Acta Pacis Westphalicae II B 6 : Die französischen Korrespondenzen, Band 6: 1647 / Michael Rohrschneider unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und unter MIthilfe von Rita Bohlen
Entstehung und Inhalt der französisch-kaiserlichen Satisfaktionsartikel vom 13. Septem-
ber 1646 betreffend die Drei Bistümer. Rechtsstellung des Herzogs Karl IV. von Lothrin-
gen gegenüber Frankreich.
Il faut sans doute que les prétentions et anciens droitz de la couronne de France sur les
trois éveschez de Metz, Thoul et Verdun, et ce qui a esté cy-devant traicté et accordé sur
ce sujet n’ayt pas esté bien représenté à messieurs les estatz de l’Empire; au contraire il y a
sujet de croire que les choses leur ont esté déguisées par l’artiffice des ennemis de la
France qui tâchent en toutes occasions d’effacer de l’esprit desditz sieurs estatz le ressen-
timent que la gratitude leur doit donner des grandes assistances qu’ilz ont receues du roy
très-chrestien, et de tous les périlz, dommages, pertes et dépenses que Sa Majesté a souf-
fert pour avoir entrepris leur deffense, ou de la pluspart d’entr’eux.
Ce qui est de plus fascheux en cette occasion est qu’on veut engager lesditz sieurs estatz à
impreuver ce qui a esté fait par messieurs les plénipotentiaires de l’Empereur, et de cette
sorte engager ceux que Sa Majesté Très-Chrestienne a tousjours tenus pour amys à des-
truire ou empescher ce qui a esté treuvé juste par ceux mesmes qui ont porté jusqu’à
présent la qualité d’ennemis de Sa Majesté.
Il y a deux choses à considérer en cette affaire, le faict et le droit, c’est-à-dire, ce qui a esté
traicté avec lesditz sieurs plénipotentiaires impériaux et les raisons dont la couronne de
France appuioit ses justes prétentions avant qu’avoir convenu avec eux de
Pour le fait, il ne faut que lire les articles qui furent arrestez le 13 septembre de l’année
dernière pour estre contrainct d’avouer que tous les droitz qui ont cy-devant appartenu à
l’Empereur et à l’Empire sur lesditz Trois-Eveschez appartiennent aujourd’uy au roy
très-chrestien, et qu’on ne peut faire aucune difficulté qui soit bien fondée sur la préten-
tion de Sa Majesté sans contrevenir ausditz articles et destruire leur véritable sens, ce
qu’on ne peut croire estre l’intention de ceux qui en sont convenus. La qualité et mérite
des personnes avec lesquelz on a traicté, et l’opinion que chacun doit avoir de leur sincé-
rité et bonne foy ne permet pas de coire qu’ilz ayent voulu user en traittant avec ceux de
France d’aucune ambiguïté captieuse, moins encor d’aucune sorte de tromperie, ny par
conséquent qu’ilz veuillent aujourd’uy révoquer par des subtilitez les poinctz dont cy-
devant ilz sont demeurez d’accord, ny se servir du ministère d’autruy pour rendre leur
promesse sans effect.
Lesditz articles portent en termes exprès «quod supremum dominium, iura superioritatis
aliaque omnia in episcopatus Metensem, Tullensem et Virodunensem urbesque cognomi-
nes horumque episcopatuum districtus et nominatim Moyenvicum eo modo quo hactenus
ad Romanum spectabant Imperium, imposterum ad coronam Galliae spectare debeant»
On peut conclurre démonstrativement de ces parolles que la couronne de France est sub-
rogée en la place et aux droitz de l’Empire dans toute l’estendue tant spirituelle que tem-
porelle de ces Trois-Eveschez qui dit «aliaque omnia» après avoir exprimé «supremum
dominium» et «iura superioritatis» ne réserve rien. L’on peut donc soustenir avec raison
que l’Empereur ny l’Empire n’ont pas eu intention de rien conserver dans toute l’estendue
des éveschez, et ceux qui voudroient à présent excepter de cette cession généralle les fiefz
ou terres des ducs, comtes, barons, ou gentilshommes qui sont situées dans l’estendue
desditz éveschez feroient faire à l’Empereur un manquement de parolle et une action con-
traire à sa dignité, en luy faisant retirer d’une main ce qu’il a donné de l’autre.
Cela est si vray et il est sy constant que ç’a esté l’intention des parties lorsqu’elles sont
demeurées d’accord desditz articles que les plénipotentiaires de France ayans tousjours
constamment soustenus que les droitz de Sa Majesté Très-Chrestienne se devoient esten-
dre en tous les lieux, où s’estendoit la jurisdiction spirituelle des Trois-Eveschez, c’est-
à-dire dans tous les diocèses, lesditz sieurs plénipotentiaires de l’Empereur, qui ayant d’a-
bord quelque sentiment contraire, avoient mis dans le premier project présenté de leur part
à ceux de France «districtus temporales»
In der ksl. Verbalnote vom 11. September 1646 war hinsichtlich der Satisfaktionsbestim-
mungen für die Drei Bistümer vorgeschlagen worden, dem Wort districtus den Genitivus
possessivus temporalis dominii hinzuzufügen ( Repgen, Satisfaktionsartikel, 191 Anm. 86);
vgl. die auf den 11. oder 12. September 1646 zu datierende Marginalglosse in dem Vorakt
des frz. Textentwurfs vom 9. September 1646 mit späteren (bis 12. September 1646) Kor-
rekturen Serviens u.a. (s. APW II B 4 nr. 148, hier 425 Anm. 1; vgl. Repgen, Satisfak-
tionsartikel , 187 Anm. 67): ad verbum districtus addendum temporales ( AE , CP All. 66
fol. 412–419’, hier fol. 412’).
feudis ducum, comitum, baronum et nobilium, iure item clientelari»
Eine Schutzklausel für die von den Zessionsbestimmungen für die Drei Bistümer betroffe-
nen Rst. enthielt bereits die Ultima generalis declaratio der ksl. Ges. zur frz. Satisfaktion,
Münster 1646 August 31 (Text (lat.): Meiern III, 712 –718, hier 714); sie war entgegen
den ksl.-frz. Satisfaktionsartikeln vom 13. September 1646 von ksl. Seite u.a. in das IPM/
T (s. [nr. 1 Anm. 17] ) aufgenommen worden ( Repgen, Satisfaktionsartikel, 200).
longue contestation de part et d’autre consentirent que le mot «temporales» fust osté du
premier
générallement pour tous les droictz que Sa Majesté avoit eus in totos districtus tam spiri-
tuales quam temporales episcopatuum. Et toute l’exception qu’on avoit voulu faire en l’au-
tre endroit fust pareillement retranchée, lesditz sieurs plénipotentiaires impériaux ayant
reconnuz que les raisons de ceux de France estoient concluantes sur ce qui leur fust monstré
clairement que ce qui compose un évesché c’est proprement la jurisdiction spirituelle et non
point les revenus ou biens temporelz, qui non seulement ne peuvent passer que pour un
accident séparable de l’évesché, mais qui ayant esté inconnus à la primitive Eglise ne pou-
voient pas estre pris pour une partie nécessaire desditz éveschez.
Quand on a parlé de la jurisdiction spirituelle, ce n’est pas que le roy très-chrestien ayt
jamais eu intention d’en diminuer les prérogatives et privilèges ny de rien prétendre sur la
spiritualité, mais seulement pour désigner l’estendue desditz éveschez, qui à parler pro-
prement ne peut estre moindre que celle de la jurisdiction spirituelle, et ne peut avoir
d’autres limites que celles des diocèses sans qu’il soit besoing en façon du monde de con-
sidérer l’estendue des domaines ou biens temporelz des évesques.
Après avoir voulu limiter et restraindre ce qu’on a ceddé au roy très-chrestien auxditz
biens temporelz des évesques et avoir voulu excepter de la cession les fiefz des ducs,
comtes, barons etc. qui estoient auparavant immédiatement subjetz à l’Empire, on s’est
expressément départy de la limitation et exception, et on est demeuré dans la clause gé-
néralle qui a ceddé «suppremum [!] dominium, iura superioritatis aliaque omnia». On
peut donc soustenir comme il a desjà esté dit qu’il n’est pas possible aujourd’uy de faire
la mesme exception des estatz immédiatz ny la mesme restriction au temporel des éves-
ques sans contrevenir directement à ce qui a esté accordé.
Or il n’est pas croyable que les estatz de l’Empire estans bien informez de la vérité, veuill-
ent adhérer à une telle intention si esloignée de la sincérité germanique, et capable d’em-
pescher entièrement la conclusion de la paix.
Sy pour avancer le repos public on a fait en cette occasion quelque chose qui soit aucune-
ment contraire aux formes et constitutions anciennes de l’Empire, il en a esté usé de
mesme en plusieurs autres intérêtz où l’on a cru présentement devoir tourner le tableau
des loix pour un plus grand bien, et pour remettre les mesmes loix en vigueur par la paix,
faisant cesser le bruit des armes qui leur oste leur force et leur authorité. Sy l’on vouloit
regarder de sy prez à l’ancienne observation des constitutions impérialles en ce qui a esté
résolu touchant la Poméranie et le Meckelbourg, les archevesques de Magdebourg et de
Bremen, les éveschez d’Halberstad, de Minden et autres
Gemeint sind die entsprechenden Bestimmungen des ksl.-schwed. Satisfaktionsabkommens
vom 18. Februar 1647 (s. [nr. 22 Anm. 14] ).
Gemeint ist die Vereinbarung über die Errichtung einer neuen Kur für Pgf. Karl Ludwig
und die Übertragung der früheren pfälzischen Kurwürde auf Bayern; vgl. [nr. 16 Anm. 3] .
le Haut- et le Bas-Palatinat , et pour les nouveautez introduites en Bohême, et en plu-
sieurs autres endroitz que l’on prétend de faire subsister, il faudroit perdre toute espé-
rence d’accommodement. Et certes il est bien à craindre que ceux qui font remettre de
nouveau sur le tapis toutes ces questions et difficultez après qu’elles ont esté terminées
n’ayent plus d’envie de continuer la guerre que d’avancer la paix, ce que lesditz sieurs
estatz ont intérêtz d’empescher.
Car il faut considérer que sy l’on commence à soustenir que l’Empereur n’a peu ny deu
céder à la France les droitz qu’il avoit sur les estatz immédiatz scituez dans l’estendue
spirituelle des Trois-Eveschez, on pourra de mesme soustenir qu’il n’a pas peu céder son
droit sur le temporel des Trois-Eveschez, ny sur les trois villes impérialles
Metz, Toul und Verdun; vgl. [nr. 1 Anm. 24] .
aussy estatz immédiatz de l’Empire, n’y ayant pas plus d’apparence que l’Empereur ayt
peu disposer des intérêtz des uns que des autres, on appelleroit tousjours cella un démem-
brement de l’Empire pour rendre les François odieux.
On doit encor considérer que cette cession de l’Empereur de tous les droitz qu’il eust pu
prétendre dans toute l’estendue tant spirituelle que temporelle desditz
une des plus considérables parties de la satisfaction du roy très-chrestien dans le traicté de
paix sans laquelle Sa Majesté ne se fust pas engagée à donner trois millions de livres
Vgl. [nr. 8 Anm. 7] .
payer pour deux millions de debtes
princes d’une maison qui détient encor à la couronne de France des royaumes et des
Estatz entiers.
Pour faire veoir plus clairement que l’intention desditz sieurs plénipotentiaires impériaux
a esté telle qu’elle vient d’estre représentée, il ne faut que lire les plaintes injurieuses qui
ont esté faites de la part du duc Charles et de l’évesque de Verdun
l’Empereur et contre ses ministres qui l’avoient proposée. Il y a un endroit où après avoir
exprimé les biens et droitz qu’ilz disent posséder dans les Trois-Eveschez, ilz adjoustent
«quae omnia per hanc alienationem Galliae relinquerentur»
Vgl. die Repræsentatio ex parte Ducis Lotharingici, dict. 1646 Juli 18 (s. [nr. 1 Anm. 23] )
(Text: Meiern III, hier 576 , erster Absatz).
ment que ladite aliénation ayant esté faite depuis nonobstant lesdites plaintes et remons-
trances, les fiefz et droictz dudit duc, dudit évesque, et des autres estatz qui pouvoient
alléguer le mesme intérest qu’eux y ont esté compris par l’opinion mesme des plus pas-
sionnez ennemis de la France.
Les ministres de France offrent de justiffier par leur registres et les dépesches qu’ilz ont
faites à la cour de France en ce temps-là, et les originaux des responses qu’ilz en ont
receues
venus des articles du 13 e septembre
Vgl. dagegen die Marginalien der frz. Ges. in der an den frz. Hof übersandten Kopie der
ksl.-frz. Satisfaktionsartikel vom 13. September 1646 über die Verhandlungsposition der
Ksl. hinsichtlich der Zessionsbestimmungen für die Drei Bistümer (Kopie: Ass.Nat. 276
fol. 154–162’, hier fol. 154’; vgl. APW II B 4 nr. 159 Beilage 1, mit Nachweis weiterer
handschriftlicher Überlieferungen; Druck (it. ÜS): Siri VIII, 239–253, hier 240f).
leur maistre la facilité qu’ilz ont apportée à rendre les villes forestières et le Brisgau, et à
payer une si notable somme d’argent en se chargeant d’une si grande quantité de debtes
par l’avantage d’avoir appaisé pour jamais les différendz des Trois-Eveschez, en acquérant
à Sa Majesté tous les droitz que l’Empereur et l’Empire y pouvoient avoir. On verroit
bien clairement qu’ilz ne s’attandoient pas alors qu’on y deût faire des limitations ou des
exceptions, et certes après ce qu’ilz ont ingénuement contribué pour composer tous les
différendz qui retardent la conclusion du traicté de l’Empire, ilz n’eussent jamais cru
qu’on leur deût former de nouvelles difficultez sur une affaire ajustée. Ilz croioient au
contraire que l’on loueroit la modération du Roy leur maistre de n’avoir rien prétendu
de nouveau après le succez de la campagne passée quoyqu’ilz eussent réservé la liberté de
le pouvoir faire.
Mais quand tout ce que dessus n’auroit pas esté accordé et que l’on ne pourroit pas allé-
guer contre ceux qui
transactae
pereur a abandonné, mais une vieille prétention prescripte et abolie par le temps, et capa-
ble d’engager l’Empire dans une guerre immortelle. Il y a prez d’un siècle entier que la
couronne de France est en paisible possession du droit de protection dans tout l’évesché
de Metz, plus de trois cens ans qu’elle a jouy du mesme droit dans celluy de Thoul, dont
l’on pourroit faire veoir les actes, et un temps immémorial qu’elle est aussy en possession
de celuy de Verdun. Le droit de protection a esté paisiblement exercé avec toute sorte
d’avantage et marque de supériorité, et l’on peut dire que la possession en a esté paisible
puisque les prétentions contraires que les empereurs ont pu avoir n’ont pas empesché
qu’ilz n’ayent vescu depuis prez d’un siècle comme il a esté dit en paix et amitié avec les
roys de France. Les articles qui ont esté accordez n’ont fait que changer l’ancien droit de
protection en celluy de souveraineté et de supériorité, quoyqu’en la forme que celuy de
protection avoit esté longuement exercé par les roys de France il ne fust pas beaucoup
différend de l’autre. Cette convention a esté faite pour rendre la paix de l’Empire durable,
et éviter à l’advenir tous subjetz de différendz entre la couronne de France et l’Empereur.
Ce ne seroit pas un bon chemin pour parvenir à la paix ny un moien propre pour appaiser
les nouveaux différens qui ont causé la prise des armes dans l’Empire, de réveiller les
anciens et faire revivre de vieilles prétentions abolies par un usage contraire. Cette pensée
donner〈oit〉 un juste sujet de deffiance à tous les voysins qui possèdent aujourd’uy des
Estatz sur lesquelz l’Empire a eu droit autreffois. La pluspart des autheurs depuis longues
années n’ont plus compté ces Trois-Eveschez dans le nombre des estatz de l’Empire, et les
ont mis dans la dépendence de la France, qui y a tousjours envoyé des gouverneurs et
officiers sans que l’Empire s’y soit opposé ny en ayt fait plainte. Il n’y a pas donc sujet de
se remuer ny de prendre intérest en ce qui a esté fait pour ce regard, comme on pourroit
faire en d’autres lieux qui seroient encores aujourd’uy sans contredit des dépendences de
l’Empire. La première nouveauté qui a esté entreprise contre les droitz de la France a esté
faite par le duc Charles, quand pour exciter des divisions entre l’Empire et la France affin
d’en proffiter, il se servit du nom de l’Empereur pour faire fortiffier Moyenvic
esté l’une des causes des troubles présens.
Pour
de la supériorité de l’Empereur en celle de la couronne de France:
Premièrement l’on ne prétend pas comme quelques-uns d’eux l’ont cru que cette supério-
rité soit acquise au Roy en conséquence des fiefz que lesditz estatz possèdent dépendans
et relevans des Trois-Eveschez. On sçait bien que la qualité de vassal est différente de celle
de subject, et que dans l’Allemagne l’une n’attire point l’autre. On ne pense point de la
part de la France à establir de nouvelles formes dans l’Empire ny à changer les anciennes,
mais on soustient avec raison que l’Empereur ayant cédé au Roy «supremum dominium,
iura superioritatis aliaque omnia» que l’Empire pouvoit avoir sur lesditz estatz immé-
diatz, en conséquence de cette cession ilz doivent estre désormais sous la supériorité de
la couronne de France et non plus sous celle de l’Empereur, attandu que cette cession n’a
esté faicte que pour coupper chemin à toutes sortes de différendz à cause du droit de
protection qui appartenoit desjà à la couronne de France en toute l’estendue desditz
Trois-Eveschez.
2) Lesditz estatz n’ont pas plus de droit de l’empescher que les trois évesques et les trois
villes qui estoient autreffois (à ce que l’on dit) estatz immédiatz de l’Empire aussy bien
qu’eux.
3) Sy les électeurs et autres grandz princes de l’Empire ont contribué volontairement de
leurs Estatz, et se sont accommodez au temps présent pour establir le repos dans leur
patrie, lesditz estatz qui se rencontrent dans l’estendue desditz éveschez ne doivent pas
avoir regret au changement qu’ilz y souffrent pour un sy grand bien.
4) Veu mesme qu’ilz n’en recevront aucun préjudice réel et qu’ilz demeureront estatz
immédiatz soubz l’authorité et supériorité de la couronne de France, comme ilz l’estoient
autreffois sous celle de l’Empereur, sans qu’on ayt intention d’apporter aucun change-
ment ez leurs qualitez, prérogatives, dignitez, exemptions et privilèges, dont ilz jouiront
paisiblement soubz l’obéissance du roy de France, et avec espérence d’en recevoir plustost
des grâces à l’avantage de leurs maisons qu’aucune sorte de préjudice.
Quant au duc Charles de Lorraine pour les intérêtz duquelz on fait plus de bruit, c’est là
où il se doit rencontrer moins de difficulté. Entre les tiltres et droitz que le roy très-chres-
tien a contre luy il y en a quatre principaux qui sont indubitables.
Le premier est tiré de la protection qui appartient de longue main à la France sur les
Trois-Eveschez contre laquelle les ducs de Lorraine ayans fait en divers temps plusieurs
entreprises et usurpations en quoy ilz ont esté souvent favorisez par le crédit et authorité
que les princes de leur maison ont eu dans les affaires de France, il y a eu tousjours de très
grandz différendz entre la France et eux pour ce sujet, où lesditz ducs ayans persisté en
leurs usurpations, les troubles du royaume et quelques autres considérations ont empes-
ché le roy très-chrétien de se faire faire raison jusqu’à présent.
Le second est fondé sur la conqueste qui a esté faite de tous les Estatz dudit duc par une
juste guerre, où il a tousjours esté l’aggresseur après mesme avoir violé les divers traictez
qui ont esté faictz avec luy.
Le troisième est tiré du dernier traicté solemnellement fait à Paris
Gemeint ist der Vertrag von Paris vom 29. März 1641 (s. [nr. 1 Anm. 21] ).
s’estant rendu volontairement et sans y estre convié pour obtenir par cette franchise et
par ce respect rendu au feu roy Louys XIII la restitution de ses Estatz, elle luy fust
libérallement accordée à condition qu’il demeureuroit ferme à l’ad[v]enir dans le party
de Sa Majesté. Qu’il renonceroit à toutes autres alliances, et que s’il contrevenoit à sa
promesse pour la 4 e fois comme il avoit desjà fait par trois autres
remettre entre les mains du Roy tous les Estatz et places qui luy devroient estre rendues,
et consentoit qu’ilz demeurassent pour jamais unis à la couronne de France. Cette pro-
messe fust faite et jurée publiquement sur les saintz évangiles, non seulement à la veue
de toute la cour de France , mais encor une seconde fois à Bar-le-Duc
solemnitez lorsque ledit duc eust esté restabli dans ses Estatz dont les actes sont publics
et peuvent estre monstrez à ceux à qui il resteroit quelque doubte, en suite de quoy ledit
duc tesmoigna hautement par ses discours et plusieurs de ses lettres qu’il estoit très
obligé au Roy, et demeuroit très satisfait des grâces qu’il avoit receues de Sa Majesté. Il
n’y auroit jamais de seureté dans les affaires du monde, sy on pouvoit aujourd’uy révo-
quer en doubte l’exécution de ce traicté qui acquiert si légitimement au Roy tous les
Estatz dudit duc, veu mesme qu’il a fallu supporter des dépenses excessives et recevoir
des préjudices extrêmes dans d’autres desseins pour reprendre par les armes les places
qui luy avoient esté rendues, ce qui donne à Sa Majesté le second droit d’une juste
conqueste sur lesditz Estatz.
Le
pas acquis par les armes et par les raisons touchées cy-dessus la propriété des Estatz dudit
duc, il ne pourroit pas disputer au Roy la supériorité et souveraineté sur les terres et pays
qui relèvent des Trois-Eveschez, et qui sont situez dans leurs diocèses, puisque ledit duc
ne désadvoue pas que la supériorité et souveraineté sur lesditz terres et pays n’ayt cy-de-
vant appartenu à l’Empereur, qui en a faict cession au Roy par les articles du 13 septem-
bre, ainsy qu’il a esté preuvé cy-devant. Ledit duc ne peut pas estre recevable à empescher
l’effect de ladite cession, puisque ceux mesmes desquelz il relève comme vassal (principa-
lement l’évesque de Metz) ne s’y opposent pas et n’ont pas droit de le faire.
On objecte trois choses en faveur dudit duc:
Il est estat de l’Empire comme marquis de Nomeny
sans qu’il y soit compris.
2) Par la transaction faitte à Nur〈em〉berg en l’année
dre les ducs de Lorraine.
3) Estant vassal pour raison des terres qu’il possède dans les Trois-Eveschez, il n’est pas
juste de l’abandonner, ayant esté comme il dit tousjours très fidelle à l’Empereur.
Mais il est aisé de respondre à ces trois objections. Sur la première, on ne refuse pas de
comprendre ledit duc dans la paix, pourveu qu’il désarme, et qu’en exécution du traicté
par luy fait à Paris, il renonce à toutes ses prétentions sur les Estatz que le Roy possède à
présent, qui ne vallent pas les immenses dépenses qu’il a fallu faire pour les reprendre tant
de diverses fois avec les armes, mais il n’y auroit point de justice dans le monde, ou pour
le moins on pourroit dire qu’elle ne règneroit pas dans l’Empire, sy un prince pour estre
estat de l’Empire avoit la liberté de provoquer par les armes et par diverses injures un roy
son voisin, et sy ayant eu du pire en ses entreprises, et faict plusieurs traictez qu’il a vio-
lez, il estoit dispensé de les exécuter pour ce qu’il est estat de l’Empire. On ne sçauroit
monstrer que 〈par un〉 semblable
toute la chrestienté a tant de besoin.
On pourroit se contenter de dire sur la seconde objection que la prétendue transaction de
Nuremberg 〈fait en〉 1542 n’a jamais esté observée de la part dudit duc ny de la part de
l’Empire non plus que celle de Bourgogne du 1548 au préjudice de laquelle l’Empire n’a
jamais voulu s’intéresser dans les guerres des Pays-Bas. Mais quand il la faudroit exécuter,
l’intention des parties n’a pas esté en faisant cette transaction que par ce moien il fust
permis aux ducs de Lorraine de troubler et inquietter impunément leurs voysins, on n’a
entendu que de les deffendre, en cas qu’ilz fussent attaquez injustement et sans cause, ce
qu’on ne peut pas dire avoir esté fait de la part de la France, qui s’est tousjours très vo-
lontiers accordée amiablement avec ledit sieur duc toutes les fois qu’il s’est voulu mettre à
la raison.
S’il n’eust point reffusé de rendre l’hommage qu’il doit à la couronne de France comme
duc de Bar
pire n’avoient aucune sorte d’intérêtz, jamais on n’eust exercé d’hostilitez contre luy. On
eust continué de le traitter en amy et en voysin comme on avoit tousjours fait, veu mesme
que le différend de Moyenvich qu’il avoit excité à mauvaise intention (et comme on le
veut croire sans l’ordre ny le sceu de l’Empereur) avoit esté terminé avant le premier
traicté qui fust fait avec ledit duc
esté remise entre les mains de Sa Majesté selon la raison et la justice.
Mais supposé que l’Empereur fust intéressé dans toutes les entreprises que ledit duc a
faites contre la France (ce qui n’est pas) sy l’on veut bien examiner sa conduite envers
l’Empereur, on trouvera que cette fidélité que les siens exaggèrent sy fort n’a pas esté à
l’espreuve des moindres petitz avantages qu’il a peu rencontrer en s’accommodant avec le
feu roy. Les quatre traictez
Gemeint sind die frz.-lothringischen Verträge von Vic vom 6. Januar 1632 (s. Anm. 53),
von Liverdun vom 26. Juni 1632 (Text (frz.): DuMont VI.1, 39f; d’ Haussonville I,
382–385), von Nancy vom 6. September 1633 (Text (frz.): DuMont VI.1, 54f; d’ Haus-
sonville I, 406–409) und von Paris vom 29. März 1641 (s. [nr. 1 Anm. 21] ).
qui ne porte une renonciation formelle à l’amitié et à toutes les alliances de la maison
d’Austriche. Peut-estre dira-t-on que ledit duc avoit oublié en le faisant que l’Empereur
estoit de cette maison. On demande donc sy après les avoir faictz, il n’y a pas eu autant
d’infidélité de les rompre qu’il y en avoit eu de les faire contre son serment et son devoir
qu’il ne faudroit pas alléguer maintenant
sujet très légitime à l’Empereur de l’abandonner puisqu’il a renoncé à son amitié et à son
alliance? Seroit-il juste que pour authoriser un manquement de parolle et la rupture de
plusieurs traictez, on retardast la paix de toute l’Europe? S’il faut que quelqu’un souffre
pour le public, ne vaut-il pas mieux que ce soit un vassal qui a manqué à son devoir, qui a
fait des traictez particulliers quand par sa propre confession il estoit obligé de faire la
guerre pour son souverain? A[-t]-il raison aprez cella de prétendre qu’on rompe un traicté
général, et qu’on immortalise la guerre pour l’amour de luy? Il y a bien peu d’apparence
qu’une assemblée sy renommée, par la sincérité et par la bonne foy comme celle des estatz
de l’Empire, puisse prendre une telle résolution qui seroit contraire à la justice, et qui
l’engageroit à authoriser un manquement de foy et à soustenir un parjure, au mespris de
tout ce qu’il y a de plus sainct et inviolable parmy les hommes sans que l’on en pust
espérer autre fruit que la continuation de la guerre.