Acta Pacis Westphalicae II B 2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 2: 1645 / Franz Bosbach unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und unter Mithilfe von Rita Bohlen
182. Servien an Lionne Münster 1645 August 5

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–/ 182 /–

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Servien an Lionne


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Münster 1645 August 5

33
Eigenhändiges Konzept: AE , CP All. 52 fol. 227–235 = Druckvorlage S. 570 Zeile 27 – S. 571
34
Zeile 6; Teil eines Reinkonzeptes: AE , CP All. 52 fol. 221–226 = Druckvorlage S. 571 ab
35
Zeile 7

39
Der Text S. 570–571 Zeile 6 fehlt im Reinkonzept.
.

36
Eintreten Chabods für Bellezia. Vermutungen über die Entsendung Rortés nach Stockholm,
37
Bemühungen um die Ablösung La Thuilleries, Empfehlung de La Cours. Gute Zusammenarbeit
38

1
mit Longueville.

[p. 570] [scan. 618]

Gute Erfolgsaussichten bei den Verhandlungen: Bereitschaft der Spanier zu einem Abkommen,
2
vor allem zu einem Waffenstillstand; Wirkung der Türkengefahr auf die Friedensbereitschaft,
3
günstige Gelegenheit zu einem Friedensschluß nach den Bedingungen Frankreichs; ähnliches
4
Verhalten der Spanier in der Vergangenheit; Vorschlag einer erneuten Erklärung der Absicht
5
auf Einbehaltung der Eroberungen und einer Fristsetzung für die spanische Antwort, Erfolg der
6
Schweden mit diesem Verfahren in den Verhandlungen mit Dänemark; Vorteile einer
7
Weiterführung des Krieges. Eventuelle Bereitschaft Spaniens zu einem Abkommen ohne
8
gleichzeitige Regelung der Probleme im Reich, Befürwortung eines solchen Abschlusses für den
9
Notfall zur Konzentration der militärischen Kräfte im Reich als Gegengewicht gegen Schwe-
10
den , Präferenz für einen allgemeinen Friedensschluß. Eventueller Friedensschluß mit Spanien
11
für Italien und die Niederlande und langjähriger Waffenstillstand für Katalonien und
12
Portugal, Tausch der spanischen Niederlande in einem Heiratsprojekt gegen Katalonien, gegen
13
die Aufgabe der Unterstützung Portugals und gegen Türkenhilfe. Berücksichtigung der
14
Interessen der Verbündeten in den Verhandlungen: keine Verpflichtung zur Rücksicht auf
15
Portugal, Savoyen, Hessen-Kassel und Siebenbürgen; Verpflichtung zur Rücksicht auf die
16
Generalstaaten und Schweden, eventuell mangelnde Friedensbereitschaft dieser Mächte, Nei-
17
gung zur Weiterführung des Krieges bei Schweden angesichts der gegenwärtigen Erfolge,
18
Widerstand von Seeland und des Oraniers gegen einen Friedensschluß der Generalstaaten,
19
Furcht des Prinzen von Oranien vor den Ansprüchen Longuevilles auf das Fürstentum Orange.
20
Drohende Stärkung der protestantischen Partei bei der Fortführung des Krieges, Vorschlag der
21
Vergrößerung der Armee im Reich zur Verstärkung der französischen Position; Vergrößerung
22
der Truppen durch katholische Soldaten als Gegengewicht zu den Weimarer Truppen. Haltung
23
der Mediatoren: kein Verlaß auf eine freundliche Einstellung Chigis trotz seiner Querelen mit
24
der Kurie, feindselige Haltung Contarinis. Ehrliches Bemühen der bayerischen Gesandten um
25
den Friedensschluß, keine Aussicht auf ein Separatabkommen mit ihnen. Brandenburgs
26
Neigung zu Schweden.

27
Monsieur l’ambassadeur de Savoye désireroit bien qu’on pust obtenir de
28
Son Eminence la grâce de Belletia comme d’un costé il craint que toute
29
cette affaire ne tumbe sur luy dans la cour de Piémont. Il espère que cest
30
homme ayant esté mortifié comme il a esté sera désormais plus sage et plus
31
modéré qu’un autre qu’on luy pourroit envoyer de Piémont lequel peut-
32
estre on voudroit luy associer et le mettre en condition esgale à la sienne. Il
33
m’a témoigné néantmoins que s’il croyoit que cette pensée dépleust à Son
34
Eminence il ne voudroit pas l’avoir. Pour moy je croy qu’il y a eu plus
35
d’imprudence et de présumption dans la conduite de Belletia que de malice
36
car monsieur de Saint Maurice m’a juré qu’il n’y a rien dans leurs
37
instructions touchant Pignerol qui ne tende à faire exéquuter le traité de
38
Quérasque.

39
Monsieur de Rorté est party d’icy avec espérance d’estre renvoyé en Suède
40
je croy mesme qu’il a obtenu quelque lettre de monsieur de Longueville à la
41
prière de monsieur d’Avaux. Si cela arrivoit je vous conjure de me donner
42
moyen auparavant de me dégager honestement des parolles que j’ay
43
données à monsieur Oxestiern de la part de Son Eminence. Le pauvre
44
monsieur de La Tuilerie a une très grande apréhension du voyage de Suède.
45
Je vous conjure que les siens cognoissent que je vous ay escrit affectionné-
46
ment pour l’en faire déclarer s’il voyoit un ambassadeur ordinaire nommé
47
qui luy peut faire espérer que son séjour y sera court. Ich schlage de La Cour
48
für die Stelle in Stockholm vor.

[p. 571] [scan. 619]


1
Je ne vous escris plus d’affaires voyant que monsieur de Longueville prend
2
plaisir d’en entretenir Son Eminence. Je luy dis avec liberté toutes mes
3
pensées et je voy qu’il l’a bien agréable. Je ne doute point qu’il ne soit desjà
4
désabusé de la première opinion qu’il avoit de monsieur d’Avaux, mais je
5
ne croy pas quoy que je pusse jamais faire qu’il veuille rendre témoignage
6
en ma faveur qui puisse faire préjudice à monsieur d’Avaux.

7
Pourveu que nous ayons de la patience, de la retenue et de la fermeté l’estat
8
présent des affaires s’il ne change point nous donnera moyen de faire icy
9
tout ce que nous vouldrons pour l’advantage de la France.

10
Les Espangolz tesmoignent estre disposez à faire les traictez qu’on vouldra
11
de paix, de trêve longue ou courte ou de suspension, mais que de chacun de
12
ces traictez les conditions en doibvent estre différentes

41
Vgl. nr. 176.
. Ce discours est si
13
public par icy qu’il y a lieu de craindre qu’ilz ne l’ayent plustost faict par
14
ostentation et pour faire esclatter leur bonne disposition à l’ accommode-
15
ment que pour en avoir l’intention. Néantmoin, beaucoup de circonstances
16
font croire qu’appréhendant les longueurs, difficultés et désadvantages
17
qu’ilz rencontreroient en traictant la paix, ilz inclinent en effect à la trêve et
18
que c’est leur principal but, mais pour moy si j’en estois cru puisqu’ilz nous
19
ont faict renoncer par des traictez irrévocables lorsqu’ilz ont esté les plus
20
fortz, nous en prendrions aujourd’huy nostre revenche n’y ayant pas
21
apparence que la conjuncture soit jamais sy favorable que maintenant pour
22
acquérir à la France un tiltre légitime pour asseurer ses conquestes et
23
destruire ceux qu’ilz ont acquis aultresfois contre nous. La diversion du
24
Turc où grâces à Dieu nous n’avons point de part, ne laisse pas de nous
25
mettre à couvert de la mauvaise volonté de tous les princes d’Italie et en
26
menaceant de tous costez les Estatz de noz ennemis comme les plus
27
proches les réduire à se contenter du traicté que nous vouldrons leur
28
donner puisque c’est un fléau que Dieu leur envoye, il semble que nous
29
aurions très grand tort sy nous n’en faisions pas nostre proffict puisque si
30
noz ennemis avoient le mesme advantage sur nous ilz ne le perdroient pas
31
non seulement pour conserver ce qu’ilz auroient conquis auparavant mais
32
pour faire des demandes nouvelles comm’en la prison de Francois I où ilz
33
ne se contentèrent pas des Estatz qui estoient contestez par les armes, mais
34
nous firent renoncer à la souveraineté de Flandres et d’Artois

42
Im Vertrag von Madrid, der während der Gefangenschaft Franz’ I. geschlossen wurde (vgl. S.
43
278 Anm. 5).
qui n’ es-
35
toient point en contestation.

36
Si la guerre du Turc nous faisoit faire des demandes nouvelles on pourroit
37
dire que nous voulons proffiter du malheur public, mais on ne sçauroit rien
38
désirer de nous de plus favorable que l’offre que nous faisons de conclurre
39
la paix en quinze jours en demeurant chacun en l’estat que nous sommes,
40
puisque quand le Turc ne s’en mesleroit pas noz ennemis ne sont pas en

[p. 572] [scan. 620]


1
estat de nous faire rien faire de plus par les armes. Je vouldrois donc qu’on
2
se tînt ferme à cette déclaration qui est trouvée juste de toutes les personnes
3
désintéressées et qu’on déclarast nettement aux Espagnolz qu’on ne s’en
4
relaschera jamais et que mesme on leur tesmoignast de voulloir une
5
responce cathégoricque dans un certain temps affin de n’amuser pas plus
6
longtemps le monde. Nous avons veu que la fermeté des Suédois et les
7
démonstrations qu’ilz ont faictes de voulloir rompre le traicté avec les
8
Danois ont obligé ceux-cy d’accorder aux autres ce qu’ilz ont voulu. Je
9
passe bien plus avant et croy’que sy l’on a de l’argent en France il vauldroit
10
mieux continuer la guerre estrangère encor deux ou trois années que de
11
faire une paix laquelle à la vérité est désirée de tout le monde, mais qui tost
12
ou tard nous jettera dans la guerre civille. Au moins ne vouldrois-je par
13
l’avoir acheptée pas la restitution d’une seulle place. Je sçay bien que je
14
parle contre mon employ, mais il est plus honneste à un homme de bien de
15
dire ce qu’il croid avantageux pour son maistre et pour sa patrie que de
16
chercher la glorie d’avoir mis son sein dans un traicté.

17
Pourveu qu’il n’arrive point d’eschec à l’armée de monsieur d’Anguien et
18
qu’elle puisse prendre des quartiers deçà le Rhin, nous ferons sans peine
19
tout ce qui nous sera ordonné avec l’Empire et avec l’Espagne. Je croy
20
mesme que nous aurons à choisir de faire un traicté avec celluy des deux
21
qui nous sera le plus commode, car comme les estatz de l’Empire déclarent
22
que sy les Espagnolz ne se veullent mettre à la raison ilz les abbandonne-
23
ront et mesmes traicteront la paix sans l’Empereur s’il ne s’y veult disposer,
24
j’ay quelque oppinion que les Espagnolz pour n’estre pas abbandonnez
25
essayeront de les prévenir et de sortir d’affaires avec nous sans l’Empire. Le
26
meilleur est bien comme il nous est ordonné de faire la guerre sy l’on peult
27
de tous costez pour une paix généralle, mais s’il falloit choisir de la faire
28
avec l’un des deux sans l’aultre selon mon foible sens je croirois plus
29
advantageux à la France de traicter avec l’Espagne sans l’Empire et
30
penserois en pouvoir donner des raisons assez concluantes à la charge
31
tousjours de ne rien rendre. Car j’estime qu’il sera plus court et plus facille
32
de demeurer constamment sur la résolution de conserver tout que sy en
33
donnant l’espérance aux Espagnolz de nous entamer nous portions la
34
négotiation à contester sur le plus ou sur le moins. Je suis tellement de
35
l’oppinion que je viens de dire que je croy que cette résolution de traicter
36
avec l’Espagne sans l’Empire peult servir de remède à la mauvaise humeur
37
que pourroient prendre les Suédois de continuer la guerre dans l’Allemagne
38
où nous pourrions bientost nous mettre en estat sy nous estions débarrassez
39
de la guerre d’Espagne, que les Suédois ne pourroient pas de [!] nous y
40
donner la loy ny opprimer injustement les catholicques comme peult-estre
41
ce seroit enfin leur dessein s’il leur arivoit de plus grandes prospéritez dans
42
l’Allemagne. Pour conclusion, selon mon foible sens il fauldroit tenir bon à
43
ne vouloir présentement faire que la paix avec l’Espagne aussy bien qu’avec
44
l’Empire et dans la paix de ne vouloir accorder aultres conditions que celles

[p. 573] [scan. 621]


1
que nous avons proposées sans se relascher en aulcune façon, peult-estre
2
mesme n’y auroit-il point de mal de déclarer aux médiateurs franchement
3
que sy les Espagnolz ne la veullent de cette sorte il n’est point nécessaire de
4
presser les Hollandois de venir icy et que nous n’y demeurerons que pour
5
terminer les affaires d’Allemagne.

6
Tout ce qu’on pourroit modérer dans nostre proposition seroit de faire
7
seulement la paix pour l’Italie et les Pays-Bas et faire une trêve de dix ou
8
douze années pour les affaires d’Espagne, assavoir pour la Cathalogne et le
9
Portugal, ce qui nous donneroit moyen de prendre noz résolutions à loisir
10
pour ces deux intérestz et peult-estre pendant la trêve de faire une eschange
11
de la Cathalongne avec ce que le roy d’Espagne possède dans les Pays-Bas
12
faisant en mesme temps le mariage de l’infante avec nostre Majesté. Mais il
13
fault considérer que la moindre ouverture de mariage avec l’Espagne seroit
14
dangereuse avant la conclusion du traicté parce que noz alliez en pren-
15
droient jalousie et peult-estre en suite des résolutions précipitées de nous
16
prévenir et de sortir d’affaires sans nous. Je ne doubte point que sy nous
17
pouvons maintenant sortir d’affaires avec les Espagnolz de cette sorte l’on
18
ne pust aisément cy-après en traictant un mariage avec eux les engager de
19
nous céder les Pays-Bas pour ravoir la Cathalogne, pour nous faire
20
abandonner le Portugal et pour obtenir quelque assistance contre le Turck
21
laquelle je croy bien qu’il fauldra donner enfin sy la guerre qu’il a
22
commencée continue, mais je vouldrois que nostre secours nous vallust
23
quelque chose ailleurs. Car il est certain que les Espagnolz nous traicte-
24
roient de cette sorte s’ilz estoient en nostre place et que les Vénitiens qui
25
sont les premiers attacquez n’ont pas dans leur âme tant d’affection pour
26
nous qu’ilz mentent que pour l’amour d’eulx nous irritions de gayeté de
27
coeur un sy puissant ennemy.

28
Tout ce raisonnement présupose que nos affaires sont en bon estat, aussy
29
est-il très véritable par la grâce de Dieu et que le lieu d’où nous avons le
30
moins à craindre est du costé de noz ennemis, mais comme la partie que
31
nous jouons est bien faicte pour nous puisque nous sommes cinq contre un
32
et que pour faire heureusement la guerre contre un si puissant ennemy que
33
la maison d’Austriche il a fallu faire diverses confoedérations, elles sont
34
bien advantageuses tandis que la guerre durera, mais quand on vient à un
35
traicté les diverses prétentions et intérestz des uns et des autres donnent
36
beaucoup de peine, voycy donc quelques inconvéniens qu’il fault considé-
37
rer parmy noz alliez, noz amis et les indifférens pour y remédier sy l’on
38
peult: Parmy les alliez de la France Portugal, Savoye et Hesse sont obligez
39
de se conformer à ce qu’on vouldra. C’est pourquoy on ne s’y arreste pas
40
non plus qu’à la confoedération nouvellement faicte avec le prince de
41
Transilvanie dont les conditions n’obligent pas trop avant. Mais celles de
42
Suède et de Hollande ne laissent pas la liberté de rien faire sans leur
43
consentement sy bien que l’une ne voulant que la paix et l’aultre que la
44
trêve, il est bien malaisé de s’accommoder à ces deux différens desseins, on

[p. 574] [scan. 622]


1
avoit bien proposé pour les concilier de faire la paix avec l’Empire et la
2
trêve avec l’Espagne, mais il fauldroit premièrement estre bien asseuré que
3
la Suède et les Provinces-Unies veuillent effectivement traicter, car il y en a
4
beaucoup qui croyent qu’elles ne veulent ny paix ny trêve quelque
5
semblant qu’elles facent du contraire.

6
La Suède enflée de l’advantageux traicté qu’elle vient de faire avec les
7
Dannois et de l’inclination que tous les protestants d’Allemagne ont pour
8
elle aura peult-estre plus d’envie de continuer la guerre dans l’Allemagne
9
que de conclurre la paix et comme elle songe plus à son agrandissement
10
qu’au bien public au lieu d’estre touchée du péril qui menace la chrestienté
11
par l’invasion du Turc, elle croira que c’est une conjuncture favorable pour
12
pousser ses conquestes plus avant et pour donner un establissement solide à
13
sa grandeur.

14
Parmy les Provinces-Unies il y en a qui souhaittent ardemment le repos et
15
particulièrement en Hollande qui est la plus puissante. Il seroit mesme à
16
craindre sy elle estoit la maistresse qu’elle ne fist pas grand scrupule de
17
traicter sans nous, mais la Zélande y apportant des obstacles, ceux qui
18
sçavent par quel motif elle a retardé sy longtemps aultresfois la première
19
trefve ont subjet de croire que la mesme cause la faict agir aujourd’huy et
20
craignent bien que monsieur le prince d’Orange ne s’oppose soubz main
21
aux conseilz pacificques de crainte que n’estant plus nécessaire quand ces
22
provinces seront dans le repos elles ne prennent envie de diminuer son
23
authorité et peult-estre mesme de se passer entièrement de luy. Il y a une
24
aultre appréhention qui le touche que monsieur de Longueville ne veuille
25
remuer dans cette assemblée ses prétentions sur la principaulté d’Orange

42
Die Hge. von Longueville bestritten die Rechtmäßigkeit des Übergangs Oranges im Jahr
43
1530 an René de Chalon (1519–1544) ( Zedler XXV Sp. 1721).
je
26
sçay de bon lieu qu’il a cette crainte laquelle quoyque la moindre ne laisse
27
pas d’augmenter celle qu’il a d’ailleurs. C’est pourquoy il seroit très
28
nécessaire de luy rasseurer l’esprit pour Orange affin que l’oppinion qu’il
29
pourroit prendre que l’on protégera monsieur de Longueville dans sa
30
prétention ne l’esloigne pas de l’affection de la France et que s’il traverse le
31
traicté ce ne soit pas par animosité contre nous laquelle le feroit mal agir
32
aussy dans la guerre. Sy ce jugement que plusieurs personnes censées font
33
des inclinations de la Suède et de monsieur le prince d’Orange est véritable
34
on doibt appréhender avec très grande raison d’estre icy longtemps sans
35
rien faire puisqu’il ne sera pas malaisé aux uns et aux aultres de treuver des
36
prétextes pour esloigner la conclusion du traicté et rendre la négotiation
37
immortelle.

38
Ce qui est le plus à craindre est que la durée de la guerre ne rende les
39
Suédois trop puissans dans les affaires d’Allemagne et que les protestans
40
ausquelz on a un peu trop visiblement faict cognoistre qu’ilz ne doibvent
41
rien espérer de nous dans l’intérest le plus sensible qui est celluy de la

[p. 575] [scan. 623]


1
religion ne s’attachent entièrement à eux sans nous considérer beaucoup.
2
L’unicque moyen de nous garentir de ce préjudice est de soustenir la guerre
3
en Allemagne tandis qu’elle durera avec de plus grandes forces que celles
4
que nous y avons eues jusqu’à présent affin qu’elles treuvent plus de facilité
5
à subsister et prendre pied deçà le Rhin, qu’elles nous donnent moyens de
6
soulager le pays que nous prétendons de conserver par le traicté et ce qui
7
est de plus avantageux qu’elles nous rendent plus considérables à noz amis
8
et à noz ennemis. Lorsque les Allemands et les Suédois nous verront en cet
9
estat ilz ne prendront pas sy aisément la pensée de nous donner la loy ny de
10
rien faire qui nous puisse déplaire et seront contrainctz de s’accommoder à
11
noz conseilz tant pour les desseins de la guerre que pour ceux de la paix.
12
L’expérience faict veoir tous les jours que les troupes françoises ne sont pas
13
propres pour la guerre d’Allemagne et l’exemple des Suédois nous apprend
14
que pour y réussir il fault avoir des troupes du pays. Celles qu’on
15
appellent [!] Weymariennes sont presque destruictes et peult-estre n’est-ce
16
pas un des plus grands malheurs qui pust ariver non seulement parce que
17
elles n’obéissent qu’à leur fantaisie et vivent sans discipline, mais parce
18
qu’elles sont deppendantes du party protestant et qu’en cas qu’il se formast
19
une guerre de religion comme les affaires semblent y pencher sy nous n’y
20
remédions, elles ne demeureroient pas dans le service de la France, sy elles
21
estoient obligées par conscience ou par raison d’Estat de se séparer des
22
protestans ou bien de former un tiers party. Nous sçavons que les
23
protestans ont plus regretté la perte de Margetain pour l’espérance qu’ilz
24
avoient aux chefs qui y sont demeurez que pour l’amour de nous, craignant
25
beaucoup plus qu’ilz ne désirent noz prospéritez c’est pourquoy dans la
26
nessésité qu’il y a de lever des estrangers il seroit à propos de préférer les
27
catholicques qui se présentent aux aultres affin que cy-après l’armée
28
d’Allemagne s’il est possible soit my-partie.

29
La disposition des médiateurs n’est pas beaucoup meilleure que celle de noz
30
alliez et de nostre armée. Il y a cette différence que ceux-là souhaittent
31
ardemment la paix et que ceux-cy en ont peult-estre la pensée bien
32
esloignée. Sy le nonce n’estoit point violenté par l’attachement du pape
33
avec les Espagnolz je croy certainement qu’il auroit plus d’inclination pour
34
la France que son collègue, les deux dernières fois que je l’ay veu il m’a
35
voulu persuader qu’il avoit rompu tout commerce avec le cardinal Penzirol-
36
le et m’a faict cognoistre par le reste de ses discours (quoyque fort
37
discrettement) qu’il n’est pas satisfaict du pape et qu’il n’a pas subjet
38
d’espérer aulcun avancement pendant ce pontificat, en effect depuis qu’il
39
est icy on ne luy a pas seulement envoyé un bref pour le continuer dans son
40
employ, mais comme il est très retenu et qu’en toutes les occasions
41
importantes il peult estre bridé par les ordres de Sa Sainteté, je ne sçay s’il y
42
a lieu de s’en promettre quelque véritable assistance. Quant à Contarini, je
43
n’avois point voulu adjouster foy aux diverses conjectures qui me font
44
croire que dans son coeur il n’a point de bonne volonté pour nous jusqu’à

[p. 576] [scan. 624]


1
ce que divers advis nous ont appris que toutes ses lettres sont remplyes des
2
jugemens qu’il fait contre nous et qu’il n’a point de plus grand plaisir que
3
nous descrier en jettant sur les François le blasme de tout ce qui ne se fait
4
pas à son gré. C’est un homme présomptueux et amoureux de ses oppinions
5
qu’il s’émancipe de dire trop librement pour un médiateur et qui ne peult
6
souffrir qu’on luy résiste. Il est bien à craindre qu’il n’ayt donné de très
7
mauvaises impressions à sa République qui l’eussent peu porter à des
8
résolutions bien esloignées du début de la médiation sy cette nouvelle
9
guerre du Turc ne luy eust donné de l’occupation. Je croy certainement que
10
sans cela nous eussions veu bientost une ligue des princes d’Italie contre la
11
France et que c’ettoit sans doubte pour les engager dans ce dessein que le
12
pape a pris tant de soin de les réunir à luy en les obligeant tous. Contarini
13
néantmoins tasche de se racommoder avec nous en apparence, il n’y a que
14
quatre jours qu’il me parla fort à la louange de Son Eminence et qu’il me
15
pria de luy faire venir son portraict. Je vous suplie d’en parler à Son
16
Eminence aussy bien il y a longtemps que je vous l’avois demandé pour
17
moy.

18
Les députez de Bavière sont ceux qui agissent le mieux dans les affaires
19
publicques et pour avancer la paix généralle. Leur oppinion est qu’il la fault
20
faire si l’on peult, mais que sy les Espagnolz se rendent trop difficiles il la
21
fault faire avec l’Empereur et l’Empire sans eulx et que sy l’Empereur la
22
refuse, les estatz ou le forceront de la faire ou la feront avec les deux
23
couronnes sans luy. Ilz nous ont faict cette déclaration fort librement que
24
nous avons treuvé très bonne sans toutesfois nous explicquer à eux du party
25
que nous avons intention de prendre. Ilz ne paroissent pas moins bien
26
disposez sur les aultres difficultez plus importantes du traicté et ont
27
eux-mesme ouvert des expédiens assez raisonnables pour terminer les
28
différends qui concernent la religion où ilz ne paroissent pas si scrupuleux
29
que monsieur d’Avaux. Aussy vont-ilz plus au solide qu’à l’ostentation et il
30
y a subjet d’espérer que dans noz intérestz particuliers leur maistre sera
31
celluy que nous aurons le plus favorable affin d’estre assisté de la France à
32
conserver la dignité électoralle dans sa maison. A la vérité, pour les offres
33
cy-devant faictes par le confesseur ilz n’en parlent plus et je croy certaine-
34
ment que leur maistre ne fera jamais rien traicter en ce lieu de cette nature
35
puisque son intention estoit de faire un traicté fort secret et qu’il ne vouloit
36
pas que l’Empereur ny les Suédois en eussent cognoissance, ce qu’il ne croid
37
pas se pouvoir faire icy, c’est pourquoy ayant esté renvoyé il n’en fault plus
38
parler.

39
Les députez de Brandebourg sont aussy assez bien disposez et se portent
40
très bien en toutes les délibérations publicques, mais oultre que l’intérest de
41
la religion est le dominant dans leur esprit, l’espérance du mariage de leur
42
maistre avec la reyne de Suède leur faict considérer dans leur coeur les
43
Suédois plus que nous bien que nous n’ayons aulcun subjet de nous en
44
plaindre.

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