «en cas
|:qu’ils soient attaquez et non autrement», ce qui peut encore servir à l’esgard du duc Char-
les, et donne plus de liberté pour les affaires du Portugal:|; zit. nach der Kopie AE , CP All.
88 fol. 64–70, hier fol. 64–64’.
obvier à ce qu’on pourroit un jour nous objecter que nous n’avions point
|:d’alliance avec le roy de Portugal qui portast obligation de l’assister
quand la paix sera faicte:|.
Il y a un autre terme dans l’article qui feroit icy beaucoup de peine si ledit
sieur duc ne mandoit qu’il le fera changer; ce |:sont ces motz «en cas de
leur deffense» où il veult faire mettre «en cas qu’ilz soient attaquez et non
autrement»:|.
Mais |:il semble que cela ne suffise pas encor pour:| se mettre à couvert de
toutes les interprettations captieuses de noz parties.
Il faut |:dire «qui seront ou qui estants aujourd’huy attacquez continue-
ront à l’estre aprez la paix:| entre les couronnes», affin de leur oster le
prétexte de dire qu’on n’a pas entendu parler |:du Portugal quand on a
dit «qui seront attaquez» puisqu’il l’estoit desjà:|.
Il faut aussy non seulement bien prendre garde à ce mot de «deffense» qui
seroit très dangereux, mais expliquer s’il est possible que quand des
|:trouppes françoises qui ne seront, en Portugal, qu’auxiliaires entreroient
dans l’Andalousie ou dans la Grenade pour faire diversion ou pour em-
pescher les ennemis d’entrer dans le Portugal, nous n’aurions pas excédé
la faculté que nous aurons d’assister le roy de Portugal, et le traitté ne
s’entendra point rompu ny la France avoir commis aucun acte d’hostilité
contre le roy d’Espagne:|.
La raison en est évidente, comme il est dit fort au long dans le dernier
mémoire , et parce aussy que |:le roy de Portugal n’a pas dessein d’attac-
quer les Espagnolz:|. C’est de leur choix qu’ilz continuent la guerre contre
luy, et il se tiendroit bien heureux d’estre laissé en repos, mais le monde
void qu’il ne peut l’obtenir. Il ne peut tomber dans l’esprit de qui que ce
soit |:qu’il attacque les Estatz d’Espagne pour les conquérir, toutes ses
attacques ne seront qu’en deffense, ny par conséquent les assistances que
nous pourrons luy donner, l’accessoire suivant la nature:| du principal
En tout cas, il importe que cela soit bien esclaircy, affin qu’il ne soit pas
réduict à la nécessité de ne pouvoir que |:parer les coups sans en porter:|.
En|:fin, comme sy les deux affaires de Portugal et de Lorraine n’estoient
point:|, on n’auroit point peut-estre songé à mettre ces clauses dans le
traicté, ou l’on n’y auroit pas pris garde de si près, aussy rien ne pouvant
estre si important à cette courronne que d’un costé, |:retenir la Lorraine
sans que le duc Charles ny sa maison puisse estre assistez directement ny
indirectement de la maison d’Austriche pour nous faire la guerre, et de
l’autre, soustenir les affaires du roy de Portugal, ayant plaine liberté de
le secourir sans contrevenir au traitté. Il fault ou:| que les ministres
d’Espagne donnent les mains à le laisser expliquer dans le traicté en des
termes bien clairs et avec autant d’articles qu’il sera nécessaire, ou s’ilz en
font difficulté quoyqu’ilz demeurent d’accord de la chose comme ilz l’ont
souvent dit aux Médiateurs, aux ministres de Holande, et que Trantmans-
dorff qui sçayt leur intention l’a advoué, en ce cas il faut bien se garder de
souffrir qu’on se serve en aucune façon |:du mot de «deffense» pour les
raisons touchées cy-dessus et on pourra dire que chacun assistera ses amis
qui sont ou seront attacquez:| pourveu qu’ilz ne puissent d’un autre costé
|:expliquer cette clause que la France attacque monsieur de Lorraine en
possédant des Estatz qu’il croid luy appartenir:|. Néantmoins on se pro-
met que par l’article séparé |:qui regardera les affaires dudit duc:|, il sera
pourveu abondamment à tout ce que nous désirons sur son sujet, et par-
ticulièrement pour bien asseurer que |:la maison d’Austriche ne puisse
l’assister directement ny indirectement:|.
Mais outre toutes ces précautions, Sa Majesté juge encores absoluement
nécessaire, comme elle l’a mandé cy-devant , |:que les Médiateurs et les
ministres de Hollande, et s’il est possible les ministres impériaux, donnent
un escrit à part par lequel il soit déclaré nettement tout ce à quoy les Espa-
gnolz ont consenty touchant le Portugal et de quelle façon il se doibt enten-
dre affin qu’on ne puisse jamais tumber en aucun embaras sur ce sujet:|.
On a desjà marqué dans la précédente dépesche qu’on ne conceoit pas
que lesdits ministres y puissent faire aucune difficulté, puisque nostre but
n’est autre, en cette prétention, que de bien affermir la paix, laquelle leurs
maistres désirent avec passion, et ont autant et plus d’intérest que nous en
sa durée, outre qu’on ne demande rien que ce à quoy les Espagnolz don-
nent les mains comme ilz sçavent, mais seulement on veut prévenir qu’en
des temps qu’ilz croiroient plus propres pour remuer, ilz ne puissent par-
ler en d’autres termes qu’ilz ne font aujourd’huy |:que la nécessité les con-
trainct de chercher à sortir d’affaires aux conditions qu’ilz peuvent:|.
Voilà pour le premier poinct; |:quand à la cession d’hostilitez qu’on pré-
tend au moins pour quelque tems dans le Portugal:|, il sera malaisé que
l’apparat de toutes les raisons spécieuses que le sieur Contarini a estudiées
pour nous en faire despartir, nous esblouisse au poinct qu’on ne reco-
gnoisse pas qu’il ne cherche en cela que l’avantage de la République et se
soucie fort peu |:de la ruyne du Portugal et du préjudice que nous en
receverions:|.
Messieurs les Plénipotentiaires auront veu dans le dernier mémoire l’estat
qu’on fait icy de cette grande ouverture que font les Espagnolz pour le
bien de la chrestienté de vouloir contribuer une fois autant de forces pour
la guerre du Turc que la France y en envoyera de sa part.
Premièrement, |:cette proposition couve un venin secret en ce qu’elle sup-
pose comme infaillible que la France rompra contre le Turc ou qu’elle
veult nous y engager. La France assistera la république de Venize sans
aucun doubte plus que ne fera le roy d’Espagne:|. Mais ce ne sera pas de
la manière que noz parties voudroient, ni en moyens dont ilz puissent
proffiter à noz despens.
En second lieu, Contarini suppose que l’Espagne envoyant ses forces ma-
ritimes contre le Turc, ne sera de longtempz en estat de faire un dessein
considérable sur le royaume de Portugal. Le raisonnement seroit indubi-
table s’il devoit l’attaquer par mer, mais il s’en faut tant qu’il en ayt be-
soing que le plus grand avantage qu’il peust espérer dans cette entreprise
seroit qu’il n’y eust un seul vaisseau à la mer de part ni d’autre, parce que
|:le Portugal estant détaché de tous les autres Estatz qui peuvent luy don-
ner quelque assistance, il auroit toute facilité d’opprimer le roy de Portu-
gal l’attacquant par terre avec les forces des autres provinces d’Espagne:|,
à qui celles de Portugal ne sont |:pas comparables, et pour cela il n’auroit
qu’à faire passer de ce costé-là les trouppes qu’il employe aujourd’huy
vers la Catalogne:|.
On juge superflu de répliquer ce qui est dans le dernier mémoire du pré-
judice que nous recevrions si nous nous privions de noz forces maritimes
qui seulles nous peuvent donner lieu |:de soustenir le roy de Portugal:|.
Car de dire comme a fait l’ambassadeur de Venize icy à quelqu’un que la
France pourroit réserver |:quatre ou cinq vaisseaux qui serviroient conti-
nuellement au traject de ses trouppes en Portugal, à moins d’un sauf-con-
duit des ennemis pour ce transport que certainement ilz ne bailleront pas,
nous ne voyons pas bien la seureté de noz quatre ou cinq vaisseaux et de
noz trouppes puisqu’il leur seroit facile d’en tenir le double dans leurs
portz qui sont entre France et Portugal pour nous combattre au passage:|.
Il se void que le sieur Contarini fait bon marché de ce qui nous regarde
quant il nous donne pour recours, en cas que les Espagnolz manquent à ce
qu’ilz promettront, que la France ne sera pas moins puissante qu’ell’est
présentement pour leur faire la guerre, et que cependant nous aurons jus-
tiffié noz armes devant Dieu et devant les hommes, et fait voir nos bon-
nes intentions pour le bien de la chrestienté, au lieu que noz parties se
seroient attirées la hayne de toutes les nations. On n’a pas veu jusques à
présent que cette hayne des nations ayt sauvé une place ny aidé à trouver
de l’argent pour payer une armée, noz bonnes intentions pour la paix sont
desjà toutes justiffiées par la seulle offre que nous faisons de mettre les
armes bas au plus fort de nos prospéritez et de nos espérances, et quant
Contarini nous renvoye aux moyens qui nous resteront tousjours de
pousser noz conquestes en cas que les ennemis manquent, il ne met point
en ligne de compte que nous aurions désarmé, quel temps et quelles des-
penses il faudroit avant que nous estre remis au mesme estat où nous nous
trouvons aujourd’huy, et plus que tout, sçavoir si Messieurs les Estatz qui
auroient aussy désarmé seroient d’humeur |:pour les intérestz des Portu-
gais qu’ilz hayssent à mort de reprendre les armes et s’ilz ne seroient pas
bien ayses de s’en exempter pour peu de couleur de qui les Espagnolz
donnassent à ce qu’ilz auroient faict contre leur parole:|.
Ilz promettent |:tout aujourd’huy pour sortir d’affaires, mais:| pour ne
point faire de faute dont nous ayons à nous repentir, il faut se tenir
pour dit et pozer pour fondement immuable que nous avons à nous
meffier d’eux plus que jamais, parce que les pertes qu’ilz ont faites |:et
le deschect de leur réputation dans le traitté de paix, joinct à la hayne
naturelle qu’ilz ont pour nous:|, seront des aiguillons continuelz et bien
pressans pour les animer |:à la vangeance et à leur en faire méditer sans
cesse les moiens:|.
Quant Contarini dit que si dans l’intervalle de temps qu’il y aura entre la
signature du traicté et la dellivrance des ratiffications, on void que les
Espagnolz se préparent |:plus à attaquer les Portugais qu’à donner un se-
cours:| contre le Turc, nous pourrons aussy nous tenir prestz pour les
deffendre, c’est un amusement où nous aurions grand tort de nous laisser
surprendre, car il n’y a rien de commun entre |:se préparer contre le Turc
et attaquer le Portugal par terre:|, le roy d’Espagne n’ayant qu’à tirer de ce
costé-là les forces qu’il a vers la Catalongne, ce qu’il peut faire en peu de
jours.
Et à la vérité, on n’a pas compris ce que Contarini a voulu entendre quant
il a ajousté que si le roy d’Espagne, après la délivrance des ratiffications,
|:envahissoit le royaume de Portugal, nous pourrions nous jetter en
mesme tems sur les provinces voisines de Catalogne qui se treuveroient
despourveues de toutte deffense, et cela avec une approbation universelle,
poursuivant un ennemy qui auroit manqué à ses promesses:|.
Car on ne void pas quelles seroient ces promesses auxquelles les Espa-
gnolz auroient manqué, puisqu’il n’y auroit point eu |:de cessation d’hosti-
litez arrestée à l’esgard du Portugal et que l’offre de secourir la Républi-
que avec le double des forces dont la France pourra l’assister, et mesme
l’obligation de faire la guerre au Turc n’est pas une promesse de ne point
attaquer le Portugal:|, au contraire s’en estant voulu réserver la faculté à
quelque prix que ce soit, et nous y ayant donné les mains comme tout le
monde sçait, il se trouveroit que nous aurions esté les seulz infracteurs
|:du traitté, ayans attacqué les Estatz d’Aragón et de Valence sans en
pouvoir alléguer aucune cause légitime ny seulement:| avec apparence de
raison, et bien loing d’en avoir l’approbation générale, |:nostre action:| se-
roit d’autant plus odieuse que |:nous aurions rompu la paix quatre jours
après l’avoir signée:|.
Quant à ce que le sieur Cantarini dit du péril qu’il y a |:que les plus riches
et accommodez des Portugais, voyans qu’après le terme de six mois ou
d’un an expiré, ilz doivent estre la proye infaillible de ceux qui les atta-
queront et de leurs deffenseurs, ne songent à accommoder leurs affaires
avec Espagne et peut-estre abbandonner leur roy, d’où il veult induire que
pour l’intérest du roy mesme, il vault mieux qu’il n’y ayt aucune trêve:|,
cette considération pourroit estre assez bonne si on ne pouvoit rétorquer
l’argument avec plus de force en l’autre cas, car ce péril seroit à craindre
au double si |:ces riches et ces accommodez voyoient leur roy hors de tout
moyen de se deffendre comme il arriveroit sy toutes les forces d’Espagne
fondoient à l’improviste sur le Portugal avant que nous eussions eu le
tems de luy fournir de quoy parer le coup:|.
La response que monsieur le duc de Longueville a faite là-dessus audit
sieur Contarini a esté très judicieuse et digne de sa prudence et de son
adresse, surtout quant il luy a fait valoir que c’est la considération de la
République qui nous oblige à demander que les deux couronnes ne puis-
sent faire |:guerre offensive pendant un an, à compter du jour de la paix
publiée:|, et quand ledit Contarini a respondu qu’il s’y employeroit bien
volontiers, mais que c’estoit peine perdue parce que les Espagnolz n’y
consentiroient jamais, il ne s’apperceoit pas qu’il destruict par un seul
mot toutes les belles raisons qu’il nous avoit alléguées puisqu’il se void
clairement de là qu’ilz ne songent |:qu’au Portugal et à s’en assurer la
conqueste, et qu’ilz n’offrent des assistances contre le Turc qu’en tant
qu’elles ne leur sont pas nécessaires pour ce dessein:|, et qu’elles peuvent
mesmes contribuer à leur en faire remporter promptement un bon succez,
nous privant |:des moyens de secourir ledit royaume:|.
Sa Majesté désire donc que Messieurs les Plénipotentiaires insistent vive-
ment pour obtenir, suivant l’ouverture que monsieur le duc de Longue-
ville en a faite, |:que les deux roys soient obligez de ne faire aucune guerre
offensive d’un an:|, et tout bien considéré, ne pouvant croire que les
Espagnolz n’y acquiescent, particulièrement quant on leur représentera
|:que sy la guerre continue pour le seul intérest de ne vouloir pas différer
pour sy peu de tems à poursuivre par les armes leurs droictz sur le Por-
tugal:|, non seulement ilz ne |:l’auront pas d’un an qui est le terme qu’on
leur demande de délay:|, mais ilz courront fortune de n’y rentrer de deux,
ni de trois, ny peut-estre jamais.
Quelqu’un nous a objecté qu’on estoit demeuré d’accord |:avec les minis-
tres de Hollande qu’il ne seroit point parlé du tout du Portugal
fut à cette condition que les Espagnolz ont relasché tant de poinctz en
nostre faveur:| qu’ilz avoient tousjours |:jusques-là contestez:|.
Mais la solution n’en est pas difficile, ce n’est pas nous qui changeons, ce
sont les choses et nous avons trop souvent protesté que nous augmente-
rions noz demandes à proportion que les événemens meillioreroient
l’estat de noz affaires pour craindre qu’on puisse avec raison nous taxer
en cecy de manquement de parolle. C’est pourquoy il sera bien à propos
ou plustost très utile que Messieurs les Plénipotentiaires prennent cette
occasion de faire remarquer aux Médiateurs, et par leur entremise aux
ministres d’Espagne, combien la face des affaires est changée à nostre
avantage depuis peu de tempz.
Premièrement, pour celles d’Allemagne, quand la paix de l’Empire ne se
feroit point, laquelle pourtant on void Dieu mercy si bien acheminée, la
seulle suspension conclue par les couronnes alliées avec le duc de Baviè-
res , nous a fait gangner une armée entière contre les Espagnolz sans
qu’ilz puissent proffiter en eschange d’un seul soldat, et si avant cela ilz ne
pouvoient résister aux forces ordinaires qu’on employoit contr’eux, on ne
void pas bien quelle sorte de deffense ilz peuvent faire, se voyans tomber
sur les bras de surcroist une des meilleures et des plus aguerries armées
qui soit dans l’Europpe.
En Holande, les ennemis peuvent s’estre désormais désabusez des espé-
rances dont ilz s’estoient flattez de pouvoir porter les Provinces-Unies
non seullement à les séparer, mais à les mettre contre nous, ayant bien
recognu que le corps de l’Estat est incapable de la corruption de quelques
particuliers ni de pouvoir commettre jamais un manquement entier envers
cette couronne.
En Flandres, l’archiduc Léopold y est arrivé, mais sans un seul homme de
guerre, et tant s’en faut que ce soit un avantage aux ennemis que les plus
sages jugent que ce pourroit bien estre leur ruine parce que les dissensions
augmenteront par les jalousies qui seront premièrement entre luy et le duc
Charles, et entre les chefs espagnolz et Picolomini à qui ledit archiduc
donnera toute sa confiance.
En Catalongne, l’arrivée de Monsieur le Prince avec les forces que les
ennemis peuvent bien croire qu’on n’aura pas manqué de luy donner affin
qu’il peust entreprendre quelque chose digne de luy, met les affaires de
cette principauté en un estat où elles n’ont point esté jusques icy, ainsy
que le succez fera voir si Dieu permet que la guerre doive continuer.
En Italie, tous ces grands appareilz du vice-roy de Naples qui devoient
engloutir nos postes de Toscane dez le 15 e janvier n’ont abouty qu’à
mettre ensemble quelques trouppes de milice pour la deffense propre du
royaume et à |:amasser un milion dont on mande que le vice-roy s’est
appliqué la moytié et envoye l’autre en Espagne, ce qui achève de déses-
pérer les peuples:|.
Cependant Piombino et Porto Longone ne sont pas seulement en estat de
ne plus craindre l’attaque des ennemis qui se garderont bien de s’engager
à faire des sièges en ces quartiers-là dans une saison si avancée, mais nous
y avons assez de trouppes pour entreprendre nous-mesmes sur les autres
postes qu’ilz occuppent |:ou d’un autre costé, estant secondez de quelques
princes qui tesmoignent grande envie de ne demeurer pas les bras croi-
sez:|.
On peut ajouster à tout cela le calme du dedans du royaume qui ne par-
roist pas pouvoir estre troublé par aucun accident, l’union estant parfaite
dans la maison royale, aussy bien que l’obéissance dans les peuples, tes-
moing ce qui vient de se passer en Languedoc où après le chastiment de la
sédition de Montpellier qu’on a fait exemplairement et sans y rencontrer
le moindre obstacle, les estatz ont accordé à Sa Majesté les trois millions
de livres qu’elle leur a fait demander par ses commissaires .
Messieurs les Plénipotentiaires doivent avoir grand soing et esgard aux
clauses que les Espagnolz ont fait oster par les Médiateurs dans les vingt
premiers articles de nostre project , et croire qu’ilz ont sur chacune quel-
que raison par laquelle il leur est avantageux qu’elle n’y soit pas. C’est
pourquoy comme il ne seroit pas bienséant que nous prétendissions avec
la mesme fermeté que toutes les moindres petites choses passassent par
nostre seule volonté, aussy faut-il faire dinstinction [!] de celles qui sont
importantes affin d’y insister, comme monsieur le duc de Longueville tes-
moignoit estre résolu de faire.
On doit considérer qu’aux termes que les Médiateurs ont accommodé le
6 e article, les Espagnolz ne prétendront pas que l’or et l’argent y soit com-
pris, puisqu’il ne peut pas estre appellé proprement «marchandise» quoy-
qu’il soit le prix de toutes. Les Espagnolz ont exercé autresfois de grandes
cruautez sur les personnes mesme pour cette extraction d’or ou d’argent
hors de leurs Estatz, et il semble qu’il deveroit leur suffire de la peine de
la confiscation dudit or, sans vouloir laisser en doute comme ilz font
qu’ilz puissent l’estendre jusques à l’emprisonnement des personnes et
confiscation du vaisseau et des autres biens. Il n’en est point parlé dans
les articles des Holandois et on ne sçait pas comme ilz en ont uzé par le
passé avec eux. En cas qu’on trouvast que nous |:fussions les seulz qui
eussions esté sy maltraittez, on pourroit convaincre facilement de faulceté
cette loy sur l’extraction de l’or que la réplique qu’ilz avoient donnée à
nostre project:| représente pour estre si formidable de leurs Estats que le
roy s’y oblige par serment solemnel envers ses subjects.
L’article 7 e, aux termes qu’on l’a rajusté, semble tout à fait superflu, n’i
aiant aucun besoing de stipuler que les sujetz du Roy pourront rapporter
des denrées d’Espagne en eschange des bledz qu’ilz y auront portez, et
puisque les Espagnolz ne veulent point consentir qu’on tire aucun or ni
argent pour payement desdits bledz, on ne croid pas qu’ilz aient prétendu
qu’on les leur donnast, et que mesmes on les leur portast jusques chez
eux, et ainsy il faut bien nécessairement que nous retirions des denrées
en eschange, mais il est certain qu’ilz n’en ont aucune dont nous ayons
besoing.
Il est remis à Messieurs les Plénipotentiaires |:de consentir que dans le
dix-septiesme article où il est parlé du restablissement des réfugiez, le
mot de «charges» soit osté:|.
Mais sur le 18 e, il semble qu’il y a plusieurs clauses obmises qu’il est im-
portant de faire remettre comme elles estoient, ainsy que monsieur le duc
de Longueville a remarqué.
Nous avions eu avis icy que le cercle du député de Bourgogne [!] avoit
esvité de se trouver aux conférences quant on a délibéré sur l’affaire pala-
tine, ainsy que Messieurs les Plénipotentiaires auront veu depuis par une
dépesche du Roy , mais puisque monsieur le duc de Longueville qui est
sur les lieux mande le contraire, on y ajouste plus de foy.
Les ennemis n’ont pas |:un seul homme de guerre dans le Mont-Cassel;
Leurs Majestez désirent qu’on fasse tous efforts possibles d’emporter ce
poinct sur les pièces qu’on a adressées à:| Messieurs les Plénipotentiaires,
et s’il n’est pas possible de l’avoir par cette voye, ilz en donneront avis au
plus tost, affin qu’on fasse |:un acte de possession, et qu’on se saisisse
dudit poste avant la délivrance des ratiffications:|.
Et sur ce que monsieur le duc de Longueville escrit au sieur comte de
Brienne , il sçaura que Sa Majesté a mandé il y a quelque tempz |:à mon-
sieur le mareschal de Turenne de favoriser Madame la Landgrave en tout
ce qu’elle désirera de luy, pourveu qu’il le puisse faire sans préjudicier à
l’exécution des autres ordres plus importans qu’il a receus:|.
L’on a veu, dans la dépesche du sieur d’Avaux , |:la hardiesse, ou pour
mieux dire, l’imprudence avec laquelle monsieur Oxenstiern luy a parlé
sur l’estat des affaires de l’Empire:|. Messieurs les Plénipotentiaires peu-
vent croire que ce n’a pas esté sans beaucoup d’estonnement que nous
avons appris cette nouveauté, et si Leurs Majestez n’estoient asseurées
que de semblables discours viennent plustost |:du caprice et de la passion
de monsieur Oxenstiern que d’un commandement envoyé par la reyne de
Suède, elles en tesmoigneroient le ressentiment qu’un tel procéder mérite,
mais cela est bien esloigné de la modération avec laquelle ladite reyne a
parlé au sieur Chanut, à qui elle a déclaré que comme par certaines raisons
de bienscéance elle ne pouvoit se dispenser d’appuyer publiquement les
prétentions des protestans, elle ne treuvoit point aussy mauvaise l’opposi-
tion que la France y faisoit aux choses qui blessoient la religion catholi-
que:| ni qu’elle l’emportast quant elle auroit la justice de son costé.
En effect, une telle conduicte n’est point à condemner entre des princes
qui deffendent des intérestz contraires quant cela se fait sans aigreur, sans
que cela blesse ceux avec lesquelz on est allié, sans que cela préjudicie au
bien commun de la chrestienté et qu’il ruyne ou recule les espérances de
la paix qui luy est si nécessaire. |:La déclaration que la susdite reyne a faite
au sieur Chanut qu’elle n’estoit point portée à insister ny que les éveschez
d’Osnabruk et de Minden demeurassent aux protestantz, ny que la
maison palatine obtint tout ce qu’elle prétendoit:|, est une marque qu’elle
est dans ce sentiment.
Cela n’empesche point que ledit sieur Chanut |:n’ayt recognu dans l’esprit
de la reyne de Suède et celuy de ses principaux ministres quelque chose de
semblable à la lenteur avec laquelle les plénipotentiaires vont à la paix:|.
Toutesfois, |:quand ilz nous verront entièrement résolus à ne vouloir plus
entretenir en Allemagne une sy grande armée et avec une sy grande des-
pense, à ne leur accorder plus le subside que nous leur avons donné jus-
ques icy, et qu’ilz sçauront que le traitté avec Espagne s’avance et que s’il
venoit à estre conclu avant la paix de l’Empire, ilz craindront que nous ne
parlions un autre langage:|, il y a de l’apparence que ces messieurs pour-
ront changer de conduicte, |:et haster autant leur allure vers la paix,
qu’elle est maintenant lente et tardive:|.
Au fondz, |:quand tous les Suédois seroient de l’avis de monsieur Oxen-
stiern, ilz n’en seroient pas où ilz pensent s’ilz croyent nous pouvoir don-
ner la loy, et le Roy seroit assez puissant pour s’empescher de la recevoir
et pour contenir les choses aux termes où la raison veult qu’elles soient:|.
Dieu seroit sans doubte pour luy, et les hommes le deveroient estre, puis-
que personne ne pourroit approuver |:une telle ambition que celle que
monsieur Oxenstiern fait paroistre accompagnée de tant d’injustice:|. Et
si lorsqu’il s’agiroit de l’intérest |:de quelque prince catholique que l’Em-
pereur voudroit protéger, il ne fault pas doubter qu’il ne fust ravy d’ob-
tenir que la France le secondast:|, voyant que par ce moyen, il le pourroit
faire avec facilité. A plus forte raison devons-nous nous asseurer que
|:l’Empereur, le duc de Bavières, et le party catholique nous donneroient
la carte blanche pour nous obliger à empescher conjoinctement avec eux
que la couronne de Suède ne se mist en train d’aspirer à l’Empire sy elle y
avoit quelque visée comme il semble que les discours de monsieur Oxen-
stiern le doivent faire croyre:|.
Le sieur d’Avaux ne pouvoit luy respondre ni s’en desmeller plus judi-
cieusement qu’il a fait, mettant les choses tantost |:sur le ridicule, tantost
sur le sérieux:|, et à la vérité, s’il eust fait autrement, il les eust falu porter
|:à une dernière extrémité:|. Il sera pourtant bon, en de semblables ren-
contres, de déclarer seulement la volonté du Roy qui ne sort jamais des
termes de la raison et de la justice, et dans les fascheuses responses qu’on
pourroit estre obligé de faire |:à monsieur Oxenstiern, faire tousjours dis-
tinction de sa personne et de celle de la reyne et des principaux ministres
qui la conseillent:|, et l’on tesmoignera qu’on sçait bien que ce ne sont
point ses sentimens et qu’elle n’approuve point sa façon d’agir.
L’on auroit trop affaire [!] si l’on vouloit respondre à toutes les choses
que |:monsieur Oxenstiern a avancées:|, elles ne le méritent point et se
destruisent d’elles-mesmes, et il est aisé à voir qu’elles ne viennent d’autre
principe que |:d’une ambition démesurée qui s’irrite par quelque visée
d’intérest particulier:|.
Dans |:le destail qu’il fait:| de l’estat de l’Empire et de la constitution où il
se trouve, il prend fort mal ses mesures, car si l’on en venoit là |:que la
France fust contraincte à lever le masque, il recognoistroit alors que les
princes catholiques qui sont désarmez armeroient, que ceux qui sont en
neutralité se déclareroient, et que tout cela uny à l’Empereur, il se forme-
roit un party assez puissant pour empescher le chancelier Oxenstiern de
faire réussir le dessein qu’on mande qu’il a de faire espouser son filz à la
reyne de Suède, par l’espérance qu’il pourra donner à cette princesse de le
faire nommer roy des Romains:|.
Que |:sy ce party n’estoit assez fort pour rompre les projectz et les me-
nées de monsieur le chancelier Oxenstiern:|, on n’auroit pas besoing de
beaucoup de solicitations |:pour y faire joindre le roy de Pologne, le roy
de Dannemarc, Messieurs les Estatz et d’aultres princes à qui la puissance
de Suède est odieuse ou suspecte:|.
On ne doute point que tout cecy ne soit tombé dans l’esprit de Messieurs
les Plénipotentiaires, mais on n’a peu s’empescher d’en dire un mot en
passant, et l’on se promet que se conduisans à l’accoustumée avec une
grande prudence, ilz accompagneront leur conduicte de toute la vigueur
et la résolution nécessaire et qu’ilz sçauront donner à entendre que si l’on
a ce desplaisir de voir que les |:Suédois, en cas que leurs sentimens soient
conformes à ceux que tesmoigne monsieur Oxenstiern, aient sy peu de
gratitude pour:| tant d’effortz que nous avons faits à l’avantage de la cause
commune, |:et particulièrement de la Suède:|, nous ne sommes pas en estat
de souffrir que ces avantages qui nous coustent si cher |:leur servent à
prétendre de nous faire donner les mains à des choses que nous ne devons
point et ausquelles il n’y a point de traicté qui nous oblige:|.
Pour ce qui est de la response que le sieur d’Avaux a faite touchant la
prétention du subside, elle est fort prudente, et l’on sera tousjours à temps
de le donner s’il y a des considérations qui nous y obligent |:en tirant
quelque aultre advantage, comme seroit d’avoir des vaisseaux ou choses
semblables dont on pourra s’adviser alors:|. Sur quoy on a icy un soubçon
qui n’est peut-estre pas mal fondé |:que les Suédois ne cherchent tant de
prétextes pour reculer la conclusion de la paix que pour gaigner le temps
auquel l’un des termes de ce subside a accoustumé de leur estre payé affin
d’avoir lieu de le demander avant que la paix soit signée, mais s’ilz n’ont
point d’aultre moyen pour obtenir ce qu’ilz demandent que cet artifice,
ilz pourroient bien y rencontrer plus de difficulté qu’ilz ne s’imaginent et
nous treuver en estat de leur refuser avec justice ce qu’ilz auront voulu
extorquer de nous par finesse:|.
L’on approuve ce que le sieur d’Avaux a fait pour les intérestz de Ma-
dame la Langrave; nous y sommes obligez à cause de la constance avec
laquelle elle a persisté dans le bon party |:et pour empescher qu’elle ne
s’attachast aux Suédois au préjudice de cette couronne:|, mais quelque
bonne volonté que nous ayons pour elle, nous ne sçaurions aller au-delà
de la possibilité des choses, et elle ne doit rien prétendre qui ne demeure
dans ces termes, et enfin il nous suffira que nous n’aurons rien oublié de
ce qui aura dépendu de nous pour luy procurer les plus avantageuses sa-
tisfactions que la raison aura peu permettre |:bien qu’elles ne soient pas
entièrement celles qu’elle prétend, qui surpasseroient de beaucoup les
nostres, quoyque ses armes n’ayent agy et n’ayent faict des conquestes
qu’à la faveur des assistances que nous luy avons données:|.
On a veu icy avec plaisir les pensées que le sieur d’Avaux nous mande |:que
monsieur de Bavières a pour rendre l’Empire alternatif et il est aisé à croire
qu’elles viennent du cœur de ce prince:|, puisque c’est son intérest |:et celuy
des aultres princes d’Allemagne:|. Mais c’est un project dont la discution
doit estre remise après la paix qui doit estre conclue avant toutes choses.
Enfin, Messieurs les Plénipotentiaires prendront soigneusement garde |:à
la conduicte des Suédois:|, et tascheront de pénétrer |:leurs sentimens tou-
chant la Pologne:|. On a juste sujet de se persuader que la passion qu’ilz
tesmoignent |:à donner de la satisfaction à leur armée n’est que pour s’en
prévalloir, après la paix d’Allemagne, à faire la guerre audict royaume ou
pour faire une paix avec luy à des conditions très advantageuses et qu’ilz
ne prétendent cette satisfaction sy exhorbitante pour gaigner temps et
veoir cependant ce qui pourra réussir de cet accommodement avec la Po-
logne, estant résoluz de ne point désarmer que l’argent n’ayt esté délivré à
leurs troupes. Monsieur le chancelier Oxenstiern n’a peu s’empescher de
faire paroistre le premier au sieur Chanut, et il luy est plusieurs fois
eschapé de luy dire que la Suède avoit assez de subjetz de rompre la trêve
qu’elle avoit avec la Pologne
gées de ne rien oublier |:pour destourner cette rupture et de tascher de
faire en sorte que la paix qui se traicte entre ces deux couronnes se fasse à
des conditions raisonnables et justes, tant pour l’une, que pour l’aultre:|.
Elles doivent cela au roy et à la république de Poulongne, tant pour res-
pondre à la bonne volonté que ce prince et cette république tesmoignent à
la France, que pour ce qu’ayant esté médiatrice de la trefve qui est entre
les susdites deux couronnes, elle a intérest ou qu’elle se convertisse en une
bonne paix, ou au moins qu’elle ne soit point violée.