Acta Pacis Westphalicae II B 3,1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 3, 1. Teil: 1645 - 1646 / Elke Jarnut und Rita Bohlen unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy, mit einer Einleitung und einem Anhang von Franz Bosbach
132. Longueville, d’Avaux und Servien an Königin Anna Münster 1646 Februar 24
Münster 1646 Februar 24
Ausfertigung: Ass. Nat. 275 fol. 97–105 = Druckvorlage; Eingang in Paris nach Dorsal fol.
106’: 1646 März 3; überbracht durch Coiffier. Duplikat für Mazarin: AE , CP All. 59 fol.
288–292. Kopien: AE , CP All. 63 fol. 429–433’; AE , CP All. 75 fol. 293–295’. Druck: Mém.
et Nég. I S. 288–296; Nég. secr. III S. 82–84; Gärtner VIII S. 326–335.
Angebot der Spanier, die Königin solle den Schiedsspruch zwischen beiden Kronen fällen. Vorbe-
halte der Franzosen: Einbeziehung der Alliierten und Führung der Verhandlung in Münster.
Mitteilung des Angebots an die Gesandten der Generalstaaten. Deren besorgte Reaktion und
Bitte um Benachrichtigung von der Antwort der Königin. Entsendung von Pauw und Knuyt
nach Den Haag.
Nous faisons cette dépesche à Vostre Majesté pour luy donner un advis bien
différent de tout ce qui est contenu en nos précédentes. Jusqu’icy, Madame,
nous n’avons eu suject de faire sçavoir que les divers moyens dont les pléni-
potentiaires d’Espagne se sont servis pour faire des traictez particuliers avec
nos alliez et les obliger à nous abandonner, pour retarder et quasy faire cesser
toutte sorte de négotiation avec nous. Maintenant ils ont comme passé d’une
extrémité à l’autre, nous ayans faict dire par messieurs les médiateurs que le
roy d’Espagne, touché des maux dont la chrestienté est affligée et voulant
autant qu’il luy sera possible prévenir ceux que l’invasion du Turc peut cau-
ser , déclare qu’il a tant de confiance en la vertu, prudence et équité de Vostre
Majesté qu’il la prie de faire ouverture des moyens par lesquels elle croit que
la paix peut estre establie entre la France et l’Espagne, offrant d’accepter les
conditions que Vostre Majesté jugera raisonnables par l’advis de Son Altesse
Royale, de Monsieur le Prince, de monsieur le cardinal Mazarin et de mes-
sieurs les autres ministres de l’Estat. Lesdicts sieurs plénipotentiaires d’ Espa-
gne ont ajousté que le désir et l’intention du roy leur maistre n’est pas d’ en-
gager par ceste offre vostre Majesté à faire une nouvelle proposition de paix
de la part de la France, mais de la rendre médiatrice entre le Roy et luy,
présupposant que Vostre Majesté en procurant l’avantage du roy son filz,
aura aussy l’esgard convenable à la maison dont elle est sortie, et que moyen-
nant cela ils ont ordre et pouvoir de signer la résolution qui sera ainsy prise
par Vostre Majesté.
Les médiateurs n’ont pas manqué de faire valoir ceste démonstration d’ hon-
neur et d’estime qui est rendue à Vostre Majesté par le roy d’Espagne, ils l’ont
mesme appellée une humble déférence, et nous ont faict cognoistre que leurs
offices et leurs instances n’ont pas peu contribué à faire prendre ceste résolu-
tion en Espagne, quoyqu’ils n’en eussent pas attendu un sy grand effect, y
ayans seulement faict plainte de la froideur et retenue du comte de Penne-
randa et de ses collègues. Ilz nous ont requis d’en rendre compte à Vostre
Majesté par un courrier exprez, ce que nous n’avons pas peu refuser tant pour
faire paroistre le gré qu’on leur sçait d’un procédé sy respectueux envers Vos-
tre Majesté que pour en sçavoir plutost ses intentions.
Nous avons tesmoigné auxdictz sieurs médiateurs que nous estions bien aises
de voir le chemin ouvert à la conclusion d’une bonne paix, ne doutans point
qu’une offre sy civile ne fût accompagnée de sincérité. Après quelques autres
complimens, nous leur avons faict entendre qu’afin qu’il y eût moins de retar-
dement à la perfection d’un sy bon œuvre nous estions obligez de leur dire
deux choses: l’une qu’on ne peut rien faire sans les alliez, et que pour cet
effect nous communiquerions leur proposition aux ambassadeurs de Mes-
sieurs les Estatz; l’autre, que pour la considération des mesmes alliez le traicté
ne peut estre conclu qu’en ce lieu où ils sont tous assemblez. Ilz respondirent
que pour ce qui touche Messieurs les Estatz les plénipotentiaires d’Espagne
ne leur en avoient point parlé; qu’ils croyoient bien que leur intention n’estoit
pas de traicter séparément, mais qu’ils les verroient dès le lendemain pour
nous en pouvoir informer plus particulièrement; comme aussy sur le second
poinct touchant le lieu où la paix se doit traicter, ne faisans nul doute que ce
ne deût estre tousjours à Munster.
Comme on se leva, nous dismes à ces messieurs que nous ne manquions pas
d’estimer comme on doit ceste offre et l’avance que faict un sy grand roy,
mais que nous leur demandions en confiance sy ce n’estoit point un simple
compliment suject à leur interprétation, puisque par la réserve qu’ilz ont
faicte ils pourroient dire que Vostre Majesté quelque résolution qu’elle prît
n’a pas eu l’esgard convenable à la maison dont elle est sortie. Monsieur
Contariny tesmoigna que ceste question ne leur estoit pas désagréable, et que
ceste parole contenue en l’offre des Espagnolz: «con la convenientia della casa
donde è ussita» leur avoit faict naistre quelque doute dans l’esprit; qu’ils s’en
esclairciroient en traictant les autres choses cy-dessus déduites et nous en ren-
droient raison.
Ilz dirent entr’autres choses, que ceste résolution avoit esté prise à Madrit il y
a longtemps et que dès le 2 e janvier le secrétaire d’Estat Coloma en avoit
donné part au nonce et à l’ambassadeur de Venise qui leur en firent aussytost
une dépesche, laquelle leur fut rendue par l’ordinaire plusieurs jours avant
que les plénipotentiaires d’Espagne eussent receu la leur par un exprez, d’ au-
tant qu’il ne partit que le 15 e du mesme mois. Ilz adjoustèrent que cela les
avoit mis en grande peine, croyans que Penaranda leur celoit les ordres qu’il
avoit receus. Et que les Espagnols ont tellement cognu que la paix ne se peut
traicter ailleurs qu’à Munster qu’ils ont addressé ceste proposition aux média-
teurs sans en avoir donné advis au nonce ny à l’ambassadeur de Venise qui
sont en France.
Le lendemain matin sans tarder davantage nous avons esté communiquer aux
ambassadeurs de Messieurs les Estatz ce qui nous avoit esté proposé, et ce que
nous avons respondu. Ilz n’attendoient rien moins qu’une telle nouvelle |:et
parurent un peu surpris de voir les choses si avancées en un moment. Toutes-
fois les depputtez de Holande en tesmoignèrent apparamment quelque satif-
faction , mais nous remarquâmes que celluy de Zélande en fust tout à faict
mortiffié, comme s’il eust creu desjà le traicté conclud entre la France et l’ Es-
pagne :|. Ilz se retirèrent ensuite dans une autre chambre pour conférer en-
semble et après y avoir demeuré près de demie heure ils nous revinrent trou-
ver et commencèrent par un grand remerciement de la bonne et prompte
communication que nous leur avions donnée, nous requérans soigneusement
de |:n’avancer point nostre traicté que conjoinctement avec le leur:|. Ils nous
dirent que comme |:les Espagnolz avoient essayé de traicter avec eulx à La
Haye, cecy tendoit à transporter la négotiation à Paris et que ce seroit les
renvoyer à La Haye:|. Nous les satisfismes entièrement sur ces deux poinctz
en leur raportant comme prévenant leurs pensées nous avions déclaré aux
médiateurs |:avoir ordre de ne rien faire sans Messieurs les Estatz et que l’ in-
tention de Vostre Majesté n’est point de tirer la négotiation hors du lieu où
sont les alliez. L’appréhention:| qu’ilz ont tesmoignée, nous faict bien cog-
noistre que les |:précautions:| dont nous avions usé à la première conférence
avec les médiateurs |:avoient esté nécessaires:|, veu mesmes que sy monsieur
Contariny leur en parle il ne peut que leur rendre tesmoignage de la vérité. Et
sur ce que nous les avions conviez de nous donner leurs bons advis sur la
proposition qui nous a esté faicte, ils s’en excusèrent civilement.
L’après-disnée du mesme jour les médiateurs nous vinrent trouver pour nous
dire, qu’ayans reveu le comte de Penaranda et ses collègues ilz leur avoient
déclaré n’avoir eu aucune intention de |:séparer par cette offre le traicté de
France d’avec celluy des Provinces-Unies ny de le tirer hors d’icy:| et leur
avoient confirmé mesmes par serment que l’ouverture qu’ilz ont faicte par
ordre du roy d’Espagne n’est point un compliment, mais un moyen propre
pour parvenir à la paix par une vraye et solide négotiation; qu’à la vérité ce
n’estoit pas un compromis qu’ilz passoient pour soubzcrire à yeux cloz à tout
ce que Vostre Majesté pourroit résoudre, et que sy c’eût esté leur intention, ils
n’auroient eu qu’à accepter l’offre que nous leur avons faicte il y a longtemps
de faire la paix en laissant les choses en l’estat qu’elles sont. En cet endroict les
médiateurs insinuèrent en passant, qu’en cas que ceste offre fût présentement
acceptée nous ne pourrions pas prétendre de retenir les conquestes qui ont esté
faictes depuis; mais nous les fismes souvenir d’avoir tousjours déclaré que cela
se devoit entendre pour le temps auquel le traicté seroit faict. Tant y a que les
médiateurs disent avoir recognu dans l’entretien des plenipotentiaires d’ Espa-
gne que le roy leur maistre en rendant ce respect à Vostre Majesté a cru rendre
aussy sa condition meilleure et qu’on ne se tiendroit pas précisément à la
première proposition qui leur a esté faicte de nostre part, veu mesmes qu’à la
cour on a souvent dict que tandis qu’ilz demanderoient qu’on restituât tout, on
leur respondroit qu’on veut tout retenir, par où ils conclurent qu’aujourd’huy
qu’ilz sont prests de céder quelque chose, la France doit aussy se relascher de
son costé; et quoyque les médiateurs assurassent qu’ilz en pouvoient produire
plusieurs lettres, nous repartismes que celles que nous avons receues de la cour
ne parlent pas en ces termes, et que nous n’avons à nous régler que par les
ordres de Vostre Majesté qui ne portent rien de semblable.
Quand nous avons considéré entre nous, Madame, tout ce qui s’est passé sur
ceste affaire aux deux conférences que nous avons eues avec les médiateurs, il
nous est venu en pensée que les ministres d’Espagne nous ayans trouvé sy
fermes et sy constans en nostre première proposition sans que tous les soins
qu’ilz ont pris depuis dix-huict mois pour nous faire peur d’un traicté parti-
culier avec les alliez, ou pour nous faire relascher par d’autres moyens, nous
ayent pu faire changer de langage, ils se sont advisez de remettre le tout au
jugement de Vostre Majesté pour en sortir par une voye plus honorable, |: es-
pérant que cette defférence leur vaudra quelque chose ou que leur réputation
sera moins engagée de recevoir de la main de Vostre Majesté les conditions
qu’ilz ont reffusées de nous:|.
Quoyque nous eussions donné advis aux ambassadeurs de Messieurs les Es-
tatz de ce qui s’estoit passé en ceste seconde conférence avec les médiateurs,
ilz demandèrent à nous voir derechef, et en leur audience ils nous prièrent de
leur |:comuniquer la response que nous pourrons recevoir de Vostre Majesté
et de ne pas passer outre, d’autant que leur négotiation est arrestée:|, les Es-
pagnols n’ayans pas encor un pouvoir suffisant pour traicter avec eux. Ce qui
|:leur fust promis et qu’on n’agiroit que de concert avec eux suivant les obli-
gations mutuelles:|. Ilz parlèrent encor du lieu |:où se doit faire le traicté:| et
tesmoignèrent avoir crainte que Vostre Majesté ayant à donner les conditions
de la paix |:touttes choses se traictassent à Paris:|; on leur répéta qu’ilz de-
voient |:estre asseurez que:| l’intention de Vostre Majesté |:n’est point de
tirer la négotiation hors de Muster:|. Sur quoy monsieur Pau dict «Doncques
la Reyne se |:tiendra dans les termes du traicté faict à La Haye:| en 1644»,
dont nous |:demeurâmes d’accord:|, puisque nous n’avons agy en ce traicté
que par les ordres de Vostre Majesté laquelle a faict observer sy exactement
les alliances et appuier sy puissamment l’intérest des alliez qu’on doit encor
plus s’assurer sur ce qui partira directement d’elle que sur la conduite de ceux
qui servent au dehors soubz ses commandemens. Ilz sortirent bien satisfaictz
d’auprès de nous. |:Néantmoins le premier estonnement que leur donna l’ af-
faire , les précautions qu’il leur a fallu apporter pour leur asseurer l’esprit, les
diverses questions et demandes avec les
tes monstrent que |:l’allarme est grande parmi eux, et que tous noz soings ne
l’ont pas entièrement faict cesser:| puisqu’ilz ont faict partir en diligence
|:pour se rendre à La Haye les deux principaux d’entre eulx, qui sont mes-
sieurs Pau et Cnut:|. Les autres nous sont venus donner part de ceste résolu-
tion et l’ont fondée sur diverses causes, mais nous sçavons de lieu très assuré
que |:les deux principalles sont la proposition d’Espagne et la grande jalousie
qu’ilz prennent de la prétention des Suédois sur la Poméranie qui les rendroit
maistres de tout le commerce de la mer Baltique:|. Il est bien vray qu’avec
cela ils ont voulu esclaircir leurs supérieurs de quelque |:blasme qu’on leur
avoit donné d’estre entrez tropt viste en matière avec les Espagnolz:| avant
qu’ilz eussent |:un pouvoir en bonne forme:|, et de plus ilz nous ont dict que
craignans les longueurs de leur gouvernement ils ont envoyé deux de leurs
collègues |:presser les résolutions des Provinces afin que quand la response:|
de Vostre Majesté arrivera ils puissent |:estre en estat d’avancer [les] affaires
de leur costé:|.
Nous attendrons, Madame, l’honneur des commandemens de Vostre Majesté
auxquels nous ne manquerons pas d’obéir ponctuellement, et cependant nous
ne pouvons nous empescher de tesmoigner la joie que nous avons de voir que
la prudente et généreuse conduite de Vostre Majesté a réduict un sy puissant
roy à la rendre aujourd’huy arbitre des différends qu’il a avec la France, et ce
à la veue de ceste grande et célèbre assemblée sur qui toutte la chrestienté a les
yeux. Nous prions Dieu, Madame, que l’intention des ministres d’Espagne
soit assez sincère pour produire une bonne paix et en laisser une gloire im-
mortelle à Vostre Majesté.