Acta Pacis Westphalicae II B 6 : Die französischen Korrespondenzen, Band 6: 1647 / Michael Rohrschneider unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und unter MIthilfe von Rita Bohlen
Je serois très malheureux si Son Eminence avoit creu que j’aye jusqu’à
présent retardé par mes advis ou autrement en quelque façon que ce soit
l’avancement de la paix de l’Empyre. J’ay bien creu luy devoir expliquer
mes sentimentz avec la liberté qu’il luy a pleu de me donner pour satis-
faire à mon devoir et décharger ma conscience envers elle. Mais je vous
suplie d’estre asseuré qu’au lieu de souhaiter que mes opinions soient sui-
vies j’ayme beaucoup mieux travailler à l’exéquution de celles d’autruy,
parce qu’au moins je ne puis jamais recevoir aucun reproche si l’événe-
ment n’est pas favorable, mais je 〈crois〉 à plus forte raison avoir resenti-
ment envers ceux qui ont pouvoir de me comender et ausquels je dois
toute sorte de respect et d’obéissance.
Mon advis a tousjours esté de faire s’il est possible les deux paix ensemble
tant pour le bien de la crestienté que pour les rendre plus durable l’une et
l’autre. Il me semble qu’il a aussy esté auctorisé par celluy de Son Emi-
nence. Si l’on ne peut pas ajuster tant de différends ressorts pour les faire
jouer en mesme temps, j’avois estimé qu’il eust esté moins præjudiciable
de comencer par la paix d’Espagne. Principalement si celle de l’Empyre
est reculée par les trop grandes prætentions ou puissances des protestantz
et des Suédois parce qu’ayant recogneu que leur plus grande apréhension
est que les affaires ne s’acommodent entre les deux couronnes avant la
conclusion des leurs, j’ay jugé ce moyen plus honeste et plus efficace
pour les ramener à la raison que d’estre contraint de retourner aux mena-
ces ou de manquer à l’alliance. Peut-estre ce conseil ne seroit pas bon si
les difficultez viennent des Impériaux (comm’elles font à présent) et que
leurs affaires soient dans quelque prospérité, parce que les assistances que
l’Empereur espéreroit de recevoir des Espagnols quand ils seroient déli-
vrés de la guerre de France le rend〈ront〉 encor plus haut et plus difficile.
Je n’ay jamais esté d’advis pour cela que si celle d’Espagne tiroit en trop
de longueur, il ne fallust pas conclure celle de l’Empyre. J’ay bien creu
〈que〉 la guerre de l’Empyre ne nous estoit pas si désavantageuse tant
que l’autre dureroit, qu’il fallust y achepter 〈la paix〉 par des conditions
præjudiciables 〈et〉 céder aux chicaneries très déraisonables que les Im-
périaux nous font aujourd’huy sur des points de très grande importance
comme sont ceux du duc Charles et des Trois-Eveschez où il semble
qu’ilz veullent mettre en compromis non seulement ce qui a esté acordé,
mais les anciens droits de la couronne sur lesditz éveschez. J’ay encor creu
pour la raison que j’ay quelquefois pris l’hardiesse de repræsenter
progrès et les conquestes contre l’Espagne ne seront pas si faciles à faire
quand elle poura estre assistée aux Pays-Bas et en Italie des forces de
l’Empereur que tandis qu’il est occupé dans l’Allemagne par les armes
des Suédois et des protestants parce que présentement il faut moins de
renfort pour estre en estat de deffense qu’il n’en faut pour se mettre en
estat d’attaquer avec heureux succès et en second lieu parce que les assis-
tances que nous pourrions tirer de noz alliez d’Allemagne, præsupposé
mesme qu’on puisse avoir au service du Roy toutes les troupes des Sué-
dois et de Madame la Lantgrave, nous cousteroient sans compa〈raison〉
plus dans les Pays-Bas et dans l’Italie où il faudroit payer reiglément
qu’elles ne font à présent dans l’Allemagne où elles subsistent en partie
par les contributions qu’elles tirent du pays et où l’armée du Roy comen-
dée par monsieur de Turenne pourroit faire la mesme chose maintenant
que nous avons une grande estendue de quartiers si nous estions aussy
œconomes que les étrangères et qu’on ostast un peu à nos principaux of-
ficiers de guerre et gouverneurs des places l’opinion qu’ils semblent avoir
que la guerre ne se fait que pour leur utilité particulière.
J’avois encor estimé que s’il faut parer la diversion de Messieurs les Estats
dont nous sommes à la veille et dont la seule espérance a desjà rendu les
Espagnols plus glorieux et plus difficiles, il sera beaucoup plus aisé de les
réduire à la raison en continuant de presser vigoureusement l’Empereur
duquel ils ont tant d’intérêt d’empescher la ruyne, qu’en faisant tous les
efforts contre l’Espagne seulle qui ne peuvent aboutir qu’à prendre une
place ou deux en toute une année, præsupposé mesme qu’on soit favorisé
de la fortune, au lieu qu’on peut faire en Allemagne des choses généralles
et décisions où il s’agit de divers royaumes tout à la fois et mesme de
l’Empyre.
Si les Impériaux nous tiennent parolle et demeurent de bonne foy dans
l’observance des choses acordées, je serois bien marry d’avoir eu la pensée
de différer un moment la paix de l’Empyre, mais encor qu’on se soit laissé
entendre qu’on prendra des tempéremments raisonables sur les difficultés
qui s’estoient præsentées touchant l’assistance que l’Empereur veut don-
ner aux Espagnols comme archiduc, nous ne sommes point encor asseu-
rez qu’on abandonne le duc Charles ny qu’on nous laisse les Trois-Eves-
chez entiers, pas mesme les droits qu’on a tousjours prætendus en France
sur les terres possédées par la maison de Lorraine qui relèvent desdits
éveschez, qui est un point de grande considération et sur lequel on nous
fait aujourd’huy plus de difficulté.
Il y a très grand subjet de croire que les subtilitez qu’on cherche pour
anéantir les articles qui furent acordez le 13 septembre de l’année derniè-
re
Gemeint sind die ksl.-frz. Satisfaktionsartikel vom 13. September 1646 (s. [nr. 1 Anm. 17] ).
la résolution que les Espagnolz les ont forcé de prendre de n’avancer pas
le traité de l’Empyre et d’y continuer la guerre.
Cela est estrange que le prince de toute l’Allemagne qui a le plus d’inté-
rest à la prompte conclusion du traité de l’Empyre et qui en effet le sou-
haite le plus est certainement celluy qui le recule aujourd’huy par la con-
duite qu’il tient. Si monsieur de Bavière avoit observé religieusement et
constemment le traité d’Ulm et qu’il n’eust point donné d’espérance aux
Impériaux de rompre la neutralité pour se rejoindre à eux, ilz n’auroient
jamais ozé penser à tous les vastes desseins qu’ilz forment à l’instigation
des Espagnolz et seroient demeurés syncèrement de tous costez dans
〈l’observation〉 des choses acordées.
Il ne se faut point tromper, ce ne sont pas maintenant les Suédois qui se
reculent de la paix ou il faut qu’ilz m’ayent bien trompé par tous leurs
discours et leurs actions, ou ilz la désirent pour le moins autant que
nous jusques là que je n’ay pas voulu faire esclater la bonne disposition
où je les ay treuvez en mon voyage d’Osnabruc, de peur que les Impé-
riaux selon leur bonne coustume ne s’adressassent aussytost à eux pour leur
donner leur compte en particulier à condition d’abandonner la France et
que peut-estre ilz ne les y treuvassent disposez dans la peyne où ilz sont
de voir leur armée sy engagée. Il ne leur reste plus rien que le point de
leur milice pour laquelle ils m’ont avoué que leur demande est excessive,
mais que quand on traitera avec eux sur ce subjet, ils fairont voir qu’ef-
fectivement ilz veullent sortir d’affaires, qu’il ne faut pas s’effaroucher des
demandes ny rompre pour cela une négotiation si avancée.
Il n’y a point de doute que les Impériaux la retardent aujourd’huy visible-
ment. Monsieur Contarini en est demeuré d’accord avec moy et a receu
de bons advis de la cour impériale qui portent qu’on y songe beaucoup
plus à la guerre qu’à la paix et que Trautmensdorf mesme qui estoit si
pacifique en ce pays est devenu tout militaire. Depuis son retour auprès
de son maistre il n’a point encor fait sçavoir les intentions de l’Empereur
sur les difficultés qui restoient lorsqu’il partit d’icy et les ministres de
deçà déclarent de ne pouvoir traiter jusqu’à ce qu’ilz les ayent receues.
Cependant les estatz catholiques en leurs délibérations sur les griefz révo-
quent tout ce qui avoit esté acordé par Trautmensdorf et rebrouillent
mesme tout ce qui avoit esté résolu pour la satisfaction des couronnes et
des autres princes qu’il a fallu dédomager.
Tout cela se fait par les menées de l’évesque d’Osnabruc, qui tasche par
toutes voyes de rompre un acomodement
Gemeint sind wahrscheinlich die erzielten Vereinbarungen bezüglich der Hst.e Osnabrück
und Minden (s. [nr. 8 Anm. 10] und [nr. 158 Anm. 3] ).
selon son désir et ne considère pas que pour son intérest particulier il met
ceux de toute sa maison en très grand péril. On ne sçait pas au vray s’il
fait tout cela pour monstrer que Trausmensdorf s’est trop avancé. Quel-
ques-uns ont cette opinion, d’autres que les Impériaux mesmes le font
remuer soubs main, mais tous croyent sans hésiter que cet évesque agist
de concert avec les Espagnolz et qu’ils luy ont donné quelque somme
d’argent
par un zèle indiscret de 〈r〉eligion quoyqu’elle reçoive plus de præjudice
en six mois de guerre qu’elle n’eust peu faire par quelques articles qui
avoient esté acordés aux protestants pour restablir la paix. Ce qui est de
fascheux est que la principale raison dont ils se servent est que si on
acorde aux protestants ce qui leur a esté offert, on n’est plus excusable
par la nécessité puisqu’on a maintenant avantage sur eux, que la France
n’a plus de forces dans l’Empyre et qu’il est aisé de les détruire si mon-
sieur de Bavière veut faire ce qu’il peut dans une conjuncture sy favorable,
à quoy ilz essayent d’intéresser sa conscience aussy bien que celle de
l’Empereur pour la continuation de la guerre par le moyen des Jésuites
qui sont leurs confesseurs.
Cependant le parti contraire prend de nouveaux ombrages, la confiance et
l’amitié qu’on avoit establies avec grande peyne entre les deux partis se va
détruisant, la ligue catholique qu’on veut former dont l’évesque d’Osna-
bruc espère d’estre un des principaux dir〈ecteurs〉 ne produira autre fruit
dans l’Empyre qu’une ligue protestante, et l’assemblage de ces deux con-
traires sera plus propre à engendrer de nouveaux troubles qu’un favorable
repoz.
J’en reviens là que l’unique remède est entre les mains de monsieur de
Bavière et que s’il veut agir avec sa prudence ordinaire sans se laisser
éblouyr aux illusions qu’on luy præsente, il faira faire la paix de l’Empyre
dans trois sepmaines 〈en〉 parlant seulement comm’il faut à l’Empereur
pour le détourner des conseils violents que les Espagnols 〈luy〉 donnent
pour 〈la〉 continuation de la guerre et en demeurant ferme dans l’obser-
vation des traités qui ont esté faits avec luy
Gemeint ist sicherlich der Ulmer Waffenstillstand vom 14. März 1647 (s. [nr. 7 Anm. 14] ).
luy rendre l’exéquution favorable par les places qu’on laisse entre ses
mains qu’il seroit obligé de rendre.
Entre autres choses s’il veut parler et agir comm’il faut, il peut faire cesser
les difficultez que les Impériaux font sur les principaux pointz de la satis-
faction du Roy et aussy empescher qu’on ne recherche sans cesse
comm’on fait les Suédois et protestantz pour les obliger à se séparer de
la France, puisqu’un traité particulier avec eux n’establiroit pas la paix
dans l’Empyre et ne seroit avantageux ny à la religion ny à la maison de
Bavière, qui doit tousjours se prometre un puissant appuy de la France.
Ce procédé des Impériaux plein d’aversion contre la France est ce qui
nous a tousjours osté les moyens de nous employer vivement comme
nous eussions peu faire pour faire contenter noz alliez de la raison, parce
qu’aussytost que nous avons eu la moindre contestation avec eux pour
cela, on s’est servi du mescontentement que nous leur avons donné, pour
les détacher de nous.
Monsieur de Bavière ne peut pas refuser d’agir fortement sur ces deux
pointz puisqu’en l’un la religion y est intéressée et en l’autre sa gratitude
qui ne luy permet pas de laisser 〈les〉 intérestz de la France en arière
après qu’ell’a si puissement travaillé 〈pour〉 mettre les siens à couvert
selon son désir, mais s’il se laisse attirer ny par l’espérance de pouvoir
demeurer en paix avec la France en recomençant les hostilités contre la
Suède et les autres alliez, ny par les vaines propositions de restablir la
ligue catholique dont on luy offre la direction, ny par les passions de
l’évesque d’Osnabruc, qui dispose entièrement de monsieur l’électeur de
Coloigne et luy déguise les affaires comm’il luy plaist, ny par les persua-
sions des Jésuites qui le veullent engager à la ruyne des Suédois, il remetra
certainement toutes les affaires de l’Empyre en confusion et celles de sa
maison en très grande incertitude.
La méthode qu’il faut tenir selon mon foyble advis envers luy et ses mi-
nistres est de se plaindre hautement à eux du manquement des Impériaux,
demander son entremise pour faire cesser les difficultés qu’on nous fait et
déclarer nettement que hors le point de l’assistance où nous conviendrons
des tempéremmentz raisonables, nous ne relascherons jamais rien de tous
les autres qui nous ont esté acordés et ne souffrirons point les interpréta-
tions captieuses qu’on y veut aporter pour les anéantir.
Je vous envoye un mémoire que j’ay dressé sur ce subjet où vous verrez
les principales raisons dont on se peut servir pour appuyer la prætention
du Roy touchant les Trois-Eveschez et les terres de Lorraine, mais il im-
porte d’en parler fortement aux ministres étrangers et leur oster toute es-
pérance de relaschement parce qu’il n’y en a pas un qui ne souhaitast dans
son âme que le Roy n’eust du tout rien dans l’Empyre et qui ne favorisast
le moindre petit prince d’Allemagne au præjudice de Sa Majesté, mais il
n’y en a pas un aussy qui ne croye et ne déclare enfin qu’il vaut mieux
acorder à Sa Majesté ce qu’elle prætend que de continuer la guerre pour
ce subjet.
Il ne seroit pas aussy hors de propoz de se plaindre à monsieur de Bavière
de la conduite de l’évesque d’Osnabruc, qui se rend exéquute[u]r dans
l’assemblée de toutes les passions des Espagnolz et de cette sorte consi-
dère bien peu les inclinations et intérests de la maison dont il est sorti, si
toutefois il a subjet de croire que les inclinations de ladite maison soient
pour la France.
On pourroit néantmoins à mon sens prendre divers tempéraments sur ce
qui concerne les Trois-Eveschez, le premier d’exempter de nostre præten-
tion ce qui relève desdits éveschez qui se treuve situé dans le Lucsem-
bourg et apartient au roy d’Espagne, mais il faudra sçavoir auparavant
en quoy cela consiste et réserver s’il est possible l’ancien droit de protec-
tion que la couronne y avoit avant ces troubles, en cas qu’ell’en ayt autre-
fois jouy, car il seroit fascheux de le diminuer dans un traité qui nous doit
estre avantageux.
Le second tempérament pourroit estre d’offrir que le Roy consentira que
ce qui doit demeurer à Sa Majesté par là par traité qui a autrefois relevé de
l’Empyre tant en Lorraine, Alsace qu’aux Trois-Eveschez demeure mem-
bre de l’Empyre sans en relever comm’il fust fait pour le cercle de Bour-
goigne par la transaction de l’année 1548
Gemeint ist der am 26. Juni 1548 in Augsburg geschlossene sog. Burgundische Vertrag
(Text (dt.): Gross, Urkunden, nr. 445, 439–447), in dem die burgundischen und ndl. Be-
sitzungen Ks. Karls V. als Burgundischer Reichskreis dem Schutz des Reiches unterstellt
wurden; dafür zahlten sie als Reichssteuer den doppelten, im Falle eines Türkenkrieges
den dreifachen Anschlag eines Kf.en. Sie unterstanden nicht der Jurisdiktion des RKG
und waren nicht verpflichtet, an Reichsversammlungen teilzunehmen.
l’Empyre sans en relever quoyqu’il en dépendist auparavant.
Le troisième pourroit estre d’offrir une contribution pour la nécessité de
l’Empyre pareille à celle d’un électeur comm’il a esté fait aussy pour le
cercle de Bourgoigne par ladite transaction de l’année 1548 et pour toutes
les dépendances de la Lorraine par la transaction de l’année 1542
Gemeint ist die sog. Transactio Lotharingica, der Nürnberger Vertrag vom 26. August 1542
(Text (lat.): DuMont IV.2, 235–238) zwischen Kg. Ferdinand I. (1503–1564; 1531 Kg.,
1558 Ks.) im Namen Ks. Karls V. und Hg. Anton II. von Lothringen (1489–1544; 1508
Hg.), in dem das Hgt. Lothringen als Teil des Oberrheinischen Reichskreises in den Schutz
des Reiches aufgenommen wurde; dafür zahlte es als Reichssteuer zwei Drittel des An-
schlags eines Kf.en. Ferner wurde festgelegt, daß das Hgt. kein Reichslehen war, das heim-
fallen konnte, und daß die Zuständigkeit des RKG in lothringischen Rechtsangelegenheiten
aufgehoben war.
mettra l’Empyre hors d’intérest parce qu’on se chargera des mesmes con-
tributions et plus grandes que tous ce[s] pays ne payoient auparavant, qui
néantmoins ne sont point considérables pour une si grande acquisition.
Mais il faudroit que ce fust à condition que les députez qui seroient en-
voyez de la part du Roy pour lesdits terres auroient à l’avenir séance et
voix délibérative dans les diètes et que les contributions ne pourroient
estre ordonnées que de leur consentement après y avoir esté deuement
apellé.
Tout ce que je crains est que dans le peu de disposition que les Impériaux
témoignent pour l’avancement de la paix, les simples offices de monsieur
de Bavière, quand mesme il les employero〈it〉 syncèrement, ne soient pas
si puissan〈s〉 que les persuasions contraires des Espagnolz, car l’Empe-
reur ne veut rien faire qui leur déplaise. Monsieur de Bavière ne veut
s’obliger à rien contre l’Empereur et allègue son serment pour s’en exempter
si bien que les Espagnols demeureront les maistres de tous les intérests de
l’Empyre pour y faire la paix ou la guerre comm’il leur plaira et monsieur
de Bavière doit bien estre asseuré que si leurs desseins et leurs maximes
réussissoient dans l’Allemagne, il seroit le premier qui en recevroit du
præjudice. D’ailleurs il est à propoz qu’il soit adverti que s’il se déclaroit
aujourd’huy contre les Suédois outre que par la rupture d’un traité qui
vient d’estre fait avec luy, qui a garenti ses Estats d’une ruyne asseurée,
il détruiroit pour jamais la confiance que l’on pouroit prendre en luy, il ne
fairoit par cette déclaration que rappeller l’armée du Roy dans l’Alle-
magne et nous oste le moyen de l’employer contre les Espagnolz pour
les réduire à la paix, à laquelle toute l’assemblée confesse aujourd’huy
que nous sommes aussy véritablement enclins que les Espagnols par un
aveuglement fatal s’en reculent.
Il est bien à propos que l’on sçache aussy que le nonce Chigy a eu grande
part aux desseins qui ont esté formés pour rétablir la ligue catholique et
par ce moyen empescher la conclusion du traité de l’Empyre, en quoy
certes nous recevons un præjudice notable, que le premier des Médiateurs
en certaines choses demeure plus ennemy et passionné que les parties
mesme et qu’il ne considère pas qu’un zèle rempli d’indiscrétion est capa-
ble de rendre les maux de l’Allemagne sans remède et d’y ruyner la reli-
gion catholique, comm’un semblable procédé d’un autre ministre
Sainteté vient de la ruyner en Irlande pour avoir empesché l’effet d’un
accord
Gemeint ist sicherlich der Friedensvertrag von Dublin vom 25. März 1646 (Text (frz. ÜS):
DuMont VI.1, 335–340; datiert 1646 März 6 und 28), der zwischen Vertretern der auf-
ständischen irischen Katholiken einerseits und James Butler, 12. earl und (ab 1661) 1. duke
of Ormonde (1610–1688), einem aus Irland stammenden Diplomaten, Militär und Roya-
listen, für den engl. Kg. Karl I. andererseits ausgehandelt, dessen Umsetzung jedoch in der
Folgezeit auf Betreiben Rinuccinis verhindert worden war ( Hynes, 36–146).
testantz.
Il me semble de recognoistre qu’on souhaiteroit bien à la cour n’estre plus
obligé d’avoir une puissante armée en Allemagne. Mais Son Eminence me
permetra de luy repræsenter que quand le traité général seroit au-
jourd’huy conclud tant avec l’Empereur qu’avec l’Espagne, nous aurions
plus besoin de forces de ce costé-là qu’en aucun autre endroit. L’exéquu-
tion du traité y sera longue et douteuse quelques præcautions qu’on y
aporte, à cause des restitutions des places, des liscentiementz des armées
et autres choses semblables. D’ailleurs quand tout seroit exéquuté de
bonne foy, l’on a tousjours veu en Allemagne après les grandes guerres
que des princes particuliers ont ramassé les soldats liscentiés qui n’ont
autre mestier que la guerre et en ont composé des armées qui les ont ren-
dus formidables. Le comte de Mansfeld
Gf. Ernst II. von Mansfeld (um 1580–1626); seit 1610 in Diensten der Union stehend,
hatte er mit seinen Söldnertruppen nach Ausbruch des böhmischen Aufstandes 1618 auf
seiten Kf. Friedrichs V. von der Pfalz gekämpft. Im Februar 1619 wurde die Reichsacht
gegen ihn verkündet; daraufhin trat er als Condottiere in den Dienst der Gst., Frk.s und F.
Béthlen Gábors von Siebenbürgen (1580–1629; 1613 F.) ( DBA I 801, 223ff; 275–285; II
851, 434–440; Heinisch, Mansfeld).
temps, et un marquis Albert de Brandebourg
Mgf. Albrecht Alkibiades von Bg.-Kulmbach (1522–1557); er hatte seit 1543 in ksl. Dien-
sten gestanden, war dann jedoch als Parteigänger Kf. Moritz’ von Sachsen gegen Ks. Karl
V. aufgetreten und hatte 1552 den Vertrag von Chambord vermittelt; im Anschluß hatte
er im sog. Markgräfler Krieg Franken sowie Mainzer und Trierer Stiftslande verwüstet,
woraufhin die Reichsacht über ihn verhängt wurde ( DBA I 13, 311–320; Guttenberg).
Quint
sourdement que c’est l’intention du duc Charles et que c’est à ce dessein
qu’il veut employer l’argent qu’il a en réserve, à quoy nous avons plus
d’intérest de prendre garde que personne. C’est pourquoy il nous importe
extrêmement si nous voulions jouir de l’effet de la paix lorsqu’elle sera
conclue d’avoir des forces considérables dans la frontière d’Allemagne
pour nous garentir des entreprises dudit duc aussy bien que sur la mer
pour estre en estat d’assister le Portugal.
Vous aurez veu par noz dépesches præcédentes que s’estant rencontré
quelque difficulté sur la déclaration que les Médiateurs nous doivent don-
ner pour l’expliquation du 3 e article, il nous a fallu nécessairement con-
sentir pour n’interrompre pas toute la négotiation, de passer outre aux
autres articles, en attendant qu’on soit entièrement d’acord sur celluy-là.
Nous aprenons de bon lieu que Pigneran〈da〉 a intention de faire encor
des difficultés sur cet article jusqu’à la rupture quand il sera remis sur le
tapis et qu’il se promet de mettre les Hollandois contre nous quand il
〈n’y〉 aura plus que l’intérest du Portugal qui retarde〈ra〉 la paix. Je ne
sçay si Son Eminence jugera qu’on se puisse contenter de l’article comm’il
est sans aucune déclaration en cas qu’on n’en puisse pas convenir, ou de
rompre plustost le traité pour ce subjet et laisser conclurre celluy de Mes-
sieurs les Estat〈s〉 sans le nostre.
Si les bruits qui courent de la rupture de monsieur de Bavière contre les
Suédois est [!] véritable, nous serons doublement malheureux, car outre
que c’est un des plus grands præjudices qui pouroient arriver aux affai-
[res] d’Allemagne dans la conjuncture présente, la pluspart des protestantz
s’imagineront qu’il n’au〈ra〉 pas pris cette résolution que par le consen-
tement tacite de la France. Un des principaux et plus intelligents d’entre
eux m’a dit franchement aujourd’huy qu’il n’y aura personne qui ne
croye qu’il n’y ayt en cela de la connivence de la France. Je suplie très
humblement Son Eminence de ne treuver pas mauvais que je luy repræ-
sente que nous avons très grand besoin 〈d’e〉ffacer cette impression.
Nous avons beau désirer la paix dans l’Empyre, si nous ne sommes en
estat de contraindre l’Empereur à nous tenir parolle, nous ne l’aurons ja-
mais. Je croy mesme qu’il est inutile voire præjudiciable de parler de paix
lorsque nos ennemis n’en veullent point et ne songent plus qu’aux præ-
paratifs de la guerre. Je vous asseure que depuis sa naissance on n’a point
eu tant de besoin de travailler puissemment à relever noz affaires que
maintenant. Outre que nous serons mesprisés si nous sommes foybles,
noz alliés ne nous voyant pas en estat de les assister pourroient bien s’ac-
comoder sans nous, à quoy les Impériaux seront tousjours plus disposés
qu’à nous faire raison. Il me semble que comm’ils travaillent de leur costé
à faire de grands præparatifs, nous en devons autant faire du nostre pour
relever le courage presque abbatu de tous noz amys, et comm’ils pro-
posent des ligues nouvelles entre eux, nous devons aussy faire des réu-
nions nouvelles entre nos alliés et y attirer ceux qui voudront y entrer,
quand ce ne seroit que pour preuver que nous n’avons pas la pensée
d’abandonner le parti que nous avons tenu jusqu’à présent de peur d’en
estre abandonné nous-mesme[s].
Je fairois scrupule d’importuner si souvent Son Eminence de propositions
et raisonementz fascheux si je ne croyois absolument nécessaire de l’in-
former naïfvement de tout et à bonne heure affin qu’on ayt le temps d’y
pourvoir, et si avec cela je n’avois considéré deux choses, l’une qu’ayant
maintenant une grande estendue de pays 〈dans〉 l’Allemagne, il ne seroit
pas difficile d’y faire de nouvelles levées si noz chefs de guerre vouloient
user de la mesme œconomie que les ennemis et les Suédois, l’autre que
voyant la réputation et les affaires du Roy si hautement restablies partout
ailleurs et voyant partout que les soins incomparables de Son Eminence
produisent des effets qui surpassent les espérances tant en Italie qu’en
Flandres, je m’émancipe d’auta〈nt〉 plus voluntiers à repræsenter ce qui
pourroit estre fait en d’autres endroitz si chacun secondoit les peynes et
les prævoyances sans exemple de Son Eminence.
Je ne doubte point que monsieur de La Thuillerie n’ayt donné advis que
la Hollande est résolue d’entrer en conférence avec l’ambassadeur de Por-
tugal , mais que toutes les aultres provinces y résistent. Quelques-uns qui
ayment le service du Roy estiment qu’il seroit bien à propos que la Reyne
escrivist une lettre à Messieurs les Estatz pour seconder la province de
Hollande affin que l’on pust plus tost entrer en cette conférence.
Je ne sçay sy on a donné advis à la cour pendant que je n’estois pas icy
d’une poursuite que font avec instance dans les estatz de l’Empire les dix
villes de l’Alsace pour n’estre point soubz la protection [d]u Roy comme
elles estoient soubz celle de l’Empereur
Vgl. [nr. 89 Anm. 3] .
duicte par la ville de Colmar qui donne en cette rencontre le branle à
toutes les aultres. Il me semble que cela mérite bien que le gouverneur
Charles de Sainte-Maure, marquis, 1664 duc de Montausier (1610–1690), 1665 pair de
France; 1635 maître de camp, seit 1638 Gouverneur des Oberelsaß und von Colmar,
1643 maréchal de camp, 1649–1686 lieutenant général im Ober- und Unterelsaß, 1650
lieutenant général des armées du Roi, 1661 chevalier des ordres du Roi ( ABF I 753, 372–
387; II 473, 230f; Halter / Schmitt; Stein, 406 Anm. 94, 585; Levantal, 761ff).
de cette place prenne garde à luy, parce qu’il seroit à craindre que dans
une décadence d’affaire elle ne nous fist le mesme tour qu’elle fit aultres-
fois à la garnison impéria〈le〉 qui estoit dedans.
Je vous diray encor qu’une lettre de la Ro〈yne〉 fort pressante à Mes-
sieurs les Estatz en faveur du roy de Portugal pour les obliger à continuer
la conférence qui a esté commencée avec son ambassadeur, produir〈a〉 un
très bon effect, ledict ambassadeur se mettant de la part de son maître à
toute sorte de raison dont les Espagnolz commencent d’estre bien en
peine appréhen〈dant〉 extrêmement que ledict roy fasse son accommode-
ment avec lesdictz Estatz.
J’ay esté prié par le sieur d’Eudo
Contariny de vous faire souvenir de la promesse que Son Eminence a
faicte plusieurs fois à monsieur Nani de faire rendre quelques hardes qui
leur appart〈iennent〉 et qui furent prises l’année passée sur un vaisseau
hollandois dans lequel il se treuva quelques balotz pour le marquis de
Castelrodrigo. Il nous importe extrêmement de faire rendre ce qui apar-
tie〈nt〉 à monsieur Contarini et à ceux de sa maison ou pour le moins la
valeur qui ne monte qu’à trois ou quatre cent risdales.
Monsieur de Niderhost agist icy admirablement bien auprès des ministres
de l’assemblée pour leur faire prendre le chemin qu’il fault pour parvenir
à la paix. Certes c’est un digne gentilhomme à qui l’on a grandes obliga-
tions. Il a dict aujourd’huy à un des ministres d’Espagne nommé Noir-
mon
désiroit de porter les Provinces à quelque tempérament là-dessus, il n’y
avoit qu’à ajuster les affaires de la France auparavant après quoy les Pro-
vinces deviendroient plus faciles sur ce point.
Überlegungen Sannazaros zu einem schnellen Erwerb Cremonas für
Frankreich.
Je vous envoye une lettre que Promontorio escript à Son Eminence. Il
auroit intention d’estre envoyé résident en France. Il me semble qu’estant
affectionné et industrieux comme il est il seroit meilleur qu’il eust cet
employ qu’un autre, veu les habitudes qu’on a desjà avec luy, et l’on pou-
voit mesnager cela avec le sieur Justiniany
qu’une recommendation de Son Eminence produiroit aysément cest effet.
J’apprens de très bon lieu que les Espagnolz ne feront point de difficulté
sur les conquestes y comprenant mesme Piombino et Portolongone qui
est un grand point, et que la plus grande difficulté se rencontrera sur la
forme de l’assistance du Portugal
Die dem Datierungsvermerk AE , CP All. 103 fol. 467’ zu entnehmende Zugehörigkeit
des hier abgedruckten letzten Absatzes ( ebd. fol. 467) zu vorliegendem Memorandum ist
nicht gesichert. Weder findet sich eine inhaltliche Entsprechung in dem Antwortschreiben
Lionnes (s. nr. 201) noch, wie bei den anderen Konzeptteilen dieses Memorandums, am
Kopf von fol. 467 eine entsprechende Numerierung, die zur Kenntlichmachung der Rei-
henfolge der einzelnen Konzeptteile diente.