Acta Pacis Westphalicae II B 5,2 : Die französischen Korrespondenzen, Band 5, 2. Teil: 1647 / Guido Braun unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy und Achim Tröster, unter Mithilfe von Antje Oschmann am Register
284. Servien an Mazarin Den Haag 1647 Mai 21
Den Haag 1647 Mai 21
Ausfertigung: AE , CP Holl. 44 fol. 390–400 = Druckvorlage (von Alards Hand, wie das
Konzept, auf 1647 Mai 21 datiert, von anderer Hand am Kopf jedoch auf 1647 Mai 27 und
auch unter diesem Datum im Aktenzusammenhang eingeordnet; mit Empfängermarginalie).
Eigenhändiges Konzept: AE , CP Holl. 41 fol. 311–317’. Teildruck: van Prinsterer ,
220–227 (auf 1647 Mai 27 datiert).
Rückschlag in den Verhandlungen durch einen ärgerlichen Zwischenfall. Starke Meinungs-
verschiedenheiten zwischen Prinz Wilhelm II. von Oranien und seiner Mutter bezüglich der
Friedensfrage als bedeutendstes Hindernis für die Verhandlungen Serviens. Von den Gene-
ralstaaten unterbreiteter Vorschlag der Prinzessin von Oranien zur Entscheidung der bei den
Garantievertragsverhandlungen strittigen Punkte durch sie selbst; Gefahren sowohl der Ab-
lehnung als auch der Annahme dieses Vorschlages. Zustimmung Serviens dazu unter folgen-
den Bedingungen signalisiert: 1) vorab Festlegung der Form ihres Schiedsspruches durch Ser-
vien ; 2) gleichzeitige Übereinkunft mit den Generalstaaten über die zwischen Frankreich
und Spanien strittigen Fragen und deren Drohung mit Fortsetzung des Krieges, wenn die
Spanier den französisch-niederländischen Vorschlag nicht annehmen. Angekündigte Zustim-
mung der Prinzessin von Oranien für den folgenden Tag; ihre jedoch daraufhin erfolgte,
fälschliche Bekanntgabe der uneingeschränkten Annahme ihres Schiedsgerichts durch Ser-
vien ; Zustimmung der Generalstaaten. Dagegen Klarstellung der fehlenden Vollmacht Ser-
viens zur bedingungslosen Annahme des Schiedsgerichts und Wiederholung der beiden Be-
dingungen ; daraufhin hitziges Wortgefecht zwischen ihm und der Prinzessin von Oranien.
Trotz versöhnlichen Ausganges der Unterredung mit ihr nachfolgende öffentliche Verleum-
dung Serviens und der Franzosen; Rückgabe der von Servien ausgehändigten Schriftsätze
(Beilagen 1 und 2). Beschwerde Prinz Wilhelms II. von Oranien über die Geringschätzung
seiner Person durch die Franzosen; Audienz Serviens bei ihm; seine Befriedigung über das
Scheitern des Schiedsgerichtes seiner Mutter. Drei unterschiedliche Parteiungen in den Ver-
einigten Provinzen: 1) die offen agierende antifranzösische Partei; 2) die zahlenmäßig unter-
legene , sich zurückhaltende profranzösische Partei; 3) die Mittelpartei; hiervon Unterbin-
dung spanisch-niederländischer Separatverhandlungen zu erhoffen, nicht aber eine nieder-
ländische Beteiligung am Feldzug. Prinz Wilhelm II. gegen den Friedensschluß; sein irriger
Glaube an die französische Unterstützung seiner Pläne zur Fortsetzung des Krieges. Bindung
der Prinzessin von Oranien an die prospanische Partei; ihr Wunsch nach Vermeidung eines
offenen Gegensatzes zu Frankreich. Ungewisse Entwicklung in den Niederlanden. Erfolg
der friedenswilligen schwedischen Königin gegen Axel Oxenstierna begrüßenswert. Geschei-
terte Verratspläne in den Spanischen Niederlanden; Nachteile durch die Belagerung Armen-
tières ’; militärische Schwäche Frankreichs von Schaden für die profranzösische Partei in den
Niederlanden. Überzeugung verschiedener Niederländer von größeren Geldgeschenken Ser-
viens an ihre Landsleute ungünstig. Ursprünglich, bis zur Auseinandersetzung mit der Prin-
zessin von Oranien, positive Wirkung der von Mazarin bekundeten Friedensliebe. Kon-
ferenz Mazarins mit Castel-Rodrigo voraussichtlich nachteilig. Veröffentlichung des Rund-
briefes Serviens an die Provinzen auf Niederländisch. Von Holland öffentlich bekundete
Bereitschaft zum alleinigen Friedensschluß; ihr schädlicher Einfluß auf die übrigen Provin-
zen ; Reise Wilhelms II. von Oranien nach Geldern und Overijssel. Beruhigung der Nieder-
länder mit Blick auf die Vorfälle in Nantes; Abraten von weitergehenden Zugeständnissen
an sie. Gratifikation Muschs, Nederhorsts und Desloges’.
Lorsque je |:croyois les affaires en fort bon estat, et sur le poinct d’estre
terminées advantageusement, il est arrivé un fascheux accident qui les a
remises en confusion:|.
J’ay faict sçavoir il y a longtemps à Vostre Eminence que les |:divers sen-
timens de monsieur le prince d’Orange et de madame sa mère apporte-
roient de grandz et les principaux obstacles à la négotiation dont je suis
chargé:|. Ilz sont tousjours bien |:en apparence, mais leurs humeurs sont si
différentes et leurs desseings si contraires qu’autant que la mère souhaicte
ardemment la paix, à quelque prix que ce soit, autant le filz l’appréhende
et désire passionnément la continuation de la guerre. D’un costé, la mère
et ceux de son party opinent à se séparer de la France sur une faulse pré-
supposition que nous ne voulons point de paix. De l’autre, le filz et ses
dépendans traversent secrettement la conclusion de la garentye et tout ce
qui peut advancer le traicté général, jusques-là qu’il ne pût s’empescher de
me dire il y a deux jours qu’il ne sçavoit pas pourquoy je pressois tant sur
la conclusion de la garentye, puisque si elle estoit accordée, et qu’après
cela nous différassions tant soit peu de faire la paix avec l’Espagne, cet
Estat penseroit avoir droict de la faire sans nous, et une:| aultre fois lors-
que je |:luy persuadois de se disposer à la paix pour quelques années, il me
respondit en jurant que si cette république avoit faict la paix, elle seroit
perdue. Je m’estois bien tousjours apperceu de cette contrariété d’ inten-
tions , et de la jalousie secrette qui est entre la mère et le filz. Mais quoy-
que j’eusse mis souvent le filz sur ce discours, et que je luy eusse de fois à
autre communiqué tout ce que je traictois avec sa mère, il ne m’avoit ja-
mais fait cognoistre de le trouver mauvais, et, au contraire, m’avoit donné
sujet de croire qu’ilz conféroient ensemble de ce que je leur avois dict à
l’un et à l’autre, ce qui m’avoit tousjours obligé de demeurer dans une
grande retenue avec tous deux:|.
Il y a quelques jours qu’on me vint proposer de la part de Messieurs les
Estatz que pour terminer les diférens qui se rencontrent sur le traicté de
garentie, il fauldroit |:s’en remettre au jugement de madame la princesse
d’Orange. Je jugeay d’abord cette proposition d’autant plus dangereuse
que celuy qui l’avoit faicte m’advoua qu’elle venoit de madame la
princesse d’Orange mesme qui pour se rendre considérable aux deux par-
tys , souhaictoit extrêmement qu’on luy déférast cet honneur:|. Je priay
celuy qui m’en fist l’ouverture de me donner loysir d’y penser jusqu’au
lendemain affin d’en pouvoir communi〈quer〉 avec tous les aultres ser-
viteurs du Roy qui sont icy. Plus j’y eus faict de réflexion, plus je la treuvé
accompagnée d’inconvéniens. |:De refuser tout à faict l’arbitrage de cette
princesse qui le désiroit passionnément, je craignois que ce ne fust l’ offen-
ser , luy:| donner subjet de dire partout, comme |:elle a faict autresfois, que
nous ne voulons point de paix, et d’employer son crédit ouvertement con-
tre nous pour porter cet Estat, qui faisoit alors ses dernières délibérations
pour la négotiation de Munster, à traicter séparément avec l’Espagne; de
remettre aussi tous les intérestz du Roy à la discrétion d’une personne
suspecte, et apparemment intéressée dans le party des ennemis, sans en
avoir ordre ny permission de Leurs Majestez:|, je creus de |:ne le pouvoir
ny devoir faire qu’après y avoir apporté toutes les précautions possibles:|.
C’est pourquoy après avoir bien examiné toutes ces dificultez, je fis dire
|:à madame la princesse d’Orange, par celuy qui m’avoit parlé de l’affaire,
que je ne manquois pas de volonté de luy rendre cette déférence:|, mais
qu’un ministre qui a ses ordres limitez ne peult rien faire au-delà de son
pouvoir; que n’ayant point esté parlé jusqu’icy de convenir d’arbitres
pour ce diférend, je ne pouvois pas avoir charge d’y consentir; que néant-
moins , pour ne perdre point d’occasion d’avancer les affaires, |:s’il plaisoit
à madicte dame de:| s’accommoder au deffault de mon pouvoir, on pour-
roit tirer quelque proffit de l’ouverture qui m’avoit esté faicte, et que
pourveu que |:elle me promist de donner son jugement en la forme que
je luy dirois, qui contiendroit tout:| ce que mes instructions me permet-
tent de faire, |:je me hazarderois à luy en déférer le jugement, sur:| cette
asseurance qui me serviroit de descharge envers Leurs Majestez d’avoir
passé sy avant sans leur permission, et que sans cela je me rendrois coul-
pable et m’exposerois à la honte d’estre désavoué. Après avoir faict |: pré-
parer son esprit de cette sorte, je luy en allay parler moy-mesme, et la
trouvay disposée à accepter cette condition avec une autre que j’y ad-
joustay qu’en mesme temps:| on tomberoit d’accord icy avec Messieurs
les Estatz sur les diférens que nous avons avec l’Espagne, et qu’ilz s’ obli-
geroient de déclarer aux Espagnolz que s’ilz refusoient d’accorder ce qui
auroit esté treuvé icy raisonnable, cet Estat continueroit de leur faire la
guerre.
Cette seconde condition |:ne luy desplut pas, et je luy promis de:| luy
envoyer un escript pour l’instruire desdictz diférens que je luy fis porter
le jour mesme, et dont la copie sera cy-joincte. |:Elle me pria seulement
d’attendre jusqu’au lendemain de tirer d’elle la promesse que je luy avois
demandée, parce qu’elle la pourroit faire plus hardiment et plus utilement
après qu’elle se seroit asseurée des intentions des principaux de l’Estat:|.
A l’heure mesme, |:elle fit esclatter par toute cette cour que je luy avois
remis le jugement absolu de cette affaire, et envoya quérir:| les principaux
députez de la Hollande |:qui sont à sa dévotion, ausquelz n’ayant faict
sçavoir qu’une partye de:| ce que nous avions traicté, et ne les en ayant
entretenuz que superficiellement, |:pour luy plaire, ilz acceptèrent l’offre
comme si elle fust venue de ma part:|.
Le lendemain, |:m’ayant envoyé advertir qu’elle avoit de bonnes nouvelles à
me dire, je me rendis chez elle, où elle me débutoit d’abord avec beaucoup
de joye qu’elle estoit maistresse absolue de l’affaire, que Messieurs les
Estatz luy en avoient déféré le jugement sans aucune condition, quoyqu’elle
n’eust le consentement que de quelques députez de Holande, et qu’elle se
promettoit que:| je ne refuserois pas maintenant d’en faire aultant.
Je respondis que Messieurs les Estatz estoient souverains et maistres de
leurs intérestz, mais que j’estois un simple ministre qui ne pouvois rien
faire sans ordre; que |:je la suppliois de se souvenir des deux conditions
que je luy avois proposées le jour précédent et de la parolle qu’elle
m’avoit donnée, pour laquelle elle avoit seulement demandé le délay
d’un jour, et sans laquelle il n’estoit pas en mon pouvoir de rien faire.
Elle fit semblant de recevoir ma response comme une nouveauté, et d’en
estre picquée. Néantmoins elle fut obligée d’advouer que c’estoit un con-
cert pris entre nous, et se contenta de me demander:| à diverses reprises sy
j’avois de |:la deffiance d’elle et si j’avois peur qu’elle me trompast:|.
Je respondis que je prendrois de bon cœur |:confiance en sa promesse,
mais qu’il falloit donc qu’elle me la fist auparavant, à quoy elle répliqua
qu’elle s’engageroit à donner tout contentement à la France, et moy, je
repartis que ce n’estoit pas assez, que les paroles générales:| n’obligeoient
pas, qu’il falloit nécessairement convenir pour ma descharge des termes
|:du jugement qu’elle entendoit donner:|, et que c’ettoit l’ordinaire des
affaires de cette importance où l’on n’avoit pas accoustumé de traicter
les grands roys comme des playdeurs, ny de rien prononcer que de leur
consentement exprès ou tacite.
Là-dessus |:elle me dict: «Mais:| Messieurs les Estatz n’entendent point
traicter de la garentie qu’après que la paix sera faicte à Munster».
«Nous sommes bien prestz, luy dis-je, de convenir icy avec Messieurs les
Estatz des conditions de la paix qui doibt estre faicte à Munster, et cela
peult estre faict sy on le désire avant que convenir de la garentie, mais de
m’y renvoyer avant qu’avoir rien faict icy, et pour tout fruict d’un séjour
de cinq mois ne donner que |:la nomination d’un arbitre, ce seroit traicter
avec beaucoup de mespris l’ambassadeur d’un grand roy:|. Je voy |:donc,
Madame, adjoustay-je:|, que l’on faict difficulté aux deux conditions que
vous agréastes hyer, et sans lesquelles vous sçavez bien que je ne pouvois
pas accepter la proposition qui m’a esté faicte de vostre part».
|:Lorsqu’elle recognut que ces conditions:|, ausquelles peult-estre les Hol-
landois avoient tesmoigné de ne vouloir pas consentir, estoient capables
de |:la priver d’un honneur duquel elle s’estoit extrêmement flattée, et sans
doute estant aussi informée des difficultez que les autres provinces a-
voient faictes d’accepter:| cet expédient, plusieurs députez ayant dict haul-
tement dans l’assemblée qu’ilz ne vouloient pas estre |:gouvernez par une
femme:|, d’ailleurs n’ignorant pas les |:jalousies et les mescontentemens
que son filz avoit de son entreprise, dont ses créatures s’expliquoient li-
brement , disans que:| c’estoit le |:traicter d’inhabile et de petit garçon:|, et
peult-estre aussy ayant esté |:changée par ceux qui tiennent le party des
Espagnolz, elle s’emporta extrêmement contre moy, et voulut:| m’imputer
les difficultez qui retardoient l’affaire quoyqu’elles ne viennent pas de
moy, affin peult-estre qu’on |:ne remarquast pas le défault de son crédit
dans les provinces:|. Après |:m’avoir dict que je la traictois avec grand
mespris, elle adjousta cent choses désobligeantes dont une des moindres
fut:| qu’il paroissoit bien clairement que |:nous ne voulons point de paix;
qu’elle alloit faire sçavoir à tous ses amys que nous l’avions trompée et
eux aussi, et:| que ce n’estoit pas sans raison que |:chacun accusoit:| Vostre
Eminence |:et moy d’estre les seulz qui tiennent la chrestienté en trouble.
Je fus obligé de respondre qu’il n’y avoit point de gens de bien qui eussent
cette opinion:|; que pour moy, je n’estois qu’un ministre subalterne et ne
cherchois aultre gloire que d’exécuter fidellement les ordres de la Reyne
qui me faisoit l’honneur d’estre satisfaicte de mes services; que |:pour
Vostre Eminence, elle ne méritoit pas d’estre traictée de la sorte; que
c’estoit une mauvaise récompense:| des soins continuelz qu’elle prenoit
pour l’avancement de la paix, pour laquelle j’estois asseuré qu’il n’y avoit
personne dans l’Europe qui eust tant travaillé que Vostre Eminence, et
que |:je n’eusse pas attendu ces discours de la bouche d’une personne que:|
Vostre Eminence |:avoit tant tesmoigné d’honorer et de vouloir servir.
Tout cela n’empescha pas que la colère n’arrachast des larmes de ses
yeux:|, ce qui me fist juger que |:son desplaisir venoit sans doute d’ailleurs
que:| de ce qui s’estoit passé entre nous, |:qui ne méritoit pas un si grand
ressentiment:|. Je pris tous les soins imaginables pour |:ramener son esprit,
afin qu’elle ne fist pas tous les mauvais offices dont elle m’avoit menacé:|.
Je luy fis comprendre qu’il n’y avoit point eu de changemen〈t〉, ny en ma
conduicte, ny en mes discours, et que les difficulte〈z〉 qui se rencon-
troient ne venans pas de moy, il n’estoit pas juste de me les imputer.
|:Elle fit semblant d’estre appaisée, et nous nous séparasmes assez bien,
mais le jour mesme, elle fit publier par ses confidens que je l’avois trom-
pée , et qu’il ne falloit point se fier aux François:|.
Je ne laissay pas de luy envoyer le lendemain le second escript duquel
j’envoye copie, qu’elle me demanda pour faire aparoir de ce qu〈i〉 s’estoit
passé, mais ne l’ayant pas treuvé selon son gré, elle me le renvoya quelque
temps après avec celuy que je luy avois donné deux jours auparavant.
Cependant que ces choses se passoient |:avec la mère, le filz, auquel j’avois
faict sçavoir moy-mesme les premiers discours que j’avois eus avec elle,
sans qu’il m’eust tesmoigné de trouver mauvais qu’elle se meslast de cette
affaire, me fit entendre par un de ceux ausquelz il se fie le plus , qui m’en
advertit en faisant semblant de n’avoir pas charge de m’en parler de sa
part, qu’il estoit extraordinairement picqué que pour récompense de
s’estre attaché aux intérestz de la France, jusqu’à se brouiller avec la Ho-
lande , et à recevoir des affrontz d’elle, on le vouloit aujourd’huy désho-
norer , et le traicter d’homme de néant; que si on le considéroit si peu, il
abbandonneroit les affaires, et qu’on verroit bientost quel train elles pren-
droient quand il ne s’en mesleroit plus:|, estant certain que le traicté |: se-
roit desjà fait avec l’Espagne s’il ne l’avoit empesché:|.
Je luy envoyay demander audience à l’heure mesme, et après luy avoir
compté comme tout s’estoit passé, et l’avoir asseuré que j’avois |:ordre
de le satisfaire en toutes choses au préjudice de qui que ce fust, il parut
fort content de moy, et ne me fit point de plaintes formelles de sa mère.
Mais il tesmoigna beaucoup de joye de ce que cet arbitrage estoit rompu,
ce qui parut visiblement sur son visage:|.
Voylà, Monseigneur, les extrémitez où je me rencontre. Ceux qui dans
l’Estat sont déclarez contre nous agissent ouvertement pour parvenir à
leurs fins, et pour gaigner ceux qui sont d’oppinion contraire. |:Ceux qui
nous favorisent sont en petit nombre, et n’osent presque parler. Il y a un
3 e party de neutres:| qui croyent estre les vrayz patriotes, et ne penchant
ny d’un costé ny d’aultre, ilz tiennent nos amis pour suspectz et les aul-
tres pour passionnez ou corrompuz. Ilz inclinent à la paix, mais ilz la
veullent faire conjoinctement avec la France, |:et s’ilz demeurent les mais-
tres , comme il y a sujet de l’espérer, les affaires passeront assez bien.
Mais:| certes, ceux-là qui sont |:les moins dangereux déclarent nettement
qu’il ne fault plus espérer de campagne, et tout le bien qu’on peut atten-
dre d’eux c’est de ne nous faire pas le dernier mal que nous craignons, qui
est de traicter séparément avec l’Espagne.
Dans la famille de monsieur le prince d’Orange:|, Vostre Eminence a veu
par ce que j’ay eu l’honneur de luy escrire que |:il est directement con-
traire à la paix et qu’il remue tout ce qu’il peut pour l’empescher. Mais
comme il n’a pas encore beaucoup d’authorité ny toute l’addresse et l’ ap-
plication qu’il faudroit avoir pour surmonter les obstacles qui se rencon-
trent à son desseing, il se flatte de beaucoup d’espérances qui selon les
apparences ne peuvent pas réussir:|. A la vérité, |:il a autant de bonne vo-
lonté pour la France qu’on eust peu désirer, mais je croy bien qu’elle est
fondée sur l’opinion que:| nous sommes disposez à favoriser |:l’intention
qu’il a de continuer la guerre. Je luy ay pourtant déclaré franchement
que:| Leurs Majestez tendent sincèrement à la paix.
|:La mère est ouvertement engagée dans le party d’Espagne, néantmoins
elle ne voudroit pas avoir la France pour ennemye déclarée:|. C’est pour-
quoy |:en favorisant les Espagnolz, elle souhaicteroit bien, s’il estoit pos-
sible , de ne nous désobliger pas ouvertement. Elle faict agir secrettement
contre nous quand on ne s’addresse pas à elle, et est puissante pour nuire;
quand on passe par ses mains, elle exerce une tyrannie insupportable, et
s’imagine que nous sommes trop heureux d’achepter son indifférence,
ayant bien l’injustice de prétendre des récompenses parce qu’elle s’ ab-
stient d’une partye des maux qu’elle nous pourroit faire:|.
Ce récit est bien ennuyeux, mais j’ay cru le devoir faire à Vostre Emi-
nence pour l’informer au long et naifvement de tout ce qui s’est passé en
cette rencontre, qui luy apprendra l’estat des affaires et des humeurs d〈e〉
ce pays où il est impossible de traicter sur un fondemen〈t〉 certain à cause
des fréquens changemens qui y arivent et qu’il n’y a personne à qui les
aultres veullent déférer.
Les nouvelles de |:Osnabruk font voir que la reyne de Suède prend l’ au-
thorité qui luy est deue:|, sans quoy il eust esté à craindre que |:le chan-
celier Oxenstiern n’eust immortalisé la guerre:|. Une de ses créatures qui
est icy
il ne sçait pas encor que |:la reyne a assez de vigueur pour combattre et:|
surmonter les artifices de son maistre.
Quand je pressay le |:gouverneur de Grave:| de me dire toutes les par-
ticularitez de l’ouverture qu’il me fist, il me respondist que sa parolle
estoit engagée de ne le faire pas sy ce n’est que |:Messieurs les Estatz
missent leur armée en campagne:|. La pluspart des aultres |:entreprises
estoient aussi bastyes:| sur ce fondement. Je ne sçaurois exprimer à Vos-
tre Eminence combien |:le siège d’Armentière change la face de toutes
les affaires; quand:| je reproche à nos amis qu’ilz n’ont pas |:satisfaict à
toutes les espérances qu’ilz m’avoient données, ilz respondent que si
nous eussions paru en bonne posture dans les Pays-Bas, tout eust esté
facile par deçà, mais que nos contre-tenans sont devenus insolens depuis
qu’ilz ont veu les Espagnolz:| non seulement |:en estat de se deffendre,
mais d’attaquer de nos places:|. En effect, les |:bien intentionnez:| n’ a-
voient tasché jusqu’à présent de combattre les aultres que par l’ appréhen-
tion des |:progrez que nous pourrions faire sans eux, dont à présent ilz
se mocquent:|. Je sçay bien, Monseigneur, qu’on ne peult pas tout faire,
mais je suis obligé de rendre compte fidellement à Vostre Eminence de
ce que j’apprens.
Il n’est pas nécessaire d’envoyer des lettres du Roy ny aux provinces ny
aux particuliers, mais sy un aultre que moy eust esté icy, j’eusse pris la
liberté de conseiller Vostre Eminence d’y envoyer |:cent mil escus:|. Les
changemens arivez depuis que j’y suis ont faict croire qu’il y a bien |:eu de
plus grandes distributions faictes, et cette opinion sans effect nous a faict
grand préjudice, parce que chacun croid que son compagnon a eu son
compte et en a jalousie:|. Vostre Eminence verra par une lettre sans nom
qui m’a esté envoyée, ensuite de plusieurs aultres de pareil styl, quel est le
sentiment de ceux du pays; car on croid qu’elle vient d’un des principaux
qui se plaint sans doubte de n’avoir pas eu part aux libéralitez qu’il pense
qu’on avoit faictes à d’aultres.
L’asseurance que Vostre Eminence m’avoit donnée en termes si exprès
par sa lettre du 3 e de vouloir la paix avoit produict un merveilleux effect,
avant cette dernière |:équippée de madame la princesse d’Orange, que je
tascheray de faire revenir.
Ces gens-cy ne mériteroient pas par leur mauvaise conduicte que:| Vostre
Eminence |:eust tant de respect pour eux:| comme elle en tesmoigne sur le
subjet du |:marquis de Castel-Rodrigo:|, mais puisqu’elle m’ordonne de
luy en dire mon sentiment, |:je craindrois que dans l’humeur où ilz sont
de chercher des prétextes pour nous faire du mal, ilz ne fussent bien aises
de fonder sur cette conférence la résolution qu’ilz pourroient prendre de
traicter sans nous:|.
Je n’ay pas manqué de faire imprimer en flaman la lettre que j’ay escripte
aux provinces , croyant que cela pourroit servir, et j’ay praticqué le
mesme pour toutes les aultres pièces que j’ay esté obligé de faire publier.
L’on ne sçauroit s’imaginer la hardiesse et l’obstination de la province de
Hollande qui a déclaré librement dans l’assemblée que quand elle seroit
seule à faire la paix, elle en prendroit la résolution plustost que celle de
continuer la guerre conjoinctement avec toutes les aultres; estant tous-
jours icy en corps, elle agit avec tant d’impétuosit〈é〉 que par crainte,
par induction, ou par d’aultres sortes de persuasions, elle esbranle toutes
les résolutions des aultres provinces qui estoient contraires à la sienne.
Monsieur le prince d’Orange part dans deux jours pour aller |:raffermir:|
celles de Gueldres et d’Overissel.
Personne de l’Estat n’ignore la bonne justice que Vostre Eminence a faict
faire de ce qui est arivé à Nantes , quoyque nos ennemis ayent pris grand
soin de faire esclatter le mal, et d’estouffer les remèdes qu’on a ordonnez.
Je voy les espritz entièrement calmez et satisfaictz sur cette affaire, mais
pour les aultres grâces qu’ilz prétendent, je suplie très humblement Vostre
Eminence |:de les faire surseoir, car certes ilz n’en sont pas dignes. Ilz
s’imaginent aisément que tout ce qu’on leur accorde ne procède que d’ ap-
préhension , et les biensfaictz receus ne font aucune impression parmy
eux:|.
Quant |:au greffier Mus, si on pouvoit s’asseurer de sa fidélité, c’est le plus
habile homme de l’Estat et le plus capable de servir. Il a esté picqué de ce
qu’on luy a manqué de promesse l’année passée:|. Il ne fault pas s’estonner
sy |:la France a peu de partisans en ce pays puisque elle n’y a pas un seul
pensionnaire:|. Il vaudroit beaucoup mieux |:donner aux particuliers qu’à
l’Estat. Cent mil livres distribuez à propos en gratiffications feroient plus
d’effect sans comparaison que quinze cens mille de subside:|.
Je tascheray sans rien engager de descouvrir les sentimens de monsieur de
|:Niderhost et Desloges pour ce que l’on pourra faire pour eux. Peu de
chose contentera le dernier. Et pour l’autre, il est certain qu’il a tout mérité
et que si les affaires se redressent icy, on luy en aura toute l’obligation:|.
3 Anonymer Brief an Servien (frz.), Amsterdam 1647 Mai 16. Kopie (wahrscheinlich An-
lage ): AE , CP Holl. 44 fol. 338. – Ausfertigung, nicht unterfertigt: AE , CP Holl. 41
fol. 286.