Acta Pacis Westphlicae II B 1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 1: 1644 / Ursula Irsigler unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy
317. Servien an Lionne Münster 1644 Dezember 6
Münster 1644 Dezember 6
Eigenhändiges Konzept: AE , CP All. 31 fol. 314–316 = Druckvorlage .
Unfähigkeit d’Avaux’. Parteilichkeit Saint Romains. Ressentiment d’Avaux’ gegen Mazarin und
Brienne.
Voicy le tableau neuf de Monsieur d’Avaux: Malignité perpétuelle dans ses
intentions, supercherie dans ses actions, sophismes ou évasions dans ses
discours avec une phisionomie de renard que ne dément point son naturel.
C’est une petite finesse qui ne s’élève pas au dessus de vétilles dont il fait
toute son occupation. Il ne sçait presque pas choysir un parti dans les
affaires et prend quasi tousjours le plus mauvais. Avant qu’il ayt fait toutes
ses façons pour commencer à les entamer, un homme un peu effectif en auroit
achevé une douzaine, ce qui fait enrager ceux qui ont à traiter avec luy. On
rencontre des obstacles continuellement en luy et nulle sorte d’assistance ny
de facilité. Son Eminence cognoistra un jour la vérité de ce que je dis et
cognoistra par effect que c’est une homme à ne donner que de l’embarras,
dont Messieurs des Finances ne fairont jamais l’expérience si tost que je le
souhaitte. Il fait le dévot et ne le peut estre dans la continuelle apliquation
qu’il a à faire du mal. Il paye le monde d’une fause aparence et d’une retenue
affectée soub laquelle il couvre esgalement et la foyblesse de son génie et la
violence de son humeur. En Holande il a falli d’exciter une sédition et y
eust peut estre ruyné les affaires du Roy si on n’y eust recogneu qu’il avoit
harangué sans ordre. En Allemagne pour une 〈…〉 de parolle qu’il a voulu
par opiniastreté conserver dans nostre première lettre, il a falli de détruire
toutes les bonnes dispositions qui estoient pour la paix et possible[ment]
l’auroit interrompue si les affaires de l’Empereur eussent tant soit peu
prospéré. Il a triumphé de la trêve de Pologne
1635; [ S. 27 Anm. 1. ]
quoyqu’il y eust huit autres Médiateurs avec luy qui dans le peu d’activité
qu’ils [ont eue] ont sans doute eu plus de part à la conclusion de l’affaire
que luy. En dix ans de service en Allemagne il a renouvellé l’alliance avec
la Suède dont le traité avoit desjà esté fait avant son arrivée et luy avoit
esté envoyé tout réformé de la Cour. D’ailleurs, quoyque pour se faire
valoir il ayt représenté à la Cour la chose de fois à autre difficile, ell’a tous-
jours esté plus nécessaire aux Suédois qu’à nous et autant désirée par eux
pour le moins que par nous. Dans le traité préliminaire il n’avoit qu’à suivre
Monsieur Salvius qui est très habile homme et n’a pas sceu profiter de son
exemple, Salvius n’ayant pas manqué de donner de la Majesté à sa maistresse
et de la nommer partout la première, ce que Monsieur d’Avaux n’a pas fait.
Si on prenoit un peu de soin, on disposeroit facilement les Princes d’ Alle-
magne de traiter le Roy de Majesté aussy bien que l’Empereur, principale-
ment en la conjuncture présente où ilz ont tant besoin de la protection de
Sa Majesté. Monsieur d’Avaux meurt de peur seulement que cela ne réussisse
à cause qu’il ne les 〈…〉 pas jamais convier par son exemple en parlant de
son maistre. Ce que je voy depuis est qu’on a creu qu’il estoit nécessaire
pour la négotiation de la paix, et que cela est si peu vray que je ne croy pas
qu’il y puisse servir ny seul ny accompagné, seul parce qu’il est trop foyble,
irrésolu et stérile en expédiens, accompagné parce qu’il est incompatible en
sorte par son orgueuil, sa vanité, sa finesse grossière et son humeur cachée
qu’un ange ne sçauroit vivre avec luy. Je ne dis tout cela que pour vous seul
et dans le dessein que vous n’en parliez jamais à personne et jettiez ce billet
dans le feu. Je vous suplie néantmoins d’asseurer Son Eminence que je
parle sans intérest et sans passion comm’un homme qui voudroit avoir
donné vint mille escus et sortir honorablement de ce malheureux lieu où je
n’ay encor eu que du mal et où je ne puis espérer à l’avenir ny plaisir ny
proffit ny peut estre aucun honneur. J’estime que si on ne nous veut envoyer
un tiers qui soit audessus de l’un et de l’autre, qu’il faut du moins nous
envoyer des reiglements sévères et condemner celluy qui se treuvera coul-
pable , car tandis que Monsieur d’Avaux se permetra d’estre flatté vous n’en
aurez jamais raison. Il est insuportable s’il void que le vent luy soit tant soit
peu favorable, mais il est lasche et timide quand on luy parle fortement.
S’il y avoit eu un autre homme que Monsieur de Saint Romain qui est sa
créature, il n’oseroit pas faire la moytié des extravagances qu’il fait. Ce n’est
pas que je voulusse faire aucun mauvais office audit Sieur de Saint Romain,
mais Monsieur d’Avaux est asseuré qu’il ne le condemnera pas en escrivant
à la Cour. Cela rend ma condition bien malheureuse, toutefois vous pouvez
faire remarquer qu’estant ce qu’il est à Monsieur d’Avaux, c’est le condemner
quand il ne me condemne pas. Je luy ay fait avouer aujourd’huy qu’il per-
doit son latin auprès de luy, et quand je luy ay demandé s’il souffriroit estant
en ma place de Munster que Monsieur d’Avaux me veut faire, il m’a fort
nettement répondu qu’il n’y voudroit pas estre pour rien du monde et qu’il
aymoit mieux estre en condition qui luy permet de souffrir honorablement
que s’il en avoit une qui l’obligeast de combattre pour se garentir de honte.
Pour conclusion, le crédit de Monsieur le Président de Mesme non seule-
ment empesche qu’on ne me fasse justice mais est capable de me faire recevoir
quelque mauvais traitement. J’oze asseurer que je ne demeureray pas icy une
heure et que j’aymeray beaucoup mieux retourner dans ma maison pour y
vivre en repos, pourveu que ce soit avec la bonne grâce de la Reyne et de
Son Eminence. Je ne vous diray pas que ces gens là ne l’ayment point, parce
qu’on pourroit croire que c’est la passion qui me donne cette opinion. Le
temps faira cognoistre leur intérieur dans lequel je suis asseuré que Mon-
sieur d’Avaux couve une haine secrète contre Son Eminence depuis qu’on
censura son offre de cent mille escus et qu’on luy a fait quelque réprimande
Vgl. [ S. 454 Anm. 1. ]
Il va fort bien chercher la source de ces résolutions et s’imagine – tant il est
ridicule – qu’on a violenté les inclinations de la Reyne comme s’il méritoit
encor plus qu’il n’a, luy qui ne sçait pas seulement les premiers rudimentz
des finances. Il s’agist en ce rencontre aussy bien de vostre intérest que du
mien. Je ne le dis pas pour vous engager dans ma cause, je n’ay pas subjet
de douter de vostre affection, mais il est certain que voyant fort bien qu’ils
ne me défairont pas tant que vous serez au lieu où vous estes, ils vous en
veullent plus qu’à moy. Il me semble d’apercevoir que la liaison de Monsieur
de Chavigny et de Monsieur d’Avaux va tous les jours augmentant et que
cela pourroit bien aller indirectement contre Monsieur de Brienne aussy bien
que contre vous. Monsieur d’Avaux n’en a jamais dit du bien et en dit
continuellement de Monsieur de Chavigny. Leur dessein est sans doute de
se rendre nécessaire dans les affaires estrangères, tous les employs du dehors
estant remplis de leurs créatures. Croyez moy, Monsieur de Brienne et vous
deviez travailler à y faire du changement, quand ce ne seroit que parce qu’il
n’est pas bon de laisser si longtemps des ministres dans un mesme lieu. Il
faudroit comencer par la Suède. Il est certainement aussy nécessaire d’y
envoyer un Ambassadeur ou un Résident qualifié que d’en oster celluy qui
y est , duquel Monsieur de La Tuilerie se plaint desjà comme vous avez veu
par sa lettre dont je vous ay envoyé la copie . Je ne sçay d’où sont venus
ces apointementz dont il parle qu’on a payés à Marigny. S’ilz n’ont pas esté
assignés de la Cour, il faut que Monsieur d’Avaux l’ayt fait icy sans m’en
rien dire, et en ce cas je fairay bien encor retentir cette entreprise.