Acta Pacis Westphlicae II B 1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 1: 1644 / Ursula Irsigler unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy
272. Servien an Lionne Münster 1644 Oktober 15
Münster 1644 Oktober 15
Konzept: AE , CP All. 31 fol. 69–73 = Druckvorlage.
Titulatur des Königs. Verhalten Saint Chamonds bei der Papstwahl. Memorandum d’Avaux’ gegen
nr. 198. Aufwand. Papstwahl. Marigny und La Thuillerie am schwedischen Hof. Vorschlag einer
französischen Vertretung in Schweden. Rang der kaiserlichen und spanischen Gesandten.
Vous verrez par les escriptz que nous avons envoyéz que les commissaires
impériaux sont soigneux de ne donner point de Majesté au Roy. Je vous
asseure qu’il importe qu’on nous envoye un ordre bien exprès sur ce subjet.
La contestation que nous avons eue pour cela Monsieur d’Avaux et moy
empesche encor que nous n’y faisons pas tout ce qui se debvroit, mais je ne
lairray pas d’en parler vivement à la première conférence, sçachant bien qu’il
ne m’ozeroit contredire, pour faire cognoistre nettement à noz parties qu’ilz
ne doibvent pas prétendre une différence de tiltres et que s’ilz ne donnent
pas tout au Roy de Majesté, nous ne la donnerons poinct à l’Empereur.
Pendant nos divisions passées j’avois souvent regretté d’avoir esté retiré de
l’Ambassade de Rome pour venir servir en celle cy, mais j’aymerois mieux
estre mort que de m’estre treuvé à Rome pendant une eslection semblable
à celle qui a esté faicte. Je ne pourrois pas survivre à un malheur semblable
à celuy de Monsieur de Saint Chamond
Vgl. dazu [ nr. 260 ] und [ nr. 261. ]
qu’il y ayt eu de sa faulte, il ne laisse pas d’estre malheureux en ce que le
public qui est le juge de nostre réputation le condemne. Il y a des advis qui
portent qu’il a trop peu faict avant l’eslection et trop depuis. Je prie Dieu
qu’au moins en France on n’ayt pas subjet de se plaindre de luy et que toute
la faulte soit rejettée sur Monsieur le Cardinal Anthoine .
Je serois bien malheureux sy je ne pouvois pas avoir une coppie de la lettre
que Monsieur d’Avaux a escripte à la Reyne et du mémoire qu’il a envoyé
depuis peu
[ Nr. 215 ] und Beilage zu [ nr. 236. ]
m’obligera pas de contrevenir aux déffences de Sa Majesté ny aux ordres de
Son Eminence pour lesquels j’ay trop de respect. Je m’estois bien doubté
quand il se hasta tant de venir céans le premier, que c’estoit pour avoir lieu
de me faire quelque nouvelle niche. Je n’ay eu aulcune nouvelle de vostre
part depuis tout cela, ce qui me met un peu en peine. Au moins que je
sçache que ma souffrance est approuvé[e]. Je veux croire pour ma consola-
tion que ce dernier escript ne l’aura pas esté, quelque modération qu’il y
ayt peu garder, et que cela faict paroistre un esprit qui ne s’appaise jamais.
Ne soyez pas en peine du ressentiment que j’en puis avoir, car je vous
asseure qu’il ne paroistra point. Je désire seulement que mes amis me
plaignent quelquefois de me veoir icy en un lieu où ne pouvant espérer ny
contentement ny proffit, je ne sçay pas mesme s’il y a lieu de prétendre d’y
pouvoir enfin acquérir quelque honneur solide. Nous avons pris un grand
vol. L’on nous refuse les assistances qu’on nous avoit faict espérer pour le
soustenir et ce que je voy de pire est que toutes les fois que j’ay voulu cher-
cher sérieusement les moyens de retrancher ma despence je ne l’ay peu,
quand mesmes je n’en eusse pas esté destourné par l’honneur et la bien-
scéance . Oultre que comme je vous ay desjà mandé que toutes les mesmes
personnes nous sont nécessaires qu’il fauldroit avoir menés dans une ville
déserte à cause que les médecins, chirurgiens, appothicaires et tous les autres
artisans de ce pays ne nous peuvent servir, il nous importe pour nostre
seureté d’avoir beaucoup de monde affin de nous garentir des violences
que nos ennemis pourroient faire contre nous dans un pays où tout est à
leur dévotion.
Je ne doubte point que Son Eminence ne se treuve bien en peine pour les
résolutions qu’il fauldra prendre sur l’eslection du Pape. Monsieur Contarini
qui est pratic aux choses de Rome soutient qu’elle est sans exemple et que
l’on n’a jamais eslevé aucun Cardinal à cette dignité qui ayt eu l’exclusion
formelle d’une des Couronnes. Savedra a eu mesme l’insolence de dire depuis
peu à des gentilzhommes de la famille de Monsieur le Nonce et à plusieurs
autres: nous avons grâces à Dieu à présent un Pape espagnol.
Je ne sçay sy ce n’est point Marigny
Thuillerie de ne se couvrir point pour tout devant la Reyne de Suède, pas
mesme en la première audience. Je doubte qu’un Ambassadeur puisse faire
ces civilitéz au préjudice de la dignité de son maistre, ce qui se faict envers
les Reynes d’Angleterre, d’Espagne et Madame la Duchesse de Savoye ne
doibt pas estre tiré en conséquence pour la Suède, veu qu’on honore les
premières non comme Souveraines du lieu où elles sont, mais comme estans
sorties de la race de noz Roys. Monsieur de La Thuillerie est mon amy,
mais je croy qu’en cette occasion il a faict une grande faulte, principallement
sy la Reyne de Suède ne rend pas le mesme honneur à la Reyne nostre
maistresse. Je vous prie de m’en escripre vostre sentiment et celuy de Mes-
sieurs les ministres. Cela est estrange qu’on se relasche presque partout du
costé de France et que tous les députez du Roy se rendent sans ordre pro-
digues de civilitéz aux despens de Sa Majesté, cependant que tous les autres
ministres avancent les prétentions de leur maistre et taschent mesme de le
faire à nostre préjudice.
Il y a apparence que Marigny dont vous cognoissez l’humeur a eu l’effronterie
de faire agir la Reyne de Suède en sa faveur pour demander à Monsieur de
La Thuillerie qu’on le laissast là. Il est à craindre qu’estant éventé au point
qu’il l’est et faisant partout le famillier, il ne donne bientost du dégoust en
ce pays la où les espritz sont naturellement méffians et où les Régens qu’on
n’a point consultéz là dessus pourroient s’imaginer que les privautéz que
Marigny vouldra prendre dans la maison de la Reyne sont peult estre avec
intention secrète d’agir contre lesdictz Régens. D’ailleurs sy après une per-
sonne qualiffiée comme Monsieur de Rorté on leur donnoit un Résident de
la qualité de Marigny, ilz pourroient s’en offencer, le mespriser et avoir peu
de confiance en luy, les peuples du nort s’attachant beaucoup aux apparences.
Je suis obligé pour mon debvoir de faire sçavoir tout cecy par vostre moyen
à Son Eminence, parce que je ne vouldrois pas contrarier ouvertement et
de gayeté de cœur les propositions qui seront faictes par Monsieur de La
Thuillerie en faveur de Marigny. A tout extrémité on pourroit le laisser en
Suède en qualité de secrétaire tandis que l’employ de Monsieur de La Thuil-
lerie durera et le faire sçavoir aux Régens, affin qu’ilz supportent plus
patiemment les déffaultz de son humeur estourdie et qu’ilz ne s’imaginent
pas qu’on veult faire par son moyen quelque caballes secrèttes auprès de
la Reyne.
Je vous diray à ce propos que je croirois absolument nécessaire pour
l’intérest de la France pendant cette négotiation d’envoyer quelque ministre
en Suède, soit Ambassadeur ou Résident qualiffié. Comme ilz sont glorieux
en ce pays là, ilz pourroient à la longue s’offencer de n’y avoir personne de
la part du Roy, veu qu’ilz ont un Ambassadeur en France , et dans les pro-
positions qu’on leur peult faire de temps en temps d’un accommodement
particulier de la part de noz ennemis, un ministre du Roy seroit fort néces-
saire sur les lieux pour parer ce coup qui nous seroit mortel. J’estimerois
qu’un homme de robe longue y seroit plus propre qu’un autre si on prend
la résolution d’y envoyer. Mais il fauldroit qu’il fust sçavant et sociable.
Comme cet employ sy esloigné ne sera pas désiré de beaucoup de monde,
je ne sçay sy on ne le pourroit point faire tumber à Monsieur de la Cour
qui selon mon oppinion ne seroit pas malpropre parmy les septentrionaux.
S’il n’y a que la qualité d’Important qui luy fasse obstacle, je respondray
fort volontiers de sa fidélité quand il aura donné sa parolle. Je ne croy pas
que de ce règne il se soit meslé d’aulcune affaire ny d’aulcune intrigue.
L’oppiniastreté de Monsieur d’Avaux est sy grande dans l’immutabilité de
ses advis, qu’encor qu’il cognoisse que les députéz qui sont icy tant de la
part de l’Empereur que du Roy d’Espagne ne sont pas ceux qui feront la
paix, à cause que ce sont personnes de sy peu de considération qu’il n’y a
pas d’apparence qu’on leur veuille confier tout le secret d’une affaire sy
importante, encor dis je que ce soit luy qui a le premier faict ce jugement
Vgl. [ nr. 18. ]
et qui y perciste encores aujourd’huy, néantmoins il a eu peine à consentir
que nous demandassions qu’on leur donnast la qualité d’Ambassadeurs ou
du moins qu’ilz ne puissent pas prétendre d’estre traictéz du pair avec ceux
qui l’ont conjoinctement avec celle de Plénipotentiaires. Lorsque je luy ay
faict veoir que cela nous avoit esté ordonné de la Cour et particulièrement
par des despesches de Son Eminence
Vgl. dazu [ nr. 46. ]
condition d’oster cette seconde alternative qui regarde le rang, parce qu’elle
chocquoit en quelque façon une oppinion qu’il a tenue pendant nos con-
testations . Cependant selon mon advis nous n’avons pas tant de droict de
prescripre à l’Empereur et au Roy Catholique les qualitéz qu’il devra donner
à ses députéz comme de dire que s’ilz n’ont les mesmes que nous, ilz ne
pourront pas prétendre d’estre traictéz du pair dans les cérémonies. Ma
pensée à esté outre la raison et la décence qui s’y rencontrent, non seulement
de pourveoir par ce moyen à la dignité du Roy, mais d’avancer en effect la
négotiation, parce que l’Empereur et le Roy Catholicque ayans honte
d’honorer de la qualité d’Ambassadeur des personnes de sy peu d’importance
que celles des docteurs et autres qui sont icy, choisira sans doubte des per-
sonnes plus relevées pour y envoyer, ausquelles vraysemblablement il donne
plustost le secret et l’authorité de traicter qu’à ceux cy qui par leur conduitte
ont faict veoir jusqu’icy qu’ilz n’ont autre pouvoir que d’escouter les pro-
positions qui seront faictes pour les envoyer à la Cour de Vienne et la con-
sulter sur la moindre difficulté. Je sçay certainement que dès le commence-
ment qu’il fut convenu d’envoyer des Ambassadeurs de part et d’autre, on
avoit jetté les yeux à Vienne sur l’Esvesque de Wirtsbourg
de l’Empire pour estre Ambassadeur de la part de l’Empereur. Ceux qui
furent dès lors envoyéz à Collogne n’eurent autre charge que de recognoistre
quand il seroit temps que les Ambassadeurs y deussent venir, et de faict il
est très certain que le Cardinal Ginetti ny ceux de sa suite n’ont jamais
traicté le Conte de Nassau d’Excellence. D’ailleurs, Monsieur Contarini m’a
dict qu’ayant faict représenter par son collègue à Vienne avant que nous
fussions arivéz icy, qu’il ne croyoit pas que la commission donnée au Docteur
Volmar fust de la dignité de l’Empereur et que nous aurions peine de le faire
aller du pair avec nous, il fut respondu par le Comte de Transmansdorf
qu’on avoit tousjours accoustumé de faire accompagner les premiers com-
missaires d’un docteur, mais que celuy cy avoit charge d’en user modeste-
ment et de ne se rencontrer pas dans les cérémonies publicques. Sy après
cela nous voulons dans des intérestz d’honneur et où la dignité du Roy est
intéressée estre moins scrupuleux que nos parties mesmes, il me suffit pour
ma descharge d’en avoir faict remarquer les inconvéniens et j’obéiray à tout
ce qui nous sera commandé, mais il me semble qu’on nous doibt ordonner
de prendre garde un peu de plus près à tout cela. Non seulement cette
assemblée seroit plus illustre, mais il y auroit espérance d’y réussir plus
utilement sy l’on y voyoit de part et d’autre des personnes de considération
et bien authorisées, n’estans pas croyable que Saavedra et Brun qui n’ont
jamais esté jusques icy que des soliciteurs, puissent décider seulz les plus
importans intérestz qu’ayt eus l’Espagne depuis que sa monarchie est par-
venue au point de grandeur où elle est.