Acta Pacis Westphlicae II B 1 : Die französischen Korrespondenzen, Band 1: 1644 / Ursula Irsigler unter Benutzung der Vorarbeiten von Kriemhild Goronzy
101. Memorandum der Königin an d’Avaux und Servien Paris 1644 Mai 14
Paris 1644 Mai 14
Ausfertigung
Ein Konzept ist nicht überliefert. Nach [ nr. 131 ] könnte das Memorandum von Lionne konzipiert
sein.
AE , CP All. 29 fol. 82–86; AE , CP All. 32 fol. 274–277’; AE , CP All. 37 fol. 143–145’;
AE , CP All. suppl. 2 fol. 196–199’. Druck: Nég. secr. II, 1 S. 41f.; Gärtner III S. 39–47.
Kurialien für die Gesandten von Venedig, Savoyen und diejenigen der Generalstaaten.
On ne peut assez s’estonner de ce que Messieurs les Plénipotentiaires escri-
vent que les ministres de Hollande se rendront peut estre plus difficiles
dans les expédients de régler les contestations pour les rangs, maintenant
qu’ils ont veu ce qui a esté faict de nouveau en faveur de la République
de Venize.
Il est impossible qu’ils ne voyent qu’on n’a rien faict de nouveau en cela,
quand mesme Messieurs les Plénipotentiaires ne voudroient pas s’en laisser
les premiers persuader, et il ne peut estre qu’ils ne le soient par les raisons
suivantes qui sont sans réplique. Premièrement, il fault poser pour fonde-
ment l’égalité du traictement entre les ministres de cette Couronne et ceux
de la République, laquelle esgalité a esté establie en sorte par le Roy Henry
le Grand et continuée sans difficulté par le feu Roy de glorieuse mémoire
que la Reyne aujourd’huy faisant demeurer les ministres du Roy dans les
mesmes termes ne faict rien de préjudiciable à la dignité de cette Couronne,
laquelle ne prétend à présent aucun nouvel advantage sur la République
pour ce qui regarde le traictement des Ambassadeurs et n’innove rien aussy
en sa faveur, puisqu’elle estoit en possession depuis le règne de deux Roys
de cette egalité de courtoisies.
Supposé donc que la France ne veuille point révocquer présentement en
doubte l’esgalité de traictement entre les ministres du Roy et ceux de la
République establie et confirmée par un si long espace de temps, il est bien
aysé à voir que quoy qui se soit passé à Munster, pourveu qu’il ayt esté
réciproque de part et d’autre, ne peut donner advantage ny porter préjudice
à aucune des parties et n’aura point la face de nouveauté près des Hollandois
ny d’aucun autre, pourveu qu’on considère que le traictement quel qu’il soit
a esté égal, parce que l’esgalité admet le plus et le moings sans estre blessée
quand chacun pratique de son costé la mesme civilité, estant constant qu’en
allant jusques au carrosse ou en s’arrestant au hault du degré, si tous deux
en usent de mesme, on ne se départ point de l’esgalité, laquelle peut estre
estendue et restraincte sans rien perdre de son essence et sans qu’aucun s’en
puisse attribuer qu’imaginairement une nouvelle prérogative non plus qu’en
craindre un nouveau préjudice.
Les ministres de Hollande et ceux des autres Princes ausquels pourroient
desplaire les civiletéz que font les Ambassadeurs de France à ceux de Venize,
ne se plaindront jamais et n’augmenteront pas leurs prétentions pour voir
les Ambassadeurs de Venize accompagnéz jusqu’au carrosse, mais seulement
pour les courtoisies qui sont establies réciproquement entre nous et eux,
comme du tiltre, de la main et de l’accompagnement avec entière esgalité.
Il y a longtemps que les Ambassadeurs de Hollande et de Savoye en font
des plaintes, mais elles n’ont point interrompu l’usage, et les Ambassadeurs
de Savoye, spectateurs dans Rome de l’égalité avec laquelle on traicte ceux
de Venize, ne laissent pas de visiter les Ambassadeurs du Roy, cédans la
main, recevans le tiltres d’Illustrissime et n’estans conduits que jusques au
hault du degré, pendant qu’ils leur donnent celuy d’Excellence et les accom-
pagnent chez eux jusques au carrosse.
Il est donc constant que les envieux des advantages que reçoivent les Am-
bassadeurs de Venize continueront à se plaindre de l’égalité avec laquelle
les ministres de cette Couronne les traictent, mais il semble qu’il ne peut
tomber dans la pensée de qui que ce soit qu’ilz en formeront de plus grandes
pour avoir veu accompagner Monsieur Contarini jusques au carrosse, estant
certain que l’esgalité est aussy bien conservée dans cet accompagnement
comme en celluy qu’on eust faict que jusques au hault du degré.
Il se void assez que tout ce qui est arrivé n’est procédé que du zèle de
Messieurs les Plénipotentiaires, lesquels ont creu pouvoir procurer en leur
personne quelque nouvel advantage au Roy. Monsieur d’Avaux dans sa
lettre à la Reyne du premier avril marque que sans quelque petite différence
entre les Ambassadeurs du Roy et ceux de Venize, on n’en pourroit establir
aucune avec les Ambassadeurs de Hollande. Il seroit véritablement bien à
désirer que cette différence parust aussy bien dans les cérémonies des Am-
bassadeurs , que chacun la void visible en effect dans la dignité et dans les
prééminences de cette Couronne avec la République, et s’il estoit question
aujourd’huy de délibérer s’il luy fault accorder cet honneur, il n’y a aucun
de Messieurs les ministres qui ne mourust plustost que de penser à conseiller
la Reyne de le faire dans une minorité. Mais puisque la République l’a receu
de la bonté de deux Roys, on void bien que la conjoncture présente est
moins propre que toute autre pour commencer à luy contester une possession
dans laquelle elle se trouve.
Et sur ce subject on a creu debvoir advertir Messieurs les Plénipotentiaires
que ce qui se praticque à Rome par l’Ambassadeur de Venize qui ne conduit
celuy de France que jusques au hault de l’escalier parce qu’il n’est accom-
pagné de luy que jusques au mesme endroit, n’est point censé un despit ou
une incivilité ainsy que tesmoigne le croire Monsieur d’Avaux par sa des-
pesche du 25 e mars , mais que c’est un concert si bien estably de long temps
pour l’esgalité, que les Ambassadeurs mesme d’obédience qui y doibvent
regarder de plus près n’ont jamais faict difficulté de les visiter pour cela,
ny prétendu d’eux autre traictement comme on a veu naguières de Monsieur
de Créquy .
Touttes ces raisons font voir clairement qu’encor qu’il eust esté à propos,
puisqu’on vouloit establir à Munster la forme des cérémonies qui se pratic-
quent à Rome, de ne point rompre celle de n’accompagner l’Ambassadeur
de Venize que jusques au degré, néantmoins ce n’est pas un grand incon-
vénient de l’avoir faict et ne donne aucun droit aux Ambassadeurs de
Hollande et aux autres de s’en plaindre, puisque comme il a esté désjà dict,
ce qui les touche et leur est sensible, c’est l’égalité et non pas la manière en
laquelle on la praticque.
On peut adjouster que si le motif d’estendre plus loing l’accompagnement
a esté de prendre quelque advantage sur l’Ambassadeur de Venize, il semble
qu’il n’estoit pas fort à présumer d’en pouvoir venir à bout, puisqu’estant
en possession d’égalité, il n’y avoit pas d’apparence que dans l’assemblée de
Munster où la médiation rend la République plus considérable, elle deust se
laisser ravir par nous les prérogatives dont par la grâce des Roys de France
elle jouit en touttes les Cours des Princes.
Il semble donc qu’il falloit de trois choses l’une, ou demeurer purement dans
les termes de ce qui se praticque à Rome de part et d’autre, ou rompant
cette coustume aller jusques au carrosse comme ont faict tousjours les autres
Ambassadeurs de Sa Majesté en Angleterre et autre part, ou prenant un
milieu de passer l’escallier et n’aller pas aussy jusques au carrosse, qu’il falloit
l’avoir concerté auparavant et en estre demeuré d’accort avec Monsieur
Contarini, d’où l’on peut et doibt inférer que s’il y avoit de la faute en ce
qui est arrivé, la Royne n’en est point coulpable, puisqu’elle n’a contribué
en rien à faire outrepasser l’usage de Rome, mais à le bien prendre, il n’y
en a point par les raison marquées cy dessus.
Il est donc impossible que Messieurs les Estats ne touchent au doigt qu’il
n’y a rien de nouveau en faveur de Venize, puisque depuis si long temps la
France a accordé l’esgalité de traictement à leurs Ambassadeurs et qu’ilz ne
peuvent ignorer que les ministres de cette Couronne ne leur ayent dès lors
donné la main chez eux, le tiltre d’Exellence et ne se soient contentéz d’en
recevoir traictement égal dans les visites.
Voylà pour ce qui regarde la plainte que vous avez creu que nous pourroient
faire Messieurs les Estats que nous nous fussions relaschéz à de nouvelles
grâces pour Venize pendant qu’on leur refuse les satisfactions qu’ils désirent,
sur le subject desquelles vous pourriez bien encore leur faire pénétrer que
ce qui peut avoir obligé le feu Roy à donner cet honneur à Venize n’est pas
sa puissance ny pour avoir plus mérité de cette Courronne, mais pour la
possession où elle est d’un Royaume, qui a faict qu’on n’a peut estre pas
creu leur pouvoir refuser sans injustice les honneurs qu’on défère aux testes
courronnées, comme les Papes pour cette considération ont receu les obé-
diences de leurs Ambassadeurs dans la sala regia qui est réservée seule pour
les Couronnes.
Quant à l’Ambassadeur de Savoye, ce n’est pas seulement les Nonces qui le
traicte[nt] d’Excellence, les Ambassadeurs de l’Empereur et d’Espagne en
cette Cour à ce qu’on dict luy en ont donné et mesme la main droicte, et on
ne voit pas comme nous pouvons nous déffendre d’accorder au moins une
partie des honneurs qu’ilz font à un Prince à qui nous debvons plustost
qu’eux procurer toutte sorte d’avantages, et sur ce subject Messieurs les
Plénipotentiaires sçauront qu’on n’est pas icy de leur sentiment touchant
l’Exellence et la main droitte. Le premier est un tiltre dont il ne demeure
rien, que l’on accorde quasi à touttes les personnes de qualité, et mesme les
Ambassadeurs de Rome le donnent aux Ducs et Princes romains qui n’ont
point de caractère public. Mais la main droitte infère quelque sorte de
supériorité dans le lieu où l’on la reçoit, et les Ambassadeurs de Rome ne
la baillent chez eux à qui que ce soit qu’à des Ambassadeurs comme eux de
testes couronnées. Ce n’est pas qu’on croye qu’il y doibve avoir difficulté à
faire contenter l’Ambassadeur de Savoye des mesmes traictemens qu’il reçoit
à Rome, pourveu qu’il ne voye point faire de plus grandes civilitéz à ceux
de Messieurs les Estats, sur quoy le Marquis de Saint Maurice
à Munster a désjà parlé à diverses personnes.
Le Roy n’a jamais voulu juger de la préscéance entre les Ambassadeurs de
Hollande et ceux de Savoye, et dans les assemblées publiques qui ont esté
faictes icy, on a tousjours pris des expédients pour l’esviter. Il est vray que
la puissance à présent de Messieurs les Estats est plus grande que celle des
Ducz de Savoye et que leur satisfaction importe extrêmement dans les
conjonctures présentes au service et à l’advantage de cette Couronne. Mais
l’estroicte alliance qui est entre le Roy et la Maison de Savoye doibt nous
obliger à faire considération sur l’ancienneté de leur domination et sur ce
que les plus grands Roys de la Chrestienté n’ont pas desdaigné de contracter
continuellement des mariages avec eux. Et véritablement, si le Roy n’a
espargné aucune peine ny dépence pour le restablir et luy conserver ses
Estats, on trouveroit bien à dire si dans le bas aage du Duc de Savoye
est entièrement soubs sa protection, il sacrifiast ce qui regarde sa dignité
et sa réputation.
Il n’y aura pas un des Ambassadeurs des Electeurs qui ne soit pour le moins
dans la mesme prétention que celuy de Savoye pour ne recevoir pas un
traictement inférieur à ceux de Hollande. Je vous ay voulu dire cela, affin
que vous examiniez tout et preniez bien vos mesures et que vous escriviez
précisément ce que vous jugerez plus à propos, affin que Sa Majesté sur vos
advis puisse prendre sa dernière résolution, sans vous arrester à ce que vous
avez faict envers l’Ambassadeur de Venize, qui comme j’ay dict ne donne
aucun droict de prétendre ny aucun subject de se plaindre à ceux d’Hollande,
lesquelz sçavent qu’en tous lieux les ministres de ladicte République traic-
tent esgallement avec les ministres de l’Empereur et d’Espagne aussy bien
qu’avec les nostres.